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Construction en pisé : dans les Bouches-du-Rhône, une maison pluridisciplinaire de santé reprend la tradition locale

La commune de Charleval, dans les Bouches-du-Rhône, vient de réceptionner une maison pluridisciplinaire de santé qui a le double-mérite de lutter contre la désertification médicale mais aussi de s’inscrire dans la tradition constructive locale du « tapis », le pisé provençal. Conçu par l’atelier Combas, le bâtiment en R+1 a été construit avec de la terre issue du site et s’inscrit, à ce titre, dans le projet expérimental « Macroterre ».

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Après un peu moins de deux ans de chantier, Charleval, commune de 2 731 habitants des Bouches-du-Rhône, dispose désormais d’une maison de santé pluridisciplinaire dont 9 des 11 cabinets aménagés sont aujourd’hui occupés. « La qualité constructive du bâtiment a joué pour attirer ces professionnels de santé », a affirmé le maire Yves Wigt, lors d’une visite organisée le 29 février, fier de montrer le bâtiment sur lequel la terre est visible en façade et sur les murs de refends à chaque travée.

Aboutissement « d’une très belle aventure humaine de près de quatre ans », selon l’élu, le projet est né en 2019 au moment du concours de maîtrise d’œuvre. Choisi parmi 36 équipes candidates, l’atelier Combas, basé à Nîmes dans le Gard et Nice dans les Alpes-Maritimes, a fait la différence pour son respect du programme et la proposition d’utiliser des matériaux biosourcés et, notamment, de la terre extraite du site. Inséré finement dans la trame villageoise avec ses deux façades principales percées d’ouvertures en forme d’arcades, reprenant l’écriture des portes cochères des bâtisses du village, le bâtiment rectangulaire en R+1 et de 725 m2 de surface utile s’inscrit dans une tradition constructive locale.

Macroterre

Pour Mathieu Grenier, architecte associé, « l’architecture étant une affaire de contexte, l’emploi de la terre a été une évidence ». En effet, à Charleval, les constructions anciennes ont puisé dans le sol pour aménager une cave et ériger les murs selon la technique constructive du « tapis » (pisé en provençal). Convaincue de la démarche de valorisation de terres de la parcelle, la commune a passé un marché innovant.

Pour répondre à la gageure de construire en zone sismique de niveau 4, l’architecte s’est associé au bureau d’études niçois Filiater, intervenu à la fois comme cotraitant de l’équipe de maîtrise d’œuvre et fournisseur de la matière première. La maison de santé pluridisciplinaire est d’ailleurs un des cinq bâtiments démonstrateurs qu’il doit réaliser dans le cadre de la démarche « Macroterre » soutenue par l’Ademe. « Financée au titre du programme d’investissement d’avenir, elle consiste à appliquer à grande échelle un procédé de construction en matériaux géosourcés », précise Michel Oggero, le dirigeant de Filiater. Compte tenu de la démarche aboutie en termes de réemploi et de filières courtes, l’opération a bénéficié d’un taux de subvention de 70 % pour financer son coût de 1,9 million d’euros HT.

Deux utilisations différentes de la terre

En l’occurrence, à Charleval, la terre a été utilisée de deux manières. Pour réaliser les murs de refend, les dallages et les chaînages, Filiater a préconisé de couler en place un mélange composé de terre issue du terrassement (85 %) et de ciment (15 %). Le bureau d’études a mis à cet effet à disposition de l’entreprise de gros œuvre KP2 une bétonnière de grande capacité. « Nécessaire, car la commune se situe dans une zone de sismicité niveau 4, où seuls quelques tirants, noyés dans les ouvrages, assurent la stabilité du bâtiment », rappelle Mathieu Grenier.

Pour élever les murs de façade, KP2 a posé, avec un procédé se rapprochant de la maçonnerie de pierres massives, les 1 000 blocs fabriqués avec un mélange sans eau de 93 % de terre crue et de 7 % de ciment. Le chantier a permis à Filiater de tester le robot compacteur mobile mis au point avec son partenaire historique Alphi.

Bois

Sur ce projet pensé pour respecter les principes de l’architecture bioclimatique et limiter son impact carbone, la maîtrise d’œuvre a préconisé l’emploi du bois pour les panneaux isolants, la charpente, les menuiseries et les planchers. Ces derniers, réalisés en cyprès ou en pin d’Alep, ont été assemblés avec la méthode à queue d’aronde pour limiter l’utilisation de pièces métalliques.

Le mode constructif n’a pas été le seul point sur lequel la maîtrise d’œuvre a voulu pousser les curseurs au plus loin. Par exemple, après la modélisation thermique montrant des apports de calories en hiver grâce au soleil, l’isolation a été supprimée sous le dallage ou en façade sud du bâtiment. De même, la terre a été laissée nue dans les cabinets médicaux en raison de ses caractéristiques techniques de régulation de l’hygrométrie du bâtiment.

Fiche technique

Maîtrise d’ouvrage : commune de Charleval
Maîtrise d’œuvre : Combas (architecte mandataire), Filiater (BET structure et thermique), Edifys (OPC), Venatech (BET acoustique), Oteis (BEt fluides)
Entreprises : KP2 (gros œuvre), 3L (charpente), Vernucci (menuiseries extérieures), Merlo (menuiseries intérieures), Ithaque (peinture, enduits terre)
Calendrier : études, août 2020 ; permis de construire, juin 2021 ; début des travaux, mars 2022 ; réception, février 2024
Surfaces : 725 m2 de surface utile et 1 500 m2 de surface extérieure
Coût de la construction : 1,9 million d’euros HT

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