Pourquoi l’entreprise doit faire la preuve des préjudices subis

Arrêt du 5 janvier 2011 Conseil d’Etat CE 5 janvier 2011, n° 343206, « Société Technologie Alpine Sécurité »

Vu, 1°) sous le n° 343206, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 et 27 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société Technologie Alpine Sécurité, dont le siège est au Parc d’activités Alpespace 74 rue Magellan à Sainte Hélène du Lac (73800) ; la société technologie sécurité demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant en application de l’, a, à la demande de la société HC Méditerranée, annulé la procédure engagée par la commune de Bonneval-sur-Arc en vue de la passation d’un marché de réalisation et d’entretien des dispositifs de déclenchement artificiel d’avalanches en rive gauche de l’Arc ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société HC ­Méditerranée ;

3°) de mettre à la charge de la société HC Méditerranée une somme de 5 000 euros en application de l’ ;

Vu, 2°) sous le n° 343214, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 et 23 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la commune de Bonneval-sur-Arc, représentée par son maire ; la commune de Bonneval-sur-Arc demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, statuant en application de l’, a, à la demande de la société HC Méditerranée, annulé la procédure engagée par la commune de Bonneval-sur-Arc en vue de la passation d’un marché de réalisation et d’entretien des dispositifs de déclenchement artificiel d’avalanches en rive gauche de l’Arc ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société HC ­Méditerranée ;

3°) de mettre à la charge de la société HC Méditerranée une somme de 5 000 euros en application de l’ ;

Vu les autres pièces des dossiers

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Frédéric Dieu, Maître des Requêtes,

– les observations de la SCP ­Peignot, Garreau, avocat de la société Technologie Alpine Sécurité et de la SCP ­Vincent, Ohl, avocat de la société HC Méditerranée,

– les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de la société Technologie Alpine Sécurité et à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la société HC Méditerranée ;

Considérant que les pourvois de la société Technologie Alpine Sécurité et de la commune de Bonneval-­sur-Arc sont dirigés contre la même ordonnance ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu’aux termes de l’, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics (…). / Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement (…). / Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu’il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu’au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours (...) ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la commune de Bonneval-sur-Arc a lancé une procédure adaptée en vue de l’attribution d’un marché portant sur la réalisation et l’entretien des dispositifs de déclenchement artificiel d’avalanches en rive gauche de l’Arc qui comprenait un lot n° 1 zone basse et un lot n° 2 zone haute ; qu’à l’issue de cette procédure, la commune de Bonneval-sur-Arc, après avoir écarté l’offre de la société HC Méditerranée, a attribué ces deux lots à la société Technologie Alpine Sécurité ; que cette société et la Commune de Bonneval-sur-Arc se pourvoient en cassation contre l’ par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, à la demande de la société HC Méditerranée, a annulé la procédure ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes du II de l’article 50 du code des marchés publics : « Pour les marchés publics passés selon une procédure adaptée, lorsque le pouvoir adjudicateur se fonde sur plusieurs critères pour attribuer le marché, les candidats peuvent proposer des variantes sauf si le pouvoir adjudicateur a mentionné dans les documents de consultation qu’il s’oppose à l’exercice de cette faculté (…) » ; que pour l’application de ces dispositions, des variantes constituent des modifications, à l’initiative des candidats, de spécifications prévues dans la solution de base décrite dans les documents de la consultation ; que le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble ayant souverainement interprété les stipulations de l’article 2.4 du règlement de la consultation comme imposant aux candidats de compléter le cahier des clauses techniques particulières en proposant une rédaction complète des chapitres A 4, description du procédé de déclenchement proposé par le candidat, ainsi que de ses ouvrages constitutifs et de leurs caractéristiques de fonctionnement, B 6 , provenance et qualité des matériels et matériaux constituant le dispositif de déclenchement et C 7, installation et mise au point des dispositifs de déclenchement, il a en conséquence inexactement qualifié de variantes ces précisions que devaient apporter les candidats sur les moyens techniques mis en œuvre pour exécuter le marché ;

Considérant, d’autre part, qu’en vertu des dispositions précitées de l’, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles susceptibles d’être lésées par de tels manquements ; qu’il appartient dès lors au juge du référé précontractuel de rechercher si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente ; que, par suite, en annulant la procédure de passation litigieuse au motif que la commune de Bonneval-sur-Arc n’avait pas suffisamment précisé dans le règlement de la consultation les exigences minimales que les variantes devaient respecter, sans rechercher si cette irrégularité, à la supposer établie, était susceptible d’avoir lésé ou risquait de léser la société requérante, le juge des référés a commis une erreur de droit et a ainsi méconnu son office ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens des pourvois, que la commune de Bonneval-sur-Arc et la société Technologie Alpine Sécurité sont fondées à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Considérant que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de l’, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée par la société HC Méditerranée ;

Considérant, en premier lieu, que si l’article 2.4 du règlement de la consultation imposait aux candidats de compléter le cahier des clauses techniques particulières en proposant une rédaction complète des chapitres A 4 : ­description du procédé de déclenchement proposé par le candidat, ainsi que de ses ouvrages constitutifs et de leurs caractéristiques de fonctionnement, B 6 : provenance et qualité des matériels et matériaux constituant le dispositif de déclenchement et C 7 : installation et mise au point des dispositifs de déclenchement , la rédaction de ces chapitres consistait aux termes des articles A 4, B 6 et C 7 du cahier des clauses techniques particulières, à fournir, dans le cadre de l’offre de base, des précisions quant aux moyens techniques mis en oeuvre pour exécuter le marché ; qu’ainsi, les candidats étaient tenus, dans la rédaction des chapitres A 4, B 6 et C 7, de respecter, sans pouvoir les modifier, les spécifications techniques prévues dans la solution de base demandée par la commune et décrite aux articles A 1 à A 3, B 1 à B 5 et C 1 à C 6 du cahier des clauses techniques particulières ; que, par suite, la société HC Méditerranée n’est pas fondée à soutenir qu’en demandant aux candidats une rédaction complète des chapitres A 4, B 6 et C 7, la commune de Bonneval-sur-Arc les a, de fait et en contradiction avec l’article 2.5 du règlement de la consultation, invités à présenter des variantes ;

Considérant, en second lieu, que l’article 4-2 du règlement de la consultation prévoyait que le critère de la valeur technique serait valorisé sur 20, en attribuant une note de 6 à l’élément A et des notes de 7 aux éléments B et C suivants du mémoire technique à produire par les candidats ; que, contrairement à ce que soutient la société HC Méditerranée, ce critère, pondéré à hauteur de 60 %, permettait une analyse objective des offres dès lors qu’il conduisait à noter les candidats en fonction des réponses qu’ils avaient apportées aux spécifications techniques prévues dans la solution de base demandée par la commune et décrite aux articles A 1 à A 3, B 1 à B 5 et C 1 à C 6 du cahier des clauses techniques particulières ; que, par suite, la société HC Méditerranée n’est pas fondée à soutenir que le mécanisme de sélection des offres et de notation serait contraire aux principes de transparence et d’égalité de traitement des candidats en raison de la latitude offerte aux candidats pour présenter des variantes ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande de la société HC Méditerranée tendant à l’annulation de la procédure litigieuse doit être rejetée ;

Considérant que les dispositions de l’ font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Bonneval-­sur-Arc et de la société Technologie Alpine Sécurité, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que demande la société HC ­Méditerranée au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre la somme de 4 500 euros à la charge de la société HC Méditerranée au titre des frais exposés par la commune de Bonneval-sur-Arc et non compris dans les dépens pour la procédure suivie devant le Conseil d’Etat et le tribunal administratif de Grenoble, en application des dispositions de l’ ; qu’il y a également lieu de mettre à la charge de la société HC Méditerranée une somme d’un même montant au titre des frais exposés par la société Technologie Alpine Sécurité et non compris dans les dépens pour la même ­procédure ;

Décide

Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 26 août 2010 est annulée.

Article 2 : La demande de la société HC Méditerranée devant le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’ sont rejetées.

Article 3 : La société HC Médi­terranée versera la somme de 4 500 euros à la commune de Bonneval-sur-Arc ainsi qu’à la société Technologie Alpine Sécurité en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice ­administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société technologie sécurité, à la société HC Médi­terrannée et à la Commune de Bonneval-sur-Arc.

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