A l’appel de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), près de 3000 artisans du bâtiment ont manifesté mercredi 18 janvier devant le ministère des Finances, "pour sauver la TVA à 5,5%", dont le sort sera scellé le 24 janvier, lors du prochain sommet Ecofin.
Depuis 10 heures, ils arrivent, par petits groupes en bus ou par le métro, s’installer aux pieds de l’imposant bâtiment du ministère des Finances. "100 délégations départementales ont fait l’effort de monter à Paris" précisent les organisateurs.
La tension monte peu à peu, puis vers 13h arrive le bus du président de la Capeb, Jean Lardin.
Il est hérissé de drapeaux blancs frappés du logo de l'organisation. La sono est poussée à fond sur des rythmes hispanisants et la foule lui répond à coups de sifflets, cornes de brumes et hurlements dans des mégaphones.
Debout sur l'impériale du bus, la voix cassée à force de plaider pour le maintien de la TVA à 5,5%, Jean Lardin, président de la Capeb, apparaît confiant. "C’est une manifestation historique, il n'y a jamais eu de regroupement national" explique-t-il, visiblement fier de ses troupes.
"Les informations que j'ai pu recueillir à la fois de la présidence de la République et du cabinet du Premier ministre me laissent à penser que notre gouvernement va se présenter mardi 24 janvier (lors de la réunion de l'Ecofin à Bruxelles, ndlr) avec une proposition forte pour le bâtiment et une proposition mesurée pour la restauration", a-t-il déclaré. "Nous pourrons bientôt boire une coupe de champagne", affirme-t-il aux journalistes lors d’une conférence de presse improvisée sur le toit du bus.
"Celui qui a notre destin entre ses mains, c'est Thierry Breton, le ministre de l'Economie et des Finances. De l'Elysée, de Matignon, on nous dit que le gouvernement est avec nous. J'aimerais que Thierry Breton me le dise aussi fort, et plus de me dire qu'il nous aime, j'aimerai qu'il nous le prouve" poursuit le bouillonnant président.
Malgré cette forte mobilisation, il ne sera pas reçus par le ministre, mais seulement par des membres de son cabinet.
A Bercy, on se limite à indiquer que "Thierry Breton et Dominique de Villepin sont mobilisés avec la même énergie et la même détermination" pour le bâtiment et la restauration.
Une prudence de mise alors que se tiennent d'ici la semaine prochaine trois réunions entre l'exécutif français et allemand, principal opposant au projet.
D'ailleurs, dans la matinée, Jean Lardin a été reçu à l’ambassade d’Autriche, de Finlande et d’Allemagne. Les 21 autres ambassades ont reçu les représentants des artisans français. "Notre démarche a surpris, mais les diplomates ont été sensibles et touchés par notre action" explique Jean-Marie Carton, président de l'Union chauffage, plomberie et couverture de la Capeb qui a été reçu par l’ambassadeur Letton. "Il n’y a eu à aucun moment et dans aucune ambassade le moindre rejet de nos arguments" résume-t-on à la Capeb.
L’espoir est donc encore de rigueur. "La bataille n’est pas encore gagnée mais l’Allemagne a pris conscience de l’importance de la TVA à 5,5 % dans le bâtiment pour les entreprises de ce secteur et pour l’économie française dans son ensemble et serait prête à faire un effort" note l’organisation professionnelle à l’issue de cette journée.
Les manifestants, tous chefs d’entreprises et souvent uniques salariés, n’auront certainement pas perdu leur temps en abandonnant leur entreprise une journée. Car l’enjeu est de taille. L'organisation estime que faire repasser la TVA à 19,6% engendrerait 66.000 pertes d'emplois en France direct et indirect. "Et le chiffre d'affaires supplémentaire qui a été généré par le passage à une TVA réduite est de 2 milliards d'euros", a estimé Henry Halna du Fretay, secrétaire général adjoint de la Capeb. Le message aura donc été entendu.
"Je n’imagine pas que nos dirigeants laissent passer un plan social de 66.000 emplois" affirme Jean Lardin qui, au pire, compte sur un nouveau compromis portant sur la durée.
Jean-Philippe Defawe