Emploi public La mutation des directeurs des services techniques

Véritables managers, les responsables des services techniques des grandes villes gèrent des équipes de plus de 500 person­nes et des budgets importants.Dans plusieurs villes, les directeurs généraux des services techniques (DGST) laissent la place à des directeurs généraux adjoints (DGA). Ils partagent de plus en plus leurs compé­tences avec l’échelon intercommunal.

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Propreté, voirie, bâtiment, assainissement, espaces verts… Les domaines d’intervention ne manquent pas au sein des services techniques des villes, avec comme mot d’ordre : répondre aux sollicitations permanentes des habitants. A l’échelle des grandes agglomérations (plus de 100 000 habitants), les services techniques ont la taille d’entreprises moyennes, occupant souvent plus de 500 salariés. Les responsables techniques des grandes collectivités travaillent sous la responsabilité du directeur général des services (DGS), mais leurs missions s’exercent au sein d’organisations très diverses. Dans certaines villes (Perpignan, Caen, Besançon, Pau, ou Villeurbanne…), les métiers techniques sont regroupés au sein d’une grande direction, animée par des directeurs généraux des services techniques (DGST), aux postes fonctionnels. Leurs profils se ressemblent : de formation ingénieurs généralistes, souvent issus de grandes écoles, ces hommes ont acquis une expérience variée et technique, le plus souvent dans la commune, avant d’être nommé à cette fonction. «Mémoire» des grands projets municipaux, leur mobilité est faible. La plupart sont proches de la retraite, avec des exceptions, comme à Montpellier (voir encadré). Ils connaissent bien leur terrain, et animent des équipes importantes, de 650 à 850 personnes, dans les domaines techniques non pris en charge par leurs structures intercommunales.

«Redistribution» des métierstechniques. Jean-Paul Griolet, DGST de Perpignan, en est un exemple. Il est chargé du PLU Ville, des espaces publics (éclairage public, nettoiement, espaces verts, voirie), de l’urbanisme de projets (droits des sols, projets), du patrimoine bâti (travaux neufs et maintenance), de l’habitat et de la rénovation urbaine, et des marchés publics. Son collègue, DGST à la communauté d’agglomération, a la responsabilité du pôle eau, la gestion des déchets, les zones d’activités, l’urbanisme d’agglomération, les transports en commun, et la voirie dite d’intérêt communautaire.

Ailleurs, le titre de DGST a disparu, parfois depuis longtemps. Le DGS anime une équipe de plusieurs directeurs généraux adjoints (DGA), parmi lesquels certains ont un champ d’intervention technique : leur fonction est alors proche de celle des DGST. Christian Rechaussat, à Saint-Etienne, est ainsi « directeur général adjoint, directeur des services techniques » ; il ne gère pas la compétence urbanisme (planification, règlements et grands aménagements), confiée à un autre collègue DGA. Cette évolution se traduit souvent par l’émergence de deux grandes directions : l’environnement d’un côté, et l’aménagement et l’urbanisme de l’autre. De plus en plus, les grandes villes organisent leurs services par «politiques publiques», chaque directeur animant une équipe mêlant profils techniques et administratifs (domaine scolaire, voirie…), ce qui «redistribue» les métiers techniques.

Privilégier un management stratégique

« Désormais, les communes raisonnent en termes de services à la population, déclinés par thèmes. L’aspect technique des projets est devenu l’un des éléments d’une politique plus globale. L’environnement, par exemple, mêle la gestion et les techniques », souligne Benoist Pavageau, DGS de la ville de Nantes. « En conséquence, les profils des managers sont aussi redistribués, poursuit le DGS nantais. Un responsable technique est plus choisi en fonction de sa personnalité, de son parcours et ses capacités à développer un service, que de ses compétences techniques. Ainsi, un administrateur peut être nommé à la tête de directions dites ‘‘techniques’’. A l’inverse, de plus en plus d’ingénieurs sont nommés DGS. Il s’agit de privilégier un management stratégique sur un management opérationnel.»

« Il ne faut pas être prisonnier d’un organigramme, qui est avant tout un outil, déclare quant à lui François Guillot, directeur général des services techniques et de l’aménagement à la ville de Caen. L’essentiel est de faire travailler les gens ensemble, quelle que soit l’organisation. Il me semble qu’une formation initiale d’ingénieur généraliste, orientée technique et aménagement, est quand même nécessaire pour faire ce métier, même si les capacités personnelles à manager sont plus importantes que le cursus. Si l’on est capable de conduire le changement et d’évoluer, on peut rester longtemps dans ce type de poste. »

Un fort changement culturel

Qu’ils soient DGST ou DGA-DST, tous sont passionnés par leur métier. Peu sont issus du secteur privé et rares sont les femmes. Ils aiment cette « mission de coordonnateurs extrêmement variée », où chaque (longue) journée apporte son lot de « dossiers imprévus, de projets stratégiques, ou de détails à régler ». À l’interface avec les élus, les entreprises, les agents, les autres administrations, et les habitants, ils doivent développer des qualités d’écoute et de diplomatie. A l’échelle des directions générales, tous témoignent aussi qu’ils se recentrent sur leur mission de maîtres d’ouvrage et « font réaliser » les projets par d’autres, aux compétences très techniques (bureaux d’études, ou ingénieurs en interne).

Ces métiers de «techniciens managers» vivent un fort changement culturel. Première cause, l’intercommunalité avec qui les villes partagent les compétences techniques : progressivement, les EPCI sont devenues les structures porteuses des investissements majeurs. « Mais beaucoup, en aménagement, restent de la compétence de la grande ville, car les maires veulent rester leaders dans ce secteur », pondère François Guillot. La décentralisation, ensuite, a redistribué les compétences entre les collectivités territoriales et chacune doit optimiser ses moyens. Enfin, cette évolution s’explique par les enjeux de la concertation : les DST des grandes villes doivent préparer et animer la concertation. En ce sens leur profil a évolué. De grandes constantes les caractérisent : le management, la maîtrise d’ouvrage, et semble-t-il encore, une certaine expertise technique.

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