Le Sycabel, syndicat professionnel des industriels française des câbles, s'est inquiété, le 9 décembre, de la chute de son carnet de commandes de câbles à fibre optique au troisième trimestre 2019.
Le "très fort ralentissement des livraisons soulève une vive préoccupation tant au niveau de la gestion industrielle et de l'emploi que de la pérennité des investissements réalisés en France", a alerté l'organisation syndicale, qui représente 21 industriels, soit environ 8000 emplois.
"Pour la première fois depuis 2011, on a vu une inversion de notre indicateur industriel, qui chute de 20% sur le trimestre", a détaillé son vice-président chargé des télécoms Jacques de Heere. Les entrées en douane en provenance de Corée du Sud et surtout de Chine ont atteint au premier semestre 45% de la production de câbles à fibre optique du Sycabel. Elles n'en représentaient 13% en 2017 et 23% en 2018. Conséquence immédiate pour l'industrie française, des usines "quasiment à l'arrêt" et "un niveau de production inférieur de moitié de ce qu'il était il y a quelques mois", selon l'organisation.
Une fibre chinoise 20% moins cher
Le marché mondial de la fibre optique est dominé par la Chine (58% de la production) tandis que la France n'en représente que 2,2%, selon des données de 2017 du cabinet d'études britannique CRU International.
Abondante, la fibre chinoise se vend également jusqu'à 20% moins cher, a expliqué Jacques de Heere. Et de constater que ses clients, au premier rang desquels les opérateurs, peut-être inquiets des risques de pénurie mondiale évoqués en 2018, avaient constitués des stocks.
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Le câble à fibre optique est une infrastructure passive qui ne représente pas un enjeu pour la sécurité des données sur le réseau national. Sa qualité est en revanche importante pour assurer sa pérennité. "L'enjeu national, c'est de raccorder à la fibre 35 millions de locaux. Il en reste encore une moitié. Assurons-nous que ces réseaux respectent les standards et puissent supporter l'évolution des technologies de transmission", a dit M. de Heere, qui suggère de ne délivrer le label "zone fibrée", sésame donnant accès aux subventions publiques, qu'aux territoires ayant respectés un certain cahier des charges.
Normes et dossier antidumping
Les normes imposent notamment un faible rayon de courbure pour que le "cheveu de verre" (le cœur de la fibre mesure 9 microns de diamètre) ne se brise pas lorsqu'il suit les angles d'un mur. Par ailleurs, la gaine se doit d'être résistante aux intempéries et aux rongeurs, notamment.
Contacté par l'AFP, Bercy affirme s'assurer "que la fibre optique financée par l'État et les collectivités locales est conforme aux standards de qualité définis par le groupe d'experts mis en place par l'Arcep", le régulateur des télécoms.
L'industrie française compte sur ses voisins européens pour exporter ses câbles une fois le marché intérieur épuisé. Elle espère également voir avancer d'ici l'été 2020 un dossier antidumping déposé il y a plusieurs mois sur le bureau de la Commission européenne.
20 millions de km produits
Le plan France très haut débit vise une couverture intégrale du territoire d'ici à 2022 en internet très haut débit, principalement à l'aide de la fibre optique.
Depuis son lancement en 2013, l'industrie française du câble a investi 210 millions d'euros dans de nouveaux équipements de production, soit 18,5% de son chiffre d'affaires, et la production est passée de 4 millions de kilomètres à près de 20 millions attendus cette année.
Le déploiement et les abonnements à la fibre optique (FttH) se sont accélérés au troisième trimestre. Selon les dernières données de l'Arcep, publiées fin novembre, 16,74 millions de locaux sont désormais couverts dans l'Hexagone.