La pierre naturelle produite en France, un produit local
« La pierre naturelle est un produit bas carbone, si l'on utilise une pierre française. » La mise au point de Vincent Raynaud, secrétaire général du Syndicat national des industries de roches ornementales et de construction (SNROC) résume parfaitement la situation du marché de la pierre naturelle en France. En effet, il faut savoir que près d'une pierre sur deux est importée. Et ce même représentant syndical d'insister : « Nul doute qu'il vaut mieux utiliser de la pierre française, même si elle peut être plus chère, car l'impact environnemental comme social sera toujours à l'avantage de la pierre locale ».
Ces dernières années, les producteurs ont massivement investi pour fiabiliser la production et la qualité, notamment en allant vers des solutions digitales et automatisées. « Aujourd'hui, l'enjeu principal est de pouvoir maintenir les carrières, parce que, depuis quelques décennies maintenant, la tendance est plutôt à leur fermeture qu'à leur pérennisation ou même à l'ouverture de nouvelles », regrette Vincent Raynaud. Il s'agit d'un réel challenge à relever pour maintenir une offre suffisante pour les futurs aménagements mais également pour assurer la restauration du patrimoine, le chantier de Notre-Dame de Paris étant le parfait exemple de cette problématique.

Les produits béton séduisent
Les industriels proposant des produits conçus à base de béton, qui concurrencent frontalement la pierre naturelle, ont su petit à petit se faire une place sur le marché. Pour Julien Viossat, directeur commercial du groupe Fabemi, cela s'explique, entre autres, par la capacité à pouvoir proposer une offre très importante de formats et de teintes, sachant qu'il existe des habitudes régionales fortes. Mathilde Bru, cheffe de produits pour l'aménagement extérieur et le mobilier urbain d'Alkern, insiste sur l'esthétique : « Nous pouvons donner à nos produits l'apparence que nous voulons puisqu'il s'agit de produits moulés. Nous proposons donc des aspects bois, pierre naturelle, béton… » Des produits de plus en plus grands pour une approche contemporaine mais aussi des finitions qui évoluent vers des surfaces de plus en plus texturées ou vieillies pour un rendu authentique sont des tendances fortes sur ce marché. La facilité de pose est également mise en avant par les fabricants de pierre reconstituée à base de béton, car celle-ci a évolué d'une pose uniquement collée à la possibilité d'effectuer également une pose sur plots.

Des enjeux politiques et sociétaux
« Il faut mobiliser la commande publique, c'est un levier majeur pour la pérennité de la pierre française. » Ce souhait est formulé par Vincent Raynaud, qui alerte sur l'importance de soutenir une filière qui connaît des difficultés face à une concurrence étrangère surfant sur l'argument prix. « Il y a beaucoup d'acteurs de la filière qui arrêtent », constate Vincent Raynaud, qui s'appuie sur des chiffres : en 2005, il y avait 940 entreprises dans ce secteur ; aujourd'hui, il en reste 640, pour un effectif d'environ 6 000 personnes. Il est donc impératif de renforcer l'attractivité de la filière, grâce notamment à la formation ainsi qu'à la capacité à fournir des emplois locaux.

La durabilité, argument de poids
Qu'il s'agisse de pierre naturelle ou de pierre reconstituée, l'argument majeur asséné est souvent le même : la faible empreinte carbone des produits. Pour Vincent Raynaud, « la pierre naturelle est le matériau de construction le plus bas carbone qui soit. De plus, il faut prendre en compte sa grande durabilité dans le temps et sa faculté à être réemployée sans problème ». Bien évidemment, ces arguments ne valent que si la pierre utilisée est locale. Julien Viossat revendique cette proximité : « Nos produits sont très respectueux de l'environnement, car nous travaillons avec de la matière première de proximité, présente au cœur des territoires, ce sont donc des matériaux fabriqués localement. » Les industriels accélèrent également sur la présence de produits recyclés dans leurs produits tout en voulant démocratiser le ciment bas carbone. Pour Mathilde Bru, « il est important de mettre en avant qu'il s'agit de produits fabriqués en France, sans cuisson à base de béton bien entendu, mais composés d'agrégats naturels sourcés localement. Une vraie garantie quant à leur empreinte carbone. »

À chaque pierre, son usage
« Les pierres conditionnent les usages, lesquels conditionnent les entreprises et leur capacité à être en concurrence avec des produits étrangers », explique Vincent Raynaud. Selon les dernières données du SNROC (2020), le chiffre d'affaires est généré par le bâtiment (45,6 %), le funéraire (41,9 %) et la voirie (12,5 %). Si l'on raisonne par type de pierre, plus de 84 % des pierres calcaires ont pour destination un usage dans le bâtiment, 24 % pour le granit et plus de 99 % pour la famille grès et lave.