Mickaël Nogal (LREM, Haute-Garonne) en était le rapporteur, et Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement, représentait le gouvernement lors des débats.
Inscrire les nouveaux critères du DPE
La séance s'est ouverte, ce dimanche, par l'examen de l'article 39, visant à donner "une assise législative" aux étiquettes du DPE, celles-ci ayant vocation à devenir des "références pour les différentes dispositions fixées dans la loi". Cet article constitue un premier pas vers "la refonte et la fiabilisation en cours du DPE", alors que la consultation publique sur la nouvelle formule du DPE a pris fin ce 15 mars. Pour mémoire, le nouveau DPE et son opposabilité entreront en vigueur le 1er juillet 2021.
Pour tenir compte des doubles seuils de performance énergétique et d'émission de gaz à effet de serre prévus par le nouveau DPE, le niveau de performance sera "exprimé en kWh d'énergie primaire par mètre carré et par an, s'agissant de la consommation et en kilogramme de dioxyde par mètre carré et par an, s'agissant des émissions de gaz à effet de serre induites", précise l'amendement n° 3394 déposé par la députée de l'Orne Chantal Jourdan pour le groupe Socialistes et apparentés. "Au regard des débats antérieurs, il nous paraît essentiel que la notion d'énergie primaire soit ainsi sanctuarisée", fait-elle valoir.
Le terme "performance énergétique et climatique" a par ailleurs été réécrit par le rapporteur du titre "Se loger", Mickaël Nogal, de manière à remplacer "climatique" par "performance en matière d'émission en gaz à effet de serre" (amendement n° 5166). Le député de Haute-Garonne a également suggéré de nouveaux intitulés pour les appellations des étiquettes énergétiques (amendement n° 5167), qui concerneront les bâtiments "extrêmement performants" (classe A) jusqu'à ceux "extrêmement peu performants" (classe G).
Gain de deux classes
Après l'article 39, sont insérées plusieurs dispositions portées pour une grande partie par Mickaël Nogal. Il apporte une modification de l'article L. 126-26 du Code de la construction et de l'habitation (CCH) pour prendre en considération la réforme du DPE à venir, en ajoutant les mentions "performance en matière d'émission de gaz à effet de serre". Il inscrit par ailleurs "une obligation d'information sur la ventilation et l'aération dans le cadre du diagnostic de performance énergétique". Un amendement dans le même esprit a été déposé par la députée (LREM, Bouches-du-Rhône) Claire Pitollat en vue d'intégrer une évaluation de la qualité de l'air intérieur dans le DPE (n° 1548).
Mickaël Nogal apporte aussi, via l'amendement n° 5360, une définition de la "rénovation performante", laquelle sera conditionnée à deux critères cumulatifs : un niveau minimal de performance correspondant à une étiquette C, ainsi qu'un "gain minimal d'au moins deux classes du DPE". Le gain d'une seule classe sera envisageable, mais uniquement "dans le cas de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales, ou de coût manifestement disproportionnés par rapport à la valeur du bien".
Données sur la rénovation
Soulignant "l'absence de données fiables" sur la rénovation, les députés Vincent Descoeurs (LR, Cantal) et Marjolaine Meynier-Millefert (LREM, Isère) obtiennent (amendements n° 185 et n° 4795) que le gouvernement publie "tous les deux ans un document contenant toutes données relatives à la rénovation énergétique", avec "des chiffres précis" sur le volume de rénovations partielles et globales.
L'article 40 consiste à adapter les obligations d'audit énergétique et DPE aux "bâtiments résidentiels en monopropriété dont la consommation énergétique est excessive (classes F et G), à l'occasion des transactions immobilières". Il procède également à une réécriture des obligations de production du DPE dans les immeubles résidentiels collectifs, afin de tenir compte du plan pluriannuel de travaux instauré plus loin dans le projet de loi par l'article 44. Il prévoit enfin le report des mesures du projet de loi dans les territoires ultramarins, de même que l'entrée en vigueur du nouveau DPE opposable.
Cet article a été amendé par Mickaël Nogal afin de compléter l'objet de l'audit énergétique, qui devra préconiser "un parcours de travaux cohérent par étapes pour atteindre une rénovation performante" (amendement n° 5381). Ce parcours vise l'atteinte d'une étiquette E a minima, mais proposera aussi les travaux nécessaires pour atteindre la classe B.
Travaux à l'initiative du locataire
Un an après la promulgation de la future loi Climat et Résilience, les loyers des logements de classe F ou G ne pourront plus être revalorisés lors d'une relocation ou d'un renouvellement du bail, comme le prévoit l'article 41 qui n'a fait l'objet que d'amendements rédactionnels ou de coordination.
L'article 42 procède à un revirement dans la définition de la performance énergétique minimale pour qualifier la décence du logement. Il ne sera plus question de calculer le niveau de performance en énergie finale, mais en fonction des nouveaux seuils du DPE en énergie primaire. À compter du 1er janvier 2028, ce seuil minimal sera aligné sur celui de la classe E.
Après cet article, deux amendements identiques de Vincent Descoeurs et Marjolaine Meynier-Millefert (n°189 et n°4826) tendent à simplifier la réalisation de travaux de rénovation énergétique pour les locataires, en modifiant l'article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989. "Pour accompagner cette démarche, une modulation à la baisse du loyer pourrait être exigée comme contrepartie, ou un renouvellement du bail pour assurer un maintien dans les lieux sur une plus longue période", lit-on dans les exposés sommaires.
Service public de la performance énergétique
L'article 43 a vocation à "clarifier l'organisation du service public de la performance énergétique de l'habitat" en proposant "un accompagnement uniformisé" sur le territoire, "tout en permettant aux collectivités territoriales d'adapter l'offre de service aux besoins de leur territoire". L'objet du service public est élargi par un amendement (n°2714) de la députée (Agir ensemble) de Seine-et-Marne, Patricia Lemoine, pour qu'il puisse aussi "encourager les rénovations performantes". La députée a fait adopter un autre amendement inspiré des propositions de l'ADCF (amendement n°2711) consistant à articuler le service public avec "les stratégies politiques locales et les documents réglementaires en vigueur comme les PLH et les plans climat air énergie territoriaux (PCAET)".
Un amendement de la députée (LREM) de l'Isère Emilie Chalas (n°2155) tend à préciser que les missions des guichets du service public intégreront la "centralisation des aides à la rénovation, tant nationales que locales".
Ce service public de la performance énergétique pourra être proposé au sein des Maisons France services, comme le prévoit l'amendement n°4725 de la députée (LREM) du Doubs, Fannette Charvier. Mickaël Nogal y adjoint un sous-amendement précisant que ces maisons peuvent "garantir un premier niveau d'information et renvoyer ensuite vers les acteurs spécialisés". Pourront également bénéficier de ce guichet, avec les propriétaires et locataires, les "syndicats de copropriétaires et (...) leurs représentants", comme le prévoit l'amendement n°5361, déposé par le rapporteur du titre. Lequel a inscrit la possibilité de missions d'accompagnement "de façon itinérante" au travers d'interventions au domicile (amendement n°5195).
Plan pluriannuel de travaux
Retoqué dans d'autres textes législatifs ou réglementaires, le plan pluriannuel de travaux fait son retour à l'article 44 du projet de loi climat qui tend ainsi à préciser le contenu de ce programme de travaux à destination des copropriétés de plus de 15 ans. Par son amendement n°256, la députée Claire Pitollat suggère de compléter le plan pluriannuel par "un objectif minimum d'amélioration de la performance énergétique du bâtiment que les travaux d'économie d'énergie doivent permettre d'atteindre". Cet objectif doit reposer sur "une estimation du niveau de performance énergétique" à atteindre, précise le sous-amendement n°5418 de Mickaël Nogal.
Le rapporteur du titre "Se loger" a par ailleurs fait adopter un amendement (n°5331) à la suite de l'article 44, pour "faciliter l'isolation thermique des immeubles par l'extérieur" pour les bâtiments construits en limite de propriété. Il institue un "droit de surplomb" qui permet, dans le cadre d'une isolation par l'extérieur, d'empiéter "d'au maximum 50 cm sur la propriété voisine".
Pas d'ordonnance pour le DPE
L'article 45 autorise le gouvernement à légiférer par ordonnance en vue d'harmoniser "toute référence à un niveau de performance énergétique d'un bâtiment ou partie de bâtiment" dans le CCH et le Code de l'énergie principalement. Plutôt que d'habiliter le gouvernement, Mickaël Nogal via son amendement n° 5209 inscrit "en dur" dans plusieurs textes législatifs les dispositions permettant "d'assurer les coordinations juridiques nécessaires dans le droit tirant les conclusions de la création d'une assise législative de l'échelle de référence du DPE". L'habilitation du gouvernement est donc supprimée.
Le gouvernement dispose toujours, cependant, d'une habilitation à légiférer par ordonnance pour "réformer le régime de police administrative de contrôle des règles de construction", et fixer le champ d'application et les conditions de délivrance des attestations relatives au respect des règles de construction. Un amendement (n°5362) du co-rapporteur a toutefois réduit la période d'habilitation de 18 à 12 mois.
Tertiaire
Après l'article 45, le député (LREM) du Bas-Rhin Vincent Thiébaut (amendement n° 4724) modifie le périmètre d'assujettissement prévu par l'article L. 174-1 du CCH à l'obligation de réduction des consommations énergétiques des bâtiments tertiaires. Seuls les bâtiments existant au 23 novembre 2018 y sont contraints, excluant de fait les bâtiments sortis de terre a posteriori. L'amendement a ainsi pour objet de corriger cette "inégalité de traitement" en incluant "les bâtiments les plus récents pour lesquels des efforts peuvent être à produire sur les process". L'amendement précise également que "la remontée des consommations énergétiques des assujettis" aura lieu chaque année.
Enfin le gouvernement, via l'amendement n°3913, procède à la ratification de l'ordonnance n° 2020-71 du 29 janvier 2020 portant sur la réécriture des règles de construction et la recodification du livre Ier du CCH (dite Essoc 2).