Transition énergétique : les CEE sous haute surveillance

Depuis un an, des mesures issues de la loi énergie-climat ont entrepris d'assainir les pratiques liées aux certificats d'économies d'énergie.

 

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Le plafond des pénalités a été porté à 4 % du CA HT du dernier exercice clos et à 6 % en cas de réitération.

Le dispositif des certificats d'économies d'énergie (CEE) a été fortement décrié ces dernières années car source de nombreuses manœuvres frauduleuses : travaux fictifs ou non conformes aux prescriptions réglementaires, travaux d'économies d'énergie surévalués ou valorisés plusieurs fois… Pour y remédier, la loi énergie-climat (LEC) du 8 novembre 2019 a instauré de nouveaux outils dans le Code de l'énergie, précisés notamment par un du 16 octobre dernier.

Encadrement du marché des CEE

La loi a tout d'abord pris trois mesures fortes pour encadrer le marché des CEE, à commencer par la mise en place d'une évaluation quinquennale du gisement d'économies d'énergie confiée à l'Ademe (). Elle a également renforcé la transparence des transactions liées à ces certificats. L'Etat, ou le cas échéant le registre national des CEE, doit désormais rendre public, chaque mois, le prix moyen auquel les certificats ont été acquis ou vendus. Le nombre de CEE délivrés par secteur d'activité et par opération standardisée d'économies d'énergie doit également être publié tous les six mois (art. L. 221-11). Enfin, la LEC a réduit la durée de vie des certificats, qui ne peut plus excéder la fin de la période suivant celle au cours de laquelle ils ont été délivrés (art. L. 221-12).

Contrôle avant la délivrance des CEE

Autre apport de ladite loi, un contrôle antérieur à la délivrance des CEE est instauré sur certaines opérations listées par arrê-té (art. L. 221-9 du code). Le demandeur des certificats devra ainsi justifier de contrôles effectués sur les opérations d'économies d'énergie réalisées dans le cadre de l'isolation des murs en secteurs résidentiel et tertiaire, ainsi que de l'isolation des parois sur des installations industrielles, engagées à compter du 1er janvier 2021 (art. 1er de l'arrêté du 16 octobre 2020 précité). Ces contrôles seront réalisés aux frais du demandeur, par lui-même ou par un organisme d'inspection accrédité selon la norme NF EN ISO/CEI 17020 ou une norme équivalente qu'il aura choisie.

Les contrôles seront menés sur un échantillon d'opérations faisant l'objet de la demande de CEE, sélectionnées de façon aléatoire (art. L. 221-9 du code et art. 1er de l'arrêté). Le pourcentage d'opérations contrôlées différera selon, le cas échéant, la nature de celles-ci (avec une majoration possible en cas de bonification du volume de CEE délivrés), le degré de précarité énergétique du ménage bénéficiaire ou encore la nature du contrôle effectué (par contact, c'est-à-dire par téléphone, courrier ou courriel avec le bénéficiaire de l'opération ; sur les lieux en cas de déplacement physique de la personne en charge du contrôle []).

Chaque opération contrôlée fera l'objet d'un rapport « qui atteste la réalité des opérations d'économies d'énergie et le respect des exigences réglementaires applicables ». Ce document devra signaler « tout élément susceptible de remettre en cause de manière manifeste les économies d'énergie attendues ». Il sera tenu à la disposition des agents désignés par le ministre chargé de l'énergie pour rechercher et constater les manquements et infractions. Les demandes de CEE devront préciser les opérations qui ont fait l'objet des contrôles (art. L. 221-9).

Des nouvelles obligations de signalement

Les éligibles au dispositif des CEE, les obligés et les délégataires d'une obligation d'économie d'énergie sont dorénavant tenus de signaler sans délai à l'organisme délivrant une certification, une qualification, un label ou tout signe de qualité requis par la réglementation en vigueur les éléments dont ils ont connaissance qui seraient susceptibles de constituer des non-conformités manifestes aux règles en la matière de la part d'une entreprise réalisant des prestations liées à la rénovation ou à l'efficacité énergétique (art. L. 221-13). Les agents de l'Etat peuvent aussi - sans y être contraints - procéder à un tel signalement (art. L. 222-10). L'organisme devra examiner sans délai les éléments signalés et mener au besoin des investigations complémentaires pouvant conduire à la suspension ou au retrait de la certification, de la qualification, du label ou du signe de qualité délivré.

Un dispositif d'échange d'informations entre les administrations

Les agents désignés par le ministère chargé de l'énergie et les services de l'Etat chargés des impôts, des douanes et droits indirects et de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent échanger tous documents et renseignements recueillis dans le cadre de leurs missions respectives (art. L. 222-10). Les informations ainsi obtenues ont la même valeur que les données détenues en propre. Ces administrations peuvent en outre, comme évoqué, signaler aux organismes accréditeurs des éléments révélateurs de non-conformités.

Enfin, la Cellule de renseignement financier nationale peut à présent transmettre au personnel du ministère chargé de l'énergie des informations en rapport avec leurs missions ().

Modification des pouvoirs de sanction

Désormais, le ministre chargé de l'énergie ne peut mettre les intéressés en demeure de se conformer à leurs obligations qu'en cas de manquements à leurs obligations déclaratives. Cependant, il peut les sanctionner financièrement en cas d'obtention indue de CEE. Le plafond des pénalités a été porté à 4 % du chiffre d'affaires HT du dernier exercice clos (au lieu de 2 %) et à 6 % (au lieu de 4 %) en cas de réitération ().

Lorsque le contrôle à l'origine d'une sanction met en évidence un taux de manquement supérieur à 10 % du volume de CEE contrôlé, le ministre peut obliger l'intéressé à effectuer des vérifications supplémentaires, réalisées à ses frais par un organisme d'inspection accrédité et indépendant de lui. Cette décision précise notamment le délai imparti pour ces vérifications et leurs modalités d'exercice, les opérations et les éléments concernés… (art. L. 222-2-1). L'intéressé devra mettre sans délai à disposition de l'organisme d'inspection les informations nécessaires. A défaut, le ministre pourra le sanctionner financièrement. L'organisme devra établir un rapport qui, s'il permet audit ministre d'établir l'existence de manquements, pourra également fonder des sanctions pécuniaires. Enfin, la LEC double le délai pendant lequel le ministre peut être saisi de faits dès lors qu'aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction n'a été accompli (art. L. 222-5). Elle le porte ainsi à six ans.

Prise en compte des émissions de GES

A noter encore, l'unité de compte (kilowattheure d'énergie finale économisé) des CEE délivrés peut désormais être pondérée en fonction des émissions de gaz à effet de serre (GES) évitées. De plus, les opérations d'économies d'énergie qui conduisent à une hausse des émissions de GES ne donnent plus lieu à la délivrance de CEE.

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