Qu’est-ce qu’une « Fédératrice » de l’offre française du mieux vivre en ville?
Michèle Pappalardo : La ville est une construction complexe qui repose sur plusieurs métiers. Dans le domaine de la ville durable, la France possède des champions dans toutes les filières : eau, air, déchets, construction, transports, efficacité énergétique et sur l'ensemble des métiers : architecture, industries et ingénierie, services urbains mais notre gros défaut c’est de partir à l’international en ordre dispersé. Or, il faut fédérer ces savoir-faire et proposer ainsi une offre mieux intégrée et donc plus optimisée qui répondra d’autant mieux aux besoins. C’est cette démarche qui doit être organisée.
Que mettez-vous derrière la notion de ville durable ?
M.P. : Dans le concept de ville durable à la française, l’humain est au cœur du projet ; c’est la priorité, l’objectif de résultats que nous nous sommes fixés. Ce n'est pas d'abord une ville verte ou une ville "intelligente" mais c'est une ville où la vie des habitants doit être la meilleure possible avec en corollaire la prise en compte des aspects santé, mobilité, mixité sociale, activité économique, etc. La deuxième spécificité, c'est la performance : la ville doit être la plus performante possible, c'est à dire consommer le moins possible de ressources naturelles et d'énergie tout en répondant aux besoins des habitants. Grâce à une qualité supplémentaire qui est l’intégration. La performance sera meilleure si les différentes fonctions de la ville sont intégrées les unes aux autres et pas les unes à côté des autres. Troisième caractéristique nécessaire à la réalisation des deux premières : une bonne gouvernance, à la fois forte et participative, entre élus et citoyens. Enfin, et c'est la quatrième et dernière caractéristique, il s’agit d’une vision plutôt que d’un "modèle ", il faut donc s'adapter au contexte.
D’autres pays ont déjà et depuis longtemps commercialisé leur ville durable à l’étranger. Qu’apporte de plus la France par rapport à eux ?
M.P. : Quand on regarde ce que proposent d’autres modèles, il me semble que notre "vision" est assez différente. D’abord parce que notre concept repose sur l’adaptabilité en prenant en compte tous les aspects comme la géographie, le climat, la culture, l’histoire du pays concerné. Puis, parce que nous intégrons tous les aspects de la ville et proposons ainsi une offre globale qui doit répondre aux besoins des habitants, plutôt que de se concentrer sur les "qualités" de cette ville (verte, smart,...) qui sont des moyens à utiliser pour atteindre notre objectif de "qualité de la vie". Enfin, nos entreprises ont de véritables compétences ; nous apportons un savoir-faire, une créativité, mais aussi un dynamisme ; car à côté des groupes qui ont pignon sur rue et qui sont souvent des leaders dans leur domaine, nombre de PME s’activent. Sur cette base, notre approche est nouvelle. Par ailleurs, nos villes françaises bénéficient à l’étranger d’une bonne image et le génie urbain à la française est reconnu.
Comment abordez-vous l’export ?
M.P. : Nous recherchons des pays qui ont une vraie problématique de la ville et qui sont souvent conscients que leurs expériences passées n’ont pas été à la hauteur de leurs espérances. Ce marché dans le monde est extraordinaire. La direction générale du Trésor a conduit une analyse prospective portant sur 47 pays qui, ensemble, représentent 80% des importations mondiales en 2012 et à l'horizon 2022. Cette étude estime le potentiel de progression du secteur à 50 milliards d'euros d’ici à 2017, et à 100 milliards d'euros d’ici à 2022. Nous nous sommes fixés dans un premier temps deux priorités géographiques : le Maroc et la Chine, où deux accords ont été signés ces dernières années dans ce domaine. Notre approche très humaine et très exigeante est, par ailleurs, bien comprise par les élus, collectivités locales et donneurs d’ordre de ces pays.
Pensez-vous développer des démonstrateurs ?
M.P. : Je ne suis pas sûre que ce soit le bon vocabulaire parce que cela donne le sentiment que ce ne serait pas une "vraie" ville mais il serait intéressant de pouvoir faire la "démonstration" de ce que peut apporter un quartier Vivapolis, notamment en terme de performance de ce qu'apporte l'intégration. Il est possible que nous allions dans cette voie, à l’image de la Suède qui a déjà adopté une démarche fédératrice 'symbiocity" depuis plus de 15 ans avec à l’appui un quartier qui lui sert de démonstrateur à Stockholm. En tout cas, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, le 27 septembre en clôture du sommet mondial des villes durables, Ecocity, à Nantes, a indiqué qu'une telle démarche était intéressante. L’Afep (Association française des entreprises privées) est également demandeuse car derrière un démonstrateur, il y a des questions à se poser techniques, bien entendu mais aussi juridiques ou sur le modèle économique à organiser.
Vous venez de lancer Vivapolis, la marque France de la « ville durable » à l’international, quelle est la prochaine étape ?
M.P. : C’est sous cette marque que se fédèrent les acteurs de la ville durable pour partir à la conquête des marchés étrangers. Elle s’accompagne d’un site internet vivapolis.fr porté par Ubifrance qui recense les entreprises françaises, leurs références et des exemples de réalisations. Ce lancement est une étape importante car autour de la marque se crée une véritable dynamique. Maintenant, il reste à la faire vivre et à l’animer... et à avoir des résultats à l'export.