Il semblerait que le rapport de la Fondation Abbé-Pierre établissant le palmarès des communes respectant la Loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) ait fait effet.
Présenté une semaine plus tôt (consulter le document, ficher .pdf de 3,7 Mo), il faisait état du faible engagement d’un nombre élevé de communes de Paca « qui ne respectent pas leur échéancier et multiplient les carences, année après année, parfois même en le revendiquant auprès de leurs électeurs ».
A l’issue du dernier bilan triennal de la loi SRU, 69 communes avaient fait l’objet d’un constat de carence pour ne pas avoir suffisamment construit de logements sociaux. Il risque d’y en avoir 14 de plus.
C’est en tout cas 83 arrêtés de carence que le préfet de région Christophe Mirmand va soumettre, ce 16 décembre, aux acteurs de l’habitat lors du Comité régional de l’habitat et de l’hébergement (CRHH) de Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Taux relativement bas
Parmi les communes sanctionnées, figurent Antibes (Alpes-Maritimes), Cannes (Alpes-Maritimes) et Toulon (Var). Cette dernière, par exemple, a été officiellement déclarée carencée pour la première fois depuis vingt ans. La capitale du Var, qui affiche un taux d’atteinte des objectifs « relativement bas » de 20,5 %, n’a agréé en 2019 que sept logements sociaux.
Est jugée la quantité mais aussi la qualité. Par exemple, Cannes, qui recense, au 1er janvier 2020, 7233 logements locatifs sociaux, soit une part de plus de 17 % de résidences principales, a privilégié, selon la Fondation Abbé-Pierre, la production de logements sociaux dits « PLS » (soit 297 PLS et 55 PLAI agréés sur la période 2017-2019). Or, la loi SRU demande à ne pas dépasser 20 ou 30 % de PLS pour atteindre l’objectif qualitatif de production HLM triennal.
Un quart des communes sanctionnées de l’hexagone
Au départ, le préfet avait prévu de sanctionner 71 communes. Un CRHH devait se tenir le 2 décembre pour officialiser cette liste. Sauf que la commission nationale SRU ne l’a pas validée et a réclamé 18 communes supplémentaires. Après négociation, le préfet a réussi à faire tomber le chiffre à 12.
Selon les observateurs, le gouvernement n’avait plus envie de trouver des excuses aux maires de la région Paca qui compte déjà, à elle seule, un quart des 269 communes sanctionnées au niveau national à l’issue du dernier bilan triennal de la loi SRU (2014-2019). Et cela, malgré un contexte particulier qui rend difficile la construction dans cette région : foncier rare, risques naturels, loi littoral, etc.
Une vision archaïque
Maire d’une des 12 communes rajoutées sur la liste, David Lisnard est monté au créneau. Avec ses pairs de six autres communes des Alpes-Maritimes (Antibes, Le Cannet, Contes, Mandelieu-la-Napoule, Mougins, Villeneuve-Loubet), il a dénoncé dans un communiqué rendu public le 10 décembre « une logique arithmétique, inadaptée et une vision archaïque » de la commission nationale SRU et demande à l’Etat de revoir sa copie « en minorant et adaptant les objectifs de production de logements sociaux ».
Dans ce même communiqué, les sept maires azuréens invoquent « l’exposition des territoires aux risques naturels, en particulier inondation et submersion », « les réalités et contraintes foncières et urbanistiques de ces mêmes territoires ».
Volonté politique
« Certes, répond Florent Houdmon, délégué régional de la Fondation Abbé-Pierre en Paca, je comprends les difficultés et les contraintes mais cela n’a pas empêché ces communes de mobiliser du foncier pour implanter des zones industrielles ou commerciales, voire construire des logements libres. Je ne dis pas qu’il ne faut pas investir dans les zones d’activités, mais cela prouve que quand la volonté politique existe, on peut parvenir à trouver du foncier. Par exemple, des communes, comme celle de La Ciotat dans les Bouches-du-Rhône, soumises aux mêmes contraintes, ont su produire du logement social. Ailleurs, en Ile-de-France, région tendue comme Paca, les communes sont plus nombreuses à jouer le rattrapage », déclare-il.
Les chiffres clés de la production de logements sociaux en Paca :
Pour respecter la loi SRU, il faudrait disposer d’un stock supplémentaire de 170 000 logements sociaux en Paca. Au premier janvier 2019, la région en comptait 314 000.
Au 1er janvier 2020, 194 communes de Paca sont concernées par la loi SRU. Parmi celles-ci, 13 communes ont atteint le taux légal de 25 % de logements sociaux. Neuf étaient exemptées de leurs obligations légales compte tenu de l’inconstructibilité de plus de la moitié de leur territoire urbanisé. Deux l’étaient en raison d’une mauvaise desserte en transport en commun, Lorgues et Salernes dans le Var (consulter la listes des communes, ficher .pdf de 455 Ko).
70 % des ménages sont éligibles au logement social, alors que 13 % des demandes en logement locatif social ont été satisfaites en 2019, contre 21 % à l’échelle nationale.
66 % des demandeurs de logement social ont des ressources qui sont inférieures au plafond PLAI (source SNE bilan 2019).
Au début des années 2000, la région recensait entre 3 000 et 4 000 agréments par an. Depuis cinq ans, la barre des 10 000 a été dépassée.