Industrie verte : les mesures à retenir du projet de loi

Le projet de loi Industrie verte qui doit, selon les mots du ministre de l'Economie Bruno Le Maire, "contribuer à faire de la France la plus grande puissance décarbonée en Europe", a été présenté mardi 16 mai en Conseil des ministres. Voici les mesures fortes à retenir de ce texte qui sera débattu d'abord au Sénat à partir du 19 juin puis à l'Assemblée nationale dès le 19 juillet.

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Bruno Le Maire, Roland Lescure et Christophe Béchu présentent le projet de loi industrie verte à la presse
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, accompagné du ministre de l'Industrie Roland Lescure (à sa droite) et du ministre de la Transition écologique Christophe Béchu (à sa gauche), présente à la presse le projet de loi Industrie verte, le 16 mai 2023 à Bercy.

Crédit d'impôt, réduction des délais d'autorisation, sites industriels clés en main... Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a détaillé en lever de rideau du Conseil des ministres, le contenu du projet de loi "Industrie verte" dont les mesures phares avaient déjà été dévoilées par Emmanuel Macron le 11 mai.

"C'est une loi que nous avons voulu simple et courte pour répondre à cette question : de quoi avons-nous besoin pour construire une usine équipées de technologies de pointes et pourvue des ouvriers et des ingénieurs nécessaires pour la faire tourner ?", a expliqué Bruno Le Maire.

Trois terrains d'action principaux ont été identifiés :

1 – Le foncier

"Implanter des usines tout en respectant les paysages, la biodiversité, les ressources en eau, c’est un défi considérable", a reconnu Bruno Le Maire. "De nombreux projets ont échoué à cause du foncier. Le projet Intel a échoué car nous n’avons jamais trouvé les 400 ha nécessaires."

Pour impulser le mouvement, le texte de loi prévoit la mise à disposition de 50 sites industriels (2000 ha) financés à hauteur d’1Md € par la Banque des territoires.

Le texte prévoit d'autre part de diviser par deux les délais d’implantation : de 17 mois à 9 mois réels garantis. "Nous allons substituer à la procédure dite "successive" une procédure "parallèle". Le dépôt de dossier, l'analyse par les Dreal, se feront en même temps que la consultation publique qui sera d'ailleurs allongée et passera de 1 à 3 mois", a expliqué Bruno Le Maire.

Pour mobiliser des fonds pour pouvoir réhabiliter plus vite les friches et accélérer la dépollution des sites, la créance environnementale des entreprises (cette "assurance" souscrite par les entreprises en cas de défaillance) sera élevée au rang des créances dites "privilégiées". Ainsi, en cas de liquidation d'une entreprise, la créance environnementale passerait avant le paiement des impôts dûs. "Cette mesure politique devrait permettre de récupérer 25% des sommes et de les dédier à la dépollution des sites", a estimé Bruno Le Maire.

Mesure plus polémique et qui a déjà "crispé" les associations d'élus locaux comme France urbaine (voir encadré) : pour des "projets d'intérêt national majeur" telles que des gigafactories, l'Etat prendrait la main par décret sur l'intégralité des procédures d'urbanisme. "Cela de manière à accélérer les procédures sur le raccordement électrique, la modification du PLU ou encore les permis de construire", a expliqué Bruno Le Maire. "Il n’y aura également qu’un seul degré de juridiction pour les recours. Les trois critères pour définir ces projets d’intérêt national majeur seront l’impact sur l’emploi, l’impact sur l’environnement et la souveraineté nationale."

L'association France urbaine remontée

"Les pouvoirs d’urbanisme des maires sont injustement menacés", écrit France urbaine, association qui réunit les grandes villes de France, les métropoles, les communautés urbaines et communautés d’agglomération. "France urbaine s’interroge sur l’article 7 qui remet en question la capacité des élus locaux à négocier l’implantation des projets et sur leurs règles d’implantation. Il n’est pas acceptable que l’accélération des procédures se fasse au profit des préfets et au détriment des maires, qui sont les plus à même de connaître les besoins de leurs territoires et des citoyens."

2 – Le financement 

"Nous allons utiliser toutes les modalités mises à disposition par la Commission européenne", a assuré Bruno Le Maire : crédit d'impôt, subventions, mobilisation de l’épargne privée.

Le crédit d'impôt de 20 à 45% concernerait les usines productrices de panneaux solaires, d'éoliennes, de batteries, et de pompes à chaleur, quatre des "big five"- le cinquième étant l'hydrogène - ces technologies d'avenir pour l'environnement reconnues par l'Union européenne. "Ce crédit d'impôt est rendu possible dans le cadre européen du "Temporary Crisis Framework" pour des projets décidés jusqu’à fin 2025. Mais il peut s’étaler jusqu’à 2029", a précisé Bruno Le Maire. "Il faut donc aller vite!"

Un dispositif d'un montant de 500 M€, financé par le déplafonnement du malus à 50% sur les véhicules polluants, le verdissement de la flotte d'entreprises ou une limitation des dépenses dites "brunes" en faveur des énergies fossiles qui sera débattue dans le cadre du budget 2024. 

Les subventions, elles, se monteraient à 2,3 Mds € de prêts directs ou de garanties, émis par Bpifrance. "Toutes ces subventions seront conditionnées à l’empreinte carbone de l’entreprise qui devra avoir réalisé son BEGES (bilan d'émissions de gaz à effet de serre)", a assuré Bruno Le Maire. Son cabinet a par la suite précisé que les TPE seraient exemptées de cette contrainte et que les PME auraient sans doute la possibilité de fournir un BEGES simplifié.

Dernière "arme" : la mobilisation de l'épargne privée avec notamment la création d'un "plan épargne climat", ouvert à la naissance d'un enfant et bloqué jusqu'à sa majorité. "Nous attendons 1 Md € de sa collecte", a annoncé Bruno Le Maire. "L'abondement initial est en discussion mais sa rémunération serait supérieure à celle du livret A  avec la même fiscalité : 0 impôt, 0 charge. Nous souhaitons mobiliser 5 Mds € d’épargne privée."

3 – Protéger l'industrie française

Pour favoriser les entreprises à l'engagement environnemental fort, le projet de loi retient la création d'un label EEE (Excellence Environnementale Européenne) qui donnerait un accès privilégié à la commande publique. Ce label fonctionnera par équivalence et créera un standard commun pour la commande publique, la finance privée et leurs clients. L’Afnor sera chargé de déterminer les critères de ce standard avant la fin de l’année. "Il faut parvenir à une transformation en profondeur de la culture des acheteurs publics : le prix ne devra plus être le critère ultime", a assuré le ministre de l'Economie dont les services ont rappelé que la mise en oeuvre obligatoire de critères environnementaux dans les marchés publics serait avancée à juillet 2024 au lieu d'août 2026.

Au total, le projet de loi - "le premier évalué de la sorte", s'est félicité Bruno Le Maire - permettrait de réduire l'empreinte carbone française de 41 millions de tonnes équivalent CO2 à horizon 2030, soit l'équivalent de "5% des émissions de nos biens importés".

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