Installer des canalisations nécessaires aux services publics ou aux activités économiques en zone préservée du littoral est légal et ne porte pas atteinte au principe de non régression de la protection de l’environnement. Ainsi, en ont décidé les sages du Palais Royal le 10 juillet 2020.
Rappelons que construire dans les espaces remarquables du littoral (dunes et landes côtières, plages et lidos, forêts et zones boisées côtières, etc.) est interdit. Sauf pour certains types d’aménagements « légers » - listés de manière limitative à l’article R. 121-5 du Code de l’urbanisme (cheminements piétonniers et cyclables et sentes équestres ni cimentés, ni bitumés, postes d’observation de la faune, aires de stationnement, etc.). A condition toutefois que ces aménagements soient nécessaires à la gestion, la mise en valeur notamment économique de ces sites ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. Et qu'ils ne portent pas atteinte au caractère remarquable dudit site (art. L. 121-24 du Code de l’urbanisme).
Nouvelle catégorie d'aménagements
Un décret du 21 mai 2019, d’application de la loi Elan, a ajouté à la liste originelle de l’article R. 121-5 de nouvelles catégories d’aménagements pouvant être implantés et notamment : « Les canalisations nécessaires aux services publics ou aux activités économiques, dès lors qu'elles sont enfouies et qu'elles laissent le site dans son état naturel après enfouissement, et que l'emprise au sol des aménagements réalisés n'excède pas cinq mètres carrés ». Et « à condition que leur localisation dans ces espaces corresponde à des nécessités techniques ».
Une association contestait cet ajout estimant, entre autres, que cette disposition méconnaissait le principe législatif de non régression de protection de l’environnement. Principe selon lequel « la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment » (art. L. 110-1 II 9° du Code de l'environnement).
Dérogation à l’interdiction, mais protection de l’environnement garantie
Le Conseil d’Etat rejette la requête et estime que le législateur a certes entendu déroger, par une réglementation spécifique, à l’interdiction de construction dans les espaces remarquables du littoral, mais qu’il a en même temps posé « les conditions dans lesquelles des aménagements légers peuvent être implantés ». Lesquelles garantissent la protection de l’environnement : pas d’atteinte au caractère remarquable du site, enquête publique préalable, avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, et retour du site à l'état naturel.
La méconnaissance des dispositions générales l'article L. 110-1 du Code de l'environnement posant le principe de non-régression de la protection de l'environnement ne peut donc être invoquée contre le décret du 21 mai 2019.
CE, 10 juillet 2020, n° 432944, mentionné aux tables du recueil Lebon
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