Prendre le pouls des décideurs publics et privés concernant la mise en œuvre opérationnelle du ZAN sur les territoires. Tel est l’objectif de l’étude que vient de publier la Scet et intitulée : Objectif ZAN - Le temps de la mise en action(s). Entre juillet et octobre 2023, 366 dirigeants issus des collectivités (49 %), des entreprises publiques locales [EPL] (21 %) et des acteurs privés de l’immobilier (18 %) ont ainsi été interrogés.
Absence de « prise de conscience totale »
Si la sobriété foncière est au cœur des politiques publiques depuis plus de 20 ans - la loi SRU fut « la première pierre » d’une politique d’aménagement sobre du territoire -, la (douce) mélodie du ZAN ne berce réellement les acteurs publics et privés que depuis de trois ans avec la loi Climat et résilience. Un changement de paradigme qui nécessite une « prise de conscience totale ». Or, un tiers des répondants à l’enquête juge que « les acteurs de l’aménagement et de l’immobilier n’ont pas pris la mesure des enjeux ». De plus, si des réflexions sur le ZAN sont en cours pour 52 % des sondés ou démarrent à peine pour 21 % des personnes interrogées, « seules 22 % d’entre elles ont adopté des plans d’actions concrets » pour mettre en œuvre l’objectif.
Pas d’expertise solide suffisante
Sans surprise, l’étude révèle que près des trois quarts des acteurs de l’aménagement et de l’immobilier interrogés estiment ne pas disposer d’une expertise suffisante en matière juridique, réglementaire et financière pour répondre à ces enjeux. Ce qui génère, pour les rédacteurs de l’étude, « une méfiance vis-à-vis de la mesure et une inquiétude forte des territoires pour poursuivre leurs projets de développement territorial ». Pour autant, « 45 % d’entre eux jugent suffisantes les actions mises en place par leur structure » ; et 66 % se sentent personnellement prêts face à la mise en œuvre du ZAN.
Quant à la question de la traduction des objectifs dans les stratégies territoriales et documents de planification : « 62 % des répondants ne [constatent] pas encore de réelle évolution à cet égard ».
De multiples freins
Les principaux freins identifiés pour « passer de l’idée à l’action » sont les « tensions politiques entre territoires ou à l’intérieur des territoires » (59 %), et « la difficile soutenabilité financière des opérations d’aménagement » (57 %).
L’acceptabilité du ZAN (44 %), les difficultés techniques liées à la sobriété (42 %), le ralentissement ou blocage de la production immobilière (41 %), de la révision des documents d’urbanisme (37 %) et le renforcement des déséquilibres territoriaux (36 %) sont également des obstacles au passage à l’action.
Des territoires inégaux
Pourtant, le ZAN « doit être vu et travaillé par les territoires comme une opportunité pour refaire projet de territoire, pour marquer ses atouts, pour se démarquer des territoires voisins », rappellent les auteurs de l’étude. Et doit aussi être une occasion de se reconnecter au contexte, ne plus faire « comme avant ». Le ZAN « réinterroge nos usages de la ville et des territoires », il « ne doit pas faire rentrer les territoires dans une planification de la contrainte mais les amener à trouver les voies pour construire des projets sobres sur le plan foncier, s’appuyant sur une nouvelle manière d’habiter et de vivre », souligne l’étude.
Les rédacteurs mettent toutefois en garde contre le risque de « construction de territoires à plusieurs vitesses ». Les espaces ne sont en effet pas « tous mis sous tension de la même manière. Le développement des territoires périurbains et des villes moyennes serait ainsi plus impacté par les effets du ZAN que les métropoles ». En raison du recul du trait de côte, les territoires littoraux sont également particulièrement concernés. Et puis, « les territoires sont inégalement préparés », en fonction notamment de « l’ingénierie disponible » ou de « l’efficacité à mettre en œuvre une stratégie foncière ». Des « déséquilibres territoriaux » pourraient en conséquence « émerger dans le sillon du ZAN », prévient l’étude.
« Retombées positives » pour la moitié des répondants
Le tableau ainsi brossé n’est toutefois pas complètement noir puisqu'un répondant sur 2 affirme que les débats et discussions sur le ZAN « ont déjà des retombées positives ». L’étude précise que « certains projets sont notamment considérés différemment et tous les acteurs de l’aménagement et de l’immobilier ont conscientisé la nécessité de réinventer leurs process ». Parmi les retombées positives d’ores et déjà observées, 40 % des sondés estiment que le ZAN offre un regain d’intérêt local pour la bonne gestion du foncier, 37 % un renouveau du débat sur l’aménagement du territoire, 34 % un regain d’intérêt pour les friches.
Dans une moindre mesure, sont également cités, le développement de la capacité d’innovation des acteurs (18 %), l’identification de nouvelles synergies et partenariats entre acteurs (14%) et le renouveau de la démocratie participative locale et le débat public (5 %).
10 pistes de travail identifiées par les acteurs interrogés pour répondre collectivement aux enjeux
Pour les collectivités
- Anticiper et définir une stratégie foncière
- Renouveler la capacité de maîtrise foncière publique
- Favoriser la densification, l’optimisation et le recyclage urbain
- Mobiliser la fiscalité en faveur de la sobriété foncière
Pour les aménageurs et opérateurs publics
- Renforcer l’ingénierie interne
- Favoriser la mutation des zones d’activité
- Développer des solutions de portage foncier de long terme
Pour les professionnels privés et les industriels
- Mieux anticiper ses besoins de développement et d’extension
- Faire évoluer le modèle d’activités de la promotion et de l’aménagement privé
- Réinterroger les potentialités et modalités d’optimisation foncière