Rien ne change, et pourtant tout est différent. En ce mois d'octobre 2038, nous célébrons les 80 ans de la Ve République. Institutions immuables, régime inébranlable et énième remaniement. Un gouvernement - le 67e depuis 1958 - vient de remplacer le précédent. Un tour de passe-passe ? Pas seulement.
Laissons de côté le jeu de chaises musicales. Comme ses prédécesseurs, la présidente fait tourner ses effectifs, promeut les fidèles, exfiltre les autres. Intéressons-nous plutôt aux intitulés des portefeuilles, témoignages des évolutions profondes et des ruptures historiques.
Le ministère de la Vie saine se voit, par exemple, doté d'un secrétariat d'Etat à la Respirabilité, chargé de lutter contre la pollution atmosphérique et les pics de chaleur. Il aura certainement son mot à dire sur le projet de loi Biodiversité urbaine, porté par le ministère des Métropoles. Ce dernier est, pour la première fois, occupé par un élu local. Fini le temps où seuls des préfets supervisaient les grandes villes.
Un ministère du Bâtiment pluriel chapeaute la filière.
Les plus jeunes se souviennent peut-être du ministère du Logement, disparu il y a une vingtaine d'années au terme d'une existence en pointillé. La réversibilité et la multifonctionnalité des bâtiments ayant rendu cet intitulé complètement obsolète, il resurgit aujourd'hui sous la forme du portefeuille du Bâtiment pluriel. Un ministère d'Etat, qui chapeaute toute la filière du bâtiment, y compris les architectes. Ces derniers, lassés d'être négligés par leur ministre de tutelle, réclamaient depuis trois ans de sortir du giron du Développement culturel. C'est fait.
Le ministère des Mobilités, lui, ne change ni de nom, ni de localisation. Il reste la seule administration « mobile », constituée d'une caravane de bus autonomes en mouvement permanent. Pourtant, ici aussi la stabilité n'est que de façade : la seconde loi d'orientation sur les mobilités (LOM2), chargée de programmer les investissements dans les transports 100 % autonomes, devrait être votée rapidement. C'est aussi ce que l'on disait de son illustre grande sœur, dont l'accouchement avait pourtant duré de longs mois…
Et « Le Moniteur », dans tout ça ? Il célèbre cette semaine son 7 000e numéro. Toujours la même exigence depuis 135 ans, mais des sujets sans cesse renouvelés. Rien ne change, et pourtant tout est différent.