Le président de la République, Nicolas Sarkozy, en a fait une de ses priorités. Dans le cadre de la future loi d'orientation et de programmation de sécurité intérieure (Lopsi), il veut tripler "le plus rapidement possible" les capacités de vidéosurveillance sur le territoire français.
"Je suis impressionné par l'efficacité de la police britannique grâce à son réseau de caméra" expliquait-il en juillet dernier au Journal du Dimanche. De fait, les Anglais sont à la pointe de la vidéosurveillance, tant en volume avec 4,2 millions de caméras, soit 20% du parc mondial, que du point de vue de l'innovation avec des systèmes pouvant lire sur les lèvres ou détecter des comportements suspects en analysant les mouvements de corps.
A Northampton, à une centaine de kilomètres au nord de Londres, les caméras sont jusque sur les casques des bobbies qui peuvent enregistrer les délits sur des sortes de baladeurs. Encore plus au nord, la ville de Middelsbrough expérimente un système de caméras qui parlent. Depuis un centre de télésurveillance, des policiers scrutent les faits et gestes des citoyens et peuvent intervenir à distance grâce à des caméras équipées de haut-parleurs. Jugée concluante, cette expérience sera étendue à une vingtaine de villes du pays.
Internet dope le marché
La conjugaison d'une volonté politique ferme et d'une évolution de la législation devrait faire exploser un marché déjà en progression depuis 6 ans. Réunis à Paris Expo su 25 au 27 septembre pour la 13ème édition du salon APS (Alarmes Protection Sécurité), les professionnels du secteur affichent leur optimisme et annoncent une progression de 9,5% sur un marché de 590 millions d'euros (chiffres 2005).
Le développement de nouvelles technologies offrant des transmissions plus rapides et une qualité d'image plus élevée vient accentuer cette tendance.
Ainsi, avec Internet, c'est une nouvelle ère qui s'ouvre pour la sécurité. Les solutions IP représenteront bientôt la majorité des produits offerts sur le marché en raison de leurs avantages en termes de coûts et de performances. En effet, les caméras sont raccordées au poste de travail du superviseur par le réseau de l’entreprise, Internet ou un réseau dédié. Le branchement s’effectue par une simple prise RJ-45, mais il est également possible d'utiliser une antenne et un pont wi-fi pour une liaison sans fil.
Résultat : le système de surveillance vidéo est piloté à partir de n’importe quel ordinateur, via un navigateur Internet grâce à un contrôle ActiveX ou une applet Java. Chaque utilisateur définit les paramétrages en fonction de ses besoins : enregistrement 24 heures/24 sur une période glissante (limitée à 30 jours par la loi) ou déclenché par des alarmes, en local ou à distance, prise de photos à la volée, couplage ou pas avec un système de détection d’intrusions, d’alertes par SMS.
Bref, facile d'installation, souple d'utilisation, fiable, la vidéosurveillance en réseau IP offre la possibilité de pouvoir déporter totalement la surveillance hors des sites et de
multiplier les flux de visualisation. Elle apporte également de réels avantages économiques grâce à ses technologies de compression vidéo (économie en espace de stockage, en puissance informatique, en infrastructure et en maintenance).
Les inquiétudes de la Cnil
Si le marché doit trouver quelques résistances, ce n'est donc pas d'un point de vue technologique ni politique, mais plutôt d'ordre sociétal. En juillet dernier, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) a lancé "une alerte à la société de surveillance" qui menace "la protection des données et nos libertés".
"L'innovation technologique est à la fois porteuse de progrès et de dangers. Les individus sont tentés par le confort qu'elle procure, mais ils sont peu conscients des risques qu'elle comporte. Ils ne se préoccupent guère de la surveillance de leurs déplacements, de l'analyse de leurs comportements, de leurs relations, de leurs goûts", met en garde le président de la Cnil, Alex Türk, dans le rapport annuel 2006.
Jean-Philippe Defawe