Rendez-vous directement au Conseil d’Etat sans passer par la case « cour administrative d’appel ». Dans un arrêt du 26 avril 2022, la Haute juridiction apporte des précisions sur le champ d’application de l’article R. 811-1-1 du Code de justice administrative. Rappelons que cet article a prévu à titre temporaire, jusqu’au 31 décembre 2022, la suppression du double degré de juridiction pour les litiges liés aux autorisations de construire dans les zones tendues. Précisément, l’article dispose que « les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours contre les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d'habitation ou contre les permis d'aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une des communes mentionnées à l'article 232 du Code général des impôts et son décret d'application ».
Réduire le délai de traitement des recours
A l’origine de la saisine du Conseil d’Etat, un contentieux entre une société immobilière et un maire à propos de la délivrance d’un certificat de conformité à un permis d’aménager accordé quelques mois plus tôt à un particulier. La société avait demandé au maire de retirer cette autorisation ainsi que le certificat de conformité. L'édile ayant refusé, la requérante a saisi le tribunal administratif qui a rejeté sa demande. La commune étant située en zone tendue, la société s’adresse alors directement au Conseil d’Etat pour obtenir gain de cause.
Les magistrats du Palais-Royal rappellent tout d'abord l’objectif de l'article R. 811-1-1 précité : réduire, dans les zones où la tension entre l'offre et la demande de logements est particulièrement vive, le délai de traitement des recours pouvant retarder la réalisation d'opérations de construction de logements.
Puis, ils en précisent le champ d’application : ces dispositions « doivent être regardées comme concernant non seulement les recours dirigés contre des autorisations de construire, de démolir ou d'aménager, mais également, lorsque ces autorisations ont été accordées puis retirées, les recours dirigés contre ces retraits ». Elles s’appliquent aussi aux recours dirigés contre les refus de retrait. En revanche, elles ne sont « pas applicables aux recours dirigés contre les certificats de conformité des travaux à l'autorisation délivrée ». Les conclusions de la requérante contre le refus de retirer le certificat de conformité sont donc renvoyées à la cour administrative d'appel.
Application stricte
A noter que le Conseil d'Etat s'était déjà prononcé sur le périmètre de cet article. Il a considéré dans un arrêt du 15 décembre 2021 que ces dispositions étaient d'application stricte et qu'elles ne s'appliquent ni aux jugements statuant sur des recours formés contre des refus d'autorisation ni à ceux statuant sur des recours contre des décisions de sursis à statuer.
CE, 26 avril 2022, n° 452695, mentionné aux tables du recueil Lebon