La restauration du donjon, des façades et des toitures de la forteresse de Saint-Florent sur l'île de Beauté, inscrite aux monuments historiques, présente une double particularité technique : une composition spécifique des enduits de façades et la pose de lauzes en couverture.
L'opération, qui touche à sa fin après un an de travaux, concerne pour les façades, la démolition de certaines parties en béton, le décroûtage des parements et la réfection des enduits à base de chaux. Dégradée par une violente explosion lors de la Seconde guerre mondiale puis abandonnée, la forteresse de forme circulaire, dotée de deux tours rondes et une carrée, a été plusieurs fois remaniée. Sur les parties anciennes du donjon, la teinte la plus soutenue de la chaux évoque les étapes successives de construction. Pour la rénovation, la composition des mortiers définie précisément par l'architecte en chef des monuments historiques, Jacques Moulin, a consisté à mélanger à la chaux aérienne des agrégats retirés de l'estuaire de la rivière voisine, l'Aliso. « Elle est conforme à l'originelle, les pigments prélevés ayant été préalablement examinés. L'apport de tout mortier hydraulique était proscrit » note l'assistant technique de Jacques Moulin. Le maçon a ainsi obtenu une couleur ocre, plus ou moins pâle. La chaux est aussi employée sur les rives extérieures où reposent les lauzes.
Les carrières de Brando, Monte et Pie d'Orezza ont fourni la pierre pour les quelque 980 mètres carrés de toiture. Des entreprises locales ont remporté l'appel d'offres et n'ont rencontré aucune difficulté d'exécution. « Fidèle à la tradition corse, le couvreur a débuté par les extrémités du toit. Des voliges de châtaignier écartées d'environ un centimètre forment le platelage d'assise des lauzes. Seule la partie inférieure de la pierre est biseautée, afin de permettre un meilleur écoulement de l'eau de pluie partiellement acheminée par les lignes de la pierre non polie. Le couvreur sonde les lauzes en appliquant des coups secs de marteline.
Ni collés, ni cloués, les cipolins sont seulement calés par des morceaux de schiste, des "scolie" . C'est une pratique séculaire, propre à la Corse, liée à la rareté de la neige. L'inclinaison des toitures est de 21°, soit près de 35 %.»
Cette nouvelle couverture remplace les tuiles et coïncide avec les premières représentations de la citadelle. Elle s'intègre dans le paysage, les demeures alentour étant, conformément au POS, couvertes de lauzes. Une fois achevé, le toit nécessitera des visites annuelles pour vérifier que les cales n'ont pas bougé avec les intempéries.
FICHE TECHNIQUE
Maître d'ouvrage : Ville de Saint-Florent.
Maître d'oeuvre : Jacques Moulin, architecte en chef des monuments historiques.
Entreprises : Sarl Franceschini (maçonnerie), Sarl Jean-Jacques Nicolaï (couverture).
Coût des travaux : 800 000 francs.
PHOTO : Ni collées, ni clouées, les lauzes sont calées par des morceaux de schiste.