« Une fois que nous disposons de la maquette numérique ou d’un modèle BIM (Building information modeling) de bâtiment, il nous suffit de deux jours pour scénariser l’ensemble et organiser une visite virtuelle », résume Hugo Martin, doctorant et ingénieur de recherche chez Bouygues Bâtiment International. Mardi 25 mars à la Cité des sciences et de l’industrie, porte de la Villette à Paris, il était en effet possible de visiter Challenger, le siège social de Bouygues à Saint-Quentin en Yvelines, comme si on y était.
La visite se déroule via un écran de réalité immersive nouvelle génération : huit rétroprojecteurs reconstituent une image de très haute définition sur un écran hémisphérique de 10 m de large et 4,5 m de haut. Vingt haut-parleurs disposés tout autour de la pièce y compris derrière l’écran permettent un rendu réaliste du son et des ambiances sonores.
Baptisée Callisto-SARI (pour salle de réalité immersive), la salle est le résultat d’un projet de recherche qui a réuni huit partenaires (voir note en bas de page) dans le cadre d’un appel à projets du Fonds unique interministériel (FUI) via les pôles de compétitivité. « L’objectif est de faire travailler ensemble des sociétés qui n’ont a priori aucune raison de se rencontrer », explique Trino Beltran, directeur R&D de Bouygues Bâtiment International. Et le résultat est époustouflant ! La visite commence par le hall d’accueil où, d’un clic sur une tablette, l’opérateur fait varier les ambiances : journée, nuit, revêtement de sol, de mur ou position du mobilier, tout peut être changé suivant les envies du moment.
Dans les bureaux, une fois les postes de travail et leur nombre configurés, le visiteur se dirige vers une salle de réunion bruyante et ferme la porte. « S’il est difficile dans la réalité d’évaluer une atténuation de 25 dB(A) ou 35 dB(A), ici c’est une réelle expérience sensorielle, on entend la différence », souligne Trino Beltran. Idem pour mesurer l’isolation thermique d’une façade en double ou triple vitrage, ou avec une double-peau ventilée. Cette fois ce sont des ondes colorées qui indiquent la perception de la température en fonction de la position du poste de travail.
Configurer son futur appartement
Cette visite n’est qu’un aperçu de tout ce qu’il est possible de faire à partir d’un modèle BIM, estime-t-on chez Bouygues Bâtiment International. « Grâce à ce projet, nous avons divisé les coûts d’installation par dix par rapport à ce qui se fait habituellement dans le domaine », explique Trino Beltran. En l’occurrence, la partie matériel ou hardware a été diminuée et compensée par davantage de travail sur les logiciels. Une « petite » salle immersive sera ouverte en septembre sur le site de Challenger. Autre effet de bord de la maquette numérique, l’application « mini-Callisto » pourra être installée sur une clé USB et fonctionner sur n’importe quel ordinateur. Plutôt que de disposer d’un plan et de quelques photos virtuelles en 3D, l’acquéreur pourra configurer chez lui son futur bien, à l’instar de ce qui existe déjà dans l’automobile. Une autre étape concerne la visite virtuelle grâce à un casque immersif. « Les modèles Oculus Rift coûtent 300 dollars et permettent non seulement de déambuler dans sa future maison, mais servent aussi à la formation dans le cadre de serious game », insiste le responsable R&D. En l’occurrence, Bouygues s’en sert depuis quelques mois pour la simulation de conduite de grue. Grâce à ces « jeux sérieux », l’apprentissage est facilité, en particulier pour les personnes qui ne savent pas lire.
En attendant l’ouverture au public dans quelques mois, la Cité des sciences finalise les scénarios pédagogiques qui seront présentés au grand public. Pour l’heure, quelques élus ont déjà pu faire un voyage étonnant au cœur du système solaire, approcher une comète et atterrir sur Mars au côté du robot Curiosity. On en redemande.