La semaine dernière, le musée du bitume a ouvert ses portes à Strasbourg. Il retrace la longue histoire de la relation entre l'industrie de la couverture-étanchéité-isolation et la matière d'origine pétrolière. Une histoire désormais
révolue. Les dernières lignes de membranes bitumineuses ont fermé ces dernières années. Elles se sont converties aux produits biosourcés, et plus encore aux matières issues du recyclage de plastiques usagés. Le choix de Strasbourg, siège de Soprema, comme site du musée était légitime : le groupe a été un pionnier de la mutation, il y a près de vingt ans, à l'occasion de la création d'une unité de transformation de barquettes alimentaires plastiques en mousse isolante.
Changement de paradigme. Progressivement, cette industrie n'a pas eu d'autre choix que de changer de paradigme. Le pétrole n'est pas devenu spécialement rare ni hors de prix, mais il est de moins en moins transformé : l'essor de la voiture électrique a réduit à leur minimum le nombre de raffineries ; de ce fait, ce véhicule est devenu le premier concurrent du secteur sur le terrain des matières.
En isolation, c'est le confort d'été qui préoccupe, réchauffement climatique oblige.
Deux autres défis attendent la filière de la couverture-étanchéité-isolation. D'une part, le recyclage de ses vieilles membranes, imposé par l'obligation réglementaire de réutiliser ou de valoriser 95 % des déchets du bâtiment, suivant en cela l'exemple des véhicules hors d'usage (VHU). D'autre part, les produits se métamorphosent parce que les exigences des occupants des bâtiments ont radicalement changé. En isolation, ce n'est plus le confort d'hiver qui les préoccupe, mais celui d'été, réchauffement climatique oblige. Tous les matériaux, notamment la ouate de cellulose et la fibre de bois, sont choisis et améliorés pour optimiser la performance énergétique en périodes de chaleur. « Protégez-nous de ces îlots de chaleur qui envahissent la ville » : les clients n'ont désormais que ces mots à la bouche. Des produits de couverture, ils n'attendent plus en premier lieu la protection physique de la maison, ni même l'esthétique que procure la toiture-terrasse, mais avant tout de contenir l'effet de la chaleur écrasante du soleil, grâce au cool roof. Quand les toits ne sont pas couverts de panneaux photovoltaïques, les habitants veulent en faire des lieux de vie, plantés de végétation.
Permis de construire à points. Dernier élément accélérant cette transition : les normes. Elles sont systématiquement pensées dans l'objectif du bas carbone. C'est le cas des permis de construire, qui accordent des points de CO2 à intégrer dans le bilan carbone réglementaire des entreprises, en fonction de l'origine des matières premières et de l'énergie grise nécessaire à leur fabrication.