Jurisprudence

Vefa : une clause peut prévoir de prolonger le délai de livraison du double du retard constaté

N’est pas abusive la clause d’un contrat de Vefa conclu entre un professionnel et un consommateur qui prévoit qu’en cas de suspension légitime du délai de livraison, celle-ci est retardée d’un temps égal à deux fois le retard effectivement enregistré. Telle est la position adoptée par la Cour de cassation dans une décision du 23 mai.

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Vefa
Marchés privés

Une société civile immobilière de construction-vente (SCCV) vend en l’état futur d’achèvement à un couple de particuliers un appartement et deux boxes. La livraison intervient avec un retard de plus de six mois. Après expertise, les acquéreurs assignent la SCCV en indemnisation des préjudices résultant du retard de livraison.

Report légitime sauf abus

Il n’est pas rare que les contrats de vente d’immeubles à construire comportent une clause prorogeant le délai de livraison pour causes légitimes, dégageant ainsi, en tout ou partie, le vendeur de l’obligation de verser des pénalités de retard.

Cette clause n’entre a priori en contradiction ni avec l’article L. 261-16 du Code de la construction et de l’habitation (relatif aux stipulations interdites dans les ventes d'immeuble à construire) ni avec les dispositions de l’article L. 261-11 du même code (relatif au contenu impératif d'un tel contrat). Elle doit toutefois respecter les dispositions d’ordre public de l’article L.132-1, devenu L. 212-1, du Code de la consommation qui qualifie d’abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Le doublement des jours non indemnisés…

En l’espèce, l’acte de vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) contient une clause relative aux « causes légitimes de suspension du délai de livraison » et à ses effets. Le contrat prévoit qu’en cas de survenance de certains événements, précisément énoncés, ayant pour effet de retarder la livraison du bien vendu, celle-ci sera reportée « d’un temps égal au double de celui effectivement enregistré, en raison de leur répercussion sur l’organisation générale du chantier ».

La question était de savoir si cette clause, qui multiplie par deux la durée des jours de retard non indemnisés par le vendeur, pouvait être valablement invoquée par ce dernier ou si, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de vente, elle était abusive et, par conséquent, réputée non écrite.

… ne déséquilibre pas le contrat de Vefa

La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, confirmant sa jurisprudence, constante depuis 2012 (Cass. 3e civ., 24 octobre 2012, n° 11-17800, Bull.).

Elle considère raisonnable que la livraison soit « retardée d’un temps égal au double de celui effectivement enregistré ». En l’espèce, la limitation des conséquences du retard de livraison pour le vendeur et la réduction de l’indemnisation accordée à l’acquéreur, est admise dans un contexte où :

- la cause de suspension du délai de livraison est légitime,

- et elle est justifiée par le vendeur à l’acquéreur par une lettre du maître d’œuvre.

La Cour, qui reprend la formulation de l’article L. 212-1 du Code de la consommation précité, ne constate aucun déséquilibre contractuel au détriment du non-professionnel ou du consommateur. N’étant pas abusive, la clause s’applique entre les parties.

Cass., civ. 3e, 23 mai 2019, n° 18-14212, publié au Bulletin

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