La lutte contre la précarité énergétique est une des priorités de l'action publique réaffirmée par le nouveau gouvernement dans le Plan climat présenté à l'été 2017 et le projet de Plan de rénovation énergétique des bâtiments, soumis à la consultation publique en fin d'année dernière. L'objectif poursuivi est d'éradiquer la moitié des passoires thermiques occupées par les ménages modestes sur le quinquennat, ce qui suppose un rythme de 150 000 rénovations de logement par an. Cet objectif est à la hauteur de l'enjeu : on estime, en effet, qu'en France, un ménage sur cinq est en situation de précarité énergétique ; 7 à 8 millions de passoires thermiques dont 1,5 million détenues par les ménages modestes composent aujourd'hui le paysage résidentiel français. Au-delà de l'impératif écologique que représente l'éradication de ces passoires, il est évidemment un enjeu de justice sociale pour ces ménages afin de leur offrir un logement décent permettant de meilleures conditions de vie et de santé.
Pour atteindre ces objectifs ambitieux, l'accompagnement et les aides proposées aux ménages en situation de précarité énergétique sont essentiels. À cet égard, l'année 2018 marque une étape importante dans la consolidation des dispositifs : un objectif plus ambitieux pour le programme national « Habiter Mieux » de l'Anah, le déploiement généralisé du chèque énergie sur l'ensemble du territoire et une volonté nouvelle de soutenir les actions portées par la sphère privée.
Le programme « Habiter Mieux » de l'Anah, dispositif central de lutte contre la précarité énergétique
Préfiguré par des travaux du Plan Bâtiment Durable, le programme « Habiter Mieux » de l'Agence nationale de l'habitat, lancé en 2011, avait pour objectif initial d'aider 300 000 ménages, d'ici 2017, à sortir de la précarité énergétique en les accompagnant dans la définition, le financement et la réalisation des travaux de rénovation énergétique de leur logement. Depuis le 1er janvier 2017, une aide spécifique aux copropriétés fragiles est venue compléter le dispositif.
Le programme « Habiter Mieux » est monté en puissance progressivement et a atteint en 2 017 le chiffre record de 52 069 logements aidés au titre du programme ; il démontre ainsi toute sa pertinence et sa bonne appropriation par les acteurs de terrain.
2018 marque une accélération du programme avec un objectif inscrit dans le projet de Plan de rénovation énergétique des bâtiments de 75 000 rénovations par an au seul titre du programme « Habiter Mieux ». Cette ambition rehaussée est ainsi l'occasion pour l'Anah de proposer une nouvelle offre adaptée : on parle désormais des offres « Habiter Mieux - Sérénité » et « Habiter Mieux - Agilité ». Cette dernière déclinaison, nouvelle, permet de financer trois types de travaux au choix (changement de chaudière ou de mode chauffage, isolation des murs et isolation des combles) sans nécessairement faire appel à un accompagnement par un opérateur-conseil, à la différence de l'offre « Sérénité ». Cette offre est également compatible avec la valorisation des CEE et permet ainsi une meilleure complémentarité avec les offres portées par la sphère privée.
Généralisation du chèque énergie : une aide complémentaire pour 4 millions de ménages
Créé par la en 2015 en remplacement des tarifs sociaux de l'énergie, le chèque énergie est une aide accordée aux ménages aux revenus modestes pour le paiement de leur facture d'énergie. Après une phase expérimentale de deux ans menée dans quatre départements français, le chèque énergie est désormais généralisé à l'ensemble du territoire. Cette phase d'expérimentation a notamment permis de noter un taux de recours beaucoup plus élevé (78 %) du chèque en comparaison aux tarifs sociaux de l'énergie : cette différence est principalement due au fait que le chèque énergie est adressé à l'ensemble des ménages bénéficiaires, sans demande préalable. Nouveauté également, le chèque peut être utilisé pour financer des travaux d'efficacité énergétique répondant aux critères d'éligibilité du Crédit d'impôt transition énergétique (CITE).
Ce dispositif vient utilement compléter le programme « Habiter Mieux ».
Dernière pierre à l'édifice : la complémentarité de l'action publique et des offres portées par la sphère privée. Seule l'existence d'une offre diversifiée et massive permettra d'atteindre les objectifs ambitieux et la nécessaire massification des opérations. C'est en ce sens que le Plan de rénovation énergétique imaginé pour le quinquennat ambitionne de créer des conditions de marché permettant l'accélération des offres complémentaires au programme « Habiter Mieux ».
La massification de la rénovation des passoires thermiques : une nécessaire complémentarité entre l'action des acteurs publics et privés
Pour atteindre les 150 000 rénovations par an de passoires thermiques occupées par les ménages modestes, inscrites dans le projet de Plan de rénovation, la seule intervention du programme « Habiter Mieux » ne suffira pas. L'atteinte des objectifs suppose en effet, qu'à côté de l'intervention publique de l'Anah, se développe un ensemble d'actions portées par la sphère privée ou les collectivités territoriales à hauteur de 75 000 rénovations par an. À l'automne dernier, le Plan Bâtiment Durable a initié un premier recensement des offres déjà à l'œuvre : elles sont nombreuses, notamment autour de l'isolation des combles perdus ou de changement de chaudières et révèlent qu'elles sont une porte d'entrée souvent efficace à l'enclenchement de travaux ensuite de plus grande envergure.
En complément, pour créer les conditions de marché favorables au développement, principalement par les acteurs privés, de programmes standards de rénovation et de généralisation de gestes simples de rénovation, le projet de Plan de rénovation s'engage à mettre en place les dispositifs adéquats, spécialement en renforçant le rôle des certificats d'économies d'énergie. Ainsi le Plan propose la mise en œuvre de « programmes territorialisés de rénovation des logements », inspirés des opérations programmées de l'Anah.
Pour permette le plein déploiement de l'ensemble de ces dispositifs, l'enjeu réside également, pour les prochaines années, à une meilleure détection des ménages en situation de précarité énergétique afin de pouvoir leur proposer l'accompagnement le plus adapté. C 'est un des objectifs assigné aux plateformes territoriales de la rénovation énergétique qui se déploient sur l'ensemble du territoire, sous l'impulsion notamment des collectivités locales.
C'est par la bonne articulation de l'ensemble de ces dispositifs et la mobilisation soutenue des acteurs que nous pouvons viser l'éradication des passoires thermiques d'ici 10 ans. Un objectif sur lequel le Plan Bâtiment Durable n'entend pas relâcher les efforts car il en va de l'amélioration des conditions de vie de plusieurs millions de nos concitoyens.