L’article 1792-6 du Code civil dispose que « La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. » Malgré l’ancienneté de ces dispositions, il apparaît régulièrement nécessaire à la Haute juridiction de rappeler les critères de la réception tacite et de réaffirmer que l’achèvement de l’ouvrage n’est pas requis. Ce fut encore le cas dans une affaire tranchée le 25 juin 2020.
Des particuliers ont fait installer un bungalow en bois. Ils règlent le solde du prix au constructeur. Par la suite, ils se plaignent de l’apparition de désordres. Après expertise judiciaire, ils assignent le constructeur et obtiennent une indemnisation.
Volonté non équivoque du maître d’ouvrage
Pour rappel, l’article 1792-6 du Code civil précité ne prévoit pas la réception tacite, mais elle est admise par la jurisprudence, à charge pour celui qui en invoque l'existence d'en apporter la preuve. Encore faut-il que soient établis non seulement le caractère contradictoire de la réception mais aussi la volonté non équivoque du maître d'ouvrage de recevoir les travaux nécessitant la prise de possession et le paiement du prix.
Ici, les juges d’appel retiennent la responsabilité contractuelle du constructeur en considérant « qu’il résulte du rapport d’expertise judiciaire que l’ouvrage n’a pas été réceptionné, comme étant inachevé ». Ils excluent ainsi la mise en œuvre de la garantie décennale du constructeur, qui nécessite la réception préalable des travaux. Ce dernier forme alors un pourvoi en cassation.
La Haute juridiction lui donne raison et casse l’arrêt d’appel. Elle énonce en effet que « l’achèvement de l’ouvrage n’est pas une condition de sa réception » et que « la cour d’appel a violé » l’article 1792-6 du Code civil. Cette décision permet de rappeler que le paiement de l’intégralité des travaux et l’entrée en possession du maître d’ouvrage, caractérisant la volonté non équivoque de ce dernier de réceptionner l’ouvrage, valent présomption de réception tacite.
Prise de possession d'un lot
La Cour réitère ainsi sa position maintes fois affirmée. Récemment, elle avait même jugé que « l'achèvement de la totalité de l'ouvrage n'est pas une condition de la prise de possession d'un lot et de sa réception et que le paiement de l'intégralité des travaux d'un lot et sa prise de possession par le maître de l'ouvrage valent présomption de réception tacite » (Cass. 3e civ., 30 janvier 2019, n° 18-10197, 18-10699).
Cass. 3e civ., 25 juin 2020, n° 19-15780
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