Fiche pratique

Règles d'hygiène et de salubrité : synthèse des apports du décret du 29 juillet 2023

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Depuis la loi de décentralisation du 6 janvier 1986, le Code de la santé publique (aujourd'hui, à l'article L. 1311-1) prévoit que les règles générales d'hygiène et de salubrité doivent être définies par décrets. Ces derniers n'avaient toutefois jamais été édictés s'agissant de la salubrité des habitations.

Le portant règles sanitaires d'hygiène et de salubrité des locaux d'habitation et assimilés vient pallier cette lacune.

Quel était le régime applicable avant le décret du 29 juillet 2023 ?

Avant l'entrée en vigueur de la loi de 1986, chaque département disposait de son propre règlement sanitaire départemental (RSD), pris sur le modèle de la circulaire du 9 août 1978 relative à la révision du RSD « type ». Dans l'attente de la parution des décrets d'application, censés se substituer aux RSD, les règles générales d'hygiène et de salubrité, parmi lesquelles celles applicables aux locaux d'habitation, étaient toujours définies au regard des RSD adoptés avant 1986 et ayant subsisté jusqu'à ce jour. Ce régime a pris fin le 1er octobre 2023, avec l'entrée en vigueur de l'essentiel des dispositions du décret du 29 juillet.

Quels sont les apports du décret ?

- Uniformisation des règles existantes

Ce décret présente l'avantage de codifier et d'actualiser les dispositions du RSD « type » au sein du Code de la santé publique (CSP) et, donc, d'uniformiser les règles d'hygiène et de salubrité qui étaient jusqu'alors déterminées localement et pouvaient varier d'un département à l'autre. La partie réglementaire du code comporte désormais une section spécifique (articles R. 1331-14 à 78) relative aux règles d'hygiène et de salubrité des locaux d'habitation.

Pour autant, comme le prévoit l', les dispositions issues du décret pourront toujours être complétées par des arrêtés préfectoraux ou municipaux comportant des prescriptions particulières, en vue d'assurer la protection de la santé publique dans le département ou la commune.

- Nouvelles définitions

L'insalubrité est désormais définie et le décret énonce les critères permettant de fonder la qualification de locaux « par nature impropres à l'habitation ». Il précise ainsi un certain nombre de termes qui n'étaient jusqu'alors pas explicitement définis par les textes, en particulier les notions suivantes () : - « caves : locaux généralement enterrés conçus et construits pour être utilisés à des fins de conservation et d'entreposage » ; - « combles : locaux constitués par la partie de l'espace intérieur d'un bâtiment situé sous les pentes du toit et séparés des autres parties de celui-ci par un plancher » ; - « dépendances : parties d'un local d'habitation autres qu'une pièce de vie ou qu'une pièce de service, telles que terrasses, loggias, vérandas, volumes vitrés, balcons, remises, cagibis, espaces occupés par des chauffe-eau et garages ».

Ce point est d'importance dans la mesure où il est désormais expressément prévu qu'une cave - à distinguer d'un sous-sol - est par nature impropre à l'habitation, quels que soient les aménagements et transformations qui pourraient lui être apportés. A l'inverse, sous réserve du respect d'un certain nombre de caractéristiques (hauteur sous plafond, éclairement, ouvertures sur l'extérieur), un sous-sol peut être envisagé comme un local à usage d'habitation. Il en va de même s'agissant des combles qui ne répondent pas à un certain nombre d'exigences (hauteur sous plafond, solidité du plancher, éclairement…) : par principe, ils ne pourront être mis à disposition à des fins d'habitation (art. R. 1331-17 à 19 du CSP).

- Durcissement des sanctions

Enfin, les dispositions des articles 4 et 5 du décret durcissent les sanctions administratives et pénales (passage d'une contravention de 3e à 4e classe) [1] applicables en cas d'infraction.

Par ailleurs, le maire, titulaire d'un pouvoir de contrôle et de prescription au titre des règles d'hygiène des habitations, ainsi que le préfet ont désormais le pouvoir d'infliger une amende forfaitaire.

Quel est le champ d'application des règles d'hygiène et de salubrité fixées par le décret ?

Ces règles visent en premier lieu les locaux à usage d'habitation et leurs abords ainsi que les parties communes des bâtiments d'habitation collectifs, en ce compris les logements meublés ou garnis, les locaux affectés à l'hébergement collectif et aux hébergements touristiques.

A titre mineur, sont également concernées les installations telles que les maisons mobiles, les campements, les huttes, les caravanes, les chapiteaux, les bateaux, les roulottes, les cabanes informelles, les abris, les conteneurs, etc. sous couvert d'adaptations qui devront faire l'objet d'un décret complémentaire d'ici deux ans (art. et du CSP). Pour ces dernières, les nouvelles dispositions intégrées au CSP ne seront applicables qu'à compter de l'entrée en vigueur d'un second décret (art. 6 du décret du 29 juillet 2023).

Quels autres textes doivent être mis en rapport avec ce nouveau décret ?

D'une part, les dispositions du présent décret s'articulent avec celles du modifié fixant les caractéristiques d'un logement décent, auquel il est plusieurs fois renvoyé, et dont les prescriptions sont applicables dans les rapports de droit privé entre bailleurs et locataires.

D'autre part, en application des dispositions de l' (CCH), les règles de construction relatives à la qualité sanitaire des bâtiments doivent être définies en cohérence avec les règles d'hygiène et de salubrité prescrites par le présent décret. Dès lors, certaines règles résultant de ce dernier sont susceptibles d'exercer une influence sur la réglementation issue du CCH et, par conséquent, sur les normes de construction.

Quels sont les points d'attention pour les constructeurs ?

- Dimensions et configuration des pièces de vie

Pour être « propres à l'habitation », les pièces de vie du logement doivent respecter un certain nombre de caractéris-tiques relatives notamment à : leur superficie et leur hauteur sous plafond ; leur configuration ; leur éclairage naturel et leur ensoleillement (art. R. 1331-17 à 23 du CSP). S'agissant en particulier de la hauteur sous plafond, celle-ci doit, en principe, être supérieure ou égale à 2,20 m (art. R. 1331-20). On observera que le projet de décret s'inspirait initialement des dispositions du décret du 30 janvier 2002 fixant les caractéristiques d'un logement décent en autorisant, par une lecture combinée avec l' (2), une hauteur minimale sous plafond de 1,80 m pour la pièce principale du logement si son volume est supérieur ou égal à 20 m3 . Il en résultait qu'un logement avec une pièce de vie d'une hauteur minimale sous plafond de 1,80 m n'était pas nécessairement impropre à l'habitation.

Ayant fait l'objet de critiques tant de la part des professionnels du secteur que des instances consultées par le gouvernement, à l'instar du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE) ou encore de la section sociale du Conseil d'Etat, ce passage a été retiré du décret dans sa rédaction finale.

Mais en réalité, même si la hauteur minimale de 1,80 m n'est plus expressément mentionnée dans le décret, il est tout de même fait référence aux dispositions du décret du 30 janvier 2002 et donc, indirectement, à celles de l' : « Une hauteur sous plafond égale ou supérieure à 2,20 mètres est suffisante. Les locaux dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres sont impropres à l'habitation sauf s'ils respectent les dispositions de l'article 4 du décret du 30 janvier 2002. » Il s'agit là d'une régression par rapport aux dispositions des RSD encore en vigueur, lesquels exigent une hauteur minimale sous plafond allant de 2,20 m à 2,30 m. Au vu des critiques et inquiétudes formulées par plusieurs associations, il n'est pas impossible que ces dispositions soient prochainement modifiées ou, a minima, précisées par le gouvernement.

- Eclairage naturel

Si le CCH (art. L. 155-1) prévoit que les locaux d'habitation sont conçus et construits de sorte que les pièces principales des logements permettent aux occupants de bénéficier d'un apport de lumière naturelle, le nouvel va au-delà en exigeant également que l'éclairage naturel soit suffisant pour permettre, au centre de la pièce de vie, d'y lire par temps clair et en journée sans devoir recourir à un éclairage artificiel.

- Confort thermique

Par ailleurs, le nouvel tient compte des réflexions en cours concernant l'adaptation des logements -nouveaux comme existants - aux épisodes de fortes chaleurs qui devraient s'intensifier à l'avenir.

Sans qu'il n'y ait plus de précisions à ce stade, il est désormais prévu que tout logement soit pourvu d'un système naturel ou mécanique « de régulation de la chaleur fonctionnel et suffisant, qui peut être assuré par différents moyens tels l'isolation thermique, la présence de volets, la possibilité de ventilation nocturne, l'existence d'un puits provençal, ainsi que par leur combinaison ».

- Ventilation

Enfin, on soulignera que le CSCEE, à qui le projet de décret a été soumis pour avis en début d'année, a attiré l'attention de l'administration sur la cohérence des dispositions relatives à la ventilation des cages d'escalier des immeubles collectifs avec les différents textes existants. Le Conseil a rappelé que l'exutoire de désenfumage n'avait pas pour vocation d'être considéré comme un dispositif de ventilation. Les dispositions en question ont finalement été retirées de la rédaction finale du décret, à l'instar d'ailleurs d'autres articles qui portaient sur les parties communes des immeubles d'habitation collectifs, sans que l'on sache pour l'instant si elles seront réintégrées ultérieurement au sein d'un autre décret.

(1) L'amende infligée peut donc désormais atteindre 750 euros. (2) Le décret du 30 janvier 2002 renvoie en effet aux dispositions de l'article R. 156-1 du CCH dont il ressort que les pièces d'une hauteur sous plafond supérieure à 1,80 m entrent, par principe, dans le calcul du volume habitable d'un logement.

Ce qu'il faut retenir

  • Les dispositions issues du décret n° 2023-695 du 29 juillet 2023, codifiées aux articles R. 1331-14 et suivants du Code de la santé publique, se substituent à celles des règlements sanitaires départementaux (RSD) qui subsistaient jusqu'à présent.
  • Elles permettent d'actualiser et d'uniformiser les règles d'hygiène et de salubrité des locaux d'habitation et assimilés qui pouvaient localement diverger.
  • Pour l'essentiel, elles sont entrées en vigueur le 1er octobre 2023.
  • L'insalubrité fait désormais l'objet d'une définition. Sont par ailleurs précisés les termes - « caves » ou « combles » par exemple - et les critères dont l'application permet de fonder la qualification de locaux « par nature impropres à l'habitation » .
  • Sur le plan des normes édictées par ce nouveau décret, une attention particulière sera portée aux dimensions - notamment la hauteur minimale sous plafond - des pièces de vie, à leur éclairage naturel ainsi qu'au dispositif de régulation de la chaleur dont tout logement doit être doté.
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