Par une ordonnance rendue le 31 mai 2007, le tribunal administratif de Marseille a annulé la procédure de passation d’un marché passé sous forme d’appel d’offres ouvert, au motif que l’avis de pré-information ne comportait pas toutes les informations devant figurer dans l’avis d’appel public à la concurrence conformément à l’article 57 du Code des marchés publics. Cette ordonnance est définitive, le Conseil d’Etat ayant rejeté le pourvoi par un arrêt du 3 octobre 2007 (n° 306561). En l’espèce, la société Dell demandait au TA d’annuler la procédure passée par le conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca) portant sur la fourniture et l’installation de postes de travail et de périphériques dans les lycées publics de la région.
Le conseil régional, qui avait opté pour la procédure d’appel d’offres ouvert, avait fait valoir l’avis de pré-information afin de réduire les délais de réception des offres en dessous de 52 jours.
Moyens nouveaux à l’audience
La possibilité pour le requérant de produire un moyen nouveau à l’audience de référé sans méconnaître pour autant le respect du contradictoire posait de sérieux problèmes en termes d’égalité des armes pour la collectivité publique. Le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 11 mai 2007 (« Région Guadeloupe », n° 298863), a validé une annulation de procédure fondée sur un moyen nouveau soulevé à la barre en considérant que le principe du contradictoire avait été respecté puisque la région avait pu avoir connaissance à l’audience dudit moyen nouveau. Si un tel mécanisme est juridiquement justifiable (les exigences du caractère contradictoire doivent nécessairement être adaptées au caractère d’urgence du référé précontractuel), on entrevoit l’importance stratégique d’un tel état des faits, notamment pour le requérant à qui il suffit d’invoquer un nouveau moyen de nature à emporter la conviction du juge.
On peut donc saluer la solution mise en œuvre par le juge des référés de Marseille. Ce dernier s’est a priori fondé sur l’ (CJA) applicable aux référés pour différer l’instruction au-delà de l’audience publique et prendre en considération un moyen nouveau. Pour le respect du contradictoire, la généralisation de cette pratique serait souhaitable dans la mesure où elle n’est pas en contradiction avec un jugement du référé dans le délai prévu par l’ de 20jours à compter de l’injonction de différer la signature du marché. Dans cette perspective, on objectera qu’il eut été préférable de poursuivre l’instruction pour la seule réponse au moyen développé par le requérant pendant l’audience.
Une mesure de publicité « bis »
Le juge des référés constate que le délai de réception fixé dans l’avis d’appel public à concurrence était inférieur à 52jours (en l’espèce 23jours). Pour autant, la collectivité avait fait passer un avis de pré-information en janvier 2007 sur ce marché. Le tribunal en conclut que la collectivité a entendu se servir de l’article57 du CMP afin de réduire le délai de réception des offres. Cependant, il rappelle que, pour que l’avis de pré-information emporte réduction des délais, les conditions de l’article57 du Code doivent être réunies et, en particulier, la condition selon laquelle l’avis de pré-information doit comporter l’ensemble des éléments contenus dans l’avis d’appel public à concurrence. En l’espèce, le juge a considéré qu’il manquait les modalités de financement, les garanties techniques et financières exigées des candidats, les critères d’attribution du marché ainsi que la langue dans laquelle les offres devaient être rédigées.
Deux observations à l’attention des autorités adjudicatrices qui entendraient se prévaloir du délai réduit de l’article57 du Code des marchés publics :
Dans la mesure où l’appel d’offres ouvert est utilisé dans le but de réduire les délais de réception des offres conformément à l’article57 du Code, l’avis de pré-information doit absolument être considéré comme une mesure de publicité « bis » et contenir de ce fait l’ensemble des éléments contenus dans un avis d’appel public. Par souci de cohérence, il est plus prudent de se calquer sur le modèle d’avis d’appel public communautaire issu du règlement (CE) n° 1564/2005 de la Commission du 7 septembre 2005 établissant les formulaires standard pour la publication d’avis dans le cadre des procédures de passation de marchés publics et des mentions qu’il contient. Afin de pallier l’absence de rubriques afférentes dans le modèle d’avis de pré-information, issu du règlement n° 1564/2005 du 7 septembre 2005, il conviendra de se servir des rubriques « informations complémentaires » pour remplir ces obligations.
Le juge des référés considère que, concernant les mentions dont elle n’avait pas connaissance au moment de l’avis de pré-information, l’autorité adjudicatrice doit en justifier les raisons. Il est donc clairement recommandé à la collectivité publique qui voudrait se servir de l’article57 du CMP de mettre, dans l’avis de pré-information, l’ensemble des éléments de publicité sur le futur marché dont elle a connaissance au moment de l’avis.
Seules les mentions dont la collectivité ne pourrait avoir connaissance du fait d’une insuffisance de détermination de ses besoins (par exemple, les modalités essentielles de financement ou les critères d’attribution), pourraient être exclues de cette obligation, et seulement si elle peut justifier cette absence notamment par la spécificité et l’originalité du marché, ce qui exclut de facto des marchés passés habituellement par la collectivité.