La valorisation des déchets grâce à la réglementation…Si elle est cohérente, applicable et appliquée ! (2/3)

Qu'elle soit européenne avec la directive cadre déchets révisée en 2008 ou nationale avec la loi Grenelle 2, les réglementations devraient favoriser le développement de la valorisation des déchets. Détails avec Jean-Yves Burgy, spécialiste du développement de filières de valorisation des matériaux.

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Valorisation

Un deuxième levier pour accroître la valorisation des déchets du bâtiment concerne la réglementation, majoritairement d'origine européenne. La communauté européenne est très prolixe en matière de réglementation environnementale. La dernière grande avancée concerne la directive cadre déchets révisée 2008. Sa transposition doit se faire avant la fin de l'année. Il est prévu que le réemploi, le recyclage et la valorisation matière des déchets de construction et de démolition atteignent un minimum de 70 % en poids d'ici à 2020. On ne sait pas s'il s'agit d'un objectif global ou par matériaux. Si l'on s'inspire de la « responsabilité élargie du producteur », ce sera plutôt la seconde option qui sera retenue.

Malgré la Loi Grenelle II qui se révèle moins ambitieuse que le projet initial, le Grenelle de l'environnement va aussi apporter des impulsions positives par rapport aux déchets de chantiers. Tout d'abord des plans départements de gestion de déchets du BTP devraient être élaborés sous le contrôle des conseils généraux comme pour celui des déchets ménagers et assimilés.

Des audits matériaux préalables à la déconstruction seront obligatoires par décret pour certains bâtiments.

Attention aux interprétations !

Ces réglementations sont porteuses d'ambitions mais l'expérience montre que la réglementation se révèle être souvent aménagée pour ne pas induire de rupture. Le plus bel exemple est la définition du déchet ultime et de la confusion qu'elle a introduite dans la compréhension des acteurs. Selon le Code de l'Environnement (art. L541-1), un déchet ultime est tout déchet « résultant ou non du traitement d'un déchet, qui n'est plus susceptible d'être traité dans les conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux. ». L'interprétation de la définition du déchet ultime implique qu'aucun traitement ne lui est applicable pour l'heure, en tout cas c'est la lecture de premier niveau. Le stockage ou l'incinération sont donc les seules solutions d'élimination actuelle. Or un deuxième niveau de lecture permet d'interpréter cela d'une manière différente. Pour être volontairement réducteur, un déchet devient ultime si et seulement si sa valorisation est plus chère que l'élimination. Au coût opérationnel de l'enfouissement, c'est-à-dire entre 15 €/t pour les plus anciennes et 30 €/t pour les plus récentes (hors TGAP pour une I.S.D.N.D de 100 kT/an, et compte tenu des garanties bancaires demandées), la quasi-totalité des déchets du bâtiment sont classés comme ultimes alors qu'ils sont à 98% techniquement valorisables. Dans ces conditions on comprend que l'arbitrage des acteurs qui détiennent les centres d'enfouissement est irrévocablement en faveur de l'élimination. Ainsi, la loi du 13 juillet 92 qui énonçait que les décharges ne devaient plus recevoir que des déchets ultimes à partir du 1er juillet 2002 ne pouvait pas générer les espoirs escomptés.

Prises de position

Les aménagements de réglementation sont courants dans le domaine de l'environnement. Pour les déchets de plâtre alors qu'on connaît parfaitement les conséquences par rapport au mélange putrescibles et plâtre, l'arrêté du 19 janvier 2006 concernant la gestion des déchets en Installations de Stockage de Déchets Non Dangereux a été aménagée de manière à alléger les contraintes. « Les déchets à base de plâtre sont stockés, sauf impossibilité pratique, dans des casiers dans lesquels aucun déchet biodégradable n'est admis. » Ces trois mots introduits en milieu de phrase font qu'aujourd'hui seuls 10% environ des I.S.D.N.D en sont équipés. L'analyse de la composition des biogaz dans les prochaines années montrera certainement les effets d'une telle tolérance, d'ailleurs certains gestionnaires d'I.S.D.N.D l'ont anticipé et commencent à refuser ces déchets.

Jean-Yves Burgy, gérant de Recovering, société d'expertise et de conseil dans le montage et le développement de filières de valorisation des matériaux.

A ne pas manquer : retrouvez la 3ème partie « La valorisation poussée par l'intérêt financier », le 21 octobre.

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