Action Logement est « une structure extrêmement efficiente », a défendu Bruno Arcadipane, président du groupe paritaire, devant la commission des affaires économiques du Sénat, le 24 mai. Un exemple concret ? Comme convenu, le groupe paritaire a doublé sa production de logements, « de 24 000 en 2017 à 50 000 cette année », a-t-il assuré.
Le but de cette audition, au sein de « la maison Sénat, (…) qui défend la France de tous les territoires » comme le fait Action Logement depuis sa création en 1943, était de « demander, une fois de plus, (…) le droit de faire notre métier, de soutenir la mobilité, alors qu’un salarié en mobilité sur deux la refuse s’il n’a pas de logement », a-t-il expliqué.
« Je vous garantis que ça partira en sucette »
Contexte : la dernière convention quinquennale entre Action Logement et l’Etat a pris fin en 2022. Et la nouvelle, qui aurait dû démarrer au 1er janvier 2023, peine à accoucher.
Autre sujet qui fâche : la ponction de 300 M€ dans le budget 2023 du groupe aux 51 filiales immobilières, qui se traduit concrètement par « 25 000 salariés en moins » bénéficiant des aides pour se loger, a souligné Philippe Lengrand, vice-président.
Enfin, la première foncière d’Europe (1 100 000 logements) a introduit, le 10 février dernier, un recours contentieux auprès du tribunal administratif de Cergy-Pontoise (Val d’Oise), contre la décision de l’Insee de reclasser sa filiale Action Logement Services, dédiée à la collecte de la Participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) auprès des entreprises de plus de 50 salariés, en administration publique (APU*).
« Depuis 70 ans, nous avons distribué 100% de notre recette au service des salariés et de la construction. Demain matin, je vous garantis que ce ne sera plus 100% et ça partira en sucette », a lâché Bruno Arcadipane, pensant aux « entreprises qui ont des difficultés de recrutement ».
Si un arrêté du ministre délégué aux Comptes publics Gabriel Attal devait valider le choix de l’Insee, Action Logement ne pourrait plus emprunter que sur 12 mois maximum, afin de répondre aux normes européennes. Or, un endettement sur plusieurs années est nécessaire pour soutenir la rénovation énergétique du parc existant et la construction de logements, alors que les agréments HLM obtenus par Action Logement et ses mises en chantier ont reculé en 2022 par rapport à 2021.
Gabriel Attal pointé du doigt
Le président de la République Emmanuel Macron et le ministre de l’Economie Bruno Le Maire ont été pointés du doigt par les représentants d’Action Logement et les parlementaires de tous bords. Gabriel Attal, lui, a été critiqué par Bruno Arcadipane pour sa volonté affichée de réduire les dépenses des ministères du Travail et du Logement.
Le gouvernement est accusé depuis plusieurs années de déconsidérer la problématique du logement. Dernière preuve en date, selon les promoteurs, entreprises de bâtiment et autres professionnels de l’immobilier : le report du 9 mai au 5 juin de l’annonce des mesures issues du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement.
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Après plus d’une heure de débat ponctué de charges à l’encontre de la majorité présidentielle dont il fait partie, le sénateur LREM Jean-Baptiste Lemoyne a déploré « les conséquences en termes de financement » du nouveau classement par l’Insee, comme l’ont illustrées « les difficultés d’extension du réseau (immobilier) de l’enseignement français à l’étranger », quand il était ministre des Français de l’étranger, jusque juin 2022.
Proximité inhabituelle entre auditionnés et sénateurs
Arrivés tendus, les dirigeants d’Action Logement sont repartis rassurés. En témoigne le soutien des sénateurs, qu’ils appellent par leur prénom. Cette proximité s’est notamment ressentie quand la sénatrice (ex-PS) et présidente de la Fédération des Coop’HLM Marie-Noëlle Lienemann a pris la parole : « Il faut que nous nous arcboutions pour conserver ce modèle (de groupe paritaire, NDLR) remis en cause » par le gouvernement.
« Vos interventions montrent à quel point Action Logement est dans le collimateur du gouvernement », a de son côté résumé la LR Dominique Estrosi-Sassone, par ailleurs secrétaire générale du bureau fédéral de la Fédération des offices publics de l’habitat (OPH) et administratrice de Côte d’Azur Habitat.
Construite avec le ministre délégué au Logement Olivier Klein (épargné par les critiques), « la copie est prête, (…) il est temps de signer la convention quinquennale (…) et de laisser votre groupe faire son travail, remarquablement », a complété l’UDI Valérie Létard. Très remontée, la sénatrice a même été applaudie par les auditionnés. Une scène rare dans le cadre d’une audition parlementaire, habituellement feutrée.
*Les APU sont « des unités institutionnelles dont la fonction principale est de produire des biens et services non marchands ou d'effectuer des opérations de redistribution du revenu et des richesses nationales et dont les ressources proviennent majoritairement de contributions obligatoires versées par des unités appartenant à d’autres secteurs institutionnels », selon l’Insee.