La loi sur l’eau enfin en discussion à l’Assemblée

Après moult détours et accidents de parcours, le projet de loi sur l'eau arrive mardi devant l'Assemblée nationale. Ce texte vise à rénover un dispositif de gestion complexe et à renforcer la protection des réserves face aux épisodes de pénurie et à la pollution.

Ce texte, pour lequel près d'un millier d'amendements ont été déposés et qui est "attendu depuis plus de dix ans", devrait être adopté avant les vacances parlementaires, mi-juillet, pour une mise en oeuvre dès janvier 2007, a espéré jeudi la ministre de l'Ecologie Nelly Olin.

Fruit de nombreux compromis entre acteurs, usagers et lobbies industriel et agricole, la loi mécontente déjà par son "manque d'ambition", que stigmatisent les défenseurs de l'environnement. "Mais même imparfaite, il est plus que temps de la faire voter", a estimé la ministre.

Le ministère de l'Ecologie entend clarifier et ajuster un empilement de textes parfois très anciens -certaines dispositions concernant la police des cours d'eau et la navigation remontent à l'Ancien régime- élaborés pour l'essentiel entre 1964 et 1992.

Le texte doit répondre à un double défi de protection, quantitatif et qualitatif, afin de permettre à la France de se conformer à la directive européenne préconisant le retour au bon état écologique des eaux d'ici 2015.

Il entend inciter par tous les moyens aux économies d'eau : installation obligatoire de compteurs individuels dans les logements neufs, suppression de la gratuité à l'administration, lutte contre les fuites qui peuvent atteindre 40 à 50% dans le monde rural, récupération possible des eaux de pluie.

La loi autorise les préfets à contraindre les différents usagers à une gestion collective de l'eau -à charge pour eux de se mettre d'accord sur la répartition d'un volume donné-, système instauré spontanément depuis une dizaine d'années autour de la nappe de Beauce et qui a fait ses preuves.

La loi doit également tenter de rééquilibrer la part de redevances (versées aux agences de l'eau) incombant aux différents usagers: celle de l'agriculture, qui exerce de lourdes ponctions sur les réserves, passera ainsi à 4% contre 1% aujourd'hui (et 85% aux consommateurs).

Elle instaure aussi une taxe sur les engrais, herbicides et pesticides, versée par les producteurs qui la répercuteront aux acheteurs (agriculteurs et jardiniers) à hauteur de 3 EUR maximum au kilo pour les produits les plus toxiques.

"A ce prix là, la taxe commence à être dissuasive", note-t-on au ministère, en insistant sur le caractère incitatif, plutôt que coercitif, de la loi aux bonnes pratiques agricoles.

Très insuffisant, note cependant l'association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir en rappelant que 80% de la consommation nette d'eau en période estivale est imputable à l'agriculture et qu'en 2003, 5 millions de Français ont été exposés au moins une fois à une eau polluée.

La fédération France Nature Environnement déplore également un "manque d'ambitions réformatrices" et une baisse de protection des "rivières réservées" qui risquent de devoir accueillir des ouvrages, notamment propices à la production d'électricité.

La FNE se félicite néanmoins de la réforme des redevances et des agences de l'eau, ou de la création de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema, qui remplace le Conseil supérieur de la pêche), organisme unique chargé de la surveillance des cours d'eaux.

"La loi joue petit-bras, mais il faut l'adopter plutôt que de céder à l'immobilisme et laisser la place aux incertitudes", estime Bernard Rousseau, responsable de l'eau à la fédération.

Anne Chaon (AFP)

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