A Sinthian, un village de la région de Tambacounda dans le sud-est du Sénégal, le centre culturel Thread accueille depuis 2015 des artistes en résidence tout en offrant des espaces où la population locale peut organiser célébrations, réunions et même un grand tournoi annuel de football.
L’équipement, qui a été financé par la Josef and Anni Albers Foundation et l’American Friends of Le Korsa, est très reconnaissable aux inclinaisons de sa toiture. Ces pentes prononcées qui permettent de recueillir l’eau de pluie sont constituées d’une charpente en bambou couverte de chaume.
Choisis parmi 50 réalisations
Cet emploi de matières végétales vaut aujourd’hui à ce bâtiment conçu par l’agence de l’architecte Toshiko Mori d’être l'un des lauréats des Fibra Awards.
Ces prix, les premiers du genre, ont été organisés par l’architecte et auteure Dominique Gauzin-Müller et le centre de recherches et d’expérimentations Amaco et ont été remis le 5 novembre, à l’occasion de la conférence 3B (Bio Based Building), le premier sommet international de la construction biosourcée qui se tenait alors à Paris.
Les douze opérations récompensées (voir le palmarès complet ci-dessous) ont été choisies parmi 50 réalisations, dénichées dans le monde entier, qui sont présentées au Pavillon de l’Arsenal, jusqu’au 17 novembre (*).

L’exposition Fibra Architectures est l’occasion de vérifier que la nature a bien davantage à offrir que le bois en termes de matériaux de construction.
Certains usages font depuis longtemps partie du paysage, comme la paille dont on fait les toits de chaume ou le bambou, si abondamment disponible en Asie, en Afrique ou en Amérique du sud.
Mais on sait aussi recourir à des espèces plus étonnantes, comme la zostère, une herbe des mers qui, conditionnée en boudins dans des filets, fait apparemment un très bon revêtement extérieur.
Immenses capacités
Cette grande variété de plantes, aux vertus écologiques évidentes, font par ailleurs la démonstration de leurs immenses capacités : la fibre végétale peut couvrir, isoler, cloisonner ou servir de filtre. Elle sait aussi être structurelle, y compris sur de longues portées. Le bambou, encore lui, présente un rapport poids/résistance si intéressant qu’on le surnomme « l’acier vert ».
« Mais l’exposition ne parle pas que de construction. Il s’agit bien d’architecture », remarque Dominique Gauzin-Müller. Qu’il s’agisse de bâtiments provisoires ou pérennes, d’édifices inspirés des formes traditionnelles ou de créations des plus contemporaines, ces réalisations font la preuve par 50 que construire écolo ne se fait pas sans dessin, ni sans élégance.
(*) « Fibra Architecture – Architectures contemporaines en fibres végétales » au Pavillon de l’Arsenal, 21 boulevard Morland, Paris IVe. Jusqu’au 17 novembre.
LE PALMARES DES FIBRA AWARDS
Catégorie « Porter & franchir » :
Ex aequo:
- Gymnase de la Panyaden School à Namprae, Thaïlande (bambou) - conception : Chiangmai Life Architects / Markus Roselieb et Tosapon Sittiwong.
- Centre éducatif Arcadia à Dhaka, Bangladesh (bambou) – conception : Saif Ul Haque Sthapati (SHS).
Catégorie « Clore & séparer » :
- Réhabilitation d’un immeuble du XVIIIe siècle à Paris, France (doublage en béton de chanvre) – conception : Dumont-Legrand Architectes avec LM Ingénieur, BET structure et thermique.
Catégorie « Isoler & coffrer » :
- Espace multifonctionnel La Boiserie à Mazan, France (caissons de paille de blé compressée) – conception : DE-SO Architectes Urbanistes avec Gaujard Technologie Scop, BET bois/paille.
Catégorie « Filtrer & tamiser » :
- Bibliothèque Amani à Kibaoni, Tanzanie (bambou) – conception: Social Practice Architecture / Lara Briz et Patricia Báscones.
Catégorie « Habiller & couvrir » :
Ex aequo:
- Centre culturel et résidences d’artistes Thread à Sinthian, Sénégal (chaume) - conception : Toshiko Mori Architect.
- Maison de vacances sur l’île de Læsø, Danemark (herbes marines) - conception : Vandkunsten Architects / Søren Nielsen et Katrine West Kristensen.
Prix spéciaux :
- Abris : Dortoirs d’un centre de formation à Mae Sot, Thaïlande (couverture en feuillage) - conception : a.gor.a Architects /Albert Company Olmo avec Jan Glasmeier et Line Ramstad
- Transfert de technologie nord/sud : Afrika Mandela Ranch à Rao, Sénégal (typha) – conception : Fondation Sylla Caap et association TypHAS.
- Patrimoine vivant : pont suspendu inca Q’eswachaka, Quehue, Pérou (cordes en ichu) – études techniques : Mag. Alejandrina Arrospide Poblete, construction : Patronato de Cultura Machupicchu.