Les promoteurs continuent de réduire la voilure

La légère progression des ventes de logements en promotion au premier trimestre 2014 ne peut cacher la gravité de la situation : malgré les besoins, le marché reste atone. Les promoteurs se sont mis en situation de produire durablement moins de 70 000 logements par an.

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Logements collectifs en construction

Les promoteurs ont vu leurs ventes de logements au détail progresser de 3% au 1er trimestre (17 339 unités). Ce léger rebond n’est toutefois pas général. Il ne concerne pas, par exemple, l’Ile-de-France où les réservations nettes reculent de 11%). Si l'on décompose par typologie de clientèle, on observe que les investisseurs progressent de 22% mais ne représentent plus que 37% des ventes du trimestre. Un bond qui paraît important mais qui se réfère à un 1er trimestre 2013 très mauvais (transition entre les dispositifs « Scellier » et « Duflot », lequel n’a été stabilisé que fin 2013). « Ce regain d’intérêt reste toutefois à confirmer car le message de la loi Alur sur l’encadrement des loyers n’est pas bon du tout», prévient François Payelle, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI).

En revanche, les ventes en accession marquent le pas (?5,7% par rapport au 1er trimestre 2013) et ce pour la 1ère fois depuis le milieu d’année 2012 et malgré des taux toujours très favorables. La FPI relève que, si les banques affirment ne pas fermer le robinet du crédit, le taux de désistement chez les promoteurs est passé de 10 à 20% depuis l’automne dernier en raison du durcissement des conditions de crédit (apport personnel et durée des prêts).

Les ventes en bloc (essentiellement aux bailleurs sociaux), qui représentent 19% des ventes du 1er trimestre et viennent s’ajouter aux ventes au détail, ne prennent pas le relais puisqu’elles ont reculé de 5,4%. Pas de quoi pavoiser donc, selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), car le volume total des ventes reste à un niveau historiquement bas (-10 000 logements ou -36% par rapport au 1er trimestre 2010).

Toujours moins de logements mis sur le marché

Plus inquiétant est la « chute inexorable des mises en ventes », particulièrement depuis début 2012. 17 704 logements ont ainsi été commercialisés au 1er trimestre (-17,2% sur un an mais -38% par rapport au 1er trimestre 2010 où 28 577 unités avaient été commercialisées), soit à peu près autant que le volume des ventes. Les autorisations de construirechutent, elles aussi, de 25% sur les trois premiers mois de l’année. « L’offre ne se renouvelle quasiment plus. Nous avons de plus en plus de mal à faire sortir des opérations à un prix en phase avec le pouvoir d’achat des ménages et les délais de montage s’allongent du fait de la complexité administrative et de réglementations qui changent constamment », indique François Payelle, qui ne voit pas dans l’immédiat de facteur d’accélération des délais.

Dans ce contexte, l’offre commerciale (stock) recule progressivementavec 85 360 logements disponibles à fin mars, soit 13,5 mois de ventes. Un chiffre qui n’alarme pas la profession dans la mesure où il reste inférieur à la durée d’un chantier (14-16 mois). Le stock achevé ou en chantier représente environ 57% de l’offre. « On peut parler de marché en panne. Depuis le deuxième trimestre 2012, les promoteurs se sont progressivement adaptés à un marché qui se fossilise. Ce qui n’est pas mis sur le marché aujourd’hui ne sera pas construit l’an prochain.  En aval, ce sont les entreprises du bâtiment qui vont souffrir».», insiste-t-il.

La diminution de l’offre ne fait pas pour autant baisser les prix (-1,3% sur un an en distinguant +0,6% en province sur un an et -1% en Ile-de-France). La FPI explique cette stabilité depuis mi?2012 par la contraction de l’offre disponible et toujours l’incompressibilité des coûts de production (foncier et chantier).

Les remèdes sont connus

Dans un contexte économique toujours très difficile, « la volonté politique de construction affichée au niveau national ne se traduit pas sur le terrain, à l’échelle locale », regrettent les promoteurs qui sont très inquiets de l’attentisme qui continue dans les municipalités qui ont connu l'alternance, après la période "blanche" qui a précédé les élections de mars. Ils appellent donc les nouveaux élus à reprendre les choses en main au plus vite.

Au niveau national, la profession demande au nouveau gouvernement d’avancer sur un certain nombre de dossiers : confirmer la stabilisation du dispositif Duflot pour trois ans ; achever le travail sur les coûts de construction (un comité de suivi doit être installé le 16 mai par Sylvia Pinel) ; relancer la primo-accession ; et adapter le régime de taxation des plus-values de cession sur les terrains constructibles. Sur ce point, la fédération concède que cela va un peu à l’encontre de la doctrine budgétaire en France mais avance des chiffres : une éxonération de plus-value de 50% pendant trois ans coûterait 460 millions d’euros mais permettrait de mettre du foncier sur le marché pour produire 25 000 logements, engendrant 3 milliards de recettes de TVA et au moins autant d’économies de transferts sociaux grâce aux emplois créés.

A moyen terme, la FPI appelle aussi à aller plus loin en matière de simplification administrative, de façon à libérer les énergies de tous les acteurs au niveau local pour construire plus. « Il faut que tout le monde apprenne à fonctionner dans l’économie de rareté qui est la nôtre aujourd’hui en utilisant tous les leviers possibles», plaide François Payelle.

Pas plus de 70 000 logements vendus en 2014

La profession estime avoir lancé 25 000 logements de moins sur deux ans et contribué à la perte de 50 000 emplois. «Il y a urgence à agir. La machine est grippée et nous ne voyons aucun signal d’amélioration pour le deuxième trimestre », avance le président de la FPI. Par conséquent, les promoteurs vendront probablement 65 à 70 000 logements cette année (contre 75 120 unités vendues en 2013 et 110 473 en 2010).

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