Nouvelle alerte sur la production HLM. Et cette fois-ci, ce n’est pas l’Union sociale pour l’habitat (USH) qui annonce une décroissance, mais Xerfi.
Dans une récente étude de marché, l’institut privé table sur une baisse de 3% des mises en chantier de logements sociaux en 2024 « pour atteindre un niveau plancher de 60 000 unités, puis encore de 2% en 2025 ». Entre 2010 et 2019, le rythme annuel tournait autour de 100 000.
Contexte : « L’équation financière des organismes HLM se complique sérieusement entre la rénovation énergétique de leur parc, en raison de la future interdiction de location des passoires thermiques, et l’envolée des coûts de la construction neuve », souligne Xerfi.
Hausse des revenus en 2025, supérieure à l’inflation
Si l’inflation annuelle devrait être ramenée autour de 2% en 2025 au plus tard selon la Banque de France, la hausse des revenus des bailleurs sociaux de 2% en 2024 et de 2,5% en 2025 ne devraient pas suffire à relever le double défi de rénovation et construction.
« Un projet de construction mobilise environ 14% de fonds propres, une source de financement aujourd’hui compromise par la contreperformance financière des acteurs. Au moins 800 000 logements devraient en principe faire l’objet d’une rénovation énergétique d’ici dix ans pour prétendre à une étiquette D pour une facture de 30Mds€ au minimum », anticipe Xerfi.
Lors du dernier Congrès HLM en octobre dernier, il restait 139 000 HLM étiquetés G, 323 000 F et 800 000 E, à rénover respectivement d’ici 2025, 2028 et 2034, selon l’USH.
Fragilisés par la réduction de loyer de solidarité (RLS) qui grève leurs recettes annuelles de 1,3Md€, les bailleurs sociaux doivent diversifier leurs sources de revenus. L’une des pistes, suggérée par le gouvernement, consiste à « s’orienter vers le logement abordable », dont le logement intermédiaire fait partie, rappelle Xerfi. « Mais certains n’auront pas d’autre choix que de se regrouper ou bien de s’adosser à l’un des deux leaders du secteur, Action Logement ou CDC Habitat », annonce-t-il.
Incontournables Action Logement et CDC Habitat
L’étude confirme ainsi la recomposition du monde HLM au profit des deux mastodontes, qui pèsent près de 30% du parc social, soit 1,5 million de logements.
Le groupe paritaire et la filiale de la Caisse des dépôts « ambitionnent (…) de dépasser la simple activité de gestionnaire HLM. Les deux opérateurs sont en outre en mesure de structurer le marché du logement abordable, où les contraintes sont moins prégnantes que dans le social. En clair, les deux majors ne manquent pas d’atouts pour renforcer leur poids ces prochaines années », explique Xerfi.
Les auteurs de l’étude évoquent même une « emprise » des deux groupes qui « devrait s’accentuer », sans toutefois donner de chiffres ni d’horizon.
Les ESH en position de force
Autre tendance : les Entreprises sociales pour l’habitat (ESH), dont certaines sont des filiales d’Action Logement, « sont aussi en mesure de tirer leur épingle du jeu dans le cadre de la reconfiguration du secteur », car les Offices publics de l’habitat (OPH) n’iront pas s’aventurer dans le marché du logement dit abordable, croit Xerfi.
Ces établissements publics locaux « restent attachés au modèle traditionnel du HLM de plus en plus décrié malgré ses avantages (proximité avec les besoins locaux, caractère vertueux du circuit de financement fermé…) », note l’institut privé. « Le glissement vers un modèle davantage diversifié est toutefois une piste à creuser et à laquelle les bailleurs sociaux vont devoir s’adapter », observe-t-il.
Le secteur HLM compte « 200 acteurs de moins qu’en 2015 pour un total d’un peu moins de 550 organismes », selon Xerfi. Cette reconfiguration, qui peut expliquer les tensions entre la Fédération des OPH et Action Logement, a été initiée en 2018 avec la loi Elan. Celle-ci impose aux bailleurs sociaux gérant moins de 12 000 logements de s’adosser à un groupe ou de fusionner.