Quelle place pour la baignoire ?
Les Français ont souvent été raillés par nos voisins d’outre-Manche pour leur propreté. Mais si le marché de la baignoire n’est pas des plus dynamiques, il ne s’agit pas d’une baisse de vigilance sur l’hygiène, mais d’un report sur une autre façon de se laver en intégrant d’autres formes de confort, de santé et de plaisir : la douche et l’hydrothérapie. L’accélération du rythme de vie, la recherche du gain de place ou la consommation d’eau portent ce nouvel engouement. Il n’empêche que les ventes sont toujours au rendez-vous et que la baignoire, même si on lui prédit depuis quelque temps un sérieux déclin, se maintient et reste bien attachée à l’univers du foyer.
Pour le moment, et d’après une étude MSI, « le marché a enregistré une progression en volume de 13,5 % entre 2002 et 2006 et une hausse en valeur de 4 % au cours de la même période ». On voit donc que la progression en valeur ne suit pas les volumes du marché. Deux explications à cela : d’une part, l’acrylique qui tend à batailler l’acier sur les gammes chantiers et, d’autre part, les records de construction de logements neufs dans lesquels les constructeurs privilégient l’entrée de gamme en première monte.
« La construction neuve favorise, en effet, le marché de la baignoire et de la baignoire premier prix, explique Valérie Lebon, responsable produit chez Jacob Delafon. Car le prix moyen d’une baignoire d’entrée de gamme est très bas, contrairement au prix d’une douche qui tourne autour de 164 euros ! » Il est vrai qu’à 40 euros en moyenne, la baignoire acier a été prisée ces dernières années, même si son prix a tendance à augmenter par la hausse de la matière première. Plus aucun fabricant français ne se positionne sur ce matériau et ce segment de très faible valeur ajoutée.
« L’avenir, c’est le design, l’innovation qui tire le marché vers le haut et qui passe par la distribution professionnelle, estime Valérie Lebon. Il existe des baignoires grand luxe, à débordement, des baignoires très design que l’on ne voit pas que dans les showrooms, des baignoires îlot… Elles s’habillent de bois, de béton de synthèse, de céramique. On donne également les moyens d’habiller sa baignoire comme le client l’entend. »
Conjoncture
« Tout matériaux confondus, le marché français de la baignoire représentait 723 000 pièces en 2005, avec une progression de 7 % par rapport à l’année précédente », annonce Brigitte Desplats-Redier, responsable de la communication de la Fisb (Fédération française des industries de la salle de bains). Un marché qui n’est pas des plus dynamiques, et qui est par ailleurs difficile à cerner avec précision, puisque les fabricants ne communiquent pas tous leurs chiffres à la fédération, et que les importations échappent quelque peu aux analyses. « L’estimation pour 2006, annonce Valérie Lebon, serait d’environ 720 400 pièces pour une valeur de 70,2 millions d’euros. » On noterait donc une légère baisse en volume. Le marché de la baignoire en France a augmenté de 7 % entre 2004 et 2005. Mais la progression en valeur n’a pas été la même. Avec 4 % de plus, pour atteindre en 2005 les 67 millions d’euros, ces données reflètent de grandes disparités et des importations importantes de produits d’entrée de gamme. Les marques néanmoins réagissent et tirent le marché vers le haut tout en proposant des produits plus abordables. Cette tendance était largement illustrée par le dernier salon IdéoBain organisé, notamment, autour d’un « défilé » d’une quarantaine de salles de bains, imaginées par des architectes et des designers. De grands noms étaient au rendez-vous : Daniel Rozenzstroch et François Muracciole, Philippe Starck qui griffait pour Duravit, Antonio Citterio pour Allia, Talocci pour Teuco…
Pourtant, la concurrence est nettement située au niveau des douches et cabines de douche qui ont le vent en poupe ! Moins encombrantes, correspondant à un rythme de vie plus rapide, les douches ont aussi évolué en parallèle et deviennent spacieuses et confortables. « Même en remplacement de baignoire, beaucoup de clients préfèrent réinstaller une douche. Et d’ailleurs les cabines ont tendance à grandir, jusqu’à épouser parfaitement l’emplacement d’une baignoire à remplacer ! », explique Christian Grapillard, gestionnaire de marché sanitaire au Gapsa. Mais les doutes sur la baignoire et la balnéo ne sont pas partagés par tous les acteurs, notamment par Jacob Delafon qui voit ses ventes augmenter. Les baignoires restent fortement attachées à l’idée du foyer. Même si le nouvel idéal des Français serait de disposer d’une baignoire et d’une douche !
Consommation
D’après l’Insee, les dépenses concernant la salle de bains ont progressé de plus de 30 % au cours de ces dix dernières années. Un engouement qui ne laissent pas indifférents les distributeurs et les industriels qui proposent de véritables collections unifiant tous les éléments de la salle de bains. La Fisb indique que les salles de bains ont une taille moyenne de 4 m2. Peut-être une explication à l’engouement pour les douches, qui au-delà de l’eau, économisent de l’espace. Le marché de la salle de bains est un marché en croissance. Un marché lié au bien-être et à la détente.
La communication passe largement par ces thèmes : il fait bon s’occuper de soi, montrer sa salle de bains qu’autrefois on tenait cachée, de lui associer toutes formes de détente comme la balnéo, l’audio, les lumières… Le groupe Saint-Gobain Distribution ne s’y est pas trompé, qui a ouvert en 2006 deux grands points de vente de 2 000 m2 et une boutique vitrine au centre de Paris, dédiés intégralement au monde de la salle de bains : Aquamondo. Une enseigne grand public d’hyperspécialiste de la salle de bains. Il s’agit d’apporter une solution complète aux particuliers, pour le neuf, comme pour la rénovation. Le marché en France est estimé à 3 Md € . Les consommateurs finaux deviennent de plus en plus prescripteurs, et la multiplication des showrooms le montre. La distribution professionnelle investit largement dans les salles d’exposition. Et les résultats sont au rendez-vous. Dans la salle de bains, la baignoire est un réel élément de mise en valeur. Elle dépasse sa fonction purement hygiéniste et devient un objet décor qu’il faut montrer.
