Dans l'univers des produits de la construction, l'aménagement extérieur est un segment un peu à part. Avant tout parce qu'il est éclaté. Il n'existe pas un, mais plusieurs marchés, délimités en fonction des différents espaces du jardin (la clôture et le portail, le revêtement de terrasse et de sols extérieurs ou encore les allées) et des matières (le bois, le béton, la pierre naturelle et autres agrégats).
Cette multiplicité a pour conséquence de fragmenter la distribution. « Le secteur est très atomisé, explique Hervé Vanhems, codirigeant de l'enseigne Solumat, avec la présence de la grande distribution de bricolage (comme Leroy Merlin et Castorama), des négoces généralistes (à l'image de Point. P Matériaux de Construction ou de Réseau Pro) ou des spécialistes indépendants de petite taille, souvent monoproduit. » À ces circuits, il convient d'ajouter l'émergence, depuis quelques années, des réseaux de franchise comme les agences Daniel Moquet (qui traitent de l'aménagement des allées et des cours chez les particuliers), Lippi (spécialisé dans la fabrication et la vente de clôture, de portails et de grillages) ou encore Kei Stone (vente de pierre naturelle). Ce morcellement est accentué par la cible de clients visée : particuliers, professionnels (paysagistes, entreprises générales du bâtiment, maçons, carreleurs…), ou les deux.
À ce stade, deux premières observations s'imposent. Primo, il est difficile d'obtenir des statistiques pour définir la part de marché de chaque circuit de distribution. Secundo, aucune enseigne ne domine vraiment le marché.
Une famille importante pour le négoce. Néanmoins, en raisonnant en termes de grands équilibres, et d'après les fabricants de produits béton, les négoces de matériaux de construction sont archileaders sur le marché. Aujourd'hui, environ 3 000 points de vente proposent des produits d'aménagement extérieur. « C'est devenu une famille importante pour nous. À l'origine, elle est venue enrichir naturellement notre plan de vente à travers des partenaires industriels bien souvent issus du gros œuvre », affirme Charles Lacassagne, category manager bois-panneaux et aménagement extérieur pour les enseignes Gedimat et Gedibois. L'épaisseur des catalogues des enseignes multispécialistes en témoignent : 149 pages pour l'édition 2019 de VM, 132 pour celle de Gedimat, 116 pour celle de Samse. Chez Point.P Matériaux de Construction, l'édition 2018 comptait près de 140 pages, quand celle de Chausson Matériaux en affichait 104.
L'offre de produits se concentre sur les revêtements de sol, le dallage, le platelage (terrasse…), les pavés et autres céramiques), la clôture de l'ouvrage (pilier, portail, grillage, écran bois, aluminium ou acier), les parements de murs… Mais, pour faire face à la crise, certains négoces ont dû réduire l'espace consacré à l'aménagement extérieur, notamment en diminuant à la fois les plans de vente et de stocks.
16,6 millions de ménages possèdent un jardin, d'une surface moyenne de 690 m2 45 % des ménages se lancent dans les travaux d'aménagement extérieur suite à l'achat récent d'une maison Source : TNS Sofres pour France Agri Mer et Val'hor 2015 et Houzz, 2017
Les GSB en embuscade. Les grandes surfaces de bricolage (GSB) ont adopté une stratégie bien différente. Le jardin et l'aménagement extérieur sont un marché historique pour Castorama, explique Virginie Desumeur, directrice du marché bâti-jardin de l'enseigne de bricolage. « Nous n'avons pas les gammes les plus profondes, mais nous proposons une offre singulière , qui couvre tous les besoins des clients et structurée autour de quatre univers : l'aménagement du jardin, qui comprend la terrasse, le dallage, la clôture, le portail, la porte de garage ; l'entretien du jardin, avec l'outillage, à main ou électroportatif, l'arrosage… ; la culture du jardin, avec les végétaux, les pots… ; enfin, le plein-air et l'agrément avec le mobilier de jardin, barbecue, piscine… »
À l'instar de la filiale du groupe Kingfisher, les enseignes de bricolage font preuve d'un réel dynamisme. Ainsi, le rayon jardin avait progressé de 2,5 % en 2017 par rapport à 2016, pour représenter en moyenne 12 % de son activité - soit un chiffre d'affaires de 2,4 Md€ sur les 19,9 Md€ réalisés cette année-là par les enseignes de bricolage.
Merchandising du rayon.
D'après un observateur avisé de l'économie de l'aménage ment extérieur, « pour les enseignes de bricolage, se positionner sur ce marché est important, parce que c'est le moyen de vendre du mobilier et des outils de jardin, des barbecues, de l'éclairage et des abris, des piscines… Elles vont même jusqu'à proposer, dans certains magasins, de mettre en contact les particuliers avec des paysagistes et des artisans pour la pose ».
Ce point de vue était partagé par Jean-Éric Riche, président d'Unibal (devenu depuis Inoha - Les Industriels du nouvel habitat), lors de la présentation de l'étude annuelle sur le marché du bricolage au mois de mai 2018 : « Ces enseignes ont accompli un important travail sur la profondeur et la lisibilité des rayons consacrés à l'aménagement extérieur ces dernières années ». Et ce n'est pas terminé. Aux négoces généralistes de trouver les réponses adéquates, au risque de subir toujours plus fortement cette concurrence frontale.
