Jurisprudence

Permis de construire La réforme du permis valant division

Le permis de construire « valant division » est couramment utilisé pour la réalisation de maisons individuelles en l’état futur d’achèvement. Il s’agit d’autoriser l’édification de plusieurs bâtiments, par le même maître d’ouvrage, sur un terrain destiné à être divisé, opération qui diffère du lotissement d’un terrain pour vendre des parcelles à construire, constituant ultérieurement l’assiette des permis de construire. Le décret du 5 janvier 2007 a assoupli, en partie, ce régime juridique sur plusieurs points importants.

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Urbanisme
Conseil d'Etat (CE)Décision du 1999/02/08N°171
Conseil d'Etat (CE)Décision du 1993/10/13N°109237

Le permis de construire « valant division » ou « groupé » de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme permet la réalisation de plusieurs bâtiments, par une même personne physique ou morale, sur un terrain devant ensuite faire l’objet d’une division foncière.

Une telle opération consiste généralement à réaliser un groupe de maisons individuelles d’habitation vendues en l’état futur d’achèvement. Elle se distingue du lotissement car la division se réalise après la délivrance du permis de construire, les bâtiments devant être impérativement édifiés par le même maître d’ouvrage. Au contraire, le lotissement d’un terrain consiste à l’aménager pour le diviser en plusieurs lots qui seront vendus comme « terrains à bâtir », à charge pour chaque acquéreur de solliciter et d’exécuter son permis de construire.

Dossier de demande.Le permis valant division ne diffère du permis « classique » qu’au regard du contenu de son dossier de demande, l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme imposant au pétitionnaire de fournir, en outre, « les documents énumérés à l’article R.315-5 a) et, le cas échéant, à l’article R.315-6 ».

Il s’agit, d’une part, d’une « note exposant l’opération » dans son ensemble et décrivant, en particulier, les dispositions prises pour assurer « les besoins en équipements publics ou privés découlant de l’opération » et, d’autre part, lorsque des équipements communs sont prévus (espaces verts, parc de stationnement, voirie, etc.), les documents constitutifs de l’association syndicale des acquéreurs, « à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l’entretien des terrains et équipements communs ».

L’article R.421-7-1 permet également au pétitionnaire d’un permis valant division (mais il ne s’agit pas d’une obligation) de produire un plan de division pour répartir les droits à construire afférents à l’unité foncière initiale entre les futurs terrains issus de la division.

Quelle que soit la qualification donnée par le pétitionnaire, le permis valant division est nécessaire lorsque l’opération implique la réalisation d’équipements communs aux futurs bâtiments (CAA, Paris, 14 juin 1994, « SCI Cent Picpus », Rec. T. p. 1250) et/ou une division en propriété ou en jouissance de l’unité foncière initiale (CE, 8 février 1999, « Commune de La Clusaz », n° 171 946). A contrario, ne relève pas du champ d’application du permis valant division l’édification de cinq maisons individuelles devant être louées, une telle opération n’entraînant aucune « division » au sens juridique du terme (CAA, Versailles, 8 juin 2006, « M. Maia Dos Santos », n°04VE 03 538).

Suppression du maître d’ouvrageunique.Le permis valant division doit être délivré à (et exécuté par) une même personne physique ou morale. Cette condition résulte de la rédaction de l’article R.421-7-1. Elle a été rappelée avec force par le Conseil d’Etat (4 mai 1983, « Sieur Chapelle », Rec. p. 174), jugeant qu’une opération consistant à édifier plusieurs bâtiments sur un même terrain à diviser, mais pour le compte de propriétaires distincts, ne peut être autorisée par un permis groupé, même si ces propriétaires ont fait appel au même entrepreneur.

L’exigence de l’unicité du maître d’ouvrage est assez curieuse puisque les futures constructions sont toutes prévues par le permis groupé, de sorte qu’il n’existe aucun risque « d’éclatement » de l’opération, l’administration pouvant, en amont, appréhender l’ensemble du projet. Surtout, cette condition obère les opérations immobilières dites « complexes » (1), où plusieurs maîtres d’ouvrage s’entendent pour réaliser différents bâtiments sur un même terrain : c’est le cas, par exemple, d’un bailleur social et d’un promoteur traditionnel dans le cadre d’un programme mixte de logements ; ou encore d’un promoteur et du propriétaire d’un terrain bâti, dans le cadre d’une opération de construction-réhabilitation.

Le nouvel article R.431-24 (qui remplacera l’actuel article R.421-7 au 1er octobre 2007, date d’entrée en vigueur du nouveau Code de l’urbanisme), supprime cette exigence d’un maître d’ouvrage unique. La définition du permis valant division sera simplement la « construction, sur le même terrain, de plusieurs bâtiments dont le terrain d’assiette doit faire l’objet d’une division en propriété ou en jouissance avant l’achèvement de l’ensemble du projet ». Le dossier de demande est également allégé, le constructeur pouvant ne pas constituer une association syndicale libre (ASL) lorsque l’ensemble sera géré par une copropriété horizontale.

Et cet assouplissement se combine avec les dispositions des futurs articles R.423-1 a) et R.431-5 a) prévoyant que la demande de permis de construire peut être sollicitée par plusieurs personnes différentes et même porter sur des terrains distincts. Le Conseil d’Etat a certes déjà admis la cotitularité d’un permis (CE, 28 juillet 1999, « SA HLM Le nouveau logis Centre Limousin », Rec. p. 272), mais en posant des conditions très strictes et inapplicables dans l’hypothèse où la division du terrain était envisagée.

Terrain d’assiette.Une autre difficulté consiste à savoir si le permis valant division doit respecter les règles d’occupation des sols appliquées à l’unité foncière dans son ensemble, ou bien appliquées à chaque parcelle qui sera issue de la division (2).

Il a déjà été jugé que les règles relatives aux espaces libres et aux plantations doivent s’appliquer lot par lot (voir CAA Paris, « Gérard », 24 septembre 1996, n°95PA00504) tout comme les règles de prospect et celles concernant la superficie minimale que doit présenter un terrain pour être constructible (CE, 13 octobre 1993, « SCI MB Promotion », n° 109237 ; 26 octobre 2005, « Commune de Sceaux », n° 265488). Cette dernière jurisprudence réduit les possibilités de construction dans le cadre d’une opération groupée, dès lors qu’elle suppose que l’unité foncière initiale présente autant de fois la superficie minimale requise que le nombre de bâtiments prévus. Et ce, même si le terrain reste soumis au régime de l’indivision puisque le juge assimile la division en jouissance à une division foncière au sens de l’article 5 du POS.

Cette solution a été contestée par la doctrine, au motif que le terrain d’assiette d’un permis groupé constitue une seule et unique assiette foncière, dont la division - sauf exception - est concomitante sinon postérieure aux opérations de construction (contrairement au lotissement). Aussi, la demande de permis devrait-elle être instruite sans tenir compte de l’événement postérieur à sa délivrance que constitue la division du sol. Par exemple, le pétitionnaire n’étant pas tenu de produire un plan de division, on ne voit pas comment les services instructeurs pourraient prétendre contrôler si l’implantation de telle maison par rapport à la limite séparative avec le lot voisin respectera la distance prévue à l’article 7 du PLU, puisque cette limite n’est pas encore connue ou, du moins, précisée.

Ici encore, le décret du 5 janvier 2007 a simplifié les choses. Un nouvel article R.123-10-1 prévoit, pour les lotissements et les permis valant division, que « les règles édictées par le PLU sont appréciées au regard de l’ensemble du projet, sauf si le règlement de ce plan s’y oppose ».

Ce texte est clair : à moins que le PLU ne s’y oppose expressément, l’instruction de la demande de permis groupé devra se faire sans tenir compte des futures divisions (3). Etant donné qu’un plan de division sera exigé par le futur article R.431-24, on espère cependant que la jurisprudence exigeant le respect, lot par lot, des dispositions de l’article 5 du PLU ne survivra pas à la réforme du Code de l’urbanisme.

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