Première partie Texte adopté le 14 décembre 2005
Le 14 décembre 2004, le Bureau du Conseil économique et social a confié à la section du cadre de vie la préparation d’un rapport et d’un projet d’avis sur « Le logement de demain, pour une meilleure qualité de vie »1.
La section a désigné Mme Cécile Felzines, comme rapporteure.
Introduction
Le logement a toujours été une préoccupation pour le Conseil économique et social. Il y a consacré de nombreux rapports et avis. Parmi les plus récents peuvent être cités « L’accès au logement, droits et réalités » en 2004 ainsi que les deux saisines gouvernementales sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine en 2003, et le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale en 2004.
Les aspects quantitatifs prédominaient dans ces travaux, même si les aspects liés à la mixité des populations, à l’accessibilité, notamment dans le rapport et avis présentés par M. Vincent Assante en 2000, ou à la dégradation du bâti dans les copropriétés (2002) avaient fait l’objet d’une attention particulière, tant il apparaîtrait vain de vouloir séparer le quantitatif du qualitatif. Pour avoir quelque peu sous-estimé l’importance de ce lien, nombre de nos compatriotes connaissent des difficultés dans certains quartiers en particulier.
Si l’on s’en tient aux chiffres avancés par la Fondation Abbé Pierre dans son dixième rapport sur le mal-logement, on peut estimer à 5,67 millions le nombre de personnes souffrant encore de non ou de mal-logement en 2004 en France. Outre-mer, la situation est encore plus critique dans la mesure où l’habitat insalubre reste encore très présent. Les constructions spontanées sur des terrains à la propriété mal définie viennent compliquer et aggraver des difficultés de ces territoires fragiles écologiquement et pour certains exigus. Enfin, il ne faut pas oublier les salariés à revenus modestes ou moyens, logés très loin de leur lieu de travail et qui perdent beaucoup de temps et d’argent dans les transports, ce qui occasionne aussi beaucoup de fatigue et de tension aux dépens de la vie familiale et associative.
Oui, il faut construire vite et combler les retards, mais l’urgence ne doit pas conduire à reproduire les erreurs du passé. La mise en place du « plan Borloo » offre l’occasion d’agir aussi bien sur le flux (nouveaux logements) que sur le stock (logements anciens) sachant que se limiter sur le premier segment reviendrait à n’agir chaque année que sur 1 % du parc total.
Les nouvelles constructions comme les rénovations devront prendre en compte les attentes des habitants exprimées par nombre de sondages et d’études, et répondre aux nouveaux modes de vie et aux nouvelles façons d’habiter qui découlent des évolutions sociodémographiques du pays.
Les progrès technologiques permettent aujourd’hui d’améliorer le confort tout en diminuant les coûts grâce à une industrialisation des produits et à la constitution de filières qui favoriseront le développement de l’emploi par de nouveaux process.
Enfin, le logement doit s’inscrire dans une démarche de développement durable, tant par ses modes de construction que par les matériaux utilisés, sa consommation énergétique ou le type d’énergie choisi.
La qualité du cadre de vie c’est bien sûr celle du logement, sa dimension, ses équipements, son évolution et son adaptabilité, mais c’est aussi son environnement social et urbain et ses services de proximité.
La qualité a certainement un coût mais ne peut en aucun cas être assimilée à un surcoût. Investir dans l’isolation thermique et les énergies renouvelables c’est à la fois épargner des énergies fossiles en voie d’épuisement et diminuer les dépenses énergétiques à venir. Prévoir des logements accessibles, plus spacieux et mieux insonorisés c’est aussi assurer un meilleur climat, tant entre les divers membres de la famille qu’avec le voisinage. Le besoin de sécurité qui s’exprimerait par la recherche d’un environnement social proche de sa culture et de son niveau économique pourrait aller à l’encontre de la diversité résidentielle voulue par les pouvoirs publics.
Nos voisins, notamment ceux de l’Europe du Nord, l’ont bien compris. Les habitants jouissent d’un meilleur confort, leurs entreprises ont développé des filières industrielles du bâtiment efficaces et leur environnement est mieux protégé.
CHAPITRE I : LE CONSTAT
Au cours du dernier siècle, notamment dans sa deuxième moitié, notre pays a connu de profonds bouleversements induits par la diffusion des nouvelles technologies. Les transformations des modes de vie se sont succédé à un rythme bien plus rapide que celles enregistrées par les sociétés humaines au cours de leur histoire. La « fée » électricité et le pétrole sont à l’origine de la plupart de ces bouleversements.
Aujourd’hui plus de 80 % de la population vit en milieu urbain ou à sa périphérie alors qu’au début du XXe siècle 90 % de la population était encore rurale. Le mouvement vers les grandes villes se poursuit, même si l’attractivité des villes moyennes et de leurs aires urbaines domine. On estime que chaque année cette extension territoriale due en majeure partie à l’habitat individuel consomme 550 km2 de terrains agricoles : environ 350 km2 pour l’habitat, 100 km2 pour les réseaux et 70 km2 pour les activités autres qu’agricoles (« La maîtrise foncière : clé du développement rural », avis présenté par M. Jean-Pierre Boisson, adopté par le Conseil économique et social le 13 avril 2005).
Depuis le milieu des années cinquante, le confort des logements s’est globalement amélioré : 91 % des logements sont dotés des trois éléments de confort (WC intérieurs, salle d’eau, chauffage central), des gains d’espace sont notables. Les surfaces moyennes passent de 72 m2 en 1973 à 90 m2 en 2002 même si de fortes disparités existent au niveau géographique et entre logement individuel et collectif, en accession ou en locatif et, dans ce dernier cas, entre parc public et parc privé. Selon les normes de l’INSEE, le surpeuplement est en diminution (10,2 % des résidences principales) alors que le sous-peuplement a tendance à se développer. Un tiers des appartements franciliens est aujourd’hui sous-peuplé.
Cependant, on peut dire qu’environ 10 % du parc ne répond ni aux normes sanitaires (humidité, peintures au plomb…) ni à celles de sécurité (installations électriques, risques d’incendie…) et se trouve en état de surpeuplement. Il s’agit généralement de logements anciens du parc privé situés en centre-ville. Dans certains quartiers, le mal-vivre continue à se développer en dépit de la succession des nombreuses politiques de la ville mises en place. La mixité tant recherchée ne parvient pas à s’imposer. Dans le même temps, l’extension périurbaine dévoreuse de foncier et coûteuse en deniers publics se poursuit en dépit des législations adoptées pour la contenir (loi SRU).
I - Une profonde évolution des modes de vie…
Avec le vieillissement de la population (selon l’INSEE les plus de 75 ans sont passés de 4,9 % en 1962 à 8,7 % en 2004, ils formeront plus du quart de la population en 2050), c’est l’évolution des modes de vie accompagnée d’un fort taux de décohabitation et la formation de nouveaux ménages qui pèsent le plus sur les besoins en logements, leur dimension et leur configuration.
La plupart des familles, quel que soit leur statut, même celles qui disposent de revenus moyens, se heurtent à des difficultés pour se loger. Tel est le cas en particulier des jeunes foyers en charge de plusieurs enfants. Les jeunes décohabitent plus tardivement en raison de l’allongement de leurs études, des difficultés d’emploi et de logement à un prix acceptable. Les divorces et les séparations sont plus fréquents, quant aux familles monoparentales leur nombre est en forte augmentation (près de deux millions). Elles résultent aussi bien de divorces, de séparations, de veuvages, que de choix personnels. Mais souvent, il ne s’agit pas de situations durables. Elles peuvent conduire à la formation de nouveaux couples. Les familles recomposées sont généralement beaucoup plus larges, car elles réunissent les enfants de deux unions distinctes auxquels peuvent s’ajouter ceux du nouveau couple.
Enfin, le nombre de personnes seules de tous âges est lui aussi en forte croissance (célibataires, divorcés, séparés, veufs). Les femmes sont plus représentées, surtout à mesure qu’elles avancent en âge.
Ces évolutions sociodémographiques exercent une forte influence sur les modes d’habiter.
II - … Qui transforme les modes d’habiter…
La famille vit de façon atomisée, chacun de ses membres ayant acquis sa propre autonomie spatiale surtout si la mère de famille travaille à l’extérieur. Ces phénomènes qui ont débuté dans les années soixante-dix perdurent.
On assiste à une certaine remise en cause des standards traditionnels. La salle à manger perd sa fonction au profit de la cuisine qui devient un lieu de convivialité. Chacun peut y préparer son propre repas à l’heure qui lui convient, et le consommer sur place entre le four à micro-ondes et le réfrigérateur-congélateur. La chambre est transformée en espace polyvalent. On y dort toujours certes, mais elle est aussi devenue un espace de travail, de détente, de récréation et de convivialité où les enfants peuvent recevoir leurs amis. Télévision, chaîne Hi-fi, console de jeux, ordinateurs ont pris place à côté du bureau, de la bibliothèque et des placards pour les vêtements. Le besoin d’espace est évident. La salle de bains aussi s’est modifiée. Elle accueille, outre les équipements habituels, des appareils de sport, de nombreux rangements, des plantes vertes et s’ouvre fréquemment sur l’extérieur.
L’absence de buanderie continue à transformer le circuit du linge (lavage-séchage, repassage-rangement) en un véritable casse-tête.
Dans l’habitat individuel, le garage se mute souvent en espace de bricolage.
Toutes ces modifications s’accompagnent d’un goût prononcé pour la nature. Balcons, terrasses dans les appartements, vérandas et jardins pour les maisons font l’objet de soins attentifs. Le jardinage devient l’une des activités de loisirs les plus prisées des Français.
L’allongement de la durée de la vie, l’extension du temps libéré par la mise en place des 35 heures et la pratique du travail à domicile, exercent une forte influence sur les attentes des habitants pour leur habitat de demain.
III - … Et oriente les attentes des ménages…
Sondages enquêtes et études confirment les évolutions déjà constatées et en précisent de nouvelles. L’analyse de ces nombreux documents montre que c’est le lieu d’implantation et le coût du logement qui déterminent les choix.
Le rejet de la concentration urbaine est affirmé, les villes moyennes voire les communes rurales sont préférées aux grandes agglomérations même si celles-ci restent majoritairement pourvoyeuses d’emplois. La maison individuelle est plébiscitée et une attention particulière portée à son environnement. Dans ce cadre, l’école devient un enjeu stratégique dans le choix résidentiel, de même que le voisinage, qui, plus que jamais, apparaît comme un marqueur social pris en compte par les ménages dans leurs arbitrages.
Le statut recherché est sans conteste celui de propriétaire. Habiter sa propre maison en périphérie d’une ville moyenne serait le rêve de la plupart de nos concitoyens. Parmi les 56,7 % de propriétaires, 80 % possèdent une maison individuelle !
S’agissant du logement lui-même, les attentes se portent prioritairement sur une extension spatiale. Même si la surface moyenne par habitant est passée de 31 m2 à 37 m2 en une vingtaine d’années, l’exiguïté de la cuisine et des chambres est la plus souvent dénoncée.
La nuisance la plus fréquemment citée par les Français est le bruit. La mauvaise isolation phonique en est la cause majeure (bruit extérieur, circulation automobile en particulier mais aussi bruits de voisinage). Les attentes qualitatives se portent aussi sur l’isolation thermique, la qualité de l’air, le chauffage, les équipements sanitaires et les fermetures. Elles dénotent des préoccupations majeures : le coût des transports, le souci de réduire la consommation d’énergie et d’eau dont le coût grève de plus en plus le budget des ménages ainsi que le besoin de sécurité tant à l’intérieur de l’habitat que dans son environnement.
IV - … Tandis que les innovations technologiques qui permettraient d’y répondre peinent à s’imposer
L’amélioration de la qualité s’est progressivement imposée grâce à l’adoption de réglementations, de normes, de labels et de certifications. Dans ce domaine, les textes et les organismes foisonnent. Nous retiendrons dans cet ensemble : la démarche HQE, Qualitel et la marque NF constructions (logements individuels et collectifs, bâtiments tertiaires), qui répondent à certaines exigences.
L’innovation existe mais elle est mal connue. Peu répandue, elle est donc d’un coût élevé, ce qui conforte l’idée selon laquelle la qualité serait un « surcoût » ; cette perception étant partagée tant par les ménages que par les maîtres d’ouvrage. Il est vrai que le logement est cher. Le seul coût du foncier en Ile-de-France et dans certaines grandes agglomérations peut représenter 30 à 50 % du montant total d’une opération et le prix moyen du mètre carré construit atteint des sommes jamais égalées (il a été multiplié par deux en sept ans), rejetant ainsi les moins nantis vers des périphéries de plus en plus lointaines. Ce coût empêche souvent tout investissement plus qualitatif.
En dépit des souhaits que les Français expriment dans les enquêtes sur la qualité, ils sont difficiles à convaincre d’engager une dépense supplémentaire de 10 à 12 % pour l’achat ou la rénovation de leur logement. Il est vrai que le taux d’effort concernant le logement atteint un niveau très élevé pour certaines familles et qu’il leur est impossible d’engager une telle dépense ou d’en obtenir le financement. Si les déductions fiscales peuvent apporter une réponse satisfaisante pour les ménages imposables, les non-imposables doivent pouvoir bénéficier d’aides financières spécifiques. De leur côté, les promoteurs et bailleurs répugnent à introduire des innovations dont ils estiment que le coût et les réserves qu’elles suscitent notamment de la part des assureurs risqueraient d’inquiéter la clientèle.
Pourtant, les pays voisins, notamment ceux du Nord de l’Europe, n’hésitent pas à innover dans leurs constructions surtout lorsque ces innovations conduisent à des économies d’énergies ou sont destinées à introduire des énergies renouvelables. Le caractère obligatoire de l’introduction de ces technologies en facilite la diffusion.
Les propositions que formule notre assemblée à l’issue de ce constat visent à la fois à mieux répondre aux attentes des Français et aux impératifs des accords de Kyoto. Elles s’inscrivent dans une démarche de développement durable guidée par l’impérieuse nécessité d’anticiper l’épuisement des énergies fossiles et reposent sur une meilleure synergie de l’ensemble des acteurs concernés.
CHAPITRE II : PROPOSITIONS
Concevoir un habitat de qualité est un défi que se doit de relever notre société. Il doit à la fois favoriser les solidarités, respecter l’environnement, économiser les ressources et offrir à la création architecturale, un espace d’expression. Toute construction de logement doit s’inscrire dans cette démarche.
Dans le passé, dans des situations où les besoins étaient criants, certains constructeurs ont fait appel à de grands architectes, jouant ainsi un rôle moteur pour l’ensemble du secteur.
Par leur audace et malgré les critiques dont ils ont fait l’objet, ces logements ont suscité un nouvel urbanisme et de nouvelles formes d’habitat aujourd’hui encore souvent considérées comme innovantes.
Aujourd’hui, sans doute sous la pression de l’urgence malgré des réalisations et des prestations de qualité, le logement, à de notables exceptions près, reproduit dans la plupart des cas des schémas et des plans standards, dépourvus d’imagination et réduisant au minimum la vraie innovation. La responsabilité en revient souvent au peu d’exigence des commanditaires et maîtres d’ouvrage soumis à des contraintes financières.
Dans le cadre d’une volonté politique plus affirmée, le Conseil économique et social souhaite que le logement, public ou privé, retrouve ce rôle moteur.
Tant pour le logement social locatif que pour l’accession à la propriété, il convient de donner à tous les ménages un logement durable et de « grande » qualité, permettant toute accessibilité. Bien inséré dans un environnement adapté, il doit utiliser les techniques et les matériaux les plus performants. Pour le logement social, la solidarité de la nation doit s’exprimer par un effort majeur notamment dans les moyens mis à disposition. Tous les efforts financiers consentis seront largement compensés par la diminution des coûts d’entretien, la baisse des charges, sans oublier le coût difficilement chiffrable du mal vivre. En y intégrant le sentiment de valorisation et de dignité que ces logements apporteront aux populations concernées, les surcoûts initiaux seront vite amortis.
Il n’est plus temps de se demander si c’est possible ou si c’est coûteux, de se freiner en se disant que ce sera difficile et compliqué. Il s’agit de savoir quand on commence, en se dotant des moyens normatifs, techniques et financiers pour y parvenir et en mettant en place une évaluation régulière des résultats.
Au terme de ses auditions, le Conseil économique et social est convaincu que l’ensemble des intervenants est prêt à adhérer et à se mobiliser autour d’un projet fondé sur les principes du développement durable et sur l’innovation répondant aux attentes des Français.
I - Inscrire le logement dans la politique de développement durable
Appliqué au logement, à l’architecture et à l’urbanisme, le concept de développement durable remet en cause les pratiques les plus usuelles de construction, gaspilleuses en énergie, en espaces et paysages, coûteuses en maintenance et peu favorables au lien social.
Il répond aux défis de notre société confrontée à la pénurie annoncée des énergies fossiles, à la stagnation des revenus des ménages et au respect de nos engagements internationaux.
Cette demande de « durabilité » ne permet plus de concevoir et de réaliser des ouvrages comme par le passé : la construction durable commence très en amont, par une réflexion préalable s’inscrivant dans un souci d’aménagement du territoire. Les matériaux comme les techniques utilisés dans la construction d’un logement doivent donc répondre à cette préoccupation environnementale.
A - Mettre en synergie maître d’ouvrage et maître d’œuvre dans un objectif de qualité
De la programmation à la réalisation, de multiples acteurs aux missions et aux responsabilités différentes interviennent dans la création de notre cadre de vie. La maîtrise d’ouvrage, préoccupée à juste titre du financement de l’opération, aura parfois du mal à orienter son programme vers l’innovation, fût-t-elle porteuse d’amélioration de la qualité.
Elle préférera souvent assurer son opération par l’adoption d’un projet aux dispositifs constructifs déjà éprouvés et aux prestations habituelles.
La complexité des opérations, la multiplicité des techniques requises, ont entraîné « l’atomisation » de la maîtrise d’œuvre en une juxtaposition de compétences, rendant difficile la synthèse architecturale et éloignant son titulaire de la position centrale qu’il doit occuper. La technique doit aider et accompagner la création architecturale et non l’asservir.
L’entreprise enfin, quelles que soient sa taille et la dimension de l’opération, et devant son obligation de résultat, renonce souvent à s’engager dans des voies nouvelles que le dédale des normes, réglementations, référentiels, marques ou labels, rendent moins accessibles.
Ces acteurs professionnels, malgré des formations originelles différentes et des intérêts parfois divergents, doivent travailler en synergie avec pour objectif commun l’amélioration de la qualité.
1. Assister la maîtrise d’ouvrage dans son rôle de programmation
Publics ou privés, les maîtres d’ouvrage représentent différents professionnels ; élus, responsables d’organismes d’HLM pour les premiers promoteurs constructeurs, lotisseurs, aménageurs-lotisseurs pour les seconds. Ils ont la responsabilité de construire la ville de demain. Détenteurs de mandats politiques ou non, ils assument la lourde tâche de la programmation d’opérations de dimension variable mais qui toutes modifieront le paysage urbain et la qualité de vie de leurs concitoyens pour de très nombreuses années. Les qualités techniques et économiques du maître d’ouvrage, chef de file, ne suffisent pas pour améliorer le cadre de vie et sa qualité. Il faut aussi reconnaître que préalablement au choix du maître d’œuvre, le maître d’ouvrage doit résoudre de nombreuses difficultés foncières, budgétaires et juridiques avec les multiples études d’impact et débats publics.
Le maître d’ouvrage n’a pas toujours à ses côtés et en amont de la décision, l’assistance sociologique, urbanistique et architecturale nécessaire pour éclairer sa décision. C’est pourtant de la qualité de la programmation (objectifs, moyens, délais) que dépend en grande partie la qualité de sa réalisation. Tout changement en cours d’opération en aggrave les coûts et pèse sur le résultat final.
Le Conseil économique et social souhaite que la maîtrise d’ouvrage prépare le projet avec l’appui systématique de compétences et les conseils de professionnels de la programmation parmi lesquels la sensibilité architecturale doit être présente.
Elle doit s’appuyer également sur une large concertation avec les citoyens telle que prévue par les textes dont la loi relative à la démocratie de proximité. Les objectifs de la planification et de la programmation des travaux doivent s’insérer dans le tissu socioéconomique et cette concertation, ce travail indispensable en amont de la décision, ces prestations intellectuelles et techniques doivent être prévues dans le financement global de l’opération.
Planifier et programmer ne peut s’improviser.
Le Conseil économique et social déplore qu’il n’existe pas pour l’heure suffisamment de formations spécifiques qualifiantes pour les maîtres d’ouvrage. Même si les municipalités les plus importantes peuvent disposer de leurs propres services d’urbanisme, et les plus petites des compétences des Directions départementales de l’équipement (DDE) et des Conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), il apparaît souhaitable que les organismes de formation des élus puissent mettre en place des formations adaptées à cette fonction essentielle. De même, le management de la maîtrise d’ouvrage pourrait être complété par une formation du type de celle proposée par l’ARECOOP (outil de formation des sociétés coopératives d’HLM) et le GEPA (structure de formation des architectes) à destination des maîtres d’ouvrage et des architectes. La culture commune acquise permettrait de mieux identifier le « chef de file » et le « chef d’orchestre » que doivent être l’élu-maître d’ouvrage et l’architecte-maître d’œuvre.
Enfin, il est indispensable qu’un maître d’ouvrage puisse dialoguer en amont du projet avec un service instructeur du permis de construire compétent, efficace et ouvert aux propositions innovantes, ce qui n’est pas toujours le cas. Il conviendrait que les délais d’instruction soient systématiquement respectés et que les recours abusifs soient sanctionnés comme le prévoient les textes.
2. Renforcer le rôle de l’architecte
Chef d’orchestre des opérations de construction, traducteur du programme décidé par la maîtrise d’ouvrage, il a la charge de la direction de la qualité de mise en œuvre de l’ouvrage. Coordonnateur de l’équipe de maîtrise d’œuvre, il occupe une position difficile qui lui est souvent contestée. Il n’intervient que sur un tiers environ des constructions en France (une maison sur vingt, moins d’un logement sur quatre, un bâtiment neuf sur deux). Telle n’est pas la situation dans les autres pays, notamment chez nos voisins européens : on compte 45 architectes pour 100 000 habitants en France contre 148 en Italie, 123 au Danemark, 68 en Espagne.
Les missions de l’architecte sont nécessairement et heureusement très étendues. Il intervient dès le début de l’opération dans l’analyse des données humaines, techniques, géographiques et environnementales du programme.
Son équipe élabore les plans, les détails. Il coordonne les données de ses partenaires techniques et économiques. Il prescrit les prestations, matériels et matériaux qui seront mis en œuvre.
Il analyse les offres des entreprises dans le cadre des consultations et conseille le maître d’ouvrage sur le choix de la meilleure proposition.
Il dirige qualitativement le chantier et contrôle la conformité de la mise en œuvre aux plans et prescriptions qu’il a établis. Il assiste enfin la maîtrise d’ouvrage dans les opérations de réception des travaux, acte juridique important qui marque le point de départ des délais de garanties.
Lorsque l’on constate que la complexité technique du bâtiment entraîne aujourd’hui l’intervention de spécialistes de plus en plus nombreux, il faut à l’évidence établir la synthèse de ces compétences entre l’ingénierie de structure, les choix thermiques, acoustiques, l’éclairage, la sécurité, etc., et bien sûr l’économie de l’ensemble du projet. Le Conseil économique et social estime en conséquence que l’on doit conserver et renforcer le rôle de l’architecte en tant que coordonnateur de cette équipe de maîtrise d’œuvre.
Cette position de « chef d’équipe » a pour contre-partie une bonne formation. Généraliste du bâtiment, l’architecte-urbaniste, parfois paysagiste, pour rester créateur et asseoir son art architectural, doit également comprendre le langage de ses partenaires techniques comme il espère la réciproque.
L’émergence d’une culture partagée par les différentes composantes de la maîtrise d’œuvre doit être favorisée.
Une plate-forme commune de formation pourrait aider à ce rapprochement initial, les sensibilités différentes s’exprimant ultérieurement.
Il convient que la formation initiale des architectes comporte le maximum de stages et de formation en entreprises, auprès de la maîtrise d’ouvrage et bien sûr dans les agences d’architecture, leur permettant ainsi un ancrage sur la réalité du terrain, sur l’innovation technologique, sans nuire à l’apprentissage en école, basé sur la recherche architecturale et le projet.
Il est à noter que les récentes réformes de l’enseignement de l’architecture ont intégré les demandes des organisations professionnelles (UNSFA) d’établir au terme des études une période professionalisante obligatoire par la pratique de la maîtrise d’œuvre architecturale. Elles permettent le renforcement des compétences même si les organisations regrettent que cette période ait été réduite, le dispositif perdant beaucoup de son efficacité à leurs yeux.
Les innovations technologiques se succèdent à un rythme soutenu, les process industriels aussi. Les réglementations et les textes normatifs évoluent. L’architecte doit s’adapter en permanence à ces nouvelles données et les maîtriser pour remplir au mieux ses missions.
La formation professionnelle continue, volontaire à ce jour et prise en charge à la demande par les organismes collecteurs, pourrait s’orienter vers une obligation à condition que des crédits complémentaires puissent être dégagés, le taux de la taxe actuelle ne permettant pas ce financement.
Pour une meilleure circulation des idées, des innovations et, pour un partenariat international productif, l’harmonisation européenne des diplômes sur la base LMD (licence-maîtrise-doctorat) devrait se poursuivre. Ceci entre d’ailleurs dans le cadre des recommandations du Conseil des architectes de l’Europe (CAE) et de l’Union internationale des architectes (UIA).
Notre assemblée souhaite une présence accrue de la profession dans tous les secteurs de la construction, surtout en matière de réhabilitation et de logement individuel. L’intervention de l’architecte y est parfois perçue comme un « surcoût » car non pris en compte dans une offre globale, la rémunération au pourcentage du montant des travaux confortant ce sentiment non fondé.
Depuis plusieurs années, les « Architectes Bâtisseurs » ou « Architecteurs » proposent une offre regroupant la conception et la réalisation des ouvrages et ont fait progresser le taux de pénétration des architectes dans le secteur de la maison individuelle, améliorant en conséquence la qualité architecturale des constructions.
Un protocole d’accord expérimental, signé en septembre 2005 entre les architectes et les artisans du bâtiment, prévoit une collaboration pour une offre de qualité dans le domaine de la construction de maisons individuelles.
Le Conseil économique et social encourage ces dispositifs et demande qu’une large communication montrant le retour sur investissement procuré par cette démarche soit faite en direction du grand public.
3. Généraliser la démarche Haute qualité environnementale (HQE)
Les professionnels de la construction de logements et les associations de consommateurs se sont engagés sur le label Qualitel. Ce label de qualité a conduit en 2005 à la certification qui en plus de ses sept critères dont celui « habitat et environnement » en ajoute un nouveau « conception économe en énergie ». Notre assemblée approuve cette démarche mais elle estime qu’il ne s’agit que d’une première étape et qu’il convient, compte tenu de la situation énergétique créée par l’épuisement programmé des ressources fossiles et de l’augmentation de leur coût, d’étendre au logement la démarche HQE réservée jusqu’à maintenant au tertiaire non résidentiel.
Cette démarche vise à maîtriser les impacts des bâtiments sur leur environnement tout en créant des intérieurs sains et confortables. Elle concerne toutes les étapes de l’élaboration et de la vie du logement depuis la programmation, la conception, la construction, l’utilisation, la gestion jusqu’à la démolition du bâtiment. Elle est formalisée dans la démarche Haute qualité environnementale (HQE) qui se décline en quatorze cibles pour aider les maîtres d’ouvrage à structurer leurs objectifs. La loi SRU conduit les collectivités à adopter une démarche similaire dans l’élaboration de leurs différents documents d’urbanisme (SCOT-PLU) et du Plan d’aménagement et de développement durable (PADD).
Notre assemblée considère que cette méthode, évolutive par définition, correspond parfaitement à la démarche de développement durable dans laquelle notre pays doit s’inscrire pour respecter ses engagements souscrits à Kyoto, réaffirmés et renforcés dans le Plan climat adopté en 2004. La crise actuelle en fait un impératif. Certains ajustements sont nécessaires mais sa diffusion la plus large possible doit se poursuivre car si la démarche HQE peut s’appliquer facilement aux constructions nouvelles, elle présente aussi l’avantage de s’adapter aux bâtiments anciens et à la rénovation. La mise en application du Plan de rénovation urbaine offre une occasion unique de mise en œuvre de cette démarche dans l’habitat ancien que le Conseil économique et social recommande de ne pas négliger.
La certification de la démarche HQE, en réflexion actuellement, permettrait sans doute au commanditaire d’avoir une garantie sur la qualité environnementale du bâtiment.
Notre assemblée estime que si la réflexion en cours devait aboutir à une certification HQE, celle-ci devrait être limitée dans un premier temps aux grands programmes prévus par la loi de rénovation urbaine pour permettre une évaluation. La démarche souple actuelle pourrait continuer à s’appliquer sur les autres opérations.
Il conviendrait également d’encourager les collectivités à s’engager davantage dans les Opérations programmées d’améliorations thermique et énergétique des bâtiments (OPATB) qui poursuivent ces mêmes objectifs.
Par ailleurs, le Conseil économique et social souhaite que les industriels de la construction poursuivent la rédaction de fiches énonçant les caractéristiques environnementales et sanitaires des produits selon le référentiel élaboré par l’AFNOR en 2002.
B - Mieux utiliser les procédures
1. Maîtriser et accroître l’offre foncière
La question foncière a fait l’objet de nombreux rapports (Conseil économique et social en janvier 1996 présenté par M. Jean-Louis Dumont, Fédération des coopératives d’HLM en septembre 2004 et Sénat, rapporté par M. Thierry Repentin en juin 2005).
La gestion foncière d’un territoire dépend d’abord de la volonté des élus d’élaborer leurs PLU et leurs PLH. Clairs, descriptifs et prospectifs, ils doivent être établis en concertation avec la population et nombre de professionnels : services déconcentrés de l’État, architectes, urbanistes, paysagistes. Ces documents doivent permettre d’élaborer ensuite une planification et une programmation dans la durée et refléter une vision globale de l’ensemble des aménagements, espaces, bâtis et non bâtis, publics et privés afin de permettre de mieux insérer les projets dans leur environnement socio-économique.
Le Conseil économique et social approuve les récentes déclarations du ministre de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, M. Jean-Louis Borloo concernant le projet de loi portant engagement national pour le logement :
-simplification des procédures de mise en vente des terrains publics (mise à disposition de terrains de l’État à moins 20 % du prix fixé par le service des domaines pour la construction de logements sociaux) ;
-renforcement des PLU qui pourront imposer dans des secteurs bien définis un pourcentage minimum de logements sociaux ou intermédiaires ;
-possibilité dans certains cas de dépasser les règles de densité.
Dans cette perspective, il convient d’accélérer les procédures d’adoption des PLU et celle de mise à disposition de terrains de l’État en Ile-de-France en particulier.
Notre assemblée souhaite que le nécessaire rééquilibrage de la fiscalité portant sur les terrains non bâtis par rapport à celle relative aux terrains bâtis, trouve une réponse satisfaisante dans le projet de loi portant engagement national pour le logement en débat au Parlement.
Elle rappelle que les maires disposent déjà de la possibilité de majorer dans le cadre d’une délibération du conseil municipal, le taux de l’impôt sur les terrains classés constructibles mais non bâtis. Cet impôt vise à dissuader les propriétaires qui seraient tentés de réserver leurs terrains dans l’attente d’une hausse générée par cette attitude de rétention dans un marché tendu.
Les établissements publics fonciers d’État régionaux et locaux sont encore trop peu nombreux pour constituer les réserves foncières nécessaires. Leur développement doit être encouragé et poursuivi.
2. Favoriser un urbanisme plus cohérent
Toutes les personnes auditionnées ont souligné la complexité et l’instabilité des trop nombreux documents concernant l’urbanisme. Notre assemblée encore une fois demande qu’ils fassent l’objet d’une simplification, d’une meilleure lisibilité et, surtout d’une durée plus compatible avec la mise en place d’une politique urbaine s’appuyant sur les objectifs des Schémas de cohérence territoriale (SCOT).
Notre législation dispose de textes visant à limiter l’étalement urbain, notamment la loi relative à la Solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 31 décembre 2000. Compte tenu de la possibilité de dépasser le Coefficient d’occupation des sols (COS) dans certaines zones, notre assemblée demande que soit privilégiée la réflexion par îlot et quartiers afin de redensifier l’existant tout en favorisant les maisons de ville groupées, le petit habitat collectif et la rénovation.
Enfin, il conviendrait que les aides publiques, y compris le PTZ, ne soient pas accordées dans des opérations de construction favorisant l’étalement urbain allant parfois jusqu’au mitage du paysage. Elles devraient en revanche être plus ciblées sur les acquisitions de logements anciens des centres-villes avec ou sans travaux, particulièrement dans le cadre des opérations de renouvellement urbain.
3. Soutenir la rénovation
Notre rapport a souligné que le faible pourcentage de constructions neuves (environ 1 % par an selon l’INSEE) demandait une action plus soutenue sur le parc existant (99 %) d’autant plus que sa diversité favorise une mixité et une cohésion sociale plus naturelles et plus fluides.
Notre assemblée prend acte des moyens et compétences élargies données à l’ANAH par le Plan quinquennal de cohésion sociale. Elle souligne qu’au regard des enjeux que représente la remise sur le marché de 100 000 logements vacants par an et les autres besoins en rénovation qui devront nécessairement s’inscrire dans le développement durable, la revalorisation budgétaire dont elle a fait l’objet ne lui permettra pas de répondre aux objectifs et aux enjeux : 418 millions d’euros en 2004, 487 millions d’euros en 2005 grâce aux premiers crédits du Plan de cohésion sociale mais seulement 505 millions d’euros prévus en 2006 alors que la montée en puissance de ce plan devait normalement permettre à l’Agence de disposer d’un budget de 557 millions d’euros, en rappelant qu’en 1994, son budget était déjà de 580 millions d’euros.
Notre assemblée propose que les propriétaires à faibles revenus qui ne pourraient avancer les sommes nécessaires en complément de la subvention de l’ANAH, puissent bénéficier de prêts à taux zéro pour financer leur participation lorsqu’ils occupent eux-mêmes leur logement.
Quand ils sont propriétaires-bailleurs, le financement à 100 % par l’ANAH serait remboursé par un prélèvement sur une partie des loyers qu’ils perçoivent. Ces avantages seraient consentis à la condition qu’une partie des travaux porte sur des économies d’énergie ou concerne des énergies renouvelables. Il faut rappeler que le marché de la rénovation représente 50 milliards d’euros dont seulement six milliards ont un impact énergétique (source EDF).
Dans le cas où d’importants travaux de rénovation doivent être mis en œuvre « l’amélioration progressive » doit être rendue éligible aux aides de l’ANAH, dans le cadre d’une convention et d’un calendrier fixant les objectifs.
Le Conseil économique et social demande donc que les moyens financiers et humains de l’ANAH soient revalorisés en conséquence.
C - Favoriser les matériaux, les techniques et les équipements à haute performance environnementale
1. Les matériaux naturels
Le bois, la pierre, la terre (mais aussi la paille et le chanvre) sont des matériaux naturels et renouvelables. Il conviendrait de renforcer leur utilisation notamment dans l’habitat individuel, par une meilleure information sur leurs qualités.
Le Conseil économique et social prend acte de la publication prochaine du décret d’application de la loi du 30 décembre 1996 relative à l’utilisation du bois dans les constructions nouvelles. Ce texte devrait fixer la quantité minimale de ce matériau à 2 dm3 par m2 de Shon. Notre assemblée estime que cette quantité qui couvre tout juste les portes et les plinthes est nettement insuffisante. Une nouvelle fois, il faut rappeler le fort potentiel de production de bois de notre pays dont un quart du territoire est boisé. Sa faible utilisation dans la construction (4 % des maisons alors qu’en Europe du Nord et outre-Atlantique, c’est la majorité de l’habitat individuel) ses qualités propres (aptitude à stocker le CO2 et donc à lutter contre l’effet de serre), et son assez bonne résistance au feu, en font un matériau à privilégier. Notre assemblée déplore le manque d’ambition du Plan Bois qui prévoit le passage de 10 à seulement 12,5 % l’utilisation du bois dans la construction d’ici à 2010. Il s’agit pourtant d’un matériau dont la qualité plastique et esthétique pourrait donner au logement une image architecturale plus valorisante.
S’agissant de la terre, crue ou cuite, notre assemblée considère que ce matériau, que certains architectes ont remis au goût du jour pour ses qualités intrinsèques, mérite d’être mieux connu et plus utilisé. De forte inertie thermique, c’est un matériau sain qui ne libère pas de composés organiques volatiles et offre une grande plasticité dans l’utilisation. Il peut se décliner en produits très diversifiés et faciles à mettre en œuvre : briques de grande dimension, cloisons, parements, tuiles…
2. L’isolation et la ventilation
Le chauffage représente 70 % des dépenses énergétiques des ménages (hors consommation de bois). L’isolation est donc primordiale et notre assemblée s’étonne, comme le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) qu’elle se fasse toujours en France majoritairement par l’intérieur et non par l’extérieur du logement comme dans les autres pays. Notre assemblée recommande que cette technique soit adoptée et que soient mieux utilisés tous les types d’isolants : laines minérales ou naturelles, les vitrages actifs et sélectifs à la fois isolants et producteurs d’énergie (par intégration de cellules photovoltaïques)…
Cette isolation devra bien entendu tenir compte de la ventilation double flux nécessaire pour éviter la concentration d’humidité favorisant le développement de bactéries, de moisissures, d’acariens etc. et réduisant la stagnation des Composés organiques volatiles (les COV) facteurs d’allergies, souvent présents dans les matériaux utilisés et parfois dans l’ameublement.
Notre assemblée déplore qu’à ce sujet la directive européenne de 2004 ne soit pleinement opposable qu’à partir de 2010 et ne vise qu’à réduire fortement l’utilisation des solvants qui dégagent des COV. Elle approuve les dispositions du Plan national santé-environnement (PNSE) dont l’objectif est d’évaluer le risque sanitaire et environnemental des matériaux de constructions à l’horizon 2010.
3. L’acoustique
La Nouvelle réglementation acoustique (NRA) est entrée en application en janvier 1996. Certes, depuis bientôt dix ans d’énormes progrès ont été réalisés mais les bruits de voisinage du fait de la faiblesse des normes en vigueur, souvent appliquées à minima, restent toujours la nuisance la plus souvent évoquée. De plus, l’habitat construit avant 1996 n’est pas concerné par la NRA ce que regrette notre assemblée qui souhaite qu’une réglementation particulière soit rapidement adoptée.
4. Les énergies renouvelables
Pris séparément, le solaire thermique et photovoltaïque, la géothermie, les éoliennes et les biocarburants ne peuvent suffire à répondre aux besoins d’un logement. C’est la combinaison bien étudiée de plusieurs de ces énergies renouvelables qui permet de couvrir l’ensemble des besoins et de réduire très significativement les dépenses énergétiques habituelles.
Notre assemblée demande que dans le cadre d’un projet les combinant, ces équipements soient tous, simultanément, éligibles aux aides de l’ADEME.
Les grands collectifs disposant déjà d’autres sources d’énergies renouvelables pourraient comme en Allemagne être couplés à des unités de cogénération ou centrales pouvant utiliser la biomasse (déchets ménagers ou résidus de bois…).
L’impulsion doit être donnée par l’État, notamment à travers l’action de l’ADEME, outil indispensable à la diffusion des techniques et dispositifs visant à économiser ou introduire les énergies renouvelables : c’est elle qui gère depuis le 1er janvier 2005 les aides directes accordées pour les équipements performants énergétiquement (chaudières à condensation, isolation, chauffe-eau solaire, pompes à chaleur…) sous forme de crédit d’impôts.
Pour accompagner cette politique, il conviendrait que les moyens de l’ADEME soient confirmés et consolidés afin de lui permettre de prendre en charge, selon des objectifs et des modalités à définir, tout ou partie du financement des équipements énergétiques (construction ou rénovation) comme cela se pratique dans certains pays européens. Une évaluation régulière de ses actions devrait permettre d’en mesurer l’efficacité.
Le Conseil économique et social souhaite aussi que l’ADEME, dont l’action est trop souvent méconnue du grand public, organise plus fréquemment dans les médias des campagnes d’information et de promotion.
D - Promouvoir la pratique du « coût global »
Toutes les recommandations qui viennent d’être formulées ne trouveront leur cohérence et leur efficacité que dans un raisonnement en « coût global ».
Le prix du mètre carré construit a atteint de tels niveaux que le promoteur comme l’accédant à la propriété établissent leur budget sur un coût « à la livraison », c’est-à-dire sur le seul investissement. Les coûts ultérieurs de gestion (chauffage, transports, consommation d’eau) et d’entretien sont rarement pris en compte. Pourtant l’observation sur cinquante ans de la répartition moyenne des coûts d’un bâtiment d’habitation révèle que 3 % sont consacrés au montage, 2 % à la conception, 20 % à la construction et… 75 % à l’entretien et à la maintenance (source : ARECOOP-UNSFA, la qualité dans le logement neuf, octobre 2005).
L’analyse en amont d’un projet au regard de son « coût global » doit être l’outil d’aide à la décision fournissant au maître d’ouvrage les éléments chiffrés permettant d’évaluer et de comparer tout projet de construction par rapport à son coût d’usage.
Trop souvent l’analyse se limite à évaluer l’incidence économique des diverses variantes (choix énergétiques, coûts d’isolation, modes de chauffages, matériaux de constructions, etc.) et l’on ne constate toujours pas de prise de conscience réelle de l’incidence des coûts d’exploitation.
C’est dès la conception et la construction que les coûts d’usage dans leur globalité doivent être étudiés et intégrés.
En effet, les coûts des charges et de l’entretien peuvent varier de façon importante en fonction de la prise en compte ou non d’aménagements et d’équipements favorisant les économies d’énergie.
Notre assemblée craint que des ménages aux revenus modestes, dont la capacité d’endettement maximale est calculée au moment du financement de leur projet d’accession, ne se trouvent en difficulté après leur installation pour avoir sous-estimé les coûts des charges d’usage.
Notre réflexion serait incomplète si la question de l’eau n’était pas évoquée. Cette ressource indispensable à la vie des hommes et à l’équilibre de leur environnement se trouve menacée dans son abondance et dans sa qualité par le changement climatique alors que nos modes de vie nous conduisent à en consommer chaque jour davantage. La part du budget des ménages consacrée à l’eau est en constante augmentation. Cette question préoccupante qui ne pourra pas être développée dans le présent avis, devrait faire l’objet d’un rapport particulier du Conseil économique et social qui s’était déjà prononcé sur le projet de loi relatif à l’eau en 2000.
II - Répondre aux attentes des français et aux évolutions des modes de vie
A - Des logements plus spacieux et plus flexibles pour une meilleure qualité de vie
Alors que la demande d’espace reste toujours aussi forte, notre pays reste très en deçà des surfaces moyennes constatées chez nos voisins de l’Europe du Nord en particulier. Les normes concernant les hauteurs sous plafond n’ont pas évolué alors que la taille des Français s’est considérablement élevée. Ne pourrait-on pas envisager le passage d’une normalisation en surface à une normalisation en volume comme aux Pays-Bas.
L’équipement des ménages n’a cessé d’augmenter et les appareils électroménagers ne trouvent pas tous leur place et leurs branchements (eau-électricité) dans les cuisines encore trop exiguës alors qu’elles sont devenues pour beaucoup des pièces « carrefour de convivialité ».
Du fait des nouveaux modes de vie, la répartition jour/nuit n’apparaît plus justifiée.
En outre, le télétravail qui se développe (15 % des actifs travaillent 50 % de leur temps de travail à domicile) suppose l’existence d’une pièce supplémentaire. Polyvalente, elle permettrait aussi d’accueillir enfants (dans le cas des familles recomposées), amis ou parents. Plus largement, il est nécessaire de prévoir la généralisation du haut débit dans les logements en veillant à l’innocuité des procédés utilisés. Les nouvelles technologies en constant développement permettent aux habitants d’être en phase avec les évolutions de la société.
Les espaces de rangement des objets de grande dimension (valises, vélos, landaus, outils…) ont disparu dans la plupart des logements alors qu’ils existaient dans les constructions des années soixante-dix. Par ailleurs, chacun sait que les caves en sous-sol dans les logements collectifs ne remplissent plus leur fonction originelle.
Le Conseil économique et social estime que les logements et bâtiments doivent être conçus et réalisés pour pouvoir évoluer dans le temps et ainsi permettre de répondre au besoin d’espace, d’intimité, et de s’adapter aux évolutions de la composition des familles, à l’âge des occupants et aux personnes en situation de handicap (par exemple, ascenseur à tous les niveaux, circulation en tous points, salle d’eau adaptée, équipement ou pré-équipement en domotique).
Sur ce point, le Conseil économique et social sera attentif à la mise en œuvre des décrets d’application relatifs au cadre bâti de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Il propose que dans le cadre des concertations préalables avec les habitants qu’il préconise, tous ces espaces, devenus indispensables à la qualité du cadre de vie souhaitée par les Français soient mieux pris en compte.
La maison individuelle en périphérie, qu’elle soit en lotissement ou en diffus, ne doit pas être la seule réponse à la demande d’espace et d’ouverture sur la nature. Le Conseil économique et social demande que des programmes expérimentaux aidés soient initiés pour faire émerger de nouvelles formes architecturales.
B - Un environnement de qualité pour mieux vivre ensemble
L’environnement immédiat des logements collectifs ou des lotissements a été trop souvent négligé ou réalisé a minima.
La difficulté d’identification des espaces privés directement reliés aux espaces publics y est pour beaucoup. Pourtant ces espaces sont dans le ressenti de nos concitoyens presque aussi importants que la qualité de leur logement.
Un environnement soigné et un éclairage bien conçu sont généralement respectés. Ils constituent le préalable à la tranquillité et à la sérénité recherchées par les habitants. Notre assemblée estime ainsi nécessaire l’étude et la définition de facteurs environnementaux, de principes d’aménagement et de création architecturale et urbaine favorables à un concept élargi de sûreté. Plusieurs lois ont d’ailleurs été adoptées dans cet esprit : la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 sur l’orientation et la programmation relative à la sécurité, qui pose le principe d’une analyse d’impact de certains programmes d’aménagement sur la sécurité des personnes et des biens, la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne fixant des obligations aux bailleurs en matière d’équipements et la loi n° 2002-1094 du 30 août 2002 d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, qui précise de concept de « prévention situationnelle ».
Le concept de prévention situationnelle étant par nature pluridisciplinaire, sa mise en œuvre suppose une adaptation des services de l’État et son adhésion à une manière de voir et de faire, à la fois nouvelle et décloisonnée. Cela implique l’existence d’un travail conjoint entre les ministères concernés (intérieur, équipement, ville). L’analyse et les constats faits sur le terrain par les acteurs de la sécurité (maire, justice, police, gendarmerie et certains travailleurs sociaux…) doivent être entendus et intégrés aux différents programmes de construction et de rénovation. Ils constituent en effet une expertise dont il serait dommage de se passer.
Pour autant la sécurité durable n’est possible que s’il s’agit d’une valeur partagée et non simplement imposée. Les règles communes doivent être acceptées et respectées et pour ce faire les droits et devoirs des acteurs doivent être rappelés et affichés. Il faut que l’offre de sécurité corresponde à une demande.
En ce sens le Conseil économique et social propose que des « conventions de sécurité » comme celles déjà engagées dans le Nord-Pas-de-Calais entre sociétés d’HLM/ville/procureur de la République soient encouragées, voire généralisées.
En outre, les aménagements prévus par la loi SRU doivent comporter non seulement les voiries et parkings, mais aussi des espaces de verdure, de jeux, de repos et des équipements sportifs entretenus.
Le Conseil économique et social demande que les associations qui ont fait la preuve de leur efficacité sur le terrain se voient confirmés les moyens nécessaires à leur fonctionnement et à leur développement dans des locaux adaptés et maintenus en bon état.
En favorisant l’intégration dans la vie des quartiers, en prévenant la confrontation (notamment entre jeunes et adultes), et les comportements asociaux, en œuvrant dans le sens du respect mutuel, de la tolérance et de l’échange de pratiques et de valeurs partagées, elles accomplissent un véritable « travail sur l’humain » pour une cohésion sociale renforcée.
Enfin, notre assemblée réitère son souhait d’insérer toute forme de logement dans un réseau de services, de commerces et de transports adapté aux besoins des populations.
C - Une accession au logement facilitée
C’est très majoritairement que les Français aspirent à devenir propriétaires de leur maison.
Les prix de l’immobilier ont atteint des niveaux tels qu’une grande partie de la population se trouve écartée de l’accession ou conduite à accepter des logements trop petits ou de médiocre qualité ou encore contraints à vivre loin des centres-ville. L’accession sociale à la propriété, malgré des efforts déployés ces dernières années, peine à se développer.
Les incitations fiscales dévolues à l’investissement locatif ne devraient-elles pas être désormais réservées à des logements neufs ou rénovés qui rempliraient les deux conditions suivantes : répondre à des normes rigoureuses de qualité (en particulier faibles dépenses d’énergie) et être loués sous conditions de ressources à des prix bien inférieurs à ceux du marché dans le cadre de conventions ?
Le foncier représente en effet une part de plus en plus importante du prix d’un logement. Cette hausse s’est généralisée à l’échelle du territoire (40 % entre 1999 et 2004).
Le Conseil économique et social encourage le développement des formules comme celle de « portage foncier » qui permet à l’accédant d’alléger la charge financière initiale, en dissociant l’acquisition du foncier de l’acquisition du bâti. L’accédant bénéficie ainsi d’un emprunt différé à dix ou vingt ans, remboursable à l’issue du prêt destiné au bâti, les moyens financiers dégagés permettant de les affecter davantage à la qualité du logement.
Par ailleurs, un plus large recours aux baux emphytéotiques dont les modalités seraient sans doute à revoir pourrait aussi ouvrir de nouvelles pistes de réflexion.
Enfin, concernant l’accession sociale à la propriété, notre assemblée soutient les dispositions du projet de loi portant engagement national pour le logement qui étend le taux réduit de TVA à 5,5 % aux constructions neuves dans les zones urbaines faisant l’objet d’une convention avec l’ANRU.
La mise à disposition de terrains appartenant à l’État et à ses établissements publics ou aux collectivités territoriales, annoncée par le ministre de l’Emploi, de la cohésion sociale et du logement, devrait contribuer à réduire significativement les prix au mètre carré pour développer de l’offre foncière pour le logement social, tant en locatif qu’en accession à la propriété, en évitant toutes spéculations.
D - Un régime de l’hypothèque réformé
La réflexion sur une réforme de l’hypothèque en vue d’élargir les possibilités de crédit pour les accédants à la propriété est engagée par les pouvoirs publics. Le ministre de l’Économie et des finances et celui de la Justice ont chargé l’inspection générale des finances et l’inspection générale des services judiciaires d’une mission sur l’hypothèque et le crédit hypothécaire. Ces travaux s’inscrivent dans une réflexion plus large qui englobe la question du viager hypothécaire pour les personnes âgées et l’intégration du marché européen du crédit hypothécaire.
Il est vrai que notre pays comparé à ses voisins notamment anglo-saxons occupe une place singulière dans ce domaine. Le crédit immobilier est accordé en fonction du niveau et de la régularité des revenus du candidat emprunteur et non sur ses avoirs. L’hypothèque a mauvaise réputation et les Français n’y recourent qu’en cas d’extrême nécessité. Elle est d’ailleurs progressivement remplacée par la caution donnée par des organismes de crédit. C’est ainsi que la part de cette dernière dans l’immobilier est passée entre 2000 et 2004 de 28 à 41 % alors que, dans le même temps, celle de l’hypothèque diminuait de 37 à 29 %. Il faut aussi reconnaître que la caution présente de nombreux avantages pour l’emprunteur : plus facile à mettre en œuvre car nécessitant moins de formalités et de délais administratifs, elle est aussi moins onéreuse. En effet, 80 à 85 % de la cotisation au fonds mutuel de garantie sont restitués à l’issue du remboursement du prêt.
Notre assemblée estime que toute réforme de l’hypothèque doit, dans le domaine immobilier, permettre aux personnes à faibles revenus de pouvoir accéder plus aisément au crédit et à la propriété.
La réflexion sur cette question mériterait un examen plus approfondi afin de vérifier les conséquences sur l’emprunteur d’un retournement du marché.
En tout état de cause, la réforme devrait viser à une simplification des procédures et à une diminution des frais qui renchérissent considérablement le coût de l’hypothèque. Celui-ci se situe entre 1,50 % et 2 % du capital emprunté en France, alors qu’il ne représente que 0,60 % au Royaume-Uni et 0,40 % en Allemagne. Cela s’explique, en Allemagne comme en Alsace et dans le département de la Moselle, par l’existence du « livre foncier » dont le coût est moins élevé en frais et en personnel, que notre conservation des hypothèques.
E - Des diagnostics pour une meilleure information
Le décret du 27 mai 2004 a rendu obligatoire la tenue d’un carnet d’entretien pour les immeubles en copropriété. Ce document permet de suivre les travaux successifs réalisés sur le bâti et les équipements, ainsi que les références des entreprises qui sont intervenues. Ce véritable carnet de santé s’ajoute aux différents diagnostics exigés à l’occasion de toute transaction (surfaces plomb, amiante, termites pour les zones concernées…) et au diagnostic de performance énergétique (transposition de la directive européenne par la loi du 9 décembre 2004) qui sera exigible à partir du 10 janvier 2006 pour toute vente et au 10 janvier 2007 pour toute location.
La CAPEB en liaison avec le Conseil supérieur du notariat avait initié une démarche visant à sécuriser les consommateurs sur la qualité et l’entretien du logement. Le projet actuel du ministre chargé du Logement va dans le même sens. Il vise à regrouper dans un document unique l’ensemble des diagnostics existants. Ce document qui devrait inclure le diagnostic électrique constituerait un état des lieux permanent, éviterait une partie des travaux « au noir » et assurerait la transparence dans toute transaction. Il recueille l’approbation du Conseil économique et social.
Reste toutefois à préciser dans des décrets à venir les conditions de certification des diagnostiqueurs afin de sécuriser et d’éclairer le choix des maîtres d’ouvrage et des particuliers.
Notre assemblée estime que ce carnet pourrait judicieusement s’accompagner du guide de prévention des accidents domestiques élaboré par la Fédération nationale des accidentés de la vie (FNATH). Sachant que près de 5,8 millions de personnes, principalement des enfants et des personnes âgées, sont accidentées chaque année à leur domicile ou à leur abord immédiat.
La loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique, fixe des objectifs globaux de réduction de la consommation énergétique de 2 % dès 2015 et de 2,5 % d’ici 2030 à tous les fournisseurs d’énergie (EDF-GDF, pétroliers). Cette obligation de résultat les conduit à aider leurs clients à économiser l’énergie.
Cette démarche que le Conseil économique et social approuve fera l’objet d’un suivi attentif par notre assemblée.
III - Mobiliser la filière de la construction pour répondre aux enjeux
A - Soutenir la recherche
Notre pays a longtemps bénéficié d’une énergie peu chère et n’a pas de ce fait accordé aux énergies renouvelables un intérêt suffisant. Il est vrai que le coût du kW/h solaire ou éolien étaient nettement plus élevé que celui produit par le nucléaire (hors coût de la gestion des déchets et du démantèlement des centrales).
Avec la raréfaction et la hausse du coût des énergies fossiles qui impacte sur le coût des autres énergies, il devient urgent d’investir massivement dans la recherche pour accompagner le redéploiement énergétique qui se profile.
Le CSTB, l’ADEME, l’Agence nationale de la recherche (ANR) et le Plan urbanisme construction et architecture (PUCA) sont appelés à coopérer dans le PREBAT dont les moyens devraient s’accroître progressivement : cinq millions d’euros en 2005, dix millions d’euros en 2006, quinze millions à partir de 2007.
Notre assemblée recommande que les objectifs du Programme sur l’énergie dans le bâtiment (PREBAT) prévus dans le plan CLIMAT soient rigoureusement atteints. Ils devraient permettre qu’à horizon 2010 puis 2020 un pourcentage significatif de logements à faible consommation énergétique (50 à 70 kW/h/m2), ainsi que des logements à bilan énergétique positif, soient construits ou rénovés.
Notre assemblée demande que certaines grandes entreprises impliquées dans la qualité du logement soient invitées à rejoindre le partenariat public-privé de la « fondation bâtiment-énergie » qui regroupe ARCELOR, Lafarge, EDF et GDF.
L’urgence à introduire les techniques et les équipements favorisant les économies d’énergies dans le bâti est de plus en plus prégnante et implique que la recherche soit encouragée et soutenue. L’avis rapporté par François Ailleret sur le projet de loi relatif à la recherche, que le Conseil économique et social adopté le 23 novembre 2005, conforte notre position.
Au niveau européen, le bâtiment dont les besoins en Recherche et Développement sont importants, ne sont pas suffisamment pris en compte. Notre assemblée demande que ce secteur participe au VIIème Programme-cadre de recherche (PCRD) qui finance la coopération scientifique en Europe et qui consacrera une partie de ses moyens (dix milliards d’euros sur 70) pour la période 2007-2013 à l’énergie et à l’environnement.
Le Conseil économique et social préconise en outre que compte tenu des retards accumulés des partenariats au niveau européen soient encouragés.
B - Accélérer l’effort d’industrialisation
Notre pays dispose d’entreprises et d’artisans du bâtiment dont la compétence est reconnue mondialement. Leurs méthodes de construction dépendent principalement des filières industrielles des différents produits qu’elles utilisent. Le béton, le plâtre, le verre, le bois, l’acier et l’aluminium sont les matériaux très majoritairement employés. Ils ont fait l’objet ces dernières années de progrès importants.
Le Conseil économique et social observe que notre pays souffre, comparé à certains de ses voisins, de l’absence de filières intégrées suffisamment réactives.
Il est évident qu’avec la « pression » actuelle de la demande (390 000 logements mis en chantier au cours des douze derniers mois), la production de matériaux et produits performants dans le domaine des économies d’énergie ou l’utilisation des énergies renouvelables ne peut pas être satisfaite dans de bonnes conditions par les entreprises nationales. C’est le cas en particulier pour les panneaux photovoltaïques et certains types de chaudières, les nouveaux isolants et les verres peu émissifs. Leurs séries industrielles trop faibles en nombre par rapport aux besoins, conduisent à des prix jugés encore trop élevés pour convaincre les entreprises et les particuliers d’adopter ces matériaux ou équipements.
A ce titre, un développement de la filière sèche, combinant acier, bois, verre en particulier, plus respectueuse de l’environnement (montage, démontage, modularité, moins de déchets), mérite d’être encouragé. Cette évolution permettrait, tout en diversifiant les matériaux de construction, de diminuer les désordres dans les chantiers et ainsi de mieux répondre aux attentes des habitants.
C’est pourquoi le Conseil économique et social souhaite que le secteur soit encouragé à constituer des « Pôles de Compétitivité » structurés et homogènes par filières.
Il semblerait que le principal frein ne réside pas dans l’absence de produits nouveaux - et les différents salons sont là pour le prouver - mais dans la difficulté des industriels à les faire adopter et mettre en œuvre sur les chantiers.
L’industrialisation ne doit pas conduire à la modélisation, mais parvenir à une diminution des coûts et à une plus grande rapidité et facilité de mise en œuvre. Le coût de la non-qualité est estimé par le secteur du bâtiment à dix milliards d’euros par an (10 % de son chiffre d’affaires). Ce qui explique sans doute les barèmes de plus en plus élevés de l’assurance dommage-ouvrage : sept milliards d’euros par an. Une diminution de ces coûts pourrait plus judicieusement profiter à l’amélioration de la qualité trop souvent et injustement qualifiée de « surcoût » et donc rarement proposée ou mise en œuvre.
Le Conseil économique et social demande qu’une concertation régulière entre les industriels, les maîtres d’ouvrage, les entreprises et les artisans utilisateurs de ces produits (performances énergétiques, process, intérêt économique), soit établie afin de faciliter la diffusion des innovations.
C - Accentuer l’effort de formation et développer l’emploi
Après une longue période de crise, l’activité du secteur, en forte progression depuis sept années consécutives, a permis en 2004 la création de nombreux emplois. Le secteur du bâtiment y compris l’artisanat représente environ 1 300 000 actifs. Les entreprises artisanales réalisent la moitié de leur chiffre d’affaires dans l’entretien-amélioration, majoritairement dans la maison individuelle.
L’ensemble du secteur a retrouvé un nouveau souffle par les dispositions fixant le taux de TVA à 5,5 % pour les travaux de rénovation.
Malgré les actions menées par la FFB et la CAPEB, tant pour les salariés que pour les chefs d’entreprise, il se trouve confronté à quatre difficultés intimement liées : le recrutement, la formation, la qualification des hommes et le vieillissement de ses effectifs.
Notre assemblée souligne l’intérêt des campagnes d’information menées auprès des jeunes pour les inciter à s’engager dans ces métiers. Encore souvent connotés d’une image dégradée, liée à la pénibilité, ils sont en voie de valorisation. Leur diversité et leur orientation technique vers le développement durable deviennent des facteurs d’attractivité. Le secteur représente un gisement important d’emplois qualifiés, du niveau V au niveau II.
Le Conseil économique et social estime donc que l’effort de formation doit aussi bien porter sur la formation initiale que sur la formation continue et que toutes deux doivent être dispensées par des formateurs eux-mêmes bien formés et familiarisés à l’utilisation et à la mise en œuvre des nouveaux matériaux, équipements et process.
Les fabricants doivent être associés aux formations continues, dans le cadre de partenariats opérationnels et dans le respect de chartes de déontologie.
Notre assemblée estime que l’ADEME devrait jouer un rôle significatif dans les formations relatives aux économies d’énergies ou aux énergies renouvelables.
L’appareil de formation, en voie de saturation, ne bénéficie pas des financements suffisants permettant un fonctionnement adapté aux nouveaux besoins : agrandissement des lycées professionnels, des centres de l’AFPA et des CFA, mise aux normes, acquisition de nouveaux matériels, mise à niveau des formateurs, hébergement des apprentis, des élèves et des stagiaires. Les pouvoirs publics ont déjà été alertés sur cette question depuis de nombreuses années, sans qu’aucune réponse satisfaisante n’ait été apportée.
Le Conseil économique et social demande instamment qu’une réflexion soit conduite entre l’État, les régions et le secteur du bâtiment, concernant tout l’appareil de formations et les moyens à dégager rapidement.
Concernant la formation continue, le versement d’une allocation pour les actions de formation réalisées hors du temps de travail, prévu par la loi du 4 mai 2004 devrait en faciliter le déroulement. C’est pourquoi le Conseil économique et social demande aussi que les dispositifs visant à permettre le remplacement des salariés pendant leur indispensable période de formation soient encouragés.
Conclusion
La crise que traverse notre pays résulte de la conjugaison de nombreux facteurs. De toute évidence, le logement et sa qualité figurent dans cet inventaire. Parce que construire aujourd’hui engage l’avenir sur plus d’un siècle, tous les logements devront désormais s’inscrire dans une dynamique de développement durable et de lutte contre le réchauffement de la planète.
Les logements devront tous répondre aux nouvelles attentes des ménages et à l’évolution des modes de vie.
La filière du bâtiment, primordiale dans notre économie, regroupe de multiples acteurs, des milliers d’entreprises, d’artisans et de salariés. Sa structure même explique que l’innovation avance à pas lents dans un secteur où les habitudes et les modes constructifs traditionnels prédominent.
Côté industriel, peu de filières bien organisées sont susceptibles de concevoir et de fabriquer, en grande série pour en abaisser les coûts, les produits et les équipements performants nécessaires à la construction et à la rénovation.
Les propositions formulées par notre assemblée visent à améliorer la qualité de vie des Français en leur proposant des logements plus spacieux, plus confortables, plus sains et plus sûrs, des logements qui correspondent mieux à l’évolution de leurs modes de vie.
Elles sont guidées par la recherche de la combinaison des trois facteurs du développement durable : l’efficacité économique (coût accessible au plus grand nombre) l’exigence sociale (la mixité) et la prise en compte des critères environnementaux. Dans ce cadre la question de la gestion foncière prend toute sa dimension. La pratique du « coût global » devrait être l’une des règles prioritaires à promouvoir, tant pour l’habitat individuel que pour le collectif. L’ensemble des propositions formulées dans le présent avis devraient garantir cette exigence de transparence à l’égard de tous les ménages.
Plusieurs lois importantes, dont deux lois de programmation viennent d’être adoptées. Une nouvelle est en examen au Parlement. Cependant, cet ensemble législatif manque de cohérence, de lisibilité et surtout d’envergure au regard de la situation actuelle.
Malgré leur pertinence, la succession des réformes nuit à l’efficacité d’une action globale concertée et les lenteurs de mise en œuvre ne sont plus acceptables par une partie de la population déjà fragilisée par la situation économique et sociale.
Le Conseil économique et social estime que les différents moyens mis en œuvre mériteraient d’être réunis dans un élan unique et que l’ensemble des acteurs du logement, publics comme privés, se rassemblent autour du « pacte national pour le logement » proposé par le Premier ministre.
Les propositions formulées par notre assemblée ont pour objet compléter le programme présenté par le gouvernement et de contribuer par le volet « qualité » qu’elles développent au renforcement de la cohésion sociale et à l’amélioration de la qualité de vie des Français.
DEUXIEME PARTIE DECLARATIONS DES GROUPES
Groupe de l’agriculture
Le logement est un sujet complexe car multiforme. On comprend qu’il soit l’objet d’une attention particulière.
Le logement participe de l’identité de la personne. Ne pas en disposer, ou être mal logé pose la question de l’abri notamment face à l’approche de l’hiver, mais également de l’insertion dans la société. Les récents événements qui ont enflammé plusieurs des banlieues à la périphérie des grandes villes doivent nous amener à réfléchir. Les pouvoirs publics ont ici, une responsabilité importante. La question des logements sociaux est récurrente. Un réel effort devrait être entrepris pour répondre à des besoins souvent bien identifiés.
Le logement est également le reflet de l’évolution de la population. Le vieillissement des personnes, la remise en cause des standards de vie traditionnels, le développement du télétravail… induisent des aménagements nouveaux. La dimension et la configuration de l’habitat sont ici en cause. Certains voient dans le logement adaptable une solution possible. Le CNRS réfléchit aux technologies domotiques. Les constructions nouvelles ne pourront plus ignorer ces situations au risque d’être décalées au regard des contraintes pesant sur les individus ou les familles. Les constructions anciennes doivent être aidées dans leur volonté de modernisation. Cela participe également de la protection d’un patrimoine national dont la valeur historique et touristique est souvent affirmée.
Le logement est empreint des souhaits profonds des personnes. Le rejet de la concentration urbaine et des nuisances liées (le bruit est le plus souvent évoqué lors des sondages), la volonté de posséder une maison individuelle contribuent à changer la physionomie de notre territoire. L’exode urbain est désormais supérieur à l’exode rural. Ce qui peut apparaître comme une simple modification des lieux de vie est en réalité lourd de conséquences en termes d’occupation de l’espace. L’extension des banlieues (ou des petites villes) et le développement de l’habitat individuel se réalisent souvent au détriment de l’activité agricole (dont ils renchérissent par ailleurs le coût en pesant sur les prix du foncier). Cela n’est pas acceptable. Un équilibre doit pouvoir être trouvé entre l’habitat et l’activité économique.
Le logement, enfin, porte la marque des préoccupations de la société. La pollution croissante de notre planète, les dommages irréversibles causés à notre patrimoine naturel, l’épuisement des réserves énergétiques fossiles ont conduit à une prise de conscience collective de la nécessité de modifier fondamentalement notre développement. Le logement est également concerné. Des matériaux naturels (bois, terre…) pourraient être plus systématiquement utilisés dans la construction. Les biocarburants seraient une source d’énergie renouvelable efficace pour le chauffage.
Le logement doit s’inscrire dans une dynamique de développement durable et de lutte contre les inégalités.
Groupe de l’artisanat
Au moment où se posent avec acuité les problèmes de vétusté du parc et d’accès au logement, cette saisine traitant plus spécifiquement de la qualité peut paraître provocatrice. Le Conseil économique et social s’étant saisi de cette question et ayant proposé des réponses adaptées à ses multiples facettes, ce travail de réflexion sur le logement de demain est tout à fait pertinent.
Sorti de l’urgence et des nécessités quantitatives, le sujet demeure complexe. Il doit concilier des exigences temporelles opposées : une construction sûre, durable et des modes de vie en perpétuel mouvement. Il doit aussi se faire avec un secteur où les acteurs sont multiples et le contexte réglementaire et normatif de plus en plus exigeant.
Sur ce point, l’avis a raison de pointer la profusion de textes, leur manque de cohérence, le retard de certains décrets d’application, qui apportent à la confusion et freinent les progrès tant attendus par nos concitoyens. L’ampleur du parc, les contraintes techniques et administratives impliquent de se donner du temps et de veiller à une lisibilité des textes pour atteindre l’objectif de qualité.
La reconnaissance du parc existant comme gisement de logements et solution à l’étalement urbain, rend urgent et obligatoire un autre regard des politiques publiques. Le programme 13 du Plan de cohésion sociale constitue une avancée, il doit se poursuivre.
Le ciblage des aides publiques sur les acquisitions de logements anciens, la réforme du prêt à taux zéro et l’idée de rendre éligibles « les améliorations progressives » aux aides de l’ANAH vont dans le bon sens. Il faudrait aller plus loin et obtenir une égalité de traitement des dispositifs d’accession à la propriété ainsi qu’un soutien spécifique à la recherche pour permettre au parc existant de bénéficier aussi des innovations technologiques, en matière d’énergie, d’accessibilité, de qualité de l’air, de lutte contre le bruit, d’optimisation des volumes…
S’il est compréhensible que les diagnostics techniques se fassent par voie réglementaire au nom de la sécurité des logements, il faut éviter de sur-réglementer le secteur du bâti existant car trop d’obligations pourraient dissuader les ménages à faire faire des travaux, voire les encourager à recourir au travail au noir.
Le groupe de l’artisanat attend beaucoup des nouvelles missions de l’ANAH « d’assistance, d’étude et de communication améliorant la connaissance du parc privé existant et des conditions de son occupation » et sera attentif au budget qui y sera consacré.
Enfin, le secteur du bâtiment artisanal a souhaité rappeler l’importance de la pérennisation du taux réduit de TVA au-delà du 31 décembre 2005. Cette mesure constitue un véritable levier pour l’amélioration de la qualité des logements et un enjeu économique important tant au niveau de la survie des entreprises que de leur contribution à l’emploi. Il en va également de la réussite du vaste programme de cet avis dont chacun partage l’intérêt pour l’équilibre des territoires et le maintien de la cohésion sociale.
Ces remarques ont conduit le groupe de l’artisanat à voter favorablement cet avis.
Groupe des associations
Le groupe des associations apprécie l’éclairage du projet d’avis sur la relation entre logement et développement durable.
Les demandes des ménages en termes d’isolation, de qualité de l’air, de chauffage, de sanitaires, de fermetures… doivent se retrouver dans les préoccupations attendues des pouvoirs publics dans la généralisation de la démarche Haute qualité environnementale.
Pour ce faire, le rôle de l’architecte est primordial. Il est légitime de proposer que « la maîtrise d’ouvrage prépare le projet avec l’appui systématique de compétences et les conseils de professionnels » dans un souci pragmatique et on peut même insister pour qu’au niveau des territoires un architecte conseil puisse donner son avis sur le permis de construire de toute maison individuelle.
Pour construire ces logements, il faut des terrains. Donner les moyens aux collectivités publiques de disposer de réserves foncières est une condition indispensable pour maîtriser les prix et pour que ces collectivités puissent mettre en application des plans d’urbanisme qui intègrent le logement social et privé dans un habitat cohérent avec les équipements collectifs et les moyens de transport.
La qualité du logement doit également être privilégiée dans la rénovation ; les incitations fiscales doivent aller dans ce sens, dans le même temps où elles permettent l’accès aux moins favorisés. On ne peut en effet oublier le nombre dramatique de nos concitoyens non - ou mal-logés. A ce sujet, l’actualité nous interpelle crûment : logements insalubres, personnes sans domicile (même avec un emploi) et des prix dans l’immobilier qui ne cessent de grimper, qui engendrent un surendettement qui, à son tour, entraîne l’exclusion.
Notre groupe est évidemment solidaire de l’UNIOPSS et de tout le collectif Alerte (qui regroupe 41 associations nationales de lutte contre la pauvreté et l’exclusion) qui, avec les syndicats et les associations de locataires, demandent de :
- préserver le système des aides au logement et de renforcer leur efficacité sociale ;
-garantir la production d’une offre de logements décents avec des loyers économiques accessibles à tous ;
-renforcer la lutte contre l’habitat indigne ;
-mettre en place une garantie des risques locatifs.
Le droit au logement est un droit fondamental que notre République doit garantir. Mais pour rendre effectif ce droit, il faut qu’il devienne opposable à une collectivité publique responsable de ce droit comme l’a déjà préconisé notre assemblée.
Enfin, il convient de souligner que le logement ne peut être séparé de son environnement local. La qualité de la vie, dans son quartier, dans son village, dépend de la présence des différents services publics, de commerces de proximité ainsi que - nous insistons sur ce point - de lieux de vie sociale. Quelle que soit leur diversité, les résidents ont besoin de se sentir pris en compte. Là est le rôle essentiel des associations, créatrices de lien social. La qualité de la vie passe par le bien vivre ensemble, il est donc essentiel que les habitants soient impliqués dans la gestion et l’animation de leur habitat, dans le domaine du sport, de la culture, de la citoyenneté… à travers une vie associative pluraliste. La richesse du dialogue civil, construit avec sincérité dans la durée, est un bon atout pour la qualité de vie du logement de demain.
Le groupe des associations a voté l’avis présenté en espérant que les préconisations présentes et passées de notre assemblée trouveront l’écho, qu’à l’évidence, elles méritent.
Groupe de la CFDT
C’est dans l’expérience des professionnels qu’elle organise et au contact des habitants, que la CFDT a appris combien la question du logement fait office ou non de protection de la société et des personnes de manière indissociable. Ce droit essentiel d’avoir un logement décent, sûr et accueillant, élément à part entière de protection sociale, est le pilier qui avec celui de l’emploi fait la solidité d’une culture, d’une démocratie.
Notre assemblée s’est déjà donnée les moyens, à travers plusieurs avis, d’analyser et de comprendre les causes profondes de la crise actuelle du logement. Le projet d’avis viendra fort utilement compléter les préconisations des travaux antérieurs.
Le rapport comme l’avis s’attachent à traiter d’éléments qui concourent de façon importante à la qualité du logement et de l’environnement, donc du cadre de vie. Le mérite de ce projet d’avis est de montrer qu’au-delà du scandale de l’habitat insalubre d’une part et de l’amélioration globale du confort des logements depuis les années cinquante d’autre part, il existe des écarts forts entre les aspirations exprimées par nos concitoyens en matière de logement et ce qui se construit ou se rénove.
Les évolutions de la société se traduisent dans des modes de vie nouveaux. Ils conduisent nos concitoyens à exprimer des besoins et des attentes aujourd’hui mal ou non satisfaits en matière de modes d’habiter. Dans le même temps, les innovations technologiques qui permettraient de répondre à ces évolutions restent encore confinées au rang d’innovations, notamment en ce qui concerne le respect de l’environnement.
L’enjeu pour le logement de demain c’est d’organiser autour des besoins de la personne, quelle que soit son origine sociale et à tous les âges de la vie, avec les matériaux et les modes de production adéquats, une esthétique et une qualité humaine qui donne à la ville sa dimension humaine. La qualité, dans ses dimensions techniques et esthétiques, fait l’attractivité ou non d’un logement et conditionne donc la réussite de la cohabitation de quatre ou cinq générations dans les espaces urbains.
La CFDT approuve le choix postulant que la qualité d’un logement se mesure à l’aune de sa capacité à satisfaire les besoins de ses habitants et le respect de l’environnement, y compris dans sa dimension sociale. La CFDT approuve également l’orientation de l’avis dont les préconisations visent pour cela à modifier dans les faits l’offre de logement. Ce travail démontre bien que les innovations technologiques, les matériaux et les procès industriels existent, que de nouvelles façons de travailler peuvent améliorer la qualité. Modifier dans les faits l’offre de logement consiste à généraliser et à banaliser ces innovations et à favoriser le développement de filières industrielles, y compris en trouvant les solutions pour dépasser le surcoût qu’elles induisent dans un premier temps.
Pour la CFDT, l’ensemble des acteurs contribuant à l’offre de logement est concerné, qu’ils soient privés ou public. L’avis fait des préconisations pour chacun dans son domaine et dans les synergies qui doivent se développer avec les autres. Dans ces deux domaines, la puissance publique a une responsabilité particulière, que ce soit à travers les normes qu’elle édicte, les politiques incitatives qu’elle mène ou les politiques publiques qu’elle met en œuvre. C’est particulièrement vrai dans le logement social, pour lequel la solidarité de la nation doit s’exprimer par un effort majeur, notamment dans les moyens mis à disposition.
Une volonté politique forte est indispensable. Mais elle peut s’avérer insuffisante pour réussir dans ce domaine par manque de cohérence, de lisibilité et d’envergure dans sa capacité d’action. Aussi, cette nécessaire volonté politique forte doit pouvoir s’appuyer sur un service public de l’habitat déjà préconisé par notre assemblée et qui serait chargé de la nécessaire mise en synergie de tous les acteurs concourant dans leur diversité et leur complémentarité à la production de logements.
Le groupe CFDT a voté l’avis.
Groupe de la CFE-CGC
L’actualité donne vraiment un relief particulier à l’avis.
En effet, sans en être la raison unique, personne ne peut contester que les conditions de l’habitat soient l’une des causes de la crise dans les banlieues.
Dans un tel contexte, le Conseil économique et social est l’assemblée idéale pour débattre d’un sujet aussi vaste que celui du malaise des banlieues. D’ailleurs, de nombreux travaux ont été déjà produit sur ce sujet.
Le groupe de la CFE-CGC considère, lorsque les passions seront apaisées, que nous ne pourrons pas faire l’économie d’un rapport et d’un avis sur un thème qui est l’une des justifications même de notre existence. Le sujet est trop grave et le Conseil économique et social doit tout faire pour proposer des remèdes aux maux qui ont causé ces troubles.
Le groupe de la CFE-CGC retrouve certaines de ses propositions dans l’avis. Ainsi, les aspects fonciers sont, bien entendu, au cœur des processus d’urbanisation. C’est l’un des freins à la construction de logements. Les règles d’urbanisme doivent évoluer.
Nous pensons aussi que les besoins en logements exigent une mobilisation de moyens humains et financiers importants. Toutes les difficultés résident cependant dans le fait qu’il faut mener simultanément plusieurs types d’opérations qui vont de la construction à l’aménagement et à la réhabilitation. Dans un tel contexte, et pour réussir, il est nécessaire d’associer les habitants à la définition et à la gestion quotidienne des opérations qui se mettent en place.
Il faut, d’autre part, rassurer les propriétaires bailleurs. Le groupe de la CFE-CGC souhaite la mise en place d’une garantie du risque locatif qui permettrait de mettre sur le marché de nombreux logements actuellement inoccupés.
Nous retrouvons également nos propositions dans les mesures de mobilisation du parc privé, notamment celles qui renforcent l’intervention de l’ANAH. A cet égard, le groupe de la CFE-CGC insiste sur la nécessité d’envisager un relèvement des plafonds de revenus pour les propriétaires bailleurs et occupants.
En outre, pour notre groupe, le logement doit effectivement s’inscrire dans une démarche de développement durable. Le renforcement de l’utilisation de matériaux naturels et renouvelables va dans le bon sens. Nous approuvons la démarche prônée par l’avis pour un environnement de qualité et donc, pour « mieux vivre ensemble ».
Nous avons toujours souligné et réclamé que les analyses constatées sur le terrain par l’ensemble des acteurs sociaux, éducatifs et de sécurité soient entendues et intégrées aux programmes de rénovation urbaine.
Le groupe de la CFE-CGC a émis un vote positif.
Groupe de la CFTC
Le groupe de la CFTC se félicite de l’intérêt porté à la question du logement par le Conseil économique et social. L’avis qui nous est présenté aujourd’hui suit d’assez près d’autres travaux et notamment celui sur « L’accès au logement, droits et réalités » porté par madame Prud’homme. Nous tenons à souligner que la qualité du logement est indissociable des autres questions posées sur le logement.
La CFTC est acquise depuis longtemps à la grande cause nationale du logement. Elle sait combien le bénéfice d’un logement digne dans un environnement agréable est important pour les salariés, pour leur famille, pour les jeunes comme pour les retraités.
Assimiler dans un même rapport logement et qualité de vie ne peut que nous séduire. Hélas, comment parler de confort, de qualité, de nouvelles technologies, quand plus de cinq millions de personnes sont mal logées ou non logées, quand on découvre un habitat dégradé, dangereux, en déshérence, quand ceux qui ont un toit ont souvent consenti pour cela d’importants sacrifices et ne peuvent payer la qualité. La réponse de l’avis tient en une formule volontariste : les efforts financiers consentis seront largement compensés par la diminution des coûts d’entretien. C’est vrai et il fallait le dire : l’effort quantitatif concernant les logements ne doit pas exclure l’approche qualitative. Il reste que la question posée aujourd’hui du financement de ces économies pour demain mérite d’être traitée. Des solutions existent, des systèmes paritaires de financement du logement ont fait leurs preuves, qu’il conviendrait d’encourager. La principale préconisation de l’avis « droits et accès au logement » était la création d’un service public de l’habitat. Il n’a rien perdu de son actualité.
La CFTC a été sensible au rappel de l’image oubliée des HLM dans les années cinquante, quand les logements sociaux étaient synonymes de modernité, de progrès et de confort. En ses débuts, le 1 % Logement anticipait bien l’accès d’un jeune ménage à un logement décent, en lui accordant un prêt ou en lui proposant un logement locatif. Transposer cette méthode à l’adaptation des logements au progrès technique, tel est l’enjeu exprimé par l’avis.
Comment répondre à un tel défi alors que le taux d’effort pour le logement et le transport pour se rendre au travail représente 40 % du budget des familles modestes ? C’est pourquoi la CFTC avait exprimé qu’il était impensable de demander un effort supplémentaire aux salariés, par exemple en rendant obligatoire l’introduction de certaines technologies. Il était important d’aborder la question des aides financières destinées à promouvoir ces innovations. La CFTC s’est exprimée à plusieurs reprises pour que les salariés à revenus modestes ou moyens, logés très loin de leur lieu de travail ne soient pas oubliés.
Au-delà des aspects financiers, la CFTC souligne que ce qui manque le plus, est souvent l’information. C’est par défaut d’information que certains sont « exclus », c’est aussi par défaut d’information que des travaux sont menés sans souci du chauffage, de la climatisation, de l’isolation phonique, du respect de l’environnement, de l’accessibilité pour les personnes handicapées, etc.
Il convenait d’ouvrir des pistes pour que les habitants de ce pays qui paient déjà cher leur logement, ne soient pas exclus d’un progrès qui, non seulement améliore la qualité de la vie, mais aussi permet des économies d’énergie et donc, au-delà, des économies tout court pour les ménages.
Le groupe CFTC estimant utile en ce sens les réflexions poursuivies a voté l’avis.
Groupe de la CGT
Placer la qualité du logement au centre de la réflexion peut, de prime abord, apparaître secondaire comparé aux enjeux considérables posés par les carences du logement social et le simple droit à un logement refusé aux plus démunis ; elle est primordiale quand on a à l’esprit les défis auxquels nous sommes et serons confrontés dans les domaines de l’environnement et du développement durable.
L’avis représente une première approche intéressante d’un sujet qui devra être approfondi dans les années à venir. Certes, les préconisations peuvent paraître modestes, elles constituent un premier positionnement des représentants de la société civile que nous essayons d’être, dans un débat probablement par trop confisqué par les experts de toutes sorte.
Quelques points appelle cependant des remarques de notre part.
L’allusion imprécise faite dans l’introduction à la thématique de la sécurité, en évoquant de manière ambiguë les événements de novembre, ne nous semble pas utile. Elle lève une question intéressante mais à laquelle l’avis ne peut évidemment donner aucun élément de réponse. Nous avions proposé un amendement pour corriger cette impression.
Concernant le rôle des maîtres d’ouvrage et leur frilosité vis-à-vis des techniques innovantes en matière environnementale et d’économies d’énergie, nous ne pouvons que souscrire aux propositions. S’agissant de maîtres d’ouvrage publics pour des programmes collectifs d’habitation ou d’équipements, nous aurions aimé que ces préconisation soient plus précises quant aux nécessaires processus d’élaboration et de contrôle démocratiques.
De même aurait-on pu réfléchir plus avant sur des propositions visant à inciter, notamment les particuliers, à faire appel plus systématiquement aux services des architectes. Notre retard par rapport à la plupart de nos voisins européens sur ce point, peut probablement expliquer, au moins pour partie, notre retard dans le domaine de la protection environnementale, de l’utilisation des énergies renouvelables, plus généralement de la qualité du logement privatif individuel.
D’autre part, la qualité des matériaux n’est pas sans effet sur la santé des populations. Ainsi, le lien positif entre ces deux questions aurait mérité d’être plus amplement développé, d’autant qu’il aurait étayé la démarche préconisée. Des réglementations existent déjà, comme celle visant le saturnisme ; un inventaire et une évaluation auraient pu figurer dans notre avis.
Le projet en débat aujourd’hui, pointe, une fois de plus, le problème de l’accession au foncier comme une des difficultés majeures auxquelles toute politique du logement est confrontée ; il n’y répond pas, ce n’était pas dans le cahier des charges fixé par la saisine. Il serait très souhaitable qu’assez rapidement notre assemblée, en prenant pour base les travaux déjà effectués dans les précédentes mandatures, soit à l’initiative de propositions véritablement novatrices.
L’avis aborde par ailleurs deux sujets qui mériteraient une réflexion approfondie.
Le premier concerne les carences, en matière d’innovation technologique, des industriels de la filière. Que ce soit pour les panneaux solaires à haut rendement, les verres peu émissifs, les nouveaux matériaux composites, etc., les industriels de notre pays ne s’investissent pas suffisamment dans ces champs nouveaux et prometteurs à moyen terme. Cela amène à une réelle pénurie de l’offre et un renchérissement des produits, pour l’essentiel étrangers, très préjudiciables à une politique audacieuse de développement durable.
Le second pointe les difficultés, en particulier des artisans qui constituent un pilier majeur dans le secteur du bâtiment, à recruter des personnels qualifiés. Le groupe de la CGT, pour ce qui le concerne, doute fort que l’abaissement de l’âge d’entrée en apprentissage soit de nature à apporter le moindre début de réponse à ces difficultés.
Le groupe de la CGT a adopté l’avis.
Groupe de la CGT-FO
Ainsi qu’il est rappelé au début du projet d’avis, le logement a toujours été une préoccupation pour le Conseil économique et social.
Le sujet est particulièrement difficile, compte tenu du contexte général de la problématique du logement aujourd’hui en France.
Avec l’actualité récente, cette difficulté est largement amplifiée et peut donner à ce projet d’avis un aspect quelque peu anachronique, en laissant penser que le Conseil serait en dehors de son temps.
Le groupe Force ouvrière, constant dans sa démarche, considère qu’il est plus qu’urgent de produire des logements sociaux, mais partage la préoccupation de ne pas reproduire les erreurs du passé. Ainsi, les nouvelles constructions devront prendre en compte les attentes des habitants et répondre aux nouveaux modes de vie et aux nouvelles façons d’habiter, qui découlent des évolutions socio-démographiques du pays.
Il est clair que les événements récents mettent en exergue cette nécessité, en particulier pour le logement social voire très social, qui a été trop souvent laissé pour compte, même si, depuis quelques années des efforts sont entrepris mais trop peu significatifs avec des moyens trop faibles.
En effet la qualité a un coût, qui ne peut en aucun cas, être assimilé à un surcoût. L’accessibilité et la qualité du logement doivent s’inscrire clairement dans le principe de l’égalité républicaine.
Si le groupe Force ouvrière est d’accord sur la nécessité d’accroître l’offre foncière, en particulier la mise à disposition de terrains appartenant à l’État et à ses établissements publics ou aux collectivités territoriales, il regrette vivement que le projet d’avis soit ambigu sur la destination finale de cette offre foncière nouvelle.
Il est indispensable, que cette offre foncière venant du domaine public au sens large, profite, en priorité, au logement social.
Le groupe FO ne veut pas ignorer l’accession à la propriété ou la location de logements privés à loyers à prix dits maîtrisés, expression imprécise que l’on retrouve également pour des loyers supérieurs à ceux du marché, mais souhaite tordre le cou à cette idée fausse et rampante que la crise du logement pourrait trouver sa solution dans l’accession à la propriété.
Le groupe FO a d’ailleurs proposé, un amendement allant dans ce sens.
Enfin, pour le chapitre concernant un régime de l’hypothèque réformé, le compromis trouvé est satisfaisant. Mais il faut attirer l’attention du Bureau du Conseil économique et social sur la nécessité qu’une section soit chargée d’une saisine concernant ce sujet qui ne peut être considéré comme étant traité et entraînant positionnement du Conseil au travers de l’adoption du présent avis.
Le groupe Force ouvrière a du projet d’avis une approche positive et l’a donc voté.
Groupe de la coopération
Tout un chacun ne peut disposer d’un logement grand, de haute qualité environnementale et en centre ville, tout cela pour 100 000 euros. Le groupe de la coopération regrette que les propositions de l’avis soient trop généralistes, sans approche économique suffisante et avec peu d’avancée. L’avis apporte par exemple peu de réponse sur la démarche HQE : est-ce le bon référentiel pour s’engager de façon plus volontaire vers une approche plus environnementale et pour que le logement participe de façon efficace contre l’effet de serre ? Faut-il « normer » ce qui n’est pour le moment qu’une démarche ? Faut-il rendre cette approche obligatoire ? Faut-il lui substituer comme certains le préconisent un autre référentiel ? Comment demander à des bailleurs d’investir sur des équipements plus chers, qui permettront aux locataires d’alléger leurs charges. C’est l’une des équations du paradoxe : le groupe de la coopération avait formulé des propositions comme l’idée de consentir des avantages fiscaux (par exemple prolongation de l’exonération de TFPB) aux bailleurs qui investiraient en vue d’alléger les charges des locataires. Trop longtemps, la notion même de qualité s’est arrêtée à la seule qualité du bâti. Pour rassurer les consommateurs, les professionnels ont multiplié les chartes, labels, certifications et autres qualifications. L’administration a édicté des normes répondant aux besoins à la fois de sécurité, de qualité mais aussi d’intérêt général en termes de consommation énergétique, de réduction de l’effet de serre.
La qualité c’est aussi l’insertion du logement dans l’espace, qu’il soit urbain, semi urbain ou rural. Les modes d’organisation de l’espace peuvent être qualitativement différenciés, les choix urbanistiques se sont révélés à l’épreuve du temps plus ou moins bien adaptés aux attentes et pertinents en termes d’intérêt général. La qualité, c’est encore celle des process de décisions et d’articulation entre les différents intervenants. Ils sont nombreux dans la chaîne qui s’étend du choix d’organisation de l’espace à la livraison d’un logement. La chaîne est plus tributaire du maillon faible que du maillon fort. Dès qu’une défaillance se fait jour, elle entraîne la dégradation de l’ensemble du processus qui mène à la livraison du logement final. Il faut prendre en compte le destinataire final, l’habitant, dans le processus d’élaboration du logement.
A l’heure où sévit une crise du logement, la qualité est une œuvre d’ensemblier. Chaque acteur doit prendre la mesure de la qualité, comprise comme un processus complexe, où chacun a certes sa partition à jouer mais dans un orchestre où le chef est à la fois le consommateur final et l’intérêt général, le logement ayant vocation à s’inscrire durablement dans le paysage.
Élus, maîtres d’ouvrage et architectes partagent une responsabilité majeure : les notions de coût global et de qualité se devaient d’aborder les questions de la qualité urbaine, des processus de fabrication, de réglementation, de la mixité sociale et fonctionnelle, de pérennité et l’évolutivité du bâti et l’économie globale de la qualité.
Enfin la qualité n’a de sens que dans la durée, conçue et comprise comme un service rendu à l’habitant tout au long de la vie du couple logement/occupant. Si les impératifs économiques dictent bon nombre de choix budgétaires, on peut s’interroger sur la répercussion dans la durée. D’appels d’offres en lancements de programmes de recherches, la rentabilité immédiate est trop souvent privilégiée : construire vite, construire moins cher. Encore faut-il construire durablement. Ce terme ne signifie pas « écologique », mais renvoie à la satisfaction d’une demande elle-même en évolution, donc adaptable : durablement en termes de pérennité du produit, durablement en termes de service rendu. La qualité a un coût. La non-qualité coûte encore plus cher. Faute d’avoir traité suffisamment la qualité sous l’ensemble de ces aspects, le groupe de la coopération s’est abstenu.
Groupe des entreprises publiques
Le sujet complexe de l’avis sur le logement de demain, pose une problématique très vaste qui constitue une vraie préoccupation pour nos concitoyens.
Il existe un décalage entre la qualité de l’habitat actuel et les attentes des Français : 10 % du parc ne répond ni aux normes sanitaires ni aux normes de sécurité. Par ailleurs, il y a une profonde évolution des modes de vie qui transforme les façons d’habiter et oriente les attentes des ménages. Ces derniers rejettent la concentration urbaine et ses problèmes inhérents, et souhaitent, dans une grande majorité, accéder à la propriété dans des logements plus spacieux et modulaires. Les innovations technologiques qui permettraient d’apporter des réponses adaptées peinent à s’imposer.
La dimension de la problématique nécessite de choisir un fil conducteur. La référence au développement durable est sans doute pertinente. Mais cette notion est elle-même complexe. Notre groupe regrette que dans l’avis soient traitées de manière simultanée les dimensions d’engagement social, d’efficacité économique et de protection de l’environnement. Ainsi, des propositions d’améliorations techniques - recours à des matériaux performants sur le plan thermique et acoustique — sont évoquées aux côtés des problématiques de maîtrise du coût du foncier. Les liens et interactions qui existent entre ces problématiques mériteraient sans doute d’être explicités.
En outre, tout en appréciant la proposition de développement du modèle Haute qualité environnementale (HQE), le groupe considère que l’avis aurait dû faire plus clairement apparaître une vision d’ensemble et affirmer avec force que la Maîtrise de la demande énergétique (MDE), notamment de la part des particuliers, sera une des réponses majeures à l’évolution tendancielle de la demande énergétique mondiale, qui fera plus que doubler entre 2000 et 2050. Une politique de communication auprès du grand public permettrait de sensibiliser nos concitoyens à cet enjeu majeur.
La maîtrise des coûts apparaît dans l’avis à la fois comme levier pour permettre l’intégration de nouvelles technologies actuellement coûteuses, mais aussi comme un moyen de répondre à l’attente première des Français, à savoir l’accession à la propriété.
Le groupe des entreprises publiques est favorable à l’exploration de ces pistes qui sont un passage obligé de l’amélioration de la qualité de l’habitat et la satisfaction des attentes des ménages.
Néanmoins, parmi les outils financiers proposés, certains d’entre eux nécessitent une analyse approfondie. C’est le cas de la réforme de l’hypothèque, qui selon l’avis, viserait dans le domaine immobilier à « permettre aux personnes à faibles revenus de pouvoir accéder plus aisément au crédit et à la propriété », doit être replacée dans leur contexte global et doit faire l’objet d’une approche très nuancée.
En effet, l’évolution de l’hypothèque, comprise dans le vaste projet de réforme des sûretés, a pour ambition d’étendre la garantie hypothécaire au profit de crédits à la consommation, là où l’hypothèque était traditionnellement liée au crédit immobilier. Le Comité consultatif du secteur financier, composé de représentants du monde bancaire et d’associations de consommateurs insiste sur la nécessité d’accompagner ces réformes de mesures de protection du consommateur.
L’amélioration de la qualité du logement passant également par une meilleure coordination entre les métiers de la construction, le groupe des entreprises publiques encourage fortement l’idée de favoriser la synergie entre maître d’ouvrage et maître d’œuvre.
Le groupe des entreprises publiques a voté l’avis.
Groupe de la mutualité
Le groupe de la mutualité relève l’intérêt du rapport présenté, notamment sur les problématiques technologiques, sur les matériaux utilisés dans la construction et l’aménagement des logements pour l’avenir. La recherche d’une plus grande maîtrise et d’une meilleure prise en compte de l’environnement rejoignent, en effet, les préoccupations du groupe.
Cependant, l’évolution des formes de famille, la diversité des parcours familiaux, la précarisation de l’emploi, la difficulté des jeunes à accéder à une véritable autonomie et le vieillissement de la population (en 2030 le tiers de la population aura plus de 60 ans contre 21 % aujourd’hui) sont autant de phénomènes qui ont des conséquences sur les besoins en logements, leur accessibilité, leur adaptabilité et la solvabilité des personnes.
La Mutualité, à travers certaines de ses initiatives, s’est penchée sur les difficultés de logement rencontrées à l’occasion de ruptures générationnelles, familiales et sociales. C’est pourquoi elle est particulièrement active dans la recherche de solutions, souvent temporaires, mais indispensables : résidences pour étudiants et jeunes travailleurs, hébergement des familles de personnes hospitalisées… Ces besoins sont aujourd’hui exprimés par la société et le groupe de la mutualité regrette que l’avis ne s’y soit pas intéressé.
Au-delà, selon une enquête de l’INSEE, les difficultés de logements liées aux handicaps physiques et à l’âge concerneraient plus de deux millions de personnes, ces difficultés résultant autant de l’accessibilité au logement que de son adaptation intérieure. On sait, par ailleurs, que le souhait légitime de beaucoup de personnes âgées est de rester le plus longtemps possible dans leur logement.
Aussi, le groupe de la mutualité déplore-t-il qu’à côté des préoccupations technologiques et de confort (taille de la salle de bain ou présence de balcons…), toute la place nécessaire n’ait pas été accordée, dans l’avis, à l’accessibilité et à l’adaptabilité des logements aux personnes âgées et à celles qui soufrent de handicaps.
Les difficultés d’accessibilité renforçant l’isolement des personnes âgées et handicapées, réalité mise en évidence notamment par la canicule de 2003, il apparaît essentiel au groupe de la mutualité d’encourager le maintien à domicile par des aménagements intérieurs, mais également de conduire une réflexion sur la construction de logements permettant une mixité générationnelle. Des expériences ont été conduites en province, en partenariat par exemple avec l’OPAC de Loire-Atlantique, qui proposent des logements adaptés ainsi que des services spécifiques réservés à une population âgée encore autonome, au sein d’immeubles occupés pour les 2/3 par des familles. Ces initiatives peu onéreuses montrent que cette voie peut être développée.
Enfin, si l’avis souligne la nécessité de formation des professionnels de la construction dans le cadre de la « mise en œuvre de nouveaux matériaux et de process », le groupe de la mutualité estime tout aussi indispensable d’intégrer la prise en compte des handicaps dans la formation initiale et continue des architectes et des professionnels de la construction.
Tout en reconnaissant le travail effectué et les propositions concrètes pour l’amélioration de l’habitat, le groupe de la mutualité s’est abstenu en raison du manque de propositions spécifiques à l’accessibilité et à l’adaptabilité des logements.
Groupe de l’Outre-mer
Le groupe remercie la rapporteure d’avoir pris en considération, dans le rapport, le volet logement en Outre-mer.
Cette question y est au moins aussi prégnante que dans l’hexagone : Elle est en effet compliquée par le coût du foncier et la présence d’une population jeune, qui crée une pression forte sur le marché.
L’avis, abordant le volet architectural et environnemental du logement, rejoint parfaitement le souci des collectivités ultramarines en vue d’une amélioration de la qualité de vie.
De ce fait, le groupe de l’Outre-mer a voté l’avis et suggère que les solutions préconisées par Marie-Claude Tjibaou dans son rapport de juin 2004 puissent être mises en œuvre afin d’apporter une réponse soutenue et concrète à la question du logement en Outre-mer.
Groupe des personnalités qualifiées
M. Marcon « J’estime que le projet d’avis contient des propositions intéressantes pour une meilleure adaptation du logement, facteur essentiel de la qualité de vie des Français. Ainsi le texte suggère-t-il de réaliser des logements plus spacieux, plus confortables, plus sûrs et plus sains, ou d’utiliser des matériaux et des techniques plus performantes, privilégiant l’énergie renouvelable, ce qu’on ne peut qu’approuver. Il en va de même pour les recommandations ayant trait au rôle de l’architecte, aux bienfaits des nouvelles normes, des labels de qualité ou des certifications, à la maîtrise du foncier ou à l’adoption de la notion de coût global dans les opérations immobilières. Autant d’avancées qui justifient un vote positif sur le projet d’avis.
Celui-ci aurait pu mieux intégrer le traitement de l’environnement immédiat du logement, d’autant que la rapporteure reconnaît l’importance de ces espaces pour les habitants : il y aurait sans doute là matière à une autre saisine. Car à l’origine du mal-être dans de nombreux quartiers, que les événements récents ont rappelé, on pointe souvent l’urbanisme des grands ensembles.
Pourtant, les logements n’ont pas toujours été mal conçus et ont même constitué, dans les années 50-60, un progrès fantastique, au point qu’on se déplaçait pour admirer certains immeubles. Et de fait, c’est plutôt l’espace public qui a été mal conçu, trop fermé, trop éloigné du lieu de travail : ainsi, en construisant des ensembles voués au logement de masse sans assez se préoccuper d’une juste répartition des espaces publics et privés, on a créé les conditions du mal vivre.
Il faut donc innover et imaginer différemment la vie des habitants en réintégrant une plus forte activité professionnelle dans les quartiers, en apportant une attention particulière aux abords des logements, en réduisant les nuisances sonores ou visuelles et en créant les conditions d’une vraie vie sociale dans des lieux où les générations apprécient de se rencontrer et d’accéder aux sports, à la culture, aux loisirs.
Toutes ces propositions se trouvent d’ailleurs dans les récentes lois qui visent à renforcer les liens entre habitat et urbanisme, tandis que le projet d’avis privilégie, lui, une approche plutôt technique et normative, dont les conséquences financières ont d’ailleurs leurs limites. Car faire des logements plus spacieux, plus confortables, et conformes aux dernières normes a un coût, et les moins favorisés ne devront-ils pas se replier vers un habitat plus ancien et de moindre qualité, dans des quartiers plus difficiles, comme on en fait déjà le constat actuellement ? La difficulté n’apparaît pas tant dans la définition d’une qualité pour le logement de demain que dans la capacité économique à se l’offrir.
Remotiver les constructeurs sur la prise en compte du coût global constitue à l’évidence une excellente proposition, mais elle se heurte à une difficulté majeure : une économie de gestion future suppose souvent un investissement immédiat accru. Or, lorsqu’il construit, le particulier est souvent pris à la gorge financièrement et on ne peut reprocher à un promoteur de rechercher le profit maximum.
Comment faire pour réduire l’impact financier lié à l’amélioration du logement ? Les pistes évoquées ici, l’industrialisation ou la maîtrise des coûts du foncier, si justes soient-elles, ne seront pas suffisantes, pas plus que les pistes financières, voire fiscales au moment où chacun constate les limites des budgets nationaux, régionaux ou départementaux. Il convient véritablement d’innover et à ce titre, le logement social offre un terrain privilégié puisqu’il est en dehors de la logique de profit. Les organismes de logement social construisent pour gérer et cette particularité les oblige à une vision d’avenir, même si les organismes HLM sont contraints par une réglementation qui ne prend absolument pas en compte la dimension du coût global et qu’il faudrait donc adapter pour ne pas freiner les initiatives. Car le logement social constitue depuis 25 ans un champ d’innovation permanent tant dans le domaine architectural que technique, économique ou méthodologique, et pourrait donc jouer un rôle important pour que la qualité de vie soit prise en compte dans les opérations immobilières. Il conviendrait d’assurer une meilleure communication sur l’innovation et d’encourager celle-ci par des participations financières.
Par ailleurs, pourquoi ne pas simplifier l’accès des petits organismes aux consortiums européens ? Une action conjointe des ministères concernés, des opérateurs privés et de l’union sociale pour l’habitat doit être possible. Il convient aussi d’insister encore plus sur le développement durable, et d’approfondir la réflexion sur la modularité des espaces pour faciliter l’adaptation du logement à l’évolution des modes de vie.
Enfin, le projet d’avis propose de mobiliser les acteurs du secteur pour mieux mutualiser les actions, ce qui est indispensable pour parvenir à une meilleure qualité de l’habitat, tout comme il est indispensable de mobiliser leurs énergies sur l’environnement du logement. Il importe donc de réorienter la formation des architectes, trop centrée sur la création artistique, et de mieux les former aux questions concernant l’économie de la construction, ainsi qu’aux questions sociales actuelles. Il convient aussi d’encourager les constructeurs qui font une utilisation intelligente de l’espace. Quant aux maîtres d’ouvrage, ils ne peuvent plus vivre en autarcie et doivent réfléchir avec tous les acteurs du logement, en particulier les urbanistes dont le rôle mérite d’être accru en termes de services commerciaux, services à la personne, écoles et crèches, parcs, circulation et stationnement, et aussi chercher à y intégrer des emplois.
Il faut tout faire pour améliorer la qualité des logements, mais surtout pour assurer un environnement où il fait bon vivre de son plus jeune âge jusqu’aux dernières années de sa vie ».
M. Cannac « Je voterai le projet d’avis sans hésitation, mais regrette que la question essentielle, à savoir la rareté de la ressource foncière, ne soit pas davantage évoquée.
En effet, la France est le pays d’Europe qui a la plus petite densité démographique au kilomètre carré, mais aussi, paradoxalement, une rareté, et donc une cherté considérable des terrains constructibles, essentiellement due aux contraintes réglementaires diverses, avec des conséquences économiques et sociales, notamment l’entassement des populations aux revenus les plus modestes dans les zones urbaines. A titre de comparaison, la Suisse, pays montagneux, qui consacre l’essentiel des financements publics à la production de terrain et laisse la construction de logements au marché, obtient de très bons résultats en matière de logement pour l’ensemble de la population, alors que la France, en finançant la construction sociale, ne fait souvent qu’alimenter la rente foncière. Il faut sur ce point un profond changement de politique et il y aurait là matière à réflexion pour le Conseil ».
Groupe des professions libérales
Il y a presque 50 ans, concepteurs et décideurs, mettaient en application une charte venue « d’ailleurs » et lançaient des programmes de logements dans un urbanisme destiné, à leurs dires, à l’amélioration de la qualité de vie de leurs concitoyens. Ils le croyaient, tout le monde le croyait, et les résultats immédiats confortaient leurs certitudes.
Mais des années plus tard, les programmes incomplets, inachevés, l’absence d’activité, de commerces, de services de proximité, d’équipements culturels et de loisirs, l’absence de ville en somme, ont ruiné ces espérances, laissant sur le terrain vague, des bâtiments sans âme, révélant alors leurs terribles défauts constructifs à une population souvent sans travail et contrainte de s’y loger.
Le décor crée-t-il la misère, la misère détruit-elle le décor ? Sans vraie réponse à cette question, on préfère aujourd’hui imploser des tours et des barres pensant ainsi stopper certaines explosions sociales.
C’est sans doute un début de solution, à la condition de remplacer cette triste médiocrité par un habitat à échelle humaine, dans lequel le lien social, l’activité, seront présents à l’extérieur comme à l’intérieur du bâtiment, offrant une diversité de logements menant à une réelle mixité de population.
Conscients de nos responsabilités collectives, il apparaît que nous ayons tiré leçon de ce passé récent et il existe aujourd’hui des programmes dans lesquels la dimension humaine est au « cœur » du projet et c’est souvent dans le secteur du logement aidé dit « social », que l’on trouve les exemples les plus marquants de recherche de qualité, de pérennité des ouvrages, dans le respect du bien-être des usagers.
Le rapporteur juge ces exemples trop peu nombreux, nous partageons sa sévérité. Les promotions privées, les yeux rivés sur le marché, refusent de construire des logements qu’elles croient ne pas pouvoir ou ne pas savoir vendre. D’autres, s’adressant à des investisseurs à la recherche d’une rentabilité de court terme, bâtissent pour autrui un résidentiel de façade. Remarquons enfin, que chez les constructeurs institutionnels, pour de multiples raisons, budgétaires, techniques, normatives, l’innovation est souvent écartée du projet en réaffirmant un peu facilement et par conformisme « que le mieux est l’ennemi du bien ».
Selon le rapporteur, il faut oser le mieux, pour une meilleure qualité de vie ! Pour atteindre cet objectif, il propose quelques pistes :
-agir sur l’offre foncière, prôner un urbanisme cohérent, mieux répartir le logement pour assurer la cohésion sociale, observer en continu l’évolution des modes de vie pour mieux adapter le logement ;
-aider les familles dans le financement et placer leur investissement sous l’éclairage du coût global du bien acquis ou loué ;
-demander aux filières de la construction de mieux produire, d’innover, d’améliorer la mise en œuvre de matériaux et matériels respectueux de l’environnement ;
-enfin, insister sur une juste revalorisation des métiers du bâtiment pour un redéploiement de l’emploi qualifié basé sur de solides formations initiales et continues.
Comment ne pas être d’accord avec ces propositions !
Mais nous voudrions insister sur un point à nos yeux essentiel. Le rapporteur a inscrit le logement de demain dans une logique de développement durable et de qualité environnementale, il a eu raison. S’il est présomptueux et hasardeux de dire quels seront les modes de vie dans 20 ans, voire 10 ans, nous sommes certains, en revanche que les préoccupations énergétiques, sanitaires, écologiques au vrai sens du terme, s’ajouteront au besoin de se loger.
Dès aujourd’hui, cette réflexion doit être au cœur de nos décisions et le développement durable replace la responsabilité sociale des concepteurs au centre du dispositif : puissent-ils saisir cette chance. De la programmation du Projet à sa réalisation, maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre architecturale et constructeurs, doivent être placés en synergie avec comme objectifs communs : le confort de vie, la quiétude des habitants et la protection de l’environnement.
La démarche dite de Haute qualité environnementale qui propose ces cibles, ne doit pas être comprise comme une liste de recettes aboutissant inévitablement à une énième labellisation de la construction mais comme le fil conducteur d’un état d’esprit partagé pour la recherche du mieux et ce, pour chaque projet. Les techniques suivront, les hommes sauront les inventer.
Concevoir un habitat de qualité, favorisant la solidarité, le lien social, respectueux de l’environnement tout en donnant à la création architecturale un espace d’expression est un défi pour notre société.
Les architectes, dans leur mission de synthèse peuvent le relever. Mais il conviendra que notre pays accorde à la conception et à la réalisation des logements la place et les moyens qu’elles méritent. D’autres pays l’ont fait, que l’on montre en exemple. Il s’agit là d’une priorité politique trop longtemps ignorée chez nous. Puissent les architectes, demain, être fiers d’une architecture du quotidien, donnant satisfaction à leurs concitoyens comme ces derniers ont été fiers hier de la qualité architecturale des grands projets que les architectes français ont su concevoir.
Les professions libérales, du secteur de la santé à celui de la justice, des métiers du conseil ou ceux de l’environnement, partagent, par humanisme, la volonté du rapporteur d’améliorer la qualité de vie de nos concitoyens dans une société sereine. Elles ont donc voté l’avis.
Groupe de l’UNAF
Le logement est le premier espace vital de toute personne, et de toute famille. Aussi, le groupe de l’UNAF ne peut que se réjouir de voir un tel sujet traité par notre assemblée. Le rapport et l’avis qui nous sont présentés aujourd’hui viennent, il est vrai, après bien d’autres, mais, à notre connaissance, ce thème si important n’avait jamais été abordé avec cette préoccupation, pourtant bien naturelle, de la recherche d’une meilleure qualité de vie par tous les ménages, et accessible à tous. Le groupe de l’UNAF remercie Mme Felzines pour le travail réalisé.
Il tient à souligner la richesse du rapport, la diversité des sujets abordés, l’importance qu’ils ont pour l’amélioration de la vie quotidienne de tous, les pistes qu’il ouvre aux décideurs privés et publics pour améliorer l’efficacité, la cohérence et la performance des politiques engagées.
L’UNAF souhaite mettre en exergue certains traits :
-l’analyse et la synthèse réalisées, relatives aux attentes et aux souhaits prioritaires de nos concitoyens en ce qui concerne leur logement ;
-l’importance de quelques facteurs-clé dans le choix et l’implantation de leur lieu d’habitation, l’école et la sécurité ;
-la difficulté d’une meilleure synergie entre les différents acteurs de la filière professionnelle du bâtiment, tous corps de métiers confondus ;
-le lien évident et concret entre les politiques foncières, d’urbanisme et celles du logement,…
On peut regretter que l’avis ne reflète pas totalement cette richesse et que ses recommandations et préconisations présentent une certaine dispersion. Aussi, le groupe de l’UNAF tient-il à exprimer les observations suivantes :
1. L’avis souligne à plusieurs reprises l’urgence et la néces-
sité d’augmenter la surface des logements par habitant et pour toutes les familles, en même temps que l’importance d’un environnement immédiat sûr et convivial (matérialisé par les parties communes de tout collectif et la présence d’un espace paysager). Le groupe de l’UNAF ne soulignera jamais assez cet aspect : l’espace dans un appartement ou une maison assure intimité et cohésion dans tous les milieux sociaux. Si l’on se trouve bien chez soi, on est moins dans la rue ; les relations familiales et éducatives sont facilitées ; enfin, le droit de vivre en famille et le regroupement familial dans les familles étrangères sont favorisés. Ce sont des principes auxquels l’UNAF tient à marquer tout particulièrement son attachement.
2. Cet avis énonce le principe d’une généralisation du « coût global », intégrant les coûts d’usage dans leur globalité. Cela nous semble un impératif absolu pour fonder désormais toute politique financière et budgétaire du logement. Le groupe de l’UNAF apprécie que soit réaffirmée cette notion dans la conclusion. Malheureusement, cette pratique mettra dans un premier temps en exergue les difficultés financières croissantes de toutes les familles (ou presque) à accéder à un logement de qualité, notamment celles avec enfants.
A cet égard, le groupe de l’UNAF rappelle que la politique du logement a une dimension familiale première, et bien sûr en priorité pour les familles les plus pauvres. Nous refusons à cet égard que le logement social soit conçu, comme c’est souvent le cas, au rabais, et que les jeunes ménages avec deux, trois enfants et plus, soient rarement pris en compte dans les politiques ouvrant l’accès à des logements de qualité.
3. Ceci étant, l’avis se heurte, comme beaucoup, aux exigences budgétaires et financières de l’État et des organismes qui lui sont rattachés. Dans le contexte économique qui est le nôtre, devant les évolutions démographiques à court terme, on voit mal comment le système actuel des aides personnelles et des aides à la pierre peuvent à la fois se concilier et réussir à intégrer les préoccupations exprimées dans notre projet d’avis. Si l’on ne peut tout attendre de l’État et des collectivités, il est certain cependant que le système fiscal actuel, comme celui des allocations diverses, révèlent leur inadéquation aux défis de la qualité du logement. Nous restons, après bien des avis adoptés par notre assemblée, sur cette interrogation, et cet avis ne fait que renforcer notre inquiétude pour l’avenir.
Cet avis est un révélateur, car il nous propose tout simplement d’affirmer que la qualité d’un logement (espace, calme, sécurité), n’est pas un luxe, mais une nécessité pour tout épanouissement familial, synonyme d’hospitalité et de solidarité.
Le groupe de l’UNAF a voté l’avis.
Groupe de l’UNSA
Le logement est au cœur de la préoccupation des acteurs sociaux : c’est un facteur essentiel de la construction de la personnalité de chaque individu et de la cohésion sociale de la nation. Il est porteur de l’avenir des destins collectifs et individuels. Il est donc indispensable d’en prévoir l’avenir.
Le rapport et l’avis décrivent le pari que nous devons mener pour les générations futures. Il est impératif d’inscrire le logement de demain dans la perspective du développement durable car on assiste déjà à des angoisses environnementales avivées par les dernières catastrophes naturelles, à des fortes hausses des prix de l’énergie et à une précarité énergétique qui touche de plus en plus de ménages.
Les propositions de l’avis posent les différents éléments de la question en termes de formation des professionnels du bâtiment. Il conviendrait aussi de sensibiliser et former tous les acteurs intervenant dans la chaîne de la construction car dès la conception du projet, ces incitations doivent être présentes et figurer dans le cahier des charges. Les professionnels du bâtiment comme les décideurs - qu’ils soient publics ou privés- ont besoin de connaître l’ensemble de la problématique.
Pour l’instant, les campagnes et les programmes développés pour les économies d’énergie s’adressent à l’ensemble de la population, mais touchent essentiellement les classes moyennes et aisées car l’utilisation des matériaux naturels nécessite un investissement initial important. Or, il est nécessaire, pour chaque citoyen, de maîtriser la consommation et les dépenses d’énergie.
De plus en plus de ménages ont des difficultés à faire face au paiement des factures des fournisseurs d’énergie. Pour répondre à ces situations d’impayés, des dispositifs d’aides existent, mais cela se limite seulement à une « solvabilisation » temporaire.
Selon un certain nombre d’indicateurs, la précarité énergétique est un phénomène important qui a des conséquences sociales et sanitaires sur les occupants des logements. Des mesures extrêmes comme les coupures de chauffage entraînent conduisent à des solutions d’appoint dangereuses : poêle à pétrole, calfeutrage… et peuvent avoir des répercussions sur la salubrité du logement : humidité, dégradation du logement, et plus graves sur la santé : risque d’intoxication au monoxyde de carbone, incendie, maladies…
Compte tenu de la situation actuelle, faire du logement une grande priorité nationale avec une action dans la durée est la seule solution pour permettre de répondre aux différents défis. Tous les partenaires de l’habitat, de l’action sociale et de la maîtrise de l’énergie doivent mettre en commun leurs compétences au service d’une politique volontariste des pouvoirs publics.
L’UNSA a voté l’avis en précisant que celui-ci n’est qu’une étape dans le cadre du développement durable. Il conviendrait donc de mener une réflexion sur l’accès au logement de qualité pour tous car les besoins sont importants.
Annexe a l’avis
Scrutin
Scrutin sur l’ensemble du projet d’avis
Nombre de votants 186
Ont voté pour 174
Se sont abstenus 12
Le Conseil économique et social a adopté.
Ont voté pour : 174
Groupe de l’agriculture - MM. Barrau, Baucherel, Bayard, de Beaumesnil, de Benoist, Boisgontier, Cartier, Couturier, Ducroquet, Ferré, Mme Gros, MM. Lépine, Lucas, Rousseau, Sander, Szydlowski, Thévenot.
Groupe de l’artisanat - MM. Alméras, Dréano, Griset, Lardin, Liébus, Martin, Paillasson, Pérez, Perrin.
Groupe des associations - Mme Arnoult-Brill, MM. Da Costa, Leclercq, Pascal, Roirant.
Groupe de la CFDT - Mme Azéma, MM. Bérail, Boulier, Mmes Boutrand, Collinet, M. Heyman, Mme Lasnier, MM. Le Clézio, Legrain, Mme Pichenot, M. Quintreau, Mmes Rived, Tsao, MM. Vandeweeghe, Vérollet.
Groupe de la CFE-CGC - Mme Dumont, MM. Garnier, Labrune, Saubert, Van Craeynest, Mme Viguier, M. Walter.
Groupe de la CFTC - MM. Coquillion, Deleu, Fazilleau, Mme Simon, M. Voisin.
Groupe de la CGT - Mmes Chay, Crosemarie, MM. Decisier, Dellacherie, Delmas, Mme Doneddu, MM. Durand, Forette, Mmes Geng, Hacquemand, Kotlicki, MM. Larose, Mansouri-Guilani, Muller, Rozet, Mme Vagner.
Groupe de la CGT-FO - MM. Becuwe, Bilquez, Bouchet, Mme Boutaric, MM. Daudigny, Devy, Houp, Lemercier, Mazuir, Noguès, Mmes Peikert, Perray, Pungier, MM. Rathonie, Reynaud, Mme Videlaine.
Groupe des entreprises privées - Mme Bel, MM. Bernardin, Creyssel, Daguin, Mme Felzines, MM. Gardin, Gautier-Sauvagnac, Ghigonis, Jamet, Lebrun, Lemor, Marcon, Mariotti, Mongereau, Pellat-Finet, Placet, Roubaud, Salto, Sarkozy, Schilansky, Didier Simond, Talmier, Tardy, Veysset, Mme Vilain.
Groupe des entreprises publiques - MM. Ailleret, Bailly, Blanchard-Dignac, Brunel, Chertier, Duport, Mme Duthilleul, M. Gadonneix.
Groupe des Français établis hors de France, de l’épargne et du logement - Mme Bourven, MM. Cariot, Clave, Feltz.
Groupe de l’outre-mer - Mme André, M. Kanimoa, Mme Moustoifa, MM. Omarjee, Osénat, Paoletti, Penchard, Radjou.
Groupe des personnalités qualifiées - MM. d’Aboville, Aillagon, Mme Benatsou, M. Cannac, Mme Cuillé, Mmes Dieulangard, Douvin, MM. Ferry, Figeac, Gentilini, Le Gall, Marcon, Masanet, Massoni, Mme Morin, MM. Nouvion, Obadia, Pasty, Plasait, Roulleau, Slama, Sylla, Valletoux, Vigier.
Groupe des professions libérales - MM. Capdeville, Maffioli, Mme Socquet-Clerc Lafont, M. Vaconsin.
Groupe de l’UNAF - Mme Basset, MM. Brin, Édouard, Fresse, Guimet, Mmes Lebatard, Petit, Therry, M. de Viguerie.
Groupe de l’UNSA - MM. Duron, Martin-Chauffier.
Se sont abstenus : 12
Groupe de la coopération - Mme Attar, MM. Gautier, Grave, Prugue, Thibous, Verdier.
Groupe de la mutualité - MM. Caniard, Davant, Laxalt, Ronat. Groupe des personnalités qualifiées - MM. Duharcourt, Duquesne.