Sommaire
Discours d’ouverture 4
Agir après Copenhague, un enjeu majeur 4
L’expérience nordiste 4
Nouvelles techniques de construction 5
Un club de maîtres d’ouvrage 5
Introduction 5
Première table ronde : La construction face aux enjeux du développement durable 6
Une démarche systématique pour le Département du Nord 6
Le management de la qualité environnementale en Ile-de-France 7
Additionner les compétences dans le parc locatif 7
Réduire l’impact environnemental du traitement des eaux 8
Les compromis énergétiques des établissements de santé 8
Confort et performance énergétique pour les logements privés 9
Le développement durable passe par le collectif 9
Deuxième table ronde : La gestion patrimoniale : quelles nouvelles approches ? 10
Le plan de maîtrise de l’énergie du Département du Nord 10
Raisonner en coût global grâce aux PPP 10
L’implication du gestionnaire immobilier dans le développement durable 11
Mobiliser utilisateurs, exploitants et propriétaires par la certification 11
Le contrat de performance énergétique de Dalkia12
Le long terme comme valeur primordiale pour la construction et la promotion 12
Récupérer l’énergie : une affaire d’installateurs… et d’utilisateurs 13
Conclusion de la table ronde 13
Troisième table ronde : L’usage et le comportemental : vers les bonnes pratiques 13
L’Agenda 21 du département du Nord 13
Aider l’usager à devenir éco-citoyen 13
Une restauration collective durable 14
Relever le défi climatique 14
Un nouveau siège durable pour Norpac 15
L’Agenda 21 collèges du Département du Nord 15
Echanges avec la salle 16
Conclusion de la table ronde 16
Synthèse des tables rondes 16
Allocution de clôture 17
Sigles 18
Construction, exploitation, usage des bâtiments
Discours d’ouverture
Patrick KANNER
Premier Vice-Président du Conseil général du Nord en charge de l’Aménagement et du Développement des territoires et du Développement économique représentant Bernard DEROSIER, Président du Conseil général du Nord
Bienvenue à tous. Face aux enjeux et défis de taille liés au réchauffement climatique, l’ensemble des élus du Département s’associent à l’ultimatum climatique lancé par les 11 ONG en préparation de la conférence de Copenhague. Ce rendez-vous international est majeur ; de sa réussite ou de son échec dépendra en partie l’avenir de notre planète. Le thème de ce colloque – la construction, l’exploitation et l’usage des bâtiments – est au cœur des préoccupations internationales de développement durable. La présence à ce colloque de nombreuses collectivités territoriales et acteurs de la construction traduit leur implication dans cette réflexion.
Agir après Copenhague, un enjeu majeur
La France se mobilise pour mettre en place les moyens nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique, mais pour l’avenir de notre civilisation, cette mobilisation doit impérativement et rapidement se traduire par des actes. Nous risquons en effet de payer cher notre inaction : Monsieur Tanaka, directeur de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), estime que chaque année de retard dans la mise en place d’une politique énergétique permettant de contenir le réchauffement climatique ajoutera 340 milliards d’euros à l’investissement total dans le secteur énergétique.
Les mesures du Grenelle de l’environnement sont une première étape de l’action, mais elles risquent de se traduire par une charge supplémentaire pour les collectivités locales et de nouveaux impôts (taxe carbone) pour les particuliers. Les collectivités territoriales françaises représentent déjà 75 % de l’investissement public et jouent déjà – bien avant le Grenelle – un rôle essentiel dans le développement durable, qui se traduit notamment par une démarche d’innovation, avec par exemple la construction de bâtiments à Haute qualité environnementale (HQE).
L’expérience nordiste
Le Département du Nord, dans sa gestion de nombreux bâtiments et routes, a fait de la HQE la priorité de son Agenda 21 initié en 2001. Des solutions thermiques innovantes ont été expérimentées dès 2003 dans la construction des collèges et depuis 2006, grâce notamment au partenariat avec le CSTB, tous les bâtiments neufs (tertiaires et collèges) sont réalisés selon cette norme HQE®. Le collège de Wazemmes, certifié HQE® et élément de préservation du patrimoine architectural, constitue pour le Département un laboratoire offrant des solutions architecturales et technologiques innovantes.
Pour réaliser des maîtrises d’ouvrage durables, des changements culturels et structurels s’imposent, qui passent par une autre hiérarchie des valeurs, ainsi que par une autre approche des usages et de nouvelles pratiques individuelles et collectives. Pour cela, les acteurs du territoire ont un rôle majeur à jouer :
- pour établir un diagnostic des réalités sociales, économiques et écologiques
- pour promouvoir les valeurs historiques et culturelles locales
- pour satisfaire dans la durée les besoins fondamentaux des populations résidentes ou de passage.
Il s’agit d’innover dans les domaines interconnectés de la cohésion sociale, de la production énergétique, des ressources en eau, du traitement des pollutions, de l’articulation des services marchands et non marchands. C’est une autre manière d’envisager la société, par la citoyenneté et l’appropriation par les populations des solutions proposées.
Le Département répond à cela en définissant dans son Agenda 21, quatre engagements :
- la promotion d’une culture citoyenne et responsable
- l’affirmation de la solidarité comme base de la cohésion sociale
- la détermination de la qualité de vie comme fondement des choix d’aménagement
- la contribution à la reconquête et la valorisation des milieux naturels.
Dans ce cadre, depuis 2004, le plan énergie permet de sensibiliser les collèges et les usagers de ces locaux au bon usage des équipements. De plus, un agenda 21 spécifique pour les collèges a pour but d’amener les agents départementaux de la communauté éducative et les élèves à prendre conscience des enjeux du développement durable. Le futur bâtiment des Archives départementales du Nord sera le premier bâtiment à énergie positive.
Nouvelles techniques de construction
Les collectivités doivent également s’investir dans le développement de nouvelles techniques de construction. En décembre 2006, les principes de la HQE ont été étendus au développement des infrastructures routières et un référentiel « route durable » est actuellement en cours de création.
Bien que l’expérience HQE du Département soit innovante, systématique et appliquée à toutes les phases du cycle de vie du bâtiment, les enjeux du développement durable restent à venir. Beaucoup reste à imaginer sur le plan des usages, de la technique et de la dimension économique. Pour cela, il faudra trouver de nouvelles solutions techniques, économiques et donc politiques. Les experts auront à proposer les solutions les mieux adaptées aux décideurs politiques qui devront alors assumer leurs choix et leurs responsabilités.
Un club de maîtres d’ouvrage
Les enjeux financiers, économiques et sociaux du développement durable sont majeurs. En effet, le Département du Nord considère que la protection des ressources naturelles constitue un levier économique. Par ailleurs, la Recherche et développement (R & D), trop souvent oubliée dans le domaine du développement durable, mérite une attention particulière. Les Grenelles ignorent en effet tout des dispositifs incitatifs en R & D.
Entre la loi romaine venant du haut et le pragmatisme anglo-saxon, rien ne remplacera l’initiative locale : le dispositif HQE du Fonds départemental pour l’aménagement du Nord en est un bon exemple.
Pour conclure, le développement durable passe par la pollinisation des esprits, des technologies appropriées et d’une volonté politique. Le Département du Nord souhaite échanger ses expériences pour continuer à progresser ensemble, démultiplier les initiatives. Je propose que ce processus d’échanges d’expériences aboutisse à la création d’un club de maîtres d’ouvrage, élément de concertation permanente alimenté par vos expériences. Nous souhaitons dessiner l’avenir de nos enfants pour un nouveau siècle durable. Bourdonnons d’intelligence collective, favorisons les initiatives innovantes et créatrices.
Introduction
Bertrand DELCAMBRE
Président du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB)
Le CSTB accompagne depuis dix ans la démarche de développement durable et de certification HQE® du Département du Nord, pionnier français en ce domaine. Le niveau d’exigence augmente dans ce secteur depuis deux ans, du fait notamment de nouvelles réglementations thermiques engagées par le Grenelle de l’environnement. En 2020, l’ensemble des bâtiments devra être construit à énergie positive. Le secteur de la construction devra aussi réduire la pollution et le gaspillage : il consomme 40 % de l’énergie finale, produit 25 % du CO2 et 50 % des déchets non valorisés. Au-delà de ces objectifs, il doit aussi répondre à des enjeux sociaux : le développement durable permettra d’offrir à tous un logement sain dans des conditions économiques viables, mais cette vague verte constitue également des perspectives d’emploi intéressantes pour les générations futures.
Le développement durable représente également un enjeu économique majeur : la construction représente environ 10 % du PIB et malgré la crise, la confiance dans la dynamique du secteur est soutenue par le plan de relance de l’Etat.
Tout le monde a pris conscience de la nécessité de construire des bâtiments durables, la question qui se pose aujourd’hui est celle de la manière dont ces bâtiments doivent être construits. La réflexion sur les moyens à investir doit être menée à toutes les échelles du quartier à la ville, aussi bien dans le neuf que dans l’existant et bien sûr, sur tout le cycle de vie du bâtiment (construction et exploitation).
Des moyens sont également nécessaires à la recherche sur le développement de l’innovation technique dans les matériaux (nanomatériaux pour l’isolation, vitrages capteurs d’énergie…). De grands progrès doivent être réalisés sur les équipements (chauffage, ventilation, etc.). Le bâtiment est rarement l’affaire de composants isolés mais bien celle d’un système équilibré dont la performance doit durer longtemps. Fort de son credo « l’innovation en confiance », le CSTB souhaite accompagner pleinement le développement actuel des innovations.
Enfin, la performance énergétique sera aussi atteinte par l’organisation de la profession. La chaîne de qualité modifiera les relations entre les acteurs, et les maîtres d’ouvrage sont amenés à acquérir une vision globale du projet. La formation professionnelle y a toute son importance. Ces engagements sont de plus en plus intégrés dans la durée par de nouvelles formules comme les contrats de performances énergétiques, le raisonnement coût global…
Heureusement, le projet de loi de finances de 2010 continuera d’appuyer l’effort de construction durable (Pass foncier, crédit d’impôt, exonération d’intérêts d’emprunt, crédit à taux zéro…). Désormais, nous entrons dans une ère de la garantie de performance, grâce à des indicateurs partagés et à la certification. Le rôle des maîtres d’ouvrage, par leur capacité d’arbitrage, sera essentiel.
Première table ronde : La construction face aux enjeux du développement durable
Les trois tables rondes sont animées par Maxime BITTER, journaliste au Moniteur des travaux publics et des bâtiments.
Les maîtres d’ouvrage, par conviction, se sont saisis depuis quelques années de la démarche durable, souhaitant impulser un changement de vision et répondre au marché. Ils ont ainsi précédé la législation, en voyant dans la Haute qualité environnementale une source de progrès pour demain. Où en est la pénétration de cette démarche en France ? Comment doit-elle s’adapter aux différents secteurs de la construction et aux évolutions réglementaires ?
Une démarche systématique pour le Département du Nord
Bernard BAUDOUX
Vice-président du Conseil général du Nord chargé des collèges
Dans le Nord, la démarche de développement durable a démarré en 2001 avec un Agenda 21, qui a soutenu l’investissement dans les projets HQE, la fonctionnalité des bâtiments et la formation des agents. Le développement durable est vécu dans le Département comme un défi et non pas comme une obligation. La passion pour construire différemment et le renouvellement de la création permettent aux métiers de la construction d’enrichir leur image.
Néanmoins, le Grenelle de l’environnement ne s’appuie pas suffisamment sur les potentiels existants et les forces vives des collectivités locales, souvent démunies face à ces enjeux. Aucune incitation financière n’est prévue pour les collectivités territoriales, d’autant plus que les dernières réformes (transfert de compétences et modification de la taxe professionnelle) les ont éloignées de l’Etat. Un climat national plus serein doit être rétabli.
L’expérience du Département permet de dire que la HQE n’augmente pas, au final, le prix des bâtiments. Le Nord s’est donné les moyens de construire des collèges comme outils de rénovation urbaine qui structurent les villes. Cette expérience, source d’enrichissement, doit bénéficier de l’appui de la recherche : la France doit se placer à la pointe des nouvelles technologies.
Les équipements du développement durable peuvent également avoir une fonction pédagogique auprès des élèves, des habitants, des journalistes. La relation directe du consommateur avec le producteur lui permet d’acquérir un comportement durable au quotidien.
Enfin, la réhabilitation du politique dans le développement durable donne du sens à l’action menée car le marché seul ne peut pas régler seul les problèmes. L’ensemble des acteurs du Département produit une intelligence collective.
Le management de la qualité environnementale en Ile-de-France Alain COCOGNE
Directeur de la programmation pédagogique et patrimoniale de l’unité Lycées – Région Ile-de-France
La région Ile-de-France regroupe 430 000 élèves dans 471 lycées. Depuis 1998, un vaste programme de construction et de rénovation des lycées a été entamé. Parmi les 250 opérations menées, 65 visaient à améliorer la qualité environnementale des bâtiments. La certification HQE®, prise en compte seulement à partir de 2005, a déjà concerné six projets.
Pour cette expérimentation, l’Ile-de-France bénéficie d’une forte volonté politique en faveur du développement durable, inscrite dans l’Agenda 21 et dans la feuille de route de l’écorégion. Elle peut aussi compter sur la motivation de ses acteurs. Cependant, cette volonté ne suffit pas si la maîtrise d’ouvrage et les agents des lycées ne sont pas formés.
Les usagers des lycées (élèves, enseignants…) et ceux qui en assurent la maintenance (techniciens et ouvriers de services sont désormais gérés par la Région) doivent intégrer les enjeux du développement durable afin que l’exploitation du bâtiment s’effectue dans la droite ligne de leur performance énergétique. Les systèmes énergétiques performants nécessitent davantage de professionnalisme dans l’exploitation.
Avant même que la démarche de certification HQE® soit entamée pour les lycées, la Région nommait un Assistant à maîtrise d’ouvrage (AMO) HQE sur chaque opération. Elle a ainsi pu expérimenter des programmes environnementaux sur les lycées. Ensuite, la certification HQE® sur 6 opérations a constitué un outil important pour atteindre les objectifs et coordonner les acteurs. La Région réfléchit aujourd’hui à un système de management général des objectifs de qualité environnementale et travaille à l’élaboration d’un cadrage multifonction de programme environnemental. Par ailleurs, le bilan carbone doit être intégré en amont de la programmation d’un lycée (recherche des ressources locales utilisables…). Les entreprises répondent ainsi à un cahier des charges précis, même si la Région s’ouvre peu à peu aux variantes.
Additionner les compétences dans le parc locatif
Charles MONTECATINE
Directeur général – Partenord Habitat
Le parc de logements en France s’élève à 30 millions de logements construits, dont 63 % d’entre eux, avant 1975. Les bailleurs sociaux n’échappent pas complètement à ce constat et ils doivent considérer la réhabilitation comme prioritaire, au moment où les financements PALULOS1 disparaissent.
En tant que bailleur social, nos enjeux sont d’abord sociétaux, nos réalisations doivent répondre à des contraintes de gestion. Afin de limiter, pour nos locataires, l’impact lié au coût de la construction sur le montant de leur quittance, la préoccupation majeure porte sur la diminution des charges locatives.
Dans cette logique, en 2009, nous avons lancé, en ordres de service, plus de 1 800 logements dont les performances dépassent la réglementation thermique en vigueur.
De tous temps, les partenaires sociaux ont été à la pointe des innovations, des expérimentations. Ils le sont aujourd’hui en matière de développement durable. Cette thématique dépasse le cadre du bâti et concerne des engagements en matière d’économies solidaires et de lutte contre toutes les formes de pauvreté également. Traditionnellement, les partenaires sociaux ont acquis le réflexe d’échanger entre eux afin de capitaliser les expériences menées quels que soient les domaines. Ce comportement est synonyme de production de qualité.
L’amortissement réel des investissements ne peut s’appuyer que sur des compétences et la mise en œuvre de matériaux adaptés et certifiés. Dans ce domaine, toutes les composantes doivent être maîtrisées, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui.
Partenord Habitat est partie prenante du Groupement d’intérêt économique (GIE) Unéo habitat, constitué avec deux bailleurs importants représentant ensemble près de 140 000 logements sociaux sur les 320 000 que compte la région. Dans le domaine de la recherche et réalisation de produits performants en économies d’énergies, une consultation commune a été lancée pour la construction de 2 400 logements individuels (Bâtiments à basse consommation (BBC) évolutif passif) en quatre ans. Aujourd’hui, nous sommes à la phase du dialogue compétitif. 22 entreprises participent à cette procédure.
Dans la recherche permanente d’efficacité opérationnelle, il est incontournable de s’appuyer et d’additionner les compétences des différents intervenants, maître d’œuvre, entreprises, etc.
Pour des opérations complexes, il faut nous y préparer par anticipation. En effet, aujourd’hui dans le cadre de la RT2005, produire du THPE2 voire du BBC reste plutôt accessible mais le saut qualitatif, normatif et financier pour l’habitat passif représente un réel changement d’échelle. De la même manière, il est indispensable de pouvoir compter sur les savoir-faire des entreprises, et les actions de formation de leurs salariés sont ainsi primordiales. Il y a le degré de fiabilité des fournitures mais la mise en œuvre doit être en phase avec les résultats attendus.
Partenord Habitat réalise actuellement 40 logements collectifs avec le label Habitat passif et il n’a pas fallu moins de deux ans, avec un maître d’œuvre engagé, pour élaborer des solutions.
Fort de ce constat et avec des objectifs ambitieux, la mise en application de ce principe qui consiste à additionner les compétences passe, pour Partenord Habitat, par une attention particulière portée à la démarche conception réalisation.
Réduire l’impact environnemental du traitement des eaux
Jean-Marc LAURENT
Directeur régional – OTV France Nord/ Groupe Veolia
OTV France et Veolia Water Solutions & Technologies, sa maison mère, conçoit et construit des installations de traitement d’eau dans 57 pays.
En France, plus de 75 % de la population est citadine. Dans le monde, cette proportion est aujourd’hui de 50 % et ne cesse de croître. Dans ce contexte, satisfaire les besoins en eau des populations urbaines, sans oublier les ruraux, constitue un défi majeur pour notre société et nos entreprises.
Le premier enjeu consiste à satisfaire les besoins considérables en matière d’alimentation en eau potable et d’assainissement. En tant que traiteur d’eau, OTV est un acteur majeur. Il intervient en amont (pour traiter l’eau et la rendre potable) et en aval (pour le traitement des eaux usées avant rejet au milieu récepteur) pour satisfaire les besoins induits par l’urbanisation galopante de notre environnement.
Le second enjeu est de réduire l’impact environnemental du traitement des eaux car il est aussi générateur de Gaz à effet de serre (GES).
Le traitement de l’eau potable varie fortement selon les régions, la disponibilité des ressources, leur nature (superficielle ou aquifère) et leur qualité. Ainsi, la proportion de dioxyde de carbone générée dans la production d’eau potable oscille entre 200 et 1 500 grammes par mètre cube d’eau traitée.
En matière de traitement des eaux usées, il en va de même selon la sensibilité du milieu récepteur et la réglementation applicable. Cette dernière ne cesse d’évoluer : c’est une bonne chose pour le bon état écologique des milieux récepteurs mais les consommations d’énergies et de réactifs – et donc les GES induits – seront de plus en plus importantes pour atteindre les objectifs de qualité demandés.
OTV France intervient donc dès la conception des unités de traitement pour réduire leur impact environnemental.
Pour cela, OTV applique les deux démarches suivantes :
- une évaluation des GES des installations projetées en utilisant la procédure du bilan carbone mise au point par l’ADEME
- une démarche d’éco-conception dénommée Ecolia 21® qui ajoute, dans le processus de construction, des objectifs additionnels aux 14 cibles de la démarche HQE®.
Pour OTV France, Ecolia 21® va au-delà d’une simple démarche de conception, c’est devenu un outil de management transversal de nos équipes, de nos technologies et de notre marketing : le développement durable s’avère ainsi un axe majeur de notre stratégie d’entreprise.
Les compromis énergétiques des établissements de santé
Christian BEREHOUC
Directeur associé – Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux
Les risques potentiels auxquels sont confrontés les patients des hôpitaux ont nécessité la mise en place de réglementations spécifiques (déchets, eau, air). Les bâtiments remplissent déjà une partie des cibles HQE et les comités de lutte contre les infections nosocomiales sont particulièrement vigilants au respect de l’hygiène.
Les activités de court séjour consomment notamment beaucoup d’énergie3. Le plan Hôpital 2012 consacre 8,5 milliards d’euros à la construction et la réhabilitation des bâtiments. Pour y être éligible, un établissement doit obligatoirement inscrire la démarche HQE® dans son projet, désigner un référent développement durable et un AMO spécialiste du sujet.
Par ailleurs, tous les établissements de santé font l’objet d’une certification, pilotée par la Haute autorité de santé ; le référentiel de certification comporte des exigences de développement durable.
Enfin, le développement des prises en charge alternatives aux hospitalisations complètes conduira à réduire le patrimoine global des établissements de santé.
Les politiques de santé et de développement durable se rejoignent, même si certains bâtiments ne pourront jamais, pour des raisons fonctionnelles, satisfaire totalement aux objectifs de réduction de leur consommation énergétique.
Confort et performance énergétique pour les logements privés
Frank HOVORKA
Directeur de programme – ICADE
Le bilan carbone réalisé depuis 2007 permet à ICADE d’intégrer les émissions de gaz à effet de serre dans sa stratégie.
La réduction de la consommation d’énergie doit être un postulat de départ pour tout projet, afin de répondre à la demande actuelle du marché. Il faut aujourd’hui concilier cet objectif avec celui du confort des logements et, bien sûr, du coût qui demeure la première des exigences. La flexibilité dans les logements est également un concept nécessaire avec une population aux modes de vie en mutation et vieillissante. Cette adaptabilité participe du concept du logement durable.
Afin de maintenir voire de réduire les coûts de construction, la conception doit être intégrée, dès le départ, dans un système de management de la performance énergétique. Mais cette démarche se heurte encore parfois au Code des marchés publics, à la fiscalité ou aux réglementations concernant les innovations qui ne facilitent pas certains projets, comme par exemple, la récupération des eaux de pluie pour leur réutilisation ou leur réinjection en terre sous le bâtiment afin de réduire l’imperméabilisation de la parcelle.
Le développement durable passe par le collectif
Bernard DELGOVE
Directeur - SNC Eiffage construction Artois Hainaut Cambresis
La véritable difficulté du développement durable est de réunir les différents acteurs d’un projet immobilier. Réaliser ce défi passe par le respect des engagements de chacun, et à ce titre la certification HQE® est un outil de management essentiel. Le développement durable est une grande opportunité si nous pouvons capitaliser sur les expériences. Ainsi, le service innovation et recherche d’Eiffage participe pleinement à l’évolution de la performance énergétique dans le bâtiment et dans les infrastructures routières. Il est cependant primordial de prouver nos performances, grâce à des bilans carbone réalisés sous contrôle d’agences extra-financières.
Eiffage est également attachée à la dimension sociétale et au management de la performance du développement durable. La société propose deux outils concrets d’estimation de cette performance : un guide à destination des collaborateurs et une calculatrice carbone pour permettre aux clients de calculer le coût carbone de leur projet et de répondre à la note environnementale des appels d’offres.
Le choix d’une entreprise est soumis à l’adéquation entre le prix et les engagements pris par l’entreprise (chantier propre…). Pour faire évoluer les pratiques, nous avons investi dans la formation de nos compagnons du bâtiment. Cependant, cette sensibilisation serait vaine sans la prise en compte de leur qualité de vie (distance entre le chantier et le logement, temps de travail…). La prise de conscience des enjeux du développement durable doit être collective pour que l’approche durable dans la construction soit globale. Plutôt que de répondre à des procédures de marché public rigides, nous préférons proposer aux maîtres d’ouvrage une démarche globale (conception réalisation) incluant l’exploitation et la dimension sociétale du projet.
Deuxième table ronde : La gestion patrimoniale : quelles nouvelles approches ?
Après la construction du bâtiment, le flambeau du développement durable passe des mains du maître d’ouvrage à celles du gestionnaire. L’exploitation du bâtiment neuf doit respecter ses caractéristiques de construction. Dans le parc existant aussi, la rénovation ne peut se passer d’une réflexion sur les enjeux d’une gestion durable. Quels sont les nouveaux outils pour dialoguer entre ces deux étapes (plan de maîtrise de l’énergie, PPP…) ? Comment prendre en considération le cycle de vie d’un bâtiment et raisonner selon le coût global ?
Le plan de maîtrise de l’énergie du Département du Nord
Bernard HAESEBROECK
Vice-président chargé des ressources humaines et du budget – Conseil général du Nord
Exploitant près de 340 bâtiments, le Département du Nord s’est fixé pour objectif d’économiser 40 % d’énergie sur ses bâtiments entre 2006 et 2012. Ce défi ambitieux, qui repose sur une mobilisation générale de tous les acteurs, nécessite une nouvelle organisation, de nouvelles méthodes et de nouveaux outils.
L’étendue du territoire du département a nécessité la création de dix unités territoriales déconcentrées. Chacune d’elles regroupe tous les métiers de l’exploitation. Afin de responsabiliser les équipes et de leur permettre d’être réactives, des enveloppes budgétaires leur ont été allouées. De plus, des contrats de maintenance permettent de veiller à la longévité de l’investissement. Les investissements sur le patrimoine sont réfléchis afin d’envisager les matériaux les plus performants et les plus pérennes dans un esprit de développement durable.
Le Département du Nord a également créé un référentiel de diagnostic des bâtiments. Ce référentiel a notamment permis de concevoir un plan de maîtrise de l’énergie. En 2010, les bâtiments seront équipés d’un système de contrôle de consommation à distance (eau, gaz et électricité). L’utilisation de ces équipements spécifiques suppose la formation des agents à une certaine technicité. Le recours à la certification d’économie d’énergie représente également une perspective de motivation des équipes.
Ces nouvelles mesures supposent par ailleurs que soient renforcées les pratiques managériales autour du développement durable.
Raisonner en coût global grâce aux PPP
Michel JOUVENT
Délégué général – Association Apogée
L’association Apogée est un club professionnel qui regroupe près de 200 organismes propriétaires ou gestionnaires de bâtiments publics ou privés. Chaque organisme n’a pas atteint le même niveau dans la démarche de développement durable. Néanmoins, depuis dix ans, la prise de conscience a progressé. Les gestionnaires accompagnent les maîtres d’ouvrage dans leur action. En effet, un bâtiment HQE ne pourra pas rester performant si sa gestion ne l’est pas. Cet enjeu d’entretien du patrimoine existant est d’autant plus important que le taux de renouvellement des bâtiments est seulement de 1 %.
Apogée a établi les dépenses annuelles pour les charges locatives et de copropriété de logement ainsi que pour les immeubles de bureaux. Elle a ensuite estimé le coût global de ces charges sur le cycle de vie d’un logement, soit 50 ans. Les dépenses en énergie et en eau, qui sont très importantes sur une année (plus de 1 000 euros par an pour un logement), ne représentent plus que 7 % sur 50 ans. Les dépenses principales d’un immeuble de logements ou de bureaux en coût global concernent la construction (31 %) et les gros entretiens et réparations4 (27 %). Ces résultats tendent à démontrer que si la maîtrise d’ouvrage avec sa maîtrise d’œuvre raisonnait en coût global, les dépenses de fonctionnement, au prix d’un surinvestissement de départ, pourraient être réduites. Néanmoins, toutes ces entreprises ne peuvent engager les lourds investissements qu’exige le développement durable. Les contrats de Partenariat public-privé (PPP) et de partenariat énergétique constituent des solutions idéales à long terme.
Afin d’étudier toutes les alternatives possibles, Apogée a créé un référentiel de Management immobilier durable (MID). Il permet aux organismes de se positionner sur les enjeux environnemental, sociétal et économique.
Par ailleurs, l’expérience prouve que les usagers ne respectent pas toujours la déontologie du développement durable. Le gestionnaire doit intervenir afin de conditionner ces comportements.
Enfin, la construction durable nécessite une réflexion plus large au niveau de l’urbanisme en politique de la Ville.
L’implication du gestionnaire immobilier dans le développement durable Jean-Eric FOURNIER
Directeur du développement durable – Foncière des régions
Foncière des régions est un investisseur et un gestionnaire immobilier. Née à Metz, elle est présente dans toute la France mais également en Allemagne et en Italie. Depuis 2001, elle a rapidement évolué en rachetant le patrimoine immobilier de grandes sociétés qui souhaitaient l’externaliser. Elle se place ainsi aux côtés d’acteurs motivés par le développement durable, dont les bâtiments ont été construits pour leur usage. Foncière des régions possède par ailleurs des immeubles de logement, des murs d’exploitation, de la logistique issue de baux d’investissement et une société de parking. Elle a également une activité d’investisseur intégré et de développement. Cette dernière se traduit par un schéma de certification active et par la valorisation et la rénovation d’actifs de son parc.
Si le potentiel de développement durable du marché du neuf ne fait aucun doute (2/3 des 900 000 m² de bureaux en Ile-de-France seront construits selon une démarche HQE®), la véritable question concerne la capacité du parc existant à répondre aux objectifs de 38 % d’économies d’énergie en 2020. Pour cela, Foncière des régions a lancé une opération de cartographie énergétique et environnementale de son parc. Un travail minutieux de collecte débouchera sur un système de notation des actifs.
Les premières études montrent que 10 à 15 % d’énergie peuvent être respectivement économisés sur les deux premiers leviers de la performance énergétique (bonnes pratiques et maintenance exploitation), le troisième étant le bâti.
La cartographie du parc débouchera sur un plan d’actions au premier semestre 2010. Des baux verts, dans lesquels preneur et bailleur auront un intérêt réciproque à améliorer la performance énergétique du logement, seront mis en place.
Ainsi, la certification offre au preneur une lisibilité du marché et elle permet aux bailleurs de maintenir une bonne liquidité de leurs immeubles.
Mobiliser utilisateurs, exploitants et propriétaires par la certification
Patrick NOSSENT
Président – Certivéa
Certivéa est un organisme certificateur spécialisé dans le non résidentiel. La certification des ouvrages est l’outil principal de Certivéa et elle se concentre sur la mobilisation des différents acteurs (utilisateurs, exploitants, propriétaires) pour atteindre la performance énergétique. Depuis 2005, Certivéa a certifié 350 bâtiments tertiaires neufs, en réponse à la sollicitation des entreprises. En Ile-de-France, 44 % des surfaces de bureaux livrées en 2009 sont certifiées HQE®.
Les retours d’expérience ont permis une formidable progression de la performance des bâtiments neufs à un coût maîtrisé. L’enjeu concerne maintenant la performance des bâtiments en exploitation, à laquelle Certivéa s’intéresse depuis trois ans. Il a élaboré un outil de certification avec un groupe d’experts et d’acteurs et l’a expérimenté sur 17 bâtiments.
La certification est avant tout une démarche de progrès, ses référentiels sont accessibles à tous sur Internet. La certification de l’exploitation mesure les impacts environnementaux d’un ouvrage selon différents indicateurs. Cette mesure permet d’établir la progression possible notamment en se comparant aux autres exploitations de bâtiments. Une approche globale est nécessaire pour ne pas prendre de décision structurante sur un seul critère.
Ensuite, la certification permet l’identification des leviers d’action suivants : la qualité intrinsèque d’un bâtiment, la qualité de l’exploitation et l’utilisation du bâtiment. Un travail de sensibilisation est nécessaire auprès des exploitants et des utilisateurs. Il pourrait, par exemple, prendre la forme d’un tableau indiquant la consommation énergétique à l’entrée du bâtiment.
Enfin, la valeur de la certification réside essentiellement dans le management (partage d’informations et du pilotage entre différents acteurs). De même, l’utilisateur doit participer à la conception du cahier des charges du bâtiment.
Le référentiel d’exploitation comporte trois parties :
- un système de management qui décrit la démarche à prendre en compte
- une série de questions qui permettent l’identification de leviers à actionner pour progresser
- une série d’indicateurs (CO2 ; eau…) qui donnent des résultats mesurables dans le temps.
De nombreuses mesures restent à prendre sur l’usage et l’exploitation du bâti. Elles sont déterminées par la qualité intrinsèque du bâtiment. Certivéa milite pour que l’amélioration énergétique mobilise l’ensemble des utilisateurs, exploitants et propriétaires. Le bail vert et la certification de performance en seront des outils.
Le contrat de performance énergétique de Dalkia
Jean-Albert SORRIAUX
Directeur technique et exploitation – Dalkia Nord/ Veolia Environnement
Les sociétés de service en efficacité énergétique travaillent sur deux points :
- l’efficacité énergétique (réduction de la consommation du bâtiment « négawatts », et réduction des déperditions)
- l’utilisation des énergies renouvelables tout en assurant la maintenabilité des équipements.
Pour cela, ces sociétés ont développé un contrat de performance énergétique avec garantie. Ainsi, les maîtres d’ouvrage bénéficient d’offres leur assurant un engagement énergétique et économique. Ces contrats sont basés sur quatre engagements :
- la sensibilisation des usagers et la formation au comportement éco-citoyen.
- la maintenabilité des équipements avec l’utilisation des technologies plus respectueuses de l’environnement
- l’audit des bâtiments existants, en particulier en matière d’isolation thermique
- l’optimisation des sources d’approvisionnement en énergie via le développement de la mixité des énergies et des réseaux de chauffage urbain, ainsi que le recours aux énergies renouvelables. La loi Grenelle II permet de subventionner ces opérations.
Le long terme comme valeur primordiale pour la construction et la promotion
Claude LENGLET
Directeur scientifique – Rabot Dutilleul
Le groupe Rabot Dutilleul assure à la fois la promotion immobilière et la construction de bâtiments, il est donc concerné par toutes les phases de l’acte de construire.
A l’échelle européenne, le bâtiment consomme 40 % de l’énergie et produit un tiers des GES. En France, seulement 1 % du bâti est renouvelé en moyenne annuelle. Le patrimoine existant doit donc concentrer, rapidement, l’essentiel des actions si on veut réellement contribuer à une réduction de la dépense énergétique globale. Dans ce domaine, les expériences menées dans les autres pays européens peuvent apporter beaucoup à la construction durable en France.
Pour être efficace, on sait aujourd’hui que celle-ci doit être réalisée selon une approche globale tenant compte de la santé, du coût global et de l’emploi des ressources naturelles.
Les PPP et d’autres approches globales ont montré ces dernières années l’importance de la réapparition de la valeur « temps » dans le processus de construction. Ceci concerne notamment :
- l’analyse des cycles de vie
- l’analyse de l’aspect sanitaire des matériaux
- la compétence en maintenance
Et se trouve en complète cohérence avec :
- les certifications et labels
- les contrats de performance énergétique.
Ces choix, déterminants pour une conception différente, doivent être décidés lors de l’élaboration du projet, notamment dans les PPP.
On peut ainsi imaginer que, dans un futur proche, l’appréciation de la valeur future des bâtiments devienne un critère majeur et se positionne avant la notion seule de coût d’investissement. Ce type de progrès nous mènera vers une réelle politique de construction durable.
Récupérer l’énergie : une affaire d’installateurs… et d’utilisateurs
Dominique ZAMOLO
Président de l’entreprise Delannoy Dewailly
Dans l’industrie, les demandes de récupération d’énergie sur les systèmes de fonctionnement existent, cependant, les aides (de l’ADEME, etc.) sont difficilement identifiables. Delannoy Dewailly assure l’installation dans les bâtiments d’équipements techniques, notamment développés dans une entité de R & D. Elle a également développé une activité de conseil parce qu’elle est confrontée aux difficultés de leur mise en œuvre. En effet, les variantes d’un marché public n’étant pas toujours libres, les entreprises ne peuvent pas faire de proposition dans le sens de l’économie d’énergie. Cette activité de conseil se fait avec des partenaires afin d’obtenir une vision globale du bâtiment.
La bonne exploitation des équipements conditionne leurs résultats énergétiques. Delannoy Dewailly est souvent confrontée à des intermédiaires (syndics…) que le montant des investissements rebute. Les citoyens doivent également être éduqués afin d’acquérir une attitude responsable et unifier leurs usages.
Conclusion de la table ronde
La préservation de notre planète est une œuvre collective qui peut seulement passer par l’assimilation des préoccupations du développement durable dans la vie quotidienne et en commun. La résistance des matériaux et le recyclage des bâtiments seront les prochains enjeux de la recherche. Dans le cadre du plan de consommation énergétique, les retombées de l’économie des GES seront supérieures à l’effort engagé.
La préservation des finances est nécessaire, il s’agit de percevoir l’investissement à long terme.
Troisième table ronde : L’usage et le comportemental : vers les bonnes pratiques
Un bâtiment bien construit et géré durablement perd de son intérêt si les usagers ne l’utilisent pas correctement. Les bonnes pratiques durables doivent se répercuter dans les comportements des « consommateurs du bâtiment ». Pour y arriver, maîtres d’ouvrage et gestionnaires doivent se préoccuper de l’usager, non pas seulement de son confort comme ils le font déjà, mais de son… éducation.
L’Agenda 21 du département du Nord
Jean SCHEPMAN
Vice-président du Conseil général du Nord chargé de la politique de l’eau
Lorsque j’ai pris mes fonctions en 2001 au Conseil général du Nord, l’Agenda 21 venait d’être mis en place. Les architectes n’ont pas tout de suite compris l’intérêt de la norme HQE®. Mon équipe a alors réalisé un réel travail de mobilisation des agents territoriaux.
Les nouvelles du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sont toujours plus alarmantes. Nous devons agir vite pour ralentir les effets des changements climatiques. L’application concrète des mesures du Grenelle II votées par le Parlement en 2009 est complexe.
La gestion de l’Agenda 21 par une équipe de cinq personnes a permis la mise en place de 100 mesures concrètes. Ces mesures s’appuient sur la volonté des usagers. Aujourd’hui, mille agents assurent la sensibilisation des équipes aux enjeux du développement durable. Nous devons rester vigilants et poursuivre nos actions en ce sens.
Aider l’usager à devenir éco-citoyen
Jean-Louis CONVERT
Responsable mission déléguée développement durable – Union sociale pour l’Habitat
Chaque organisme d’Habitation à loyer modéré (HLM) doit accompagner le comportement durable de l’usager. La préoccupation première de l’Union sociale pour l’Habitat, qui regroupe plusieurs de ces organismes5, est de conserver une charge de loyer acceptable pour des personnes au revenu modeste. Une grande partie d’entre elles sont des personnes âgées peu sensibles aux enjeux environnementaux. Aider les locataires à bien utiliser leur logement est un enjeu primordial pour demain. L’amélioration du chauffage avec l’aide d’EDF6 a été l’occasion d’accompagner les usagers dans les changements technologiques. Il est cependant nécessaire de leur proposer des outils simples.
Le partage des économies d’énergie entre l’organisme HLM et le locataire, qu’autorise une nouvelle réglementation, devra être très bien expliqué aux clients pour conserver leur capital confiance.
Le développement du suivi de consommation des logements individuels permettra aussi de réaliser ces économies. Actuellement, les consommations d’eau, d’électricité et de gaz ne peuvent pas être suivies facilement, car les compteurs sont difficilement accessibles aux usagers et les factures intermédiaires se fondent sur des estimations. Il est nécessaire de trouver des systèmes qui permettent d’alerter sur les dérives des clients. De plus, une personne doit assurer instantanément l’ingénierie des analyses au bénéfice du client. La mise en place d’un comptage deviendra bientôt obligatoire pour une réelle prise de conscience des locataires.
Une restauration collective durable
Alain ROY
Directeur associé – Philippe Hersant & partners
Philippe Hersant & partners aide les acteurs de la restauration collective à la prise de décision et à la définition d’une stratégie de restauration. La restauration durable, sur laquelle l’entreprise travaille depuis dix ans, intéresse ces acteurs, notamment dans le milieu scolaire. Il s’agit de définir le bénéfice que peut en retirer l’usager final. Pour cela, nous animons des groupes de travail thématiques (approvisionnements durables, éco-pratiques…). Cette restauration collective se caractérise par de gros volumes produits par des équipements conséquents, qui doivent être intégrés dans une démarche HQE®.
Les équipes étaient d’abord réticentes à la démarche de tri sélectif, qui représente pourtant un réel outil pédagogique, dans la mesure où les méthodes sont reproduites par les élèves au sein de leur famille. De plus, les échanges avec les équipes révèlent souvent qu’elles recherchent des solutions concrètes pour intégrer le développement durable dans leurs missions.
Les trois grandes actions à mener sur l’exploitation de la restauration collective sont :
- le choix d’un approvisionnement en produits labellisés, en circuits courts
- la réduction des déchets en amont (cette action est facilitée par l’évolution de la réglementation)
- la gestion du non alimentaire (produits d’entretien moins néfastes, tenues vestimentaires recyclables…).
Transversalement à ces trois étapes, il s’agit d’éduquer les élèves, leurs familles et les personnels d’établissements aux enjeux du développement durable.
Les budgets, même s’ils sont serrés, permettent d’agir en fédérant les équipes et en communiquant avec les élèves et les familles. Le développement durable passe par le respect des qualités sanitaires puis par un travail sur la valeur nutritionnelle.
Relever le défi climatique
Bruno FRIMAT
Directeur adjoint région Nord - Pas-de-Calais – ADEME7
Pour conférer un confort de vivre tout en luttant contre les changements climatiques, le bâtiment doit résoudre l’équation de ces quatre données :
- les objectifs techniques du Grenelle
- des échéances à 2012 et 2020
- la mobilisation des professionnels (architectes, bureaux d’étude, entreprises, artisans)
- l’adhésion des usagers.
L’ADEME intervient à plusieurs niveaux auprès des usagers des bâtiments. En partenariat avec le conseil régional Nord - Pas-de-Calais, elle développe plusieurs actions :
le conseil : 15 espaces info énergie apportent une information personnalisée aux ménages.
- des réseaux d’experts dans les agences d’urbanisme et dans les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) intègrent, avec les maîtres d’ouvrage, les préoccupations de développement durable en amont des projets.
- les opérations expérimentales : en partenariat avec l’Association régionale de l’Habitat, l’ADEME mène une opération de réhabilitation thermique de 5 000 logements avec une performance énergétique élevée qui intégrera une démarche auprès des habitants et des professionnels du bâtiment
- de la recherche, par exemple, l’industrialisation de la performance thermique d’un même type d’habitat avec le regard technico-économique et l’acceptabilité de l’usager.
Pour une meilleure adhésion à tous ces changements, il est nécessaire que la communication se décloisonne et intervienne davantage dans le quotidien des usagers.
L’ADEME est un outil majeur de la transformation de notre société au regard de la lutte contre le changement climatique et l’adaptation à ses conséquences. Le challenge est d’éviter l’augmentation de la température de la planète de 2 °C. Pour cela, nous devons travailler sur quatre secteurs : le bâtiment, les énergies renouvelables, le transport, la production et la consommation responsable. Par ailleurs, si les entreprises et la collectivité émettent la moitié des émissions de GES, l’autre moitié est produite par les citoyens (maison, transport, achats, loisirs…). A titre d’exemple, nous avons mis en place, dans deux supermarchés Leclerc, des étiquettes indiquant l’émission de carbone nécessaire à la consommation du produit. Cette opération a permis une prise de conscience des salariés de l’entreprise et des consommateurs, qui réalisent l’impact global de leurs achats sur l’environnement : leur objectif est, de caddy en caddy, de le réduire.
Un nouveau siège durable pour Norpac
Patrick DUBOURG
Directeur commercial bâtiment – Norpac
Le développement durable est à la fois une opportunité et un marché sur lequel Norpac souhaite se positionner. Le nouveau siège, que l’entreprise intégrera fin 2009, l’a amené à réfléchir sur son organisation du travail et à mettre en scène une vitrine de ses actions. Il a par ailleurs permis de sensibiliser ses salariés aux enjeux du développement durable. L’investissement de cette construction a été analysé en coût global sur 30 ans. L’entreprise a donc surinvesti au départ pour écraser les coûts d’exploitation.
Le nouveau bâtiment, certifié BBC et HQE®, n’est pas climatisé, mais rafraîchi avec l’eau de la nappe (à 14 °C). Norpac a réussi à trouver un investisseur qui apporte son concours à un bâtiment sans climatisation (car ils sont plus difficiles à revendre).
Le bois constitue un des principaux matériaux de ce bâtiment. Les murs sont recouverts de peinture sans Composé organique volatil (COV) et, pour renforcer le confort visuel, 40 % des façades sont constituées d’ouvrants. L’organisation interne prend la forme d’un open space pour faciliter les projets en équipes.
En ce qui concerne les usages, l’éclairage ne se déclenche qu’en présence du salarié. De même les ordinateurs portables ont été privilégiés pour leur moindre consommation énergétique. L’entretien est assuré par des produits non toxiques et le tri des déchets est organisé dans les bureaux. L’énergie consommée sera affichée quotidiennement pour améliorer le comportement de l’utilisateur et pour que le salarié s’approprie le bâtiment. De même, les ascenseurs seront réservés aux personnes à mobilité réduite. Norpac propose à ses salariés des alternatives de transport (covoiturage, vélos) mais également de nombreux services à la personne (conciergerie, banque, restauration, crèche…).
L’Agenda 21 collèges du Département du Nord
José COHEN
Directeur général adjoint chargé de l’enseignement, du patrimoine et des infrastructures – Conseil général du Nord
Le Conseil général gère l’ensemble de la chaîne des bâtiments des collèges, de leur conception à leur gestion en passant par leur réhabilitation. Les 1 700 agents territoriaux, présents dans les établissements, sont les premiers ambassadeurs de l’Agenda 21 collèges. Le succès de la démarche passe par la réalisation par ces agents de petites actions qui se structurent peu à peu en grands programmes.
La période de l’adolescence est un moment clé pour l’acquisition de bonnes pratiques sur le développement durable. Ces préoccupations sont transversales et touchent tous les acteurs : elles concernent notamment les modes de transport et la restauration. Nous souhaitons mettre en place un référentiel des objectifs du développement durable dans les collèges en partenariat avec l’Education nationale.
Les projets HQE sont notamment l’occasion de renouveler le projet pédagogique de l’établissement. C’est par exemple le cas pour le nouveau collège de Wazemmes à Lille où une classe de sixième de développement durable a été créée. La communauté éducative ainsi que les familles se sont mobilisées sur le projet dès le départ. Le principal et le gestionnaire relaient la politique durable. Un projet d’indicateur de la consommation des flux en temps réel permettra de responsabiliser les usagers du collège. La mise en place de certificats d’économie d’énergie pourrait également stimuler le gestionnaire du collège.
Echanges avec la salle
De la salle (André MALFOY, chargé de mission développement durable à Boulogne-sur-Mer)
Vous n’avez pas évoqué le rôle de conseil des fournisseurs d’énergie. La communauté d’agglomération de Boulogne-sur-Mer a recruté des conseillers énergétiques formés par ERDF8 pour informer les citoyens. De nombreuses actions pourraient encore être menées.
De la salle (Jean-Luc PERAT, conseiller général du Nord et député)
Nous avons présenté le rôle des bailleurs sociaux et des collectivités dans le développement durable sans mentionner celui des propriétaires occupants qui représentent 60 % du potentiel d’économie d’énergie. Le Département du Nord a mis en place une Opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH) pour accompagner ces propriétaires occupants d’habitations insalubres, malheureusement nombreuses en Nord – Pas-de-Calais. Les expériences des uns et des autres devraient être relayées, le Département et la Région devraient se rapprocher des communautés de communes pour inciter et conseiller les particuliers.
Bruno FRIMAT
Les renseignements sur la problématique technique de la maison et sur les aides financières sont donnés par les espaces info énergie, dont le nombre demeure cependant insuffisant.
Conclusion de la table ronde
Jean SHEPMAN
Les efforts engagés sur le développement durable sont louables, mais ils doivent être encore relayés auprès des populations. Depuis le début du colloque, nous avons omis de dire que nous contribuons à enrichir nos enfants, en leur permettant de mieux vivre et de militer pour une vie meilleure. Par exemple, l’amélioration de la restauration scolaire permet aux élèves de profiter davantage du temps du déjeuner. L’économie d’énergie permet de mieux vivre, et cette amélioration n’est pas quantifiable.
Synthèse des tables rondes
Alain MAUGARD
Ancien président du CSTB, ancien président de la 4e section risque sécurité sûreté au Conseil général de l’environnement et du développement durable, président de Qualibat
C’est la première fois, dans le cadre d’un colloque, que la notion d’usage est associée à celles de construction et d’exploitation. Le département du Nord a déjà obtenu des résultats sur le développement durable dans ces deux grands domaines. Il lui reste à présent à compléter ce cycle par la gestion des usages.
Les bâtiments à énergie positive représentent un événement majeur de la construction. En effet, il y a quelques années, les premiers bâtiments HQE n’étaient pas ambitieux en matière d’énergie. Aujourd’hui, l’enjeu énergétique est intégré aux projets dès leur conception. Les bâtiments atteindront notamment l’objectif d’être à énergie positive avant 2020. Cependant, il ne s’agit plus aujourd’hui d’explorer ce secteur de pointe mais d’en transposer les résultats à grande échelle. Ce passage à un plus grand volume déterminera les compétences de la filière.
La préoccupation durable de l’exploitation est apparue plus récemment. Les bâtiments présentent des potentialités d’exploitation dont il faut tirer parti. L’exploitant doit être informé et même s’il est accompagné dans ses gestes, il doit conserver la maîtrise de ses actes et disposer d’une marge de manœuvre. L’exploitation est le lieu même de l’intelligence, la responsabilité de l’exploitant dans la gestion durable doit donc être mise en avant. Ce secteur doit par ailleurs compter avec la sous-traitance, notamment des fournisseurs d’énergie. La maîtrise d’ouvrage d’exploitation nécessite un réel professionnalisme dans sa relation avec l’exploitant. Elle doit être puissante et compétente sur l’exploitation.
La gestion durable des usages, plus récente, a été présentée lors de ce colloque de manière ambivalente. Il est en effet apparu que la construction et l’exploitation durables se heurtent aux mauvais comportements du citoyen. Si l’usager ne discerne pas l’intérêt du développement durable, de tels bâtiments sont inutiles. Par ailleurs, l’apologie des valeurs individuelles ne facilite pas la vision collective de l’avenir. Dans l’enjeu du développement durable, la valeur citoyenne mondiale est le nerf de la guerre. Ce partage des valeurs collectives permettra au citoyen d’être proactif. Ainsi, les bâtiments, les quartiers et les villes durables remplissent leur rôle s’ils font naître un comportement éco-responsable. C’est cette appropriation de la liberté citoyenne que l’usager doit réaliser. Le bâtiment appartient à tous ceux qui l’occupent. Il s’agit ensuite de passer de l’usage au mode de vie. En effet, l’usage se concentre uniquement sur le bâtiment tandis que le mode de vie en transcende les murs.
Les projets construits selon des préoccupations qui ne sont pas encore celles de certains usagers les amèneront à une réelle prise de conscience sur le développement durable. C’est ce que nous pouvons nommer le syndrome des zones piétonnes. Ces zones urbaines, un temps récriées, sont aujourd’hui largement plébiscitées. Ainsi, l’usager, après avoir intégré les enjeux du développement durable, fera, à son tour, des propositions d’innovations complémentaires ou ultérieures. Le changement des modes de vie accélérera le mouvement durable. Pour cela, nous avons besoin d’informations, d’indicateurs, de recherche et d’innovation. Nous sommes des consommateurs conditionnés par la publicité. Nos combats sociaux et économiques souffrent d’indicateurs de croissance pauvres ; en ce sens, le rapport Stiglitz ouvre de nouveaux horizons et nous demeurons sous l’emprise du politique.
Le débat se porte actuellement sur la croissance verte. Cette croissance doit être mesurée selon des indicateurs plus riches, qui ne soient pas uniquement financiers, car elle n’est pas, partout dans le monde, « marchandisée ». Nous ne sommes pas encore capables, au niveau des collectivités, de mesurer l’impact de notre contribution au développement durable. Il faut, pour cela, se placer dans une économie territorialisée et réhabiliter la croissance locale avec des circuits courts. Cette forme de croissance permettra la création d’emplois locaux et freinera le vaste mouvement de délocalisation.
Allocution de clôture
Bernard BAUDOUX
Nos idées sont des passerelles pour les prochaines discussions. L’accord général issu du Grenelle de l’environnement nécessite d’agir selon une échelle différente. En effet, la démarche HQE® est profonde et globale car elle va jusqu’à l’utilisateur en passant par la maîtrise d’ouvrage et l’exploitant.
Notre envie de repousser les limites de nos actions remet en cause les moyens alloués aux citoyens et aux collectivités locales qui doivent bénéficier d’aides comme la bonification des prêts. Les maîtres d’ouvrage ont un rôle fondamental par leurs actions transversales qui cible aussi bien le producteur que l’utilisateur. Ils sont donc à même d’impulser une politique locale.
Rappelons aussi que le développement durable coûte moins cher que de ne pas s’en préoccuper. Il faut parfois savoir surinvestir et agir pour obtenir les retours souhaités. Par exemple, la réaction des agents du Département à l’Agenda 21 a été exceptionnelle. La mobilisation de l’utilisateur réclame un management des acteurs.
En matière d’ingénierie et de recherche, les départements doivent travailler et investir ensemble. Cette problématique nationale aura un impact sur l’emploi. Nous devons notamment offrir aux PME les moyens d’investir et de faire face à la concurrence étrangère. Le politique doit donner du sens à un marché qui ne prend pas en compte les questions de développement durable. Les mesures, telles que la réimplantation d’un collège et d’un supermarché en centre-ville, sont des outils de prise de conscience du citoyen. D’autres mesures comme le suivi de la consommation par les usagers sont des outils d’évolution des comportements.
Enfin, le développement durable est une source de solidarité en France et dans le monde, pour les citoyens d’aujourd’hui et les générations futures.
Sigles
ADEME : Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie
AMO : Assistant maîtrise d’ouvrage
BTP : Bâtiment et travaux publics
CCI : Chambre de commerce et d’industrie
COV : Composé organique volatil
CSTB : Centre scientifique et technique du bâtiment
EDF : Électricité de France
ERDF : Électricité réseau distribution France
GES : Gaz à effet de serre
GIE : Groupement d’intérêt économique
GIEC : Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat
HQE : Haute qualité environnementale
HLM : Habitation à loyer modéré
MAINH : Mission nationale d’appui à l’investissement hospitalier
MID : Management immobilier durable
OPAH : Opération programmée d’amélioration de l’habitat
PALULOS : Prime à l’amélioration des logements à usage locatif
PIB : Produit intérieur brut
PPP : Partenariat public privé
R & D : Recherche et développement
THPE : Très haute performance énergétique