La rédaction du Moniteur l’annonçait déjà il y a quelques semaines : Alkern est en passe de rejoindre le groupe Holcim. Une offre signée début juin concrétise l’accueil dans l’actionnariat Holcim et la séparation avec le fonds actuel, Chequers Capital. La finalisation de l’opération attend encore l’aval de l’Autorité de concurrence et pourrait être opérationnelle d’ici fin 2025. Désormais dans les mains d’un gros industriel, l’actionnariat de l’acteur du béton préfabriqué apporte « la garantie d’une solidité financière longue qui passera les crises, confie Xavier Janin, président du groupe Alkern (247 M€). Notre activité observe des cycles longs, avec des investissements lourds. Il est plus simple de partager cette vision avec un autre acteur industriel qu’avec un fonds d’investissement. Chequers Capital nous a toujours aidé à grossir mais anticipait leur sortie en réalisant moins d’investissements de long terme. Les deux LBO successifs que nous avons connu nous ont bien aidé, notamment sur la RSE et la cybersécurité, mais nous avons désormais besoin d’un industriel. »
Maillage territorial des sites de production d'Alkern :
50% matériaux, 50% produits en 2030
Depuis 2018, Alkern a réalisé huit acquisitions. Il envisage de poursuivre ce rythme, en lorgnant, pourquoi pas, sur des acteurs plus importants, grâce à une trésorerie plus confortable. Si une partie d’Holcim vient d’intégrer la Bourse de New York pour les activités américaines, le reste – Europe, Asie, Afrique et Amérique du Sud – reste dans le giron du groupe Holcim, soit environ 17 Mds € de chiffre d’affaires. Holcim détient aussi les entités Lafarge, dont Lafarge Ciments. Le choix de rachat s’est porté sur Alkern dans une volonté d’équilibrer l’activité du groupe, aujourd’hui répartie à deux tiers sur les matériaux, et notamment le granulat de construction, et à un tiers sur les produits de construction, comme le béton, avec d’autres entités comme Lafarge Béton, PRB ou encore Carbocia. Holcim cherche à renforcer la seconde activité pour atteindre un équilibre 50-50 en 2030. « Holcim va investir sur notre activité car leur stratégie passe par le développement des produits de construction. » La gouvernance actuelle est vouée à rester en place afin de miser sur la continuité et favoriser l’augmentation de la collaboration commerciale entre les entités: « Nos solutions se complètent », plaide Xavier Janin.
Reprise mi-2025
Le président du groupe Alkern témoigne d’une « crise majeure du bâtiment » mais se réjouit que les TP se maintiennent. « Nous avons bien résisté et les signaux montrent que l’activité va redémarrer au second semestre 2025. » Il en veut pour preuve les taux d’intérêt qui baissent et les crédits et les ventes de logement qui augmentent. L'activité bâtiment du groupe Alkern perd 33% par rapport à 2023 et -9% sur les réseaux, notamment freinés par le gel du projet d'autoroute A69. La voirie augmente d'1% et devrait encore être dynamisée par la période électorale des municipales 2026, tandis que l'aménagement extérieur augmente de 6%, grâce aux nouvelles gammes commercialisées en 2024. Si le groupe ne lésine pas sur la croissance externe, il prend aussi soin d’améliorer ses propres infrastructures.
A l’image de la rénovation quasiment complète du site de Bernières sur Seine, dans l’Eure, pour en faire une usine moderne, destinée à la fabrication de produits béton bas carbone et biosourcés, comme l’airium, un isolant minéral placé dans les blocs Alkern. Les 100 000 tonnes par an de produits (multi-activités) pourront abreuver, par voie fluviale, l’ouest parisien, ainsi que la Normandie et le nord de la France. Le site, situé à côté d’une sablière de Lafarge, coûtera à l’industriel un investissement de 10 M€ et sera opérationnel au troisième trimestre 2025.
EcoVadis or
En 2024, Alkern aura également soigné son évaluation RSE, en intégrant près de 60% de nouveaux indicateurs. L’accent mis sur cet aspect s’explique essentiellement par la mise en place du CSRD. Même si celui-ci ne sera finalement pas mis en place dans l’immédiat, l’industriel a souhaité prendre l’occasion au vol. Il a ainsi mis en place un réseau d’ambassadeurs afin de diffuser les comportements responsables dans l’entreprise. Dans le cadre de sa stratégie Cap2030, l’industriel souhaite diminuer sa consommation d’eau et énergie. Ainsi, sur ses scopes 1 et 2, Alkern diminue en 2024 de 33% ses émissions sur ses 40 sites et réduit ainsi son empreinte de 6 000 t de CO2. Progressivement, il souhaite remplacer l’essence de sa flotte de véhicules et chariots élévateurs par des biocarburants et la consommation électrique classique par de l’énergie solaire. Le scope 3 porte l’ambition d’une réduction de 17% d’émissions, en jouant sur la logistique amont et aval, à commencer par la livraison, alimentée prochainement par des camions au biocarburant. Enfin, sur le volet social, la direction d’Alkern veut porter une politique de protection et de sécurité, récompensée par l’obtention de l’Ecovadis or et la norme ISO 14 001. En 2024, deux tiers des sites n’ont recensé aucun accident.
