Action Logement réorganise ses filiales de logement intermédiaire

Exposé aux difficultés des promoteurs et au retrait des investisseurs, le groupe va réunir d’ici début 2025 ses cinq entités In’li qui gèrent 51 000 logements intermédiaires en Ile-de-France et 22 000 en régions. Les métropoles de Bordeaux, Nantes et Rennes font partie de ses nouveaux marchés.

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Orsay In'li
Livrée en août dernier, la résidence Athéna à Orsay (Essonne) se compose de 312 unités de coliving gérées par Colonies, partenaire d’In’li sur ce marché résidentielle de niche.

« Compte tenu du contexte de la construction, Action Logement a décidé d’unifier ses 5 filiales de logement intermédiaire en une entité », annonce Daniel Weizmann, président du conseil de surveillance d’Inli, la filiale francilienne du groupe, en conférence de presse le 16 septembre.

Concrètement, Action Logement Immobilier, qui détient les titres des filiales immobilières du groupe, va transférer ceux d’In’li Auvergne-Rhône-Alpes, In’li Provence-Alpes-Côte d’Azur, In’li Grand Est et In’li Sud-Ouest à In’li. Actuellement, les quatre filiales régionales gèrent 22 000 logements locatifs intermédiaires (LLI). De son côté, In’li en revendique 51 000 en Ile-de-France.

« Peser dans les négociations avec les entreprises de construction »

La « réorganisation » sera effective d’ici « fin 2024 ou début 2025 », assure Antoine Pinel, directeur général historique d’In’li. « A un moment où les investisseurs institutionnels (qui financent l’offre nouvelle de LLI, NDLR) sont moins présents, il faut créer des synergies », observe Eric Balci, nouveau président du directoire d’In’li depuis juin dernier. « Le contexte politique et économique ne facilite pas la prise de décisions stratégiques », reconnaît toutefois Daniel Weizmann, lui aussi nommé en juin dernier.

Un détail important : il s’agit de filialisations, et non d’une fusion, qui aurait acté la disparition des conseils d’administration et des sièges sociaux des sociétés anonymes régionales, à Lyon, Marseille, Strasbourg et Toulouse. « Pour un élu, c’est plus fort de parler à un directeur général qu’à un directeur de développement », justifie Antoine Pinel. 

Et Daniel Weizmann de compléter : « Une des forces d’Action Logement, c’est sa territorialité, en opposition à CDC Habitat, la filiale de la Caisse des dépôts centralisatrice (…) Le poids d’une entité régionale qui gère 3000 logements n’est pas suffisant pour peser dans les négociations avec les entreprises de construction locales et dans les discussions avec les élus locaux. »

« Muscler notre maîtrise d’ouvrage d’ici trois ans »

Le but de cette « réorganisation » est aussi de réaliser des économies (non communiquées) sur les fonctions supports, de l’informatique aux achats. Autant de coûts en moins qui pourront permettre à In’li d’attirer des chargés d’opérations et des responsables de programmes. « Nous allons muscler notre maîtrise d’ouvrage d’ici trois ans », annonce Eric Balci. Les objectifs chiffrés seront détaillés prochainement.

Contexte : les difficultés de commercialisation des promoteurs immobiliers, à qui Action Logement commande des logements en Vente en état futur d’achèvement (Vefa), se ressentent sur les mises en chantier d’In’li. En cette deuxième année de crise immobilière, la filiale francilienne de LLI table en effet sur seulement 1200 logements commencés, contre 2478 en 2023 et 3006 en 2022.

In’li compte livrer cette année 450 logements construits sans le concours des promoteurs. Après le trou d’air (non communiqué) de l’an prochain, 800 logements produits en propre seront livrés en 2026 puis en 2027, « un rythme de croisière amené à croître », anticipe Eric Balci.

Démolition-reconstruction et amélioration-acquisition

Ses équipes de maîtrise d’ouvrage sont actuellement mobilisées par la construction neuve mais aussi par la démolition-reconstruction, de barres des années 60 en programmes neufs. « Ces projets répondent à l’enjeu de densification, autour de nouvelles gares notamment, comme au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), L’Haÿ-les-Roses ou Villejuif (Val-de-Marne). Il s’agit de remettre au goût du jour des bâtiments, en ajoutant des balcons par exemple », illustre Antoine Pinel.

Comme chez certains bailleurs sociaux, eux aussi dépendants des opérateurs privés en matière de construction neuve, l’acquisition-amélioration de logements existants à rénover constitue l’autre levier à actionner par In’li. « Nous réfléchissons à des partenariats avec des promoteurs qui se tournent vers ce marché », déclare Eric Balci.

In’li regarde également le marché de niche de la transformation de bureaux. « On s’y retrouve économiquement si le vendeur (de l’immeuble à reconvertir, NDLR) accepte une décote de 20 à 30% », confie-t-il. Ces chantiers complexes peuvent donner lieu à des créations de logements en coliving, qui se prête bien à la reconversion de bâtiments tertiaires, mais pas en résidence intergénérationnelle. « Nous attendons les décrets car le LLI n’y est pas encore autorisé », regrette Eric Balci.

Les investisseurs institutionnels demeurent en retrait

L’autre facteur externe qui explique la décrue des mises en chantier chez In’li réside dans la rapide hausse des taux d’intérêt de mi-2022 à mi-2023. « Quand les investisseurs empruntent à 4%, notre souci de leur garder une rentabilité de 4% nous oblige à remettre en question des chantiers », décrypte Antoine Pinel.

Si la Banque centrale européenne vient de baisser son principal taux directeur à 3,5%, de quoi alléger les conditions des banques, les investisseurs qui ont besoin d’emprunter pour se positionner dans le logement intermédiaire devraient rester en retrait ces prochains mois. Ces derniers y trouvaient leur compte en 2021, quand les taux s’élevaient à 1%. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Au-delà d’In’li, Action Logement se trouve sous la pression des entreprises, dont certaines réfléchissent à loger elles-mêmes leurs salariés plutôt que de passer par le groupe paritaire, collecteur de la Participation des employeurs à l'effort de construction (Peec). « Le manque de logements est un frein à la mobilité, d’où notre lecture des marchés locatifs par bassins d’emplois », confirme Daniel Weizmann, par ailleurs président du Medef en Ile-de-France, la principale organisation patronale représentée au sein d’Action Logement.

De Dunkerque à Bordeaux, les nouveaux marchés

« Les sollicitations viennent de Dunkerque avec les gigafactories, mais aussi de Bretagne, à Nantes et Rennes, où le groupe n’est pas assez présent » sur le front du LLI, constate Eric Balci. Ce dernier identifie également un manque à Bordeaux : les 5000 logements gérés par In’li Sud-Ouest se concentrent dans les métropoles de Toulouse et de Montpellier. En Ile-de-France, In’li reçoit « 40 à 50 demandes pour un logement, alors que nous avons de moins en moins d’offres », alerte le dirigeant.

Aux dernières nouvelles, avant le changement de gouvernance annoncé en juin dernier, In’li visait 80 000 LLI sous gestion d’ici 2030 et non plus 2025 comme prévu à sa création en 2017. Un nouvel objectif, qui tient compte des virages stratégiques en termes de construction et rénovation notamment, est en cours de chiffrage.

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