A quel défi majeur le schéma directeur de la région Ile-de-France (Sdrif) en cours de révision doit-il répondre en priorité ?
Le défi majeur, c’est de réorganiser et d’harmoniser ce qui existe afin de réduire les inégalités et d’inverser les processus ségrégatifs à l’œuvre. Ce défi clé est lié à celui de la densification urbaine. Deux exigences fortes ressortent de tous les débats. La première, sociale, concerne l’accès de tous aux grands services urbains collectifs (transports, services de santé, commerces, formation, culture…). Nous ne pouvons la satisfaire que dans les zones où demeure une population suffisamment nombreuse. Dans une configuration d’étalement urbain et d’habitat diffus, le coût est trop lourd pour la collectivité. La seconde exigence, environnementale, vise à préserver tous les espaces ouverts (non construits). Si l’on croise ces deux approches avec l’objectif de construction de 50 000 à 60 000 logements par an, qui devrait être inscrit dans le nouveau Sdrif, on voit bien que la seule solution est celle de l’habitat dense dans les zones déjà urbanisées.
Quelle est votre définition de l’habitat dense ?
Fabriquer de la densité urbaine acceptable par tous exigera de la qualité urbaine. Le défi, c’est de reconstruire des villes non seulement avec un habitat « à visage humain » mais aussi et surtout avec de vrais espaces publics : des rues, des places, des commerces, des activités de services… Pour cela, nous souhaitons favoriser le petit collectif et la maison de ville.
De cette manière, nous fabriquerons de la densité urbaine acceptable par tous. Nous demanderons à des architectes, des urbanistes de travailler sur cette question-là. Nous ferons aussi certainement appel à des artistes, des créateurs… pour nous aider à réinventer un imaginaire urbain. Nous devons redonner l’envie de vivre en ville. Cela passe par la réhabilitation du mode de vie urbain face à la vision idéalisée de « la petite maison dans la prairie », pas toujours aussi idyllique qu’on l’imagine.
Cette volonté de reconquête de la ville sur la ville était déjà inscrite dans le Sdrif de 1994, mais elle n’a pas vraiment été suivie d’effet. En quoi la situation sera-t-elle différente ?
Nous avons souhaité organiser une concertation la plus large possible, car nous considérons que le Sdrif ne pourra être appliqué que s’il est partagé par tous les acteurs concernés. Par ailleurs, des moyens sont incontestablement nécessaires à la région pour assumer effectivement la responsabilité du schéma directeur. C’est pourquoi nous envisageons un schéma en cinq points : un texte d’orientation, une cartographie, une « boîte à outils », un plan stratégique et une conférence permanente de suivi et d’évaluation. Ces trois derniers volets n’étant pas prévus par la loi, nous ne savons pas si le gouvernement acceptera qu’ils figurent dans le schéma directeur. De toute façon, nous les ferons adopter par l’assemblée plénière.
Quel sera le contenu de cette « boîte à outils » ?
On songe bien sûr à l’Etablissement public foncier régional, dont la création semble aujourd’hui compromise. Dans le domaine financier, nous devons nous poser la question, même si elle est très sensible politiquement, de l’apport des opérateurs privés dans l’aménagement. Les PPP, tels qu’ils sont conçus aujourd’hui, ne constituent sans doute pas une réponse satisfaisante mais peut-être faut-il en inventer d’autres. Nous devrons aussi nous interroger sur l’intérêt de doter la région d’outils opérationnels : SEM d’aménagement régionale ou établissements publics d’aménagement régionaux. La mise en œuvre du Sdrif devra aussi privilégier la contractualisation entre la région et les communes, l’une des façons de convaincre les maires de construire des logements étant peut-être de les aider financièrement.
Préserver les espaces ouverts signifie-t-il que vous n’ouvrirez pas de nouveaux espaces à l’urbanisation ?
Nous souhaitons en effet limiter très fortement l’ouverture de nouveaux espaces à l’urbanisation, l’objectif étant que la zone qui était préservée dans le schéma de 1994 continue à l’être. Notre souci est également d’établir une cartographie assez détaillée de manière à pouvoir délimiter le plus précisément possible les zones non urbanisables. Mais cette question pose quelques difficultés. Nous ne pouvons pas, en effet, empiéter sur les compétences des communes.
Quand le schéma directeur pourrait-il être adopté ?
Il devrait être arrêté par le conseil régional en décembre 2006, puis être transmis à l’Etat. Nous serons alors en pleine campagne présidentielle, le calendrier est donc incertain. Nous espérons cependant une approbation définitive du Sdrif fin 2007.
