Le compte est rond. Le 26 juin, l’établissement public Paris La Défense a dévoilé une charte en 10 points pour accompagner la transformation du bâti existant du quartier d’affaires et en particulier de ses fameux gratte-ciel qui se dressent à l’ouest de Paris.
Après une année de réflexions et de rencontres organisées dans le cadre d’«Etats généraux de la transformation des tours», ces mesures concrètes doivent participer au plan de décarbonation du secteur.
En effet, en 2021, Paris La Défense s’est fixé comme objectif de devenir « le premier quartier d’affaire post-carbone de dimension mondiale». Si cette ambition oblige à agir tous azimuts, intervenir sur le bâti sera incontournable. A La Défense, la construction représente 1/3 de l’empreinte carbone et 15% proviennent du seul fonctionnement des bâtiments.
Traiter la masse de l'existant
Côté constructions futures, le quartier avait déjà lancé «Empreintes», un appel pour des projets particulièrement performants en la matière. Il restait à s’attaquer à la masse de l’existant. «Dans la mesure où l’on considère qu'en France, 80% des bâtiments de 2050 sont déjà là, l’enjeu essentiel est dans la rénovation», souligne Céline Crestin, directrice de la Stratégie et du Développement Responsable de l’établissement public Paris la Défense.
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La panoplie des mesures retenues (voir ci-dessous) doit à la fois servir de levier pour engager des chantiers particulièrement vertueux et permettre d’optimiser l’utilisation du patrimoine bâti. Et de créer une culture partagée de la décarbonation.
Instaurer une règle de calcul
Ainsi le premier point de cette stratégie concerne l’établissement d’un «outil commun de calcul d’empreinte carbone».
Une proposition soutenue par des concepteurs et des bureaux d’études. «C’est un peu pour comme pour les DPE… selon le diagnostiqueur auquel on fait appel, les résultats ne sont jamais exprimés de la même manière, explique Céline Crestin. La Défense a donc besoin d’établir une règle de calcul reconnue par tous afin que des comparaisons puissent être établies. Pour les propriétaires et les investisseurs, cet outil sera une aide à la décision, depuis les scénarios d’évolution de leur patrimoine jusqu’au choix des matériaux à mettre en œuvre.»
Améliorer le taux d’occupation, aussi bien dans le temps que dans l’espace, des locaux existants est aussi une piste sérieuse. Plutôt que d’occuper une tour, en moyenne, seulement huit heures par jour ou de sous-utiliser les mètres-carrés notamment dans de grands halls un peu vides, il s’agit d’imaginer de nouveaux types d’usages.
Naissance du Campus La Défense
La charte cible notamment le secteur de l’enseignement supérieur. «Nombre d’écoles se sont installées dans le quartier ces dernières années, au point que la population étudiante représente aujourd’hui 70 000 personnes. Mais certaines aménités, comme des bibliothèques ou des équipements sportifs, leur font aujourd’hui défaut», a pu constater Céline Crestin. La création d’un «Campus la Défense» devrait donc permettre à tous les établissements de travailler ensemble à satisfaire ces besoins.
Enfin, La Défense entend inciter à l’expérimentation, par exemple en usant des dispositions du «permis d’innover» mis en place dans le cadre de la loi Elan. L’établissement public souhaite pousser les opérateurs à penser les projets de rénovation sur le très long terme en leur amenant à déposer des demande de permis «multidestination».
Modèle pour d'autres territoires
Cependant une charte ne vaut que si elle est signée. Et en tant qu'établissement public, le pouvoir de Paris La Défense s'arrête au pied des tours. Mais «nos propositions ont été bien accueillies», juge Céline Crestin qui cite les partenaires qui se sont déjà engagés, parmi lesquels les investisseurs et développeurs immobiliers Redman, Icade, Unibail-Rodamco-Westfield et Groupama.
Un dernier bénéfice de cette liste d’engagements serait qu’elle dépasse les limites de La Défense. «Evidemment, cette charte a été pensée pour notre périmètre, conclut la directrice de la stratégie. Mais notre travail sur certains sujets comme la fiscalité ou le permis d’innover et les tests que nous effectuerons pourront servir à d’autres territoires.»
Dix engagements pour la transformation des tours
Pour favoriser la rénovation bas carbone :
1) Créer le premier outil commun de calcul d’empreinte carbone à l’échelle de La Défense.
2) Planifier le développement et la décarbonation des réseaux de chaleur et de froid du territoire.
3) Faire entrer les opérations de restructuration à La Défense dans les critères des
Green Bonds.
4) Adapter la fiscalité immobilière pour avantager les opérations de rénovation bas carbone.
Pour encourager les nouveaux usages :
5) Ouvrir au public et exploiter les socles et les étages élevés des tours.
6) Créer un «Campus Paris La Défense», pour fédérer les acteurs de l’enseignement supérieur du territoire.
7) Mettre en place un permis multidestination pour toutes les opérations de restructuration.
8) Rapprocher réglementations environnementale et incendie dans le cadre de la restructuration des IGH.
9) Rendre possible l’accès à des disponibilités foncières pour des opérations de rénovation particulièrement ambitieuses.
10) Créer un fonds de dotation réunissant investisseurs et entreprises pour financer des actions de dynamisation du territoire.