Urbanisme : la formation, un remède au déficit d'instructeurs

Pour rendre cette profession plus attractive et aider les collectivités à recruter, deux cursus voient le jour cette année.

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Les collectivités territoriales souffrent depuis quelques années d'un manque cruel d'instructeurs des autorisations de construire. Pour s'en convaincre, il suffit de faire une recherche sur les sites d'offres d'emploi dédiés. Communes rurales, villes moyennes, agglomérations, métropoles… aucun territoire n'est épargné.

Les raisons de cette pénurie ? Le désengagement de l'Etat sur ces missions, opéré par la en 2014, qui n'a pas été suivi de détachements de fonctionnaires de l'Etat vers la fonction publique territoriale, ni de formations idoines. Dans le même temps, le nombre de dossiers à traiter n'a cessé de grossir. Mais surtout, le métier d'instructeur pâtit d'un « déficit criant d'attractivité », selon Vincent Le Grand, maître de conférences en droit public à l'université de Caen Normandie, entre manque de visibilité et de reconnaissance, faible rémunération, technicité et caractère répétitif des missions… Résultat, les collectivités sont contraintes de « débaucher des agents dans d'autres centres instructeurs, ou de recruter et former des collaborateurs sur le tas », ajoute David Soro, directeur du syndicat mixte du Scot du Pays de Fougères (Ille-et-Vilaine) et formateur en urbanisme. Il vient d'ailleurs d'embaucher une policière municipale et une responsable de restauration sur des postes d'instructeur. Mais « le temps passé à former des agents en interne, c'est du temps en moins pour l'instruction, avec le risque de laisser passer des permis tacites, faute d'avoir pu traiter les demandes dans les délais », pointe-t-il.

Formation professionnelle. D'où l'idée de ce dernier de créer une formation préparant spécifiquement à cette profession et la référençant « véritablement en métier de l'urbanisme ». Un projet mené avec Landry Roger, directeur général adjoint en charge du pôle professionnel du lycée Jean-Baptiste-Le-Taillandier, à Fougères. La première promotion a commencé son cursus en janvier et l'achèvera en juin. Dénommé « formation i-ADS instructeur des autorisations du droit des sols », il s'adresse à tous types de profils, qu'ils soient dotés d'un bac + 2, d'une expérience significative ou en reconversion professionnelle.

Durant six mois, les étudiants alternent entre cours théoriques - dispensés par des instructeurs en poste et des responsables de services urbanisme -, visites de chantiers et stages dans des centres instructeurs. Le premier bloc de cours se focalise sur la planification, le zéro artificialisation nette (ZAN), le recul du trait de côte ainsi que l'optimisation du foncier. « Des notions fondamentales que les instructeurs de demain doivent connaître », souligne David Soro. Les blocs suivants traitent davantage de l'instruction proprement dite.

Formation universitaire. A 120 km de là, c'est « l'envie de susciter des vocations » autant que celle de mettre fin à « l'absurdité d'avoir autant besoin d'instructeurs et aucune formation initiale diplômante dédiée » qui ont conduit Vincent Le Grand à créer et diriger le premier diplôme universitaire (DU) instructeur des droits des sols à l'université de Caen Normandie. La première promotion démarrera sa session en septembre prochain pour le finir en mars 2024.

Basé sur une alternance entre périodes de cours « sous forme de séminaires pratiques assurés par des professionnels (instructeurs, agents de l'Etat, responsables de services techniques d'eau potable, d'assainissement, représentants des Sdis…) » et périodes d'immersion professionnelle dans des collectivités, le DU vise à préparer de façon très opérationnelle à intégrer des postes d'instructeur. Il s'adresse à tous les titulaires d'un niveau bac, quelle que soit leur spécialité. Aucun bagage juridique n'est requis pour candidater, Vincent Le Grand étant convaincu que « le vrai carburant, c'est la motivation ».

Le métier étant néanmoins à dominante juridique, la formation comprend inévitablement des enseignements conséquents en droit. Mais, pour le responsable du diplôme, « la connaissance de la réglementation ne peut suffire. L'instruction suppose bien d'autres aptitudes techniques - maîtrise du système d'information géographique, logiciels dédiés ou encore capacité à gérer des délais serrés - auxquelles prépare le DU ». Au-delà du savoir-faire, le cursus entend enfin insuffler une dose de savoir-être aux futurs agents pour « les exercer à gérer des relations humaines parfois délicates avec les élus et les porteurs de projets ».

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