"Supprimer le «Malraux», c’est tuer les centres anciens". Lettre ouverte au Premier ministre, par Martin Malvy

Le président de la Région Midi-Pyrénées, Martin Malvy, en tant que président de l'Association Nationale des Villes et Pays d'Art et d'Histoire et Secteur Sauvegardé, a adressé le 7 décembre à Dominique de Villepin, Premier ministre, une lettre ouverte signée par 79 maires de communes à secteurs protégés afin de faire connaître au gouvernement l’inquiétude qui est la leur devant l’éventualité de la disparition de la Loi Malraux ou de la réduction de son champ d’actions, suite au vote de l’Assemblée Nationale du 22 novembre 2005.

Voici le texte de cette lettre ouverte :

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE

Monsieur le Premier Ministre,

Nous sommes élus de villes à secteur sauvegardé ou de villes à zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager (ZPPAUP).

Le projet de Loi de Finances pour 2006 nous interpelle.

Nous nous adressons à vous.

Le Gouvernement confond le dispositif «Malraux» créé en 1977, avec les niches fiscales qu'il entend supprimer.

Ce dispositif permet effectivement à un investisseur privé de reporter les déficits d’opérations immobilières sur l’ensemble de ses revenus. Mais ceci en contrepartie d’une restauration intégrale, sous contrôle de l’administration, dans le respect des règles incontournables de protection du patrimoine et de la qualité des logements fixées par la ZPPAUP ou le Secteur Sauvegardé.

Ces contraintes onéreuses conditionnent l'obtention des permis de construire.

Depuis 1977, ce sont, dans les villes concernées, plusieurs milliers de logements insalubres qui ont été restaurés, et qui accueillent maintenant des familles souvent à revenus modestes.

Dans les centres anciens, il en reste un bien plus grand nombre qui doivent être réhabilités et ne le seront jamais si le dispositif "MALRAUX" disparaît. Des centaines d'entreprises artisanales sont concernées. Le devenir des centres anciens est menacé.

Depuis 1977, année après année, la puissance publique a restreint ses interventions financières. En 2005, il n’existe plus aucun soutien adapté si l'on excepte les "opérations programmées d’amélioration de l’habitat" et à l'intérieur de celle-ci … le dispositif Malraux.

Le Gouvernement a demandé une nouvelle délibération pour supprimer un amendement qui aurait assuré la pérennité du régime, et qui avait été adopté par l’Assemblée Nationale.

La seconde délibération ne maintient plus l’avantage fiscal que pour :

- les démolitions reconstructions, ce qui est pour le moins paradoxal.

- le rétablissement des logements dans les immeubles qui avaient perdu temporairement cette fonction.

Si cela est maintenu, les villes seront seules désormais face à leurs centres-villes.

Seuls quelques immeubles pourraient encore être concernés, 5% environ du parc. Dans ces conditions les investisseurs se détourneront des centres-villes pour aller rechercher des avantages fiscaux dans les DOM-TOM ou ailleurs.

Abandonner "le MALRAUX" signifie la mort programmée des centres-villes, l'aggravation de leur déshérence. Les récents développements dans les quartiers de périphérie doivent nous rappeler que la plupart des centres historiques sont dans des situations proches avec des logements vacants, de la précarité, une prise en charge sociale de plus en plus importante.

Nous vous demandons, Monsieur le Premier Ministre, de reconsidérer la position du Ministère des Finances.

Il s’agit de maintenir dans les centres-villes l’investissement privé, outil de reconquête sociale, patrimoniale et vecteur d’emplois, de maintenir une production de logements restaurés conformes aux besoins des habitants et aux règles d'urbanismes appliquées à ce type d'habitat.

Quel intérêt politique, social, économique, patrimonial peut-on trouver à détourner l’investissement privé des centres historiques, alors que rien ne pourra jamais s'y substituer compte tenu des contraintes architecturales coûteuses, imposées à juste titre !

Monsieur le Premier Ministre, nous en appelons à l'intérêt que vous portez en même temps à la préservation du patrimoine exceptionnel de nos villes et de la mixité sociale de leurs centres anciens pour pérenniser le seul et unique instrument d'une politique dont notre Pays à tout lieu aujourd'hui d'être fier et qui participe à son image.

Nous ne pouvons imaginer qu'il n'en soit pas ainsi.

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Date de réponse 10/10/2025