Alila se présente comme un « acteur national », classé « dans le top 10 des promoteurs ». Preuve de ce rayonnement hexagonal, le spécialiste de la vente en bloc de logements sociaux affirme, sur son site internet et dans ses derniers communiqués de presse, s’appuyer sur un réseau de « 13 agences régionales » ouvertes du lundi au vendredi, dans neuf régions (sur treize) de métropole.
Interrogé par « Le Moniteur » sur ses implantations locales, le promoteur n’a pas souhaité répondre. Nous nous sommes donc rendus sur place pour mesurer la réalité de sa présence sur le terrain.
Sa seule agence d’Occitanie est inexistante. « Ce n’est qu’une boîte aux lettres et nous n’avons personne sur place », reconnaît une salariée, jointe par téléphone via le numéro de l’agence de Montpellier indiqué sur le site internet d’Alila.
Vérification sur place : « Ils n’ont plus de boîte postale depuis avril », explique l’hôte d’accueil des espaces sous-loués par la marque de coworking Regus, dont les services de domiciliation d’entreprise et de réception du courrier sont facturés 38€ HT par mois.
Même destinée pour l’agence d’Aix-en-Provence, ouverte en 2017 pour conquérir la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Alila n’a plus de salarié au sein du centre d’affaires indiqué sur son site internet depuis juillet dernier, apprend-on sur place. A noter que le promoteur n’a produit aucun logement dans cette région, où la construction HLM repose à 79% sur la vente en l’état futur d’achèvement (Vefa), sa spécialité.
Société de domiciliation
A Bayonne, Alila ne loue pas de bureaux mais dispose bien d’une boîte aux lettres, via la société de domiciliation d’entreprises Fimatex. Il s’agit d’un « contrat à durée indéterminée pour recevoir du courrier et ouvrir un siège social », précise un salarié de Fimatex, qui a consulté la liste affichée à l’accueil du bâtiment pour vérifier que le promoteur faisait bien partie de la cinquantaine d’entreprises domiciliées. « Le client peut y mettre un terme à tout moment », ajoute-t-il.
Direction le Centre-Val de Loire. A Tours, Alila a bien son logo à l’entrée d’un espace de coworking, mais celui-ci ne réceptionne que le courrier. « Si vous voulez les rencontrer, allez voir à Orléans, suggère la responsable du site. Mais c’est peut-être une boîte aux lettres, comme cela était le cas ici. »
Dans la préfecture du Loiret, l’adresse de l’agence Alila correspond à un bâtiment tertiaire, dans lequel aucun logo n’indique la présence du promoteur, mais où Regus gère là aussi un centre d’affaires. L’hôtesse d’accueil propose de « laisser un message », car les salariés du promoteur sont absents. Donc Alila est bien présent dans la région ? « Ici c’est une agence », soutient-elle. Mais il n’y a aucun collaborateur aux horaires d’ouverture… Rencontrés au même étage, deux travailleurs, dont les employeurs affichent leur logo, ne connaissent pas Alila.
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Un poste de travail à Bordeaux
Dans un centre d’affaires de Nantes, une agence d’Alila couvre la Bretagne et les Pays de la Loire. A son apogée avant la pandémie, elle a employé jusqu’à une douzaine de personnes mais elle a, depuis, été déstabilisée par une vague de départs non compensés. Au moins une salariée, présente aux horaires d’ouverture, y travaille effectivement.
A Bordeaux, Alila loue un seul poste de travail dans un immeuble de coworking, chez Buro Club, nous explique-t-on à l’accueil. A Villeneuve-d’Ascq, près de Lille, le promoteur est client de Regus. Au moins deux salariés, dont un directeur des programmes, y travaillent. Une étiquette Alila est par ailleurs collée sur un panneau devant une place de parking.
A Metz, au moins deux salariés se retrouvent dans un espace de 20m² au premier étage d’un centre d’affaires. Cette équipe couvre le Grand Est avec des homologues basés à Strasbourg, dans un immeuble tertiaire à partager avec d’autres entreprises.
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Pour le marché francilien, Alila dispose d’une agence à Paris, située dans un immeuble haussmanien du 8e arrondissement. Là encore, il s’agit d’une adresse de coworking.
En complément de son siège à Lyon, le promoteur est également implanté dans la région Auvergne-Rhône-Alpes à Epagny Metz-Tessy, près d’Annecy, où un directeur d’agence a été nommé en mai dernier.
D’après nos vérifications, quatre adresses indiquées sur son site internet correspondent donc à des boîtes postales : Aix-en-Provence, Bayonne, Orléans et Tours. A Montpellier où le promoteur affirme être installé, le contrat de domiciliation lui permettant de recevoir du courrier a été résilié en avril dernier. Si l’on ne prend en compte que les villes où il emploie au moins une personne disposant d’un bureau, Alila compte huit implantations dans six régions.
Droit de réponse de la société Alila
Votre article du 21 novembre 2023 est le deuxième d'une série de quatre articles consacrés à la société Alila en quatre jours consécutifs.
Il relève qu'Alila, en plus de son siège social lyonnais, dispose, comme tant d'autres sociétés, parmi lesquelles la société éditrice de votre revue, d'établissements secondaires dans différentes régions de France, dont certains dans des centres d'affaires.
Chacun de ces établissements est dûment enregistré au Registre du commerce et des sociétés du Tribunal du commerce dans le ressort duquel il se situe.
Votre enquête a, du reste, permis de relever que, pour au moins huit de ces implantations sur treize, Alila disposait d'au moins un représentant permanent.
Il est donc injuste d'affirmer qu'il s'agit d'agence fantômes.