« La majorité de la rénovation globale se fera sur la maison individuelle », Edouard Barthès (Symbiote)

Dopés par MaPrimeRénov’, les travaux de rénovation énergétique de logements comportent deux piliers : l'isolation et le chauffage, selon Edouard Barthès, porte-parole de 200 entreprises du secteur.

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Edouard Barthès, porte-parole de 200 entreprises de rénovation énergétique.
Edouard Barthès, porte-parole de 200 entreprises de rénovation énergétique.

Devant le succès de MaPrimeRénov’, le gouvernement a fixé, le mois dernier, de nouveaux objectifs à l’Anah : non plus 500 000 mais 700 000 à 800 000 primes à distribuer en 2021. D’où son budget prévisionnel en hausse, de 1,7 Mds€ en début d’année à 2,4 Mds€. Cette massification, qui vise à éradiquer les passoires thermiques, suppose des actes globaux de rénovation. Une nouvelle approche que les TPE-PME du secteur, habituées à intervenir corps de métier par corps de métier, commencent seulement à intégrer.

Malgré le manque de bras, la filière sera opérationnelle début 2022, assure Edouard Barthès, président de la PME francilienne EBS Groupe, spécialisée dans le chauffage et l’isolation, et du Syndicat multi-branche des industries et des opérateurs de la transition énergétique (Symbiote), qui fédère 200 entreprises prenant part à plus de 300 000 chantiers par an. Entretien.

Quels travaux de rénovation énergétique seront fléchés ces prochains mois ?

Le bouquet de travaux que les sociétés commencent à proposer et proposeront repose sur deux axes. D'abord, l'isolation, des combles ou du mur par l'intérieur ou l'extérieur. Ensuite, le chauffage, avec la pompe à chaleur (PAC) air-eau, couplée à un ballon thermodynamique, qui va devenir quasi systématique, ainsi que la chaudière biomasse ou à granulés, en bois ou sous-produits du bois en remplacement du fioul ou du gaz. En complément, il peut y avoir de la ventilation, de la menuiserie, du solaire ou de l'éclairage, par exemple en auto-consommation grâce à des panneaux photovoltaïques.

Quelle est la hausse de travaux attendue d’ici la fin d’année ?

Il est difficile de donner une volumétrie. Les sociétés du secteur sont en train de muter vers la rénovation globale. Principalement à travers le recrutement, afin d'intégrer de nouvelles compétences, et parfois en rachetant d'autres entreprises. Des entreprises ont attendu de connaître les règles du jeu, annoncées en avril dernier. Le taux d’acceptation de cette nouvelle approche a triplé en un trimestre.

Les réfractaires au changement sont désormais minoritaires ?

Deux entreprises sur dix ne souhaitent pas y aller parce qu'elles n’ont pas l’habitude de toucher à différents corps d’état et ont peur de ne pas y arriver. Mais beaucoup d’acteurs sont en phase de test, effectuent leurs premiers travaux globaux. Pour l'instant, l’action geste par geste permet d’avoir de l’activité, mais nous savons que les aides seront de plus en plus fléchées sur des actes globaux. 

Comment la massification est-elle vécue à l'échelle de votre PME ?

Dans mon entreprise, les rénovations globales représentent seulement 1% de nos chantiers, car il y a une inertie en raison de l’audit, de la pédagogie avec le client… L'heure est à la compréhension, au rodage du discours commercial. Comme dans la majorité des sociétés du secteur, nous sommes plus en train de régler la machine que de faire la course. Nous serons prêts début 2022.

Dans quels territoires allez-vous principalement intervenir ?

La majorité de la rénovation globale se fera sur la maison individuelle, principalement en campagne et en zone périurbaine, en raison du revenu des habitants qui entrent dans les critères de précarité énergétique. En outre, les passoires énergétiques sont plutôt situées en zone rurale. Il s'agit souvent de vieilles maisons de taille importante.

Nous ne vous verrons donc pas à Paris ?

Nous n'avons pas de produits adaptés au changement de fenêtres ni à l'isolation par l'extérieur des immeubles haussmaniens. La modification ne serait pas acceptée par le propriétaire. Ce type de travaux, c'est plutôt le métier des sociétés spécialisées dans l’entretien du patrimoine, capables de rénover des moulures et autres signes typiques d’un immeuble haussmanien.

Y a-t-il assez d’entreprises RGE pour réaliser le volume de travaux ?

Le souci, ce n'est pas le nombre d'entreprises, mais la ressource. Il est difficile de recruter des personnes qualifiées ou qui veulent entrer dans ce secteur, pourtant porteur.

Que proposez-vous ?

La première solution, c'est la formation. Il faut dupliquer la Solive, la première école de la rénovation dédiée à la reconversion qui va ouvrir à la rentrée à Paris. Car avec 25 élèves par trimestre, nous sommes loin de la dynamique de masse à mettre en place. Il faut également que les écoles s'efforcent d'attirer des jeunes et les forment à des métiers actuellement en tension : chauffagiste en tête, mais aussi façadier et bardeur pour l'isolation, et plus généralement, maçon et électricien.

Et à court terme ?

La deuxième solution consiste à assouplir les charges salariales et patronales, qui freinent les recrutements. Un exemple : en raison de la rareté, un chauffagiste à 39 heures par mois coûte 3 000 € net. Ce niveau de salaire est trop élevé pour 90 % de nos entreprises qui ont moins de dix salariés, alors qu’elles pourraient créer de l’emploi grâce à l’activité à venir. Le seul point positif, c'est qu'il est plus facile d'embaucher en zone rurale et dans les villes moyennes que dans les grosses agglomérations, où la demande est moins forte.

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