Les 80 hectares de l'Union, à la limite de Roubaix, Tourcoing et Wattrelos, présentent un aspect hétéroclite. D'abord une immense étendue d'herbes folles signale les terrains en attente d'aménagement. Il y a aussi de la brique avec des maisons murées ou habitées et des « châteaux de l'industrie » en cours de démolition ou de réhabilitation. Et, en plein milieu, le chantier d'un grand équipement, le Ceti (Centre européen des textiles innovants). Ce kaléidoscope est le point de départ d'un des grands projets de la métropole lilloise.
Les usines textiles, créées à la fin du XIXe siècle dans une plaine agricole le long des infrastructures de transport (canal, chemin de fer), ont fermé à partir des années 1970. Mais il faut attendre 2004 pour que la Communauté urbaine de Lille désigne l'équipe d'architectes Reichen et Robert lauréate d'un marché de définition portant sur un schéma d'aménagement de l'ensemble du site. Celui-ci se base sur la constitution de « plaques » prolongeant la composition des ensembles industriels et sur un parc en forme de papillon. Le programme de construction totalise 360 000 m2.
En 2007, un groupement composé de la SEM Ville Renouvelée et la SAEM Euralille se voit attribuer pour quinze ans la concession de la ZAC de l'Union, avec un budget de 174 millions d'euros qui s'ajoute aux 30 millions d'acquisitions et aux 8,3 millions de travaux consacrés entre 1999 et 2009 par l'Etablissement public foncier à la maîtrise de 48 ha.
Mais, entre-temps, le territoire a bougé. D'autres friches sont concernées. Au sud du canal, l'îlot Vanoutryve est dédié à un « pôle image » de 4,5 ha (architectes : Pierre Bernard et Didier Debarge) qui articule 20 000 m2 d'usines à réhabiliter et 20 000 m2 de constructions neuves.
Au nord, les bâtiments du Peignage de La Tossée, fermé en 2004, ont intégré le périmètre. Et surtout l'Union étant promu « écoquartier », le concessionnaire s'entoure d'un groupement formé de Arc-Ame, Airele, Twi et Aleho pour l'aider dans sa démarche de développement durable.
Trois secteurs stratégiques
Une nouvelle consultation d'urbanisme désigne à nouveau en 2008 l'équipe conduite par Reichen et Robert comme urbaniste en chef avec comme mission l'actualisation du plan-masse et la maîtrise d'œuvre des espaces publics (hors parc) sur huit ans. Bernard Reichen et Claire Schorter, chef de projet, se focalisent sur trois secteurs stratégiques : La Plaque - dont le chantier du Ceti est la première opération emblématique - va concentrer l'essentiel des constructions neuves (140 000 m2). La Tossée conjugue 20 000 m2 de réhabilitation et 60 000 m2 de construction neuve. Les « Quais tertiaires » accueilleront 40 000 m2 de bureaux. L'Union affiche un programme de 500 000 m2 (140 000 m2 de plus qu'en 2004). Les COS (coefficient d'occupation des sols) à la parcelle varient de 0,6 à 2,5 et sont en majorité proches de 1. Le nombre de logements est passé de 1 000 à 1 500. Les surfaces tertiaires doublent pour atteindre 180 000 m2, notamment avec la densification de la friche de La Tossée.
Des parkings silos
La trame verte a été renforcée avec le repérage de trois corridors biologiques potentiels dans La Plaine et La Plaque, le long des voies ferrées et du canal. La maîtrise de la politique de stationnement est au cœur du dispositif. Quatre parkings silos, futures « loges de quartier », centraliseront les services : parkings pour les logements et les bureaux, production d'électricité, stockage des eaux pluviales, relais colis, point vélo, collecte de déchets. Côté énergie, les performances visées sont au minimum la BBC, avec des constructions passives voire à énergie positive. Enfin, l'animation d'un écoquartier à cheval sur trois villes et s'appuyant sur une demi-douzaine de comités de quartiers est un enjeu majeur.
« Nous devons réfléchir à la pérennité des structures d'animation au-delà de la durée de la concession. L'atelier populaire d'urbanisme du quartier de l'Alma, créé il y a trente ans à Roubaix, avait imaginé des coursives et des jardins qui ont perdu leurs fonctions d'espaces de rencontres pour devenir petit à petit des espaces de dépôt, car les gens qui ont inventé ce quartier avaient oublié de transmettre son mode d'emploi », prévient Yves Lepers, chargé du volet développement durable à la SEM Ville Renouvelée