Estelle Debaussart-Joniec (Paris Habitat) : « La loi Alur a permis des avancées sur l'attribution des logements sociaux »

Pas moins de trois décrets du 12 mai 2015 viennent compléter les dispositions de la loi Alur relatives à la réforme de la procédure de gestion des demandes de logement social. Le sujet n’est pas clos puisque la ministre du Logement veut revoir le cœur même du système d’attribution des logements sociaux. Estelle Debaussart-Joniec, directrice des affaires juridiques et des marchés de Paris Habitat, nous livre son analyse sur cette réforme annoncée.

Réservé aux abonnés
Image d'illustration de l'article
Estelle Debaussart Joniec, directrice des affaires juridiques et des marchés, Paris Habitat

Pourquoi la loi Alur n’a pas réussi à changer les règles s’agissant de l’attribution de logement ?

Estelle Debaussart-Joniec : La loi Alur a permis de faire quelques avancées. Elle a mis en place un système national d’enregistrement, préalable à la réforme de l’attribution, et a amélioré l’in­formation du demandeur tout au long du processus. Elle a également introduit, sous forme d’expérimen­tation, les deux pistes évoquées pour cette réforme par les groupes de travail : le système de cotation de la demande et le dispositif de la location choisie. Ces dispositifs pourront être intégrés dans les plans parte­nariaux de la gestion de la demande. L’évolution des règles d’attribution suppose une vision partagée de la qualification de l’offre, du poids des critères nationaux de priorité par rapport aux critères locaux, de critères généraux et particuliers pouvant être pris en compte, de la coordination entre les réservataires, des moda­lités de traitement des mutations, du rôle du deman­deur... Or, le travail sur ces items reste à faire.

Que pensez-vous d’une généralisation du système de cotation pour déterminer les demandes prioritaires ?

E. D.-J. : Il est possible de s’interroger sur la pertinence d’un système unique d’attribution. Le système de cotation est particulièrement adapté dans les zones marquées par un déséquilibre important entre l’offre et la de­mande, il présente peut-être moins d’intérêt dans les zones peu tendues ou pour certaines catégories de financement. En zone tendue, le système de cotation permet de hiérarchiser les demandes de manière au­tomatique, d’objectiver le processus d’attribution et d’apporter une équité de traitement. Aujourd’hui, la multiplicité des critères de priorité, non hiérarchisés, définis par différentes dispositions législatives, est source de difficultés. La pénurie de l’offre génère une exigence accrue de transparence des attributions. Les réservataires, qui ont un rôle essentiel dans le proces­sus d’attribution, poursuivent des objectifs différents. Le système de cotation peut être un moyen de mettre en cohérence les politiques suivies par les différents réservataires et ainsi de donner une lisibilité au pro­cessus. Pour que ce système soit performant, il me semble nécessaire que les catégories et le poids des différents critères permettant de qualifier tant l’offre que la demande puissent être déterminés localement. Il faudrait prévoir une phase d’expérimentation pré­cédant la mise en place, et une évaluation régulière. Enfin, un tel système ne peut être qu’un outil d’aide à la décision. La commission d’attribution des loge­ments doit conserver un vrai pouvoir décisionnaire. L’appréciation de situations particulières ne peut pas résulter uniquement d’un traitement mathématique automatisé.

Quel est le dispositif d’attribution de Paris Habitat ?

E. D.-J. : Paris Habitat dispose d’une charte d’attribution. La ville de Paris a décidé de se doter d’une procédure de cotation des demandeurs de logements sociaux relevant de son contingent et a lancé une expérimen­tation sur plusieurs arrondissements (voir l’encadré). Elle a invité les bailleurs qui lui sont rattachés à en faire de même. Dans ce cadre, Paris Habitat va mettre en place un système de cotation des demandeurs de mu­tation au cours de l’année 2015.

La sous-location à des personnes privées, pourtant prohibée par la loi, est-elle une pratique en hausse ?

E. D.-J. : La sous-location a été rendue plus visible par Internet. Alors qu’il s’agit d’une infraction grave aux conditions de location, elle a pu apparaître comme une source de revenu complémentaire ou un moyen de partir en vacances pour certains locataires. La ville de Paris et les bailleurs parisiens viennent de signer avec certains hébergeurs une charte contre l’offre sur Internet de sous-location dans le parc social. Il n’est pas consta­té une augmentation du contentieux pour cession ou sous-location d’un logement HLM, ce qui demeure marginal, mais il y a un regard plus sévère porté sur ce type de pratiques illicites punissables d’une peine de 9 000 € d’amende.

Retrouvez l’intégralité de cet article dans le numéro d’avril-mai 2015 d’Opérations Immobilières

Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !
Détectez vos opportunités d’affaires