Courant juillet, Cari Aquitaine saisit le tribunal de commerce en raison d’importantes modifications apportées par Clairsienne sur le permis de construire initial de Lumi, opération de logements, bureaux — dont le siège social du bailleur —, crèche et résidence intergénérationnelle.
Une démarche qui entraîne la mise en place d’une médiation et une suspension du chantier de deux mois, repoussée jusqu’à fin octobre.
« Après avoir réalisé 30 % des travaux, soit 15 millions d’euros, nous avons constaté que nous ne pouvions pas les reprendre en raison de carences et d’incohérences dans les documents de conception et de modifications majeures postérieures au démarrage des travaux, qui impactent notamment la sécurité incendie », indique Eric Ferrari, président de Fayat Bâtiment.
Une ordonnance de la cour d’appel de Bordeaux du 1er octobre confirme la suspension des travaux jusqu’à la délivrance du permis de construire modificatif : « L’étude des pièces jointes aux dossiers ne permet pas de démontrer que les ordres de service pouvaient se substituer aux documents réclamés par la société Fayat à la société Clairsienne. Pour ce qui est du permis de construire modificatif, il a été établi (…) qu’il est un préalable obligatoire à la poursuite des travaux. », stipule-t-elle.
Fayat Bâtiment estime même qu’un troisième permis de construire modificatif pourrait être nécessaire.
Dialogue de sourds
Mais Daniel Palmaro, directeur général de Clairsienne n’en démord pas : les travaux auraient dû reprendre début novembre. Il se dit dans l’incompréhension face aux arguments de Fayat concernant les modifications demandées et le surcoût généré, 5 à 6 millions d’euros, comme évoqué dans la presse locale.
Réponse de Fayat : « Ce n’est pas un problème financier, assène Eric Ferrari, mais un flou réglementaire et contractuel. » Fayat Bâtiment dément d’ailleurs se retirer du chantier. « Nous avons réduit les coûts de mobilisation en diminuant les frais de location extérieure », précise-t-il.
L’entreprise dit attendre l’obtention du permis de construire modificatif et le rapport de l’expert appointé le 25 novembre, mais s’inquiète face au délai… « On n’attendra pas un an », prévient Eric Ferrari.
« Les modifications restent mineures, elles concernent un quart des bureaux et, quoi qu’il en soit, il est possible de réaliser le permis de construire initial. Depuis la fin octobre, il n’y a aucune raison juridique de suspendre le chantier. Quelle est l’opération sur laquelle il n’y a pas de modifications ? Heureusement qu’on ne les arrête pas toutes ! », estime de son côté le directeur de Clairsienne qui soupçonne le constructeur d’avoir « organisé la situation actuelle par une « sous-estimation du marché », tactique courante dans le BTP », comme cela a été évoqué lors de l’audience du 19 juillet au tribunal de commerce de Bordeaux.
« La reprise du chantier pour mener à bien la réalisation des logements ne devrait pas poser de problème, estime Daniel Palmaro et il est faux de dire qu’il n’y a pas de permis de construire ! », ajoute-t-il en référence à des propos tenus par le constructeur dans Sud Ouest.
Un permis modificatif correspondant aux nouvelles demandes du bailleur sur les bureaux a été déposé le 5 août dernier. La première préoccupation de Clairsienne reste la réalisation d’accès communs aux immeubles voisins.
Fayat Bâtiment dit partager les mêmes priorités, mais ne souhaite pas prendre de risque. « Nous avons un contrat global et forfaitaire, souligne Eric Ferrari, nous n’avons pas prévu de travailler à la petite cuillère. »
La situation est donc bloquée et un retard de la livraison, initialement prévue au deuxième trimestre 2020, est désormais plus que probable.