L'obligation réelle environnementale en quête de reconnaissance

Réglementation -

Créé en 2016, ce dispositif foncier peine encore à trouver sa place dans le paysage. Il a pourtant de nombreux atouts.

 

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Charles Dereix, président de l’association Forêt Méditerranéenne.

Instaurée par la loi Biodiversité du 8 août 2016, l'obligation réelle environnementale (ORE) connaît un démarrage timide. Selon un bilan « non exhaustif » du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, une quarantaine de contrats ont été signés à ce jour. La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) relevait pour sa part en 2021 qu'en dehors des conservatoires d'espaces naturels (CEN), peu d'organismes se sont véritablement emparés de ce dispositif foncier (1).

Ce bilan en demi-teinte n'inquiète pas Vanessa Kurukgy, juriste ORE et biodiversité à la Fédération des CEN pour qui ce récent instrument juridique prend néanmoins de l'ampleur : « L'ORE est de plus en plus identifiée parmi les outils de stratégie foncière existants. » Le réseau associatif enregistre aujourd'hui une trentaine de contrats signés sur tout le territoire. « Nous sommes de plus en plus sollicités par les propriétaires, et faute de moyens suffisants, nous sommes parfois contraints de refuser d'en signer », constate la juriste.

Contrat sur mesure. Concrètement une ORE, c'est quoi ? Ni plus ni moins qu'un contrat sur mesure entre le propriétaire d'un terrain - particulier, entreprise ou collectivité - et une collectivité publique, un établissement public ou une personne morale de droit privé agissant pour la protection de l'environnement. L'objectif est de faire naître à leur charge les obligations que « bon leur semble, dès lors [qu'elles] ont pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d'éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques » (). L'innovation tient au fait que « pour la première fois depuis l'édiction du Code napoléonien, le législateur consacre la notion d'obligation réelle liée à un terrain. Jusqu'ici, il n'était pas possible, à quelques exceptions près, d'astreindre une personne à des obligations de faire qui naîtraient en raison de sa qualité de propriétaire », explique Coralie Leveneur, notaire associée du groupe Cheuvreux.

Les points forts de cet ovni juridique : les obligations et la durée du contrat. Elles sont librement consenties par les cocontractants ; aucune contrainte ne leur est imposée. Au service de la biodiversité de son terrain, le propriétaire se donne les obligations qui lui paraissent les plus adaptées : planter des haies, reconstituer des sols plus favorables à la biodiversité, etc. A titre d'exemple, la première ORE forestière a été mise en place en 2020 pour une durée de dix ans à Vergèze (Gard) entre la Source Perrier (groupe Nestlé Waters) et le CEN Occitanie sur 112 ha. Après avoir dressé un bilan de la richesse écologique du site et réalisé un plan de gestion avec l'appui du CEN, l'industriel s'est engagé notamment à consolider les parcours utilisés par un troupeau de chèvres, préserver des murets favorables aux reptiles ou encore rouvrir des mares pour les amphibiens. Pour Charles Dereix, président de l'association Forêt Méditerranéenne, il ne s'agit pas « d'actions spectaculaires mais de mesures simples qui sont positives pour la biodiversité locale ».

Les obligations et la durée du contrat sont librement consenties par les cocontractants

Outil de compensation. En complément de ces ORE de préservation volontaire, l'outil peut aussi être utilisé à des fins de compensation par les maîtres d'ouvrage. Un bilan dressé par le gouvernement fin 2019 tendait d'ailleurs à montrer que ces ORE sont « relativement plus attractives » que celles conclues volontairement. Pour preuve, « 160 promesses d'ORE ont été conclues dans le cadre de projets d'infrastructures ferroviaires et routières », précise Marine Belin, responsable des procédures administratives et juridiques chez Systra. Quelle que soit sa finalité, ce jeune dispositif ne demande qu'à s'épanouir dans l'arsenal de mesures en faveur de la biodiversité.

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