Force est de constater que, malgré tant d’engagements pris par les collectivités territoriales en faveur du développement durable, la réflexion urbaine et territoriale est de plus en plus cloisonnée et de moins en moins apte à répondre aux impératifs de transversalité suggérés par la mise en œuvre de l’équilibre économique, social et sociétal et environnemental.
Face à l’effet d’annonce de l’urgence environnementale et souvent insuffisamment armés pour en assumer le défi, les maîtres d’ouvrage ont trouvé refuge dans les AMO développement durable, souvent encouragés par les subventions attractives à portée de main. De leur côté, les maîtres d’œuvre ont trouvé des partenaires spécialisés en AEU, ADDOU et autres démarches labellisées, pour s’assurer une place face à des commanditaires de plus en plus exigeants mais également de plus en plus perdus dans la panoplie grandissante de référentiels, guides de recommandations, chartes de performance, etc.
On s’attendait à un effet de mode, qui aurait du s’estomper progressivement, au même rythme de la transmission des savoirs techniques des prestataires spécialisés vers les maîtres d’ouvrage et les maîtres d’œuvre. Mais la réalité est toute autre : de plus en plus, les urbanistes qui ne s’adjoignent pas des prestataires spécialisés sont mis à l’écart, aussi riches, pointues et engagées soient leur culture du développement durable et de l’environnement et leur expérience des SCOT, des PLU et des projets urbains. Après tout, qui dit AEU dit subventions de l’ADEME à la clé ! Pire, les maîtres d’ouvrage superposent désormais des « démarches » AEU à l’élaboration des SCOT et des PLU, dont l’existence même est fondée sur la nécessité d’intégrer les critères de développement durable et de respect de l’équilibre environnemental à la planification territoriale et urbaine.
Cet état de fait profite largement aux architectes, seuls à solliciter spontanément le concours de prestataires spécialisés pour justifier des compétences transversales, et désormais seuls à profiter de la prolifération de projets d’éco-quartiers, éco-cités, quartiers durables, métropoles durables. Crise économique demeurant, cette tendance ne peut que s’aggraver : les architectes maîtres d’œuvre ont déjà commencé à se rabattre sur les domaines liés à la planification normalement réservées aux urbanistes, seuls garants d’une vision transversale, d’une culture pluridisciplinaire et d’une capacité d’action multi-sectorielle. A ce rythme, l’urbanisme à la française sera bientôt mort, laissant place au plus anglo-saxon urban design, domaine privé des grands architectes.
La société Cap Terre a fondé sa culture sur la nécessité d’articuler l’urbanisme et l’environnement, et ce, il y a quelques années déjà. Nous nous sommes positionnés, avec une longueur d’avance sur nos concurrents, sur les prestations spécialisées en développement durable, en énergie et en qualité environnementale du bâtiment et nous accompagnons donc collectivités, aménageurs, architectes et promoteurs dans la mise en œuvre de leurs projets urbains. Mais, en déployant notre technicité au service de nos clients et partenaires nous n’entendions pas nous dessaisir de notre cœur de métier traditionnel : l’urbanisme. C’est pourquoi, face au risque de perte de place dans le marché de l’urbanisme au profit des maîtres d’œuvre architectes, nous nous insurgeons!
Pascale Fouletier, directeur-général de Cap Terre et Maria Jaramillo, architecte-urbaniste - www.cap-terre.com