Déclarant un « chiffre d’affaires » (CA) de 484M€ en 2018 et supérieur à 600M€ depuis 2019, Alila se présente comme un membre du « top 10 des promoteurs français ». L’obtention de ce CA « courant » sur plusieurs années reviendrait à multiplier au moins par trois le CA consolidé du groupe « Alila Participation » issu du résultat des Sociétés civiles immobilières de construction-vente (SCCV) créées à chaque opération potentielle.
Prenant en compte l’avancement des chantiers, ce chiffre-clé est validé par un commissaire aux comptes. Le rapport consolidé de ce dernier fait état, en 2017, d’un CA de 104M€. En outre, selon un document interne, Alila a réalisé un CA de 52M€ au premier semestre 2017. Comment atteindre les 327M€ de CA qu’il a annoncés à la presse pour l’année 2017 ?
Seulement quatre programmes livrés en six mois
Autre indicateur : les chantiers finis. Selon ce même document, Alila a livré 9 programmes au premier semestre 2017 et 4 au premier semestre 2018. A l’époque, ses « principales opérations », peut-on lire, généraient chacune quelques millions d’euros de CA. Or, il aurait fallu que celles-ci représentent chacune plusieurs dizaines de millions d’euros pour obtenir les impressionnants résultats annoncés par Alila.
« Tous les promoteurs communiquent sur un volume d’affaires mais ils ne le confondent pas avec le chiffre d’affaires consolidé annuel », note un ancien cadre. « Hervé Legros (le dirigeant-fondateur, NDLR) nous répétait à chaque comité de direction qu’il pesait un milliard d’euros de chiffre d’affaires. En réalité, c’était un milliard d’euros de volume d’affaires, donc avec des opérations pas encore engagées », se souvient un autre.
« Entre directeurs d’agence régionale, en additionnant nos chiffres sans connaître ceux de l’agence de Lyon tenus secrets, nous arrivions à la conclusion qu’Hervé Legros mélangeait les choux et les carottes », raconte un ex-responsable. « Il s’est vanté de mentir pour faire grandir son entreprise, devant tous les salariés », confie un quatrième témoin. Selon plusieurs anciens salariés, la scène aurait eu lieu en 2018, lors d’un séminaire au palace Cheval Blanc de Courchevel.
Chiffre d’affaires « courant », pas consolidé
Non soumis aux communications financières d’un groupe coté, Alila ne gonflerait-il pas son chiffre d’affaires (CA) communiqué aux salariés et à l’extérieur de l’entreprise ? Ne ferait-il pas passer le volume d’affaires glissant sur plusieurs années pour un CA consolidé annuel ?
Par volume d’affaires, il faut entendre : les logements vendus à la clôture du bilan annuel, mais aussi les programmes dont le permis de construire est « à déposer », « déposé » ou « purgé », selon un document interne.
Autrement dit, le promoteur lyonnais prendrait en compte des opérations qui ne sont pas autorisées à la construction et ne le seront peut-être jamais, pour des raisons administratives, économiques, politiques ou techniques.
Alila n’a pas répondu aux questions du « Moniteur ». L’entreprise ne souhaite plus participer à notre classement des promoteurs immobiliers, basé sur le CA hors taxe consolidé de l’année écoulée, et n’a toujours pas communiqué ses résultats pour 2022.
Droit de réponse de la société Alila
Votre article du 22 novembre 2023 est le troisième d'une série de quatre articles consacrés à la société Alila en quatre jours consécutifs.
Il s'échine, comme le premier de cette série, à remettre en cause les chiffres des activités de la société Alila, que vous aviez pourtant, pour certains, diffusés sans la moindre réserve à l'occasion de précédents articles publiés ces dernières années dans votre revue.
Tout spécialement, le titre de votre article qualifie le chiffre d'affaires déclaré par Alila de « surprenant ».
Ici encore, les témoignages anonymes rapportés et les insinuations qu'ils véhiculent, qu'Alila conteste fermement, ne sauraient remettre en cause les comptes annuels de la société.
Ces comptes sont élaborés par les services comptables d'Alila, mis en forme par un expert-comptable, puis soumis à la certification d'un commissaire aux comptes.
Les chiffres qu'ils révèlent sont, par ailleurs, validés par le contrôle interne, le contrôle de gestion et différents audits menés par des cabinets extérieurs.
Ces comptes sont, en outre, régulièrement déposés au Greffe du Tribunal de commerce de Lyon.
Ils sont le reflet fidèle et sincère des activités d'Alila et n'ont donc rien de surprenant.
