Un « humaniste » qui « intimide et rassure » : Jean-Louis Georgelin par ceux qui l’ont côtoyé

Trois jours après la mort de celui qui présidait l’établissement public chargé de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, les acteurs du projet rendent un hommage unanime à l'ancien chef d'état-major des armées.  

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Jean-Louis Georgelin lors de la pose des arcs diagonaux et de l’oculus de la voûte de la croisée du transept, en février 2023.

Vendredi 18 août, le général Jean-Louis Georgelin, en charge de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris est décédé lors d’une randonnée dans les Pyrénées. Nommé par Emmanuel Macron au lendemain de l’incendie de l'édifice en avril 2019, il ne verra pas la livraison du chantier, prévue le 8 décembre 2024 à 11h15 au son du Te Deum.

Pour ceux qui ont travaillé avec lui sur le plus grand chantier patrimonial d’Europe, l’émotion est à son comble. Philippe Villeneuve, architecte en chef des monuments historiquesen charge de Notre-Dame et maître d’œuvre du chantier de restauration souligne : «Je trouvais en lui un partenaire fiable. Or, le chantier, dans ses aspects administratifs ou de coordination des équipes, s’est complexifié au fil du temps. Le général a été le maître d’ouvrage parfait. Il sera difficile de trouver, pour le remplacer, une personne dotée à la fois de tant de charisme et d’une connaissance aussi précise des détails du chantier et des arcanes de sa gestion. Mais le paquebot et lancé et le calendrier sera tenu.»

Le général a été le maître d’ouvrage parfait

—  Philippe Villeneuve

« Une science des hommes »

De son côté, François Asselin, chef de l’entreprise éponyme qui intervient sur le clos couvert, souligne son « autorité bienveillante » basée avant tout sur la « science des hommes ». Le général Georgelin ne ménageait pas son temps au service de la reconstruction de Notre-Dame et se rendait régulièrement sur le chantier, mais aussi dans les ateliers des entreprises partout en France. Pour les compagnons, «c’était un véritable bonheur de le rencontrer sur le terrain où il témoignait de la reconnaissance pour leur travail hautement qualifié».

Une qualité que loue également Pascal Prunet, architecte en chef des monuments historiques, dont le vestiaire sur la base vie du chantier se trouvait à côté de celui de Jean-Louis Georgelin. «Le local n’a rien de luxueux et le général tenait à cet emplacement. J’y vois une marque d’humilité et la volonté de partager le quotidien des compagnons», témoigne-t-il. Au-delà de l’anecdote, l’architecte se souvient avec émotion de ce moment symbolique au printemps dernier lors de la pose de la dernière pierre de l’un des voûtains détruit lors de la chute de la flèche : «il me semblait important de proposer au général Georgelin de procéder à la pose. Il était très touché de partager ce moment fort

Julien Le Bras, président du groupe Le Bras Frères, constate que derrière «une autorité un peu surjouée», se cachait un «homme profondément humain, dont la force était de savoir travailler en équipe grâce à un management par l’exemple.» Il souligne également son exceptionnelle loyauté et sa grande prise à cœur de l’engagement présidentiel. Si le dirigeant se souvient bien des «coups de pression» du général pour respecter le planning, il demeure très touché par ses coups de fils quotidiens lors de son hospitalisation causée par le Covid-19.

Une figure d’autorité

Car avant son humanité, c’est bien la figure d’autorité qui en imposait. Rémi Fromont, architecte en chef des monuments historiques et membre de l’équipe de maîtrise d’œuvre entend encore sa voix de stentor quand il répétait «il faut gagner la bataille de Notre-Dame en 2024, il en va de l’honneur de la France». Au-delà de cette anecdote, il évoque surtout une «relation de franchise dans les deux sens, où [nous] devionst savoir alerter sans inquiéter et proposer des solutions pour chaque difficulté rencontrée».

Grâce à lui, nous bénéficions d’un relais efficace auprès du Président de la République.

—  Rémi Fromont

François Asselin n’oublie pas non plus son franc-parler et son autorité «qui pouvaient en intimider certains et qui en rassuraient beaucoup d’autres». De fait, reprend Rémi Fromont, «grâce à son intransigeance et à sa ténacité, nous avons obtenu des bois de grande qualité. Nous savions également que grâce à lui, nous bénéficions d’un relais efficace auprès du Président de la République

Une équipe forte et soudée

En attendant la nomination d’une nouvelle personnalité pour incarner ce chantier emblématique, chacun tient à lui rendre hommage, comme Philippe Villeneuve : «Lui et moi avons travaillé dans un respect mutuel. Et nous partagions le même amour de la cathédrale

«Il a su mettre en place une équipe forte et soudée, en particulier avec Philippe Jost, son bras droit. Désormais je souhaite que les travaux se poursuivent dans la continuité en conservant notre objectif ambitieux sur les délais», témoigne Julien Le Bras, qui pensera à lui lors des futures étapes clés du chantier comme la pose du coq au sommet de la flèche ou lorsque les premières notes de l’orgue résonneront à nouveau dans la cathédrale.

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